samedi 27 janvier 2018

RÉFORME JUDICIAIRE UN NOUVEAU TRIBUNAL EST NE À BFM.TV ?.

Réforme judiciaire :un nouveau tribunal est né à BFM.TV ?.
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.

Beaucoup d’ avocats de France protestent car la réforme de la carte judiciaire concoctée par Mme Belloubet Garde des sceaux va entrainer la suppression de tribunaux ici et là sur le territoire. C’est un problème de société sérieux.  Des barreaux sont directement concernés, et la justice près du justiciable risque de disparaitre. Mais les médias veulent occuper la place et au nom de leur devoir d’information tout azimut ils jugent en direct. Ce ne sont plus des comptes rendus judiciaires comme avant, mais de véritables procès qui ont lieu en quelques minutes.
Je regarde régulièrement BFM TV notamment à 19 heures où la distribution est souvent la même : un thème de débats et quatre intervenants. Et Mme Ruth Elkrief comme présidente d’audience-dans tous les sens du terme , en toute impartialité cela va sans dire. Quand il s’agit d’une affaire judiciaire ou d’un problème de droit, on retrouve toujours les mêmes acteurs : un journaliste politique qui est compétent quel que soit le sujet  économique, social, culturel et naturellement judiciaire ; un sachant  expert pour  tout et rien ; un ancien magistrat  qui lui connait le sujet ; un avocat parfois ; et un généraliste ou un sondeur. Je n’ai jamais eu autant d’informations sur les sondages  en toutes matières qui sont désormais la vox populi qu’il faut suivre sinon on est marginalisé. Et on fait le procès en direct, on s’interroge sur la défense hasardeuse du mis en examen, des preuves de l’accusation que l’on connait par ouï dire ; de la réaction du public, et on critique ce qui ne va pas aux yeux  de ce tribunal des médias formé pour l’actualité du jour. Naturellement il y a parfois des intervenants qui expliquent à juste titre ce qui se passe et sont très compétents en faisant œuvre pédagogique. Mais il n’y a quasiment jamais l’avocat du prévenu ou de l’accusé qui pourrait faire connaitre la position de son client, sa personnalité, ce qu’il réfute, pourquoi il a agi ou non… On s’indigne, on se met à la place des victimes, on rappelle ce que pensent les français - personnellement on ne m’a jamais interrogé ?- et on décide à demi-mot voire clairement que la personne poursuivie est coupable. Je n’ai pas encore entendu, mais je dois être un peu sourd, que telle personne poursuivie devait être innocente. Car bien sûr on souligne que la présomption d’innocence est capitale et  que la vie privée  doit être respectée, mais on les piétine allègrement au nom de la liberté de l’information .Personne n’a lu le dossier puisque seuls les avocats et les magistrats chargés du procès y ont accès : nos experts ont eu des informations de façon indirecte par des confidences qui violent soit le secret professionnel soit celui de l’instruction soit le principe du contradictoire dans tout débat,  et qui sont diffusées dans l’intérêt de celui qui les communique, donc ne sont ni fiables ni objectives. Mais nos experts concluent  sans réserve généralement, de façon péremptoire, générale et définitive sans argument de droit ou autre, à quoi d’ailleurs cela servirait-il, sauf à perdre du temps !. Il faut que le public qui n’y connait rien , soit éclairé  par ceux qui savent, l’élite compétente erga omnes  qui ne doute pas , et qui suivent la plupart du temps l’indignation de l’opinion publique,  cette catin comme l’appelait  Me Moro-Giafferi qui  voulait la  voir être chassée du prétoire, car elle tire le juge par la main.
L’affaire de M.Jawad Bendaoud dit le logeur de Daesh pour avoir abrité trois terroristes qui ont attaqué le bataclan, est typique. L’opinion est indignée et hurle à la condamnation et ce n’est pas moi qui va dire le contraire.  Mais il y a des limites à ne pas franchir dans un état de droit car si on fait des exceptions pour M.Bendaoud, elles peuvent  se reproduire et être dangereuses sur le principe.
BFM TV devrait être plus en retrait   quand on se rappelle qu’elle a interrogé en direct M .Bendaoud au moment où les forces de l’ordre donnaient l’assaut à l’immeuble à Saint Denis où étaient logés les terroristes, et lui a donné la parole dont il a profité. Celui-ci a pu dire combien il était surpris d’avoir logé des terroristes et combien il était de bonne foi ! (sic) .La France entière a ri de cette déclaration bien que les faits soient dramatiques.  Puis l’enquête a commencé et on a appris la réalité de la personnalité de ce logeur qui se déclarait innocent.
Sur BFM TV vendredi 26 janvier à 19 h. il y a eu une émission  sur le cas Bendaoud  avec aux manettes Mme Elkrief qui a dirigé les débats, puis un journaliste politique M.Gattegno, un journaliste polémique M.VaL, une ancienne  magistrate qui a présidé la cour d’assises Mme Bernard-Requin , et mon excellent confrère Me Thibault de Montbrial partie civile (il y en des centaines ce qui explique l’émotion dans ce dossier qui n’est pas celui des terroristes) dans le procès contre M.Bendaoud et qui sortait de la vraie audience. Débat intéressant par ailleurs . Ce qui m’a chagriné c’est qu’aucun membre de la défense de M.Bendaoud n’ait été convié ou se soit déplacé ?  et que l’on organise un quasi débat sur la culpabilité alors que le procès est en cours.
Pourtant il y a un précédent récent qui a eu lieu en décembre dernier. Le procès devant la cour d’assises de Bobigny de M.Georges Tron ancien ministre et député  accusé je crois d’agressions sexuelles et viols, a été renvoyé à une date ultérieure à la demande de la défense et ce avec raison,  notamment parce qu’une émission de télévision a été diffusée pendant le procès, émission qui n’était pas à la gloire de l’accusé.
La justice ne doit pas être un spectacle  et on n’est pas dans les jeux du cirque. Le devoir d’information des médias ne doit pas se substituer au devoir d’impartialité et de réserve et ce quelque soit la personne poursuivie que l’on peut haïr à titre personnel, et que les victimes ont le droit de poursuivre pour obtenir réparations de toute nature. On ne doit pas leur voler leur justice. Bien sûr les parties civiles n’imaginent pas que les juges vont être indulgents ou vont faire du droit  et ne pas condamner au maximum de la loi.  Voire acquitter si les éléments constitutifs du crime ou délit ne sont pas réunis. Tout avocat qui a un peu d’expérience et de retenue sait que tout peut arriver. L’opinion publique n’intègre pas ces données. La justice est pour elle la condamnation voire la vengeance. Mais dans un état de droit il faut respecter les règles comme celle du droit pour n’importe quel individu même le plus vil d’être assisté par un avocat, et de se défendre en racontant n’importe quoi.  

Dans notre société du spectacle, de la transparence exigée pour les autres, des fake news et de l’à peu près, de la bien-pensance et de ses excès, l’objectivité  veut qu’en matière de justice personne ne se mette à la place des juges. Les magistrats sont suffisamment décriés pour qu’on ne les remplace pas  par des caméras et des militants. Le tribunal de l’opinion télévisée ne doit pas siéger tous les jours. 

mercredi 17 janvier 2018

HUMANISME ET AUTORITÉ

Humanisme et autorité
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
C’est reparti ou plutôt cela continue, le débat entre  bons sentiments ou humanisme, et autorité pris dans le sens d’inhumanité et de force. La loi sur l’asile et l’immigration  que le gouvernement concocte a été esquissée par le président Macron lors de sa visite à Calais et sa rencontre avec des migrants , de vrais réfugiés puisque venant du Soudan semble -t- il ? S’il s’était agi d’albanais aurait-on protesté ? La future loi qui a pour objectif de maîtriser l’immigration n’est pas encore connue mais déjà les associations, les défenseurs des droits de l’homme, tous ceux qui ont une conscience pour les autres et font de l’être humain la priorité quelques soient les circonstances, les lieux et les possibilités, sont contre , farouchement contre et sont prêts à en découdre !
Mais ne pourrait-on pas aborder les sujets qui fâchent d’une autre manière, qui ne soit pas conflictuelle comme si le ciel allait nous tomber sur la tête. A force d’entendre que le fascisme ne passera pas, qu’il y a un racisme d’Etat, que quasiment l’homme est un porc pour tout, ce qui est faux ou pour le moins excessif, qu’il ne faut rien ni personne discriminer ce qui est exact, et que seuls les rapports de force comptent surtout quand ils émanent d’un infime minorité, on se lasse, on se fatigue et on se demande pourquoi il faut s’incliner tout le temps en vertu de la bien -pensance, pourquoi la majorité silencieuse ne fait pas la loi, pourquoi on se sent toujours coupable de quelque chose, pourquoi il faut se repentir et réécrire l’histoire quand la fin ne convient pas (comme Carmen qui désormais tue son harceleur) , pourquoi l’excuse pour tout et rien est devenue la norme, et pourquoi il y a une police de la pensée avec des ayatollahs vigilants qui guettent ce qui ne leur convient pas et clouent au pilori médiatique ceux qui ne pensent pas comme eux. Georges Orwell est dépassé. Halte au feu.
Est-ce un oxymore quand on parle d’une autorité humaniste, celle qui concilie les droits et les devoirs, qui fait respecter les règles et la loi, qui sanctionne les infractions et qui comprend les pauvres, les exclus, les faibles, les persécutés divers, les malheureux en général. « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur,  c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » déclarait  jean- baptiste Lacordaire religieux dominicain (1802-1861).
Peut-on imaginer de laisser les choses en l’état et ne pas avoir une politique migratoire jugée « inhumaine » par certains dont des députés de La République en marche ?. Est-il humain d’accueillir  tous les migrants, qu’ils soient réfugiés stricto sensu, ou  pour des raisons économiques, climatiques ou culturelles voire religieuses  pour les laisser dans une impasse et finalement les renvoyer chez le voisin ou d’où ils viennent ? Les habitants des territoires concernés, comme à Calais, Ouistreham, ou Vintimille et la Savoie désormais  n’ont-ils pas le droit , comme tous les citoyens français de vivre dans la paix, sans avoir peur à tort ou à raison , sans subir des exactions avérées certes commises par des voyous  en petit nombre mais qui sont. La république ne doit-elle pas protéger d’abord ses citoyens ? Il est facile d’être généreux à distance, de dénoncer les sans cœurs d’autres régions, et de ne voir  que de loin la complexité et la réalité du problème. Sans oublier les forces de l’ordre qui font un travail ingrat , qui sont accusées sans preuve - des fake news ?- des pires maux, les pompiers et les services de santé qui font le maximum, tandis que les collectivités locales sur place y vont de leur budget et de la critique de leurs administrés.
Les bons sentiments sont- ils un humanisme ? L’humanisme est une philosophie du 16ème siècle , de la Renaissance qui place l’homme et les valeurs humaines au- dessus de toutes les autres valeurs. Il vise à l’épanouissement de l’homme par la culture d’origine grecque et latine ,par l’éducation. Son équivalent est l’ altruisme ,l’ amour des hommes (et des femmes, parité oblige).
L’humanisme n’empêche pas le regard critique, puisque il est fondé sur la réflexion, sur le doute qui s’oppose aux dogmes, aux certitudes, aux postulats. Il est en recherche permanente de l’équilibre entre le bien et le mal (qui existe hélas)  et sur la connaissance de l’homme pour l’améliorer donc en faire profiter l’humanité. L’humanisme n’est pas un laxisme : au contraire pour que les valeurs humaines triomphent sur  d’autres valeurs qui clivent, séparent, accablent ou conduisent au mal (exemple le terrorisme qui s’appuie principalement sur une religion donc un dogme dans lequel l’homme ou la femme se soumettent volontairement ), il faut un cadre , et non pas un état de nature sauvage ou chacun fait ce qu’il lui plait .Une démocratie est l’organisation des rapports humains, avec une autorité légitimée par des élections libres et une justice indépendante. Est-il normal et humain de céder à toutes les minorités qui obéissent parfois à des motifs idéologiques ou politiques qui n’ont rien à voir avec l’idéal qu’ils prétendent défendre,  ou qui vomissent notre société démocratique capitaliste, libérale et redistributive,  dont ils profitent et qui leur laisse la liberté d’expression ?
L’humanisme c’est aussi d’admettre que l’on n’a pas toujours raison et de penser que l’autre est aussi respectable. L’humanisme c’est la volonté de régler les problèmes par la raison et non par le canon ;  par la conviction et non l’imposition ; et de considérer que les droits personnels sont en miroir avec les devoirs collectifs » .On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments » disait André Gide. Victor Hugo pensait que tout dépend du talent de l’écrivain et je crois qu’il avait raison. Prenons un exemple  lié à l’actualité quand on a manifesté récemment l’intention de republier les ouvrages de Louis-Ferdinand Céline : on peut faire de la bonne ou originale littérature  tout en étant clairement ignoble sur le fond. On a battu en retraite et renoncé en fonction des cris d’orfraie entendus. L’opinion publique est impitoyable, voire autoritaire.
Mais l’humanisme ne se divise pas et il ne s’agit évidemment pas de poursuivre des politiques publiques sur de mauvais sentiments. Je n’imagine pas un seul homme politique  et une femme encore moins, annoncer cyniquement qu’il allait prendre une loi liberticide ou discriminatoire ou revancharde ou protectrice des français de souche on non (autre polémique) , pour que nos valeurs dites universelles mais réputées à tort  franchouillardes s’appliquent qu’ entre nous, que nous seuls profitions de nos avantages et que tout ce qui n’est pas citoyen de la république soit exclu. On a les gouvernements que l’on mérite mais jusqu’à ce jour ils sont responsables et humains, que l’on ait voté pour eux ou non. 
Cela n’empêche pas d’avoir du bon sens chose du monde la mieux partagée disait Descartes et de l’autorité. Au contraire c’est une obligation.  
L’autorité est le pouvoir de commander, d’être obéi. Elle implique les notions de légitimité,  et de commandement. Elle ne se confond ni avec l’autoritarisme ni avec la répression. On ne discute pas de l’autorité de la chose jugée par la justice, ni de l’autorité parentale par exemple. Ou de l’autorité naturelle de telle personnalité ou quidam. C’est une valeur conférée qui concerne surtout l’Etat. C’est son caractère nécessaire à la structure de toute organisation qui la rend légitime.  Et qui permet de l’opposer erga omnes. L’autorité  se confond avec les pouvoirs publics.  Platon a beaucoup disserté sur l’autorité et Max Weber a parlé de l’autorité charismatique. Chaque citoyen a sa compréhension de l’autorité et de son contenu. Il la souhaite plutôt ouverte à son égard  quand cela l’arrange, et ferme  pour les autres sur des sujets qui lui tiennent à cœur. Chacun vit avec ses contradictions.  Les buts de l’autorité sont la sauvegarde du groupe et la conduite de celui-ci vers des objectifs collectifs consentis.
L’évacuation de la ZAD de notre- dame- des landes des éléments les plus radicalisés (qui sont-ils ?) quelque soit la décision sur le fond va être un test pour l’autorité de l’Etat en nette perte de vitesse ces dernières années : souvenons- nous seulement du feuilleton Léonarda ! La colère des surveillants de prison qui se font agresser par des détenus, comme les agressions contre les forces de l’ordre, ou les médecins et pompiers dans les territoires dits perdus de la république mais pas perdus pour le business lié à la drogue ; ou encore les insultes voire violences commises à l’intérieur des tribunaux contre les magistrats comme l’a dénoncé Mme la Procureure du TGI de Nanterre, témoignent que désormais tout est possible et que certains estiment  qu’ils ont droit à l’impunité au nom de prétextes fumeux qui vont de la misère sexuelle (les frotteurs dans le métro) ou sociale, au manque de travail ou de revenus, ou parce qu’ils s’ennuient ( des intellectuels  sérieux ont justifié l’incendie des véhicules en disant que c’était surtout ludique-sic-), et enfin parce que les barres d’immeubles invivables inciteraient à la violence (déclaration du ministre de l’intérieur) et que dans ces quartiers la moindre arrestation ou un contrôle d’identité tourne au drame et à l’accusation contre la police qui soit provoque par son uniforme ,soit est raciste et violente. Basta comme on dit chez certains de nos amis corses qui s’y connaissent un peu  en la matière.  Et les motifs ne sont pas exhaustifs .
Mais l’autorité est surtout remise en cause par ceux qui  prétendent détenir  la vérité, qui savent ce qui est bon et bien, qui nient la société telle qu’elle existe et qui ne leur convient pas, qui ont beaucoup beaucoup discuté…  entre eux , sans admettre d’autres contradicteurs (rappelons nous de nuit debout) , qui croient incarner le peuple sans avoir été élus-c’est ringard- ou avoir le moindre mandat -pourquoi rendre des comptes ?-ni naturellement une quelconque légitimité : ils ne représentent qu’eux, ce qui est court pour exiger quoique ce soit. Mais on les entend : ils haïssent les médias qui diffuseraient  des fausses nouvelles ou informations et  les télévisions qui abêtissent  les citoyens selon eux, mais ils savent s’en servir et faire passer leur message : nous résistons -résiste chantait France Gall- à l’oppression, à la finance, aux ordres et à une société inhumaine, disent- ils. Nous avons des droits naturels, comme ceux de s’approprier des terres puisque le sol n’appartient à personne…Merci pour les propriétaires.
Le journal le parisien a titré le 16 janvier : « enquête sur la génération j’ai le droit ». Il aurait pu ajouter que des parents avaient la même conception de la société.
Quand on a que des droits, on ne tolère plus l’autorité et on pense que tout ce qui est contraire à ce que l’on pense est forcément injuste et inhumain. Le «  je » l’emporte sur le « nous », comme le masculin l’emporte sur le féminin en  grammaire, mais plus pour longtemps semble-t-il , les féministes s’activent . L’écriture inclusive  veut  s’imposer ce qui n’est un progrès pour personne.

Et s’il n’y avait plus d’autorité(s) comme on a bien interdit la fessée par amendement du parlement du 22 décembre 2016  que se passerait -il ?  Chacun peut imaginer ce qu’il en serait de la vie en société. L’humanisme n’est pas incompatible avec les principes de responsabilité et réalité.  Un gouvernement doit faire des choix en raison des besoins internes  et notamment pour le logement (plus ou moins de social, faut- il pénaliser les propriétaires privés); la sécurité (la lutte contre le terrorisme justifie-t-elle une législation rigoureuse tout en protégeant les libertés publiques et individuelles ?), la justice  (le procureur doit- il être soumis à l’exécutif ou être totalement indépendant, ou à quoi sert la prison ?) ; les impôts à qui servent ils ?; comment intégrer les jeunes sur le marché du travail et ne pas pénaliser les retraités -dont je suis- qui ont payé impôts et taxes toute leur vie et qui ne sont pas des privilégiés, puisque en plus ils aident enfants et petits enfants ?.... Tous les sujets doivent être traités avec un souci de résultats et de dimension humaine. Humanisme et autorité sont donc compatibles, sachant qu’il y aura toujours des mécontents et des moins gagnants que d’autres. Ne peut on baisser d’un ton,  essayer d’abord de faire prévaloir la raison et ne pas voir dans un contradicteur un horrible  raciste, un macho ou un ultra conservateur. Comme si le progrès  ne résultait que de ce qui est minoritaire, ou d’arguments qui partent du cœur et ne sont ni objectifs ni vérifiés.
L’Etat qui dirige à ce jour 67,2 millions de citoyens et essaie d’intégrer ceux qui appellent au secours doit trouver l’équilibre entre l’autorité sans qui rien ne peut se faire et le respect de la vie et des libertés c’est-à-dire les valeurs humanistes ou républicaines  les deux se confondant. C’est la grandeur de sa mission.



jeudi 21 décembre 2017

BONNE ANNÉE 2018

Bonne année 2018,année magique ?
Par Christian FREMAUX AVOCAT HONORAIRE ET ELU LOCAL .
Cessons les hostilités car le nouvel an arrive avec ses espoirs et noël est devenu une fête quelconque puisque  les croix et les crèches ne sont plus en odeur de sainteté devant les tribunaux  qui se prononcent en droit, et même si la mairie de paris célèbre la fin du ramadan dans ses locaux, oeucuménisme oblige. La laïcité  ne se divise pas , elle n’est ni ouverte ni fermée. A défaut  c’est  l’opportunité pour tout ce que l’on ne veut pas voir comme les prières dans les rues ou la remise en cause de pratiques à l’école ou dans la vie publique, et de ce qui fait notre tradition historique et le ciment de notre république. Mais la laïcité n’empêche pas la paix entre tous, la compréhension des autres, la cohabitation non conflictuelle et la volonté d’avoir un destin commun ce qui caractérise la nation. On ne peut effacer le passé tout  en reconnaissant les autres cultures qui s’ajoutent et ne remplacent pas: construisons un présent et un futur neufs, débarrassés de méfiances réciproques . C’est possible il faut y croire.
Halte au feu aussi sur ce qui sépare, ce qui clive, à savoir l’affrontement d’un groupe avec un autre. Tous les jours sur des sujets a priori sérieux ou plus futiles des polémiques éclatent qui ne durent  que ce que durent les roses : l’espace d’un matin, comme écrivait F .de Malherbe. L’écume cache la vague de fond qui peut causer des drames. Soyons donc prudents dans nos réactions. Le ton monte, on s’invective, on croit que c’est la fin du monde mais le lendemain on n’y pense plus ou moins, et on passe à un autre sujet tout aussi fondamental !, aussi scandaleux, aussi insupportable. Et ainsi  de suite. Jamais on ne prend le temps de hiérarchiser les priorités et les gravités, de creuser un sujet, d’y consacrer un vrai débat avec des interlocuteurs prêts à entendre et tenir compte des arguments adverses, sans camper sur leur dogmatisme ou avoir la vérité révélée et vouloir discréditer l’autre . Quand on n’est pas aux responsabilités il est facile de critiquer et de dire ce n’est pas cela qu’il fallait faire, sans pour autant donner la solution . Et quand on arrive ensuite au pouvoir on doit s’incliner devant la réalité, ses contraintes et les contradictions, voire les exagérations de ses amis, et faire au mieux . On connait tout ceci ce qui devrait conduire à la modestie et à la modération .Tel n’est pas le cas : on pérore, on affirme, on exige, on disqualifie et l’on pense être génial . Si on représente une minorité on crie au racisme, y compris de l’Etat !, à la discrimination ou au harcèlement. L’excès ne fait pas peur il est même indispensable - croit-on -pour être crédible. Basta, comme nous le disent les autonomismes et indépendantistes corses qui viennent d’avoir une élection triomphale et qui ont déjà posé leurs conditions à l’Etat . Plus rien n’est pris avec distance car tout est prétendument hyper grave. L’humour -même celui qui n’est pas drôle voire douteux- n’est plus toléré et on ne peut plus rire de tout. Un ayatollah de la pensée veille et la justice est aussitôt saisie comme si les juges qui sont des professionnels du droit avant tout étaient tous des «  pic de la mirandole », l’érudit qui avait une culture universelle sur la dignité de l’homme et la quasi réponse à tout ? Tout en dénigrant par ailleurs lesdits juges quand ils rendent des jugements qui ne conviennent pas ou sont soupçonnés d’être aux ordres des puissants .L’esprit français qu’incarnait Jean d’Ormesson a disparu avec lui :il avait l’art d’être sérieux en feignant d’être léger. Nous avons à sa place  des imprécateurs toujours mécontents de tout et son contraire .Désormais noir c’est noir comme le chantait Johnny, et les méchants pullulent. Les médias en continu qui répètent  le vrai comme le faux ou le non vérifié sont devenus des nouveaux magistrats  faisant leurs propres enquêtes dans des conditions souvent partiales et non contradictoires, partielles bien sûr  et donnent leurs conclusions comme si c’était la vérité. En cas d’erreurs ils ne peuvent pas être sanctionnés et ne s’excusent pas car ils sont présumés  de bonne foi, ont un devoir d’information  exigeant la transparence absolue pour les autres et sont neutres ,selon eux !. L’opinion publique est devenue la reine des élégances, l’arbitre suprême puisque les sondages font office de lettres de cachet,  et on lui sacrifie tout, vie privée comme présomption d’innocence, séparation des genres en devenant une autorité judiciaire bis qui se prononce à chaud sur l’émotion, et mise au ban de la société de ceux qui ne sont pas dans les normes édictées par une minorité  agissante décrétant quel est le camp du bien.
Le procès qui a eu lieu début décembre 2017 de M .Georges Tron maire de Draveil devant la cour d’assises de Bobigny  pour viols et agressions sexuelles est une illustration de ce que je dis. N’ayant pas lu le dossier et n’ayant pas assisté aux audiences , mon avis n’a qu’une valeur relative puisque je m’appuie sur les compte-rendus de la presse dont je viens de dénoncer les défauts. Mais après 42 ans de barreau et de plaidoirie y compris devant les juridictions pénales dont la cour d’assises j’estime pouvoir formuler quelques explications crédibles sur ce qui s’est passé. Je ne soutiens ni ne défends M.Tron qui a d’excellents avocats. L’ordre moral et le puritanisme ne doivent pas s’installer .Mais comme petit  élu moi-même  je m’étonne que M.Tron « prenne  son pied » par l’exercice de la réflexologie plantaire  pratique médicale alternative, ce qui est son droit sauf qu’il exerçait dans son bureau de la mairie, ce qui est peu usité et me parait déplacé puisque un élu  surtout ancien ministre et député doit donner l’exemple en toutes les matières y  compris pour sa vie personnelle.  On tombe certes  dans la subjectivité . Jacques Chirac flattait le cul des vaches mais c’était au vu de tous au salon agricole notamment . Revenons donc à nos moutons .
La procédure d’instruction a duré plusieurs années et M.Tron a bénéficié de non -lieux, le parquet ne s’y opposant pas . Le parquet est composé de procureurs en correctionnelle et d’avocats généraux devant la cour d’assises. On sait que le parquet est indivisible et que ses réquisitions s’imposent à tous ses membres. Bien sûr cette règle de droit connait une exception qui s’exprime ainsi : « la plume est serve mais la parole est libre ». Autrement dit l’avocat général qui porte l’accusation contre M.Tron doit suivre les réquisitions d’acquittement s’il y en a, mais rien ne lui interdit de dire le contraire oralement ! C’est ce qui est arrivé pour M.Tron si j’ai bien compris. L’avocat général à l’audience a eu l’air de considérer que M.Tron pouvait être coupable .Divine surprise pour les plaignantes et grosse colère de la défense .Après quatre jours d’audiences chaotiques  le procès a du être arrêté et renvoyé à une date ultérieure sans précision .On ne sait pas s’il reprendra ce que j’espère car soit M.Tron est innocent et il doit être lavé des soupçons, soit il ne l’est pas et les plaignantes doivent être reconnues comme victimes.Ce sont les motifs du renvoi qui m’ont chagriné :
-une émission de télévision plutôt à charge de M.Tron a été diffusée pendant  que le procès se tenait, alors que l’avocat de M.Tron avait écrit au CSA pour demander la non- diffusion. Il avait raison : la cour aurait du appuyer cette demande ;
- mais le plus scandaleux pour forcer les mots est que les réseaux sociaux ont mis en cause le président (un homme) de la cour pour lui reprocher les questions incisives et indiscrètes qu’il posait aux plaignantes ce qui serait un manque de respect .Les bras m’en tombent et cela me rappelle un procès célèbre d’il y a longtemps devant une juridiction d’exception où le président répondait systématiquement à la  défense : « la question ne sera pas posée » ce qui permettait de ne pas mettre en cause le pouvoir d’alors.
Il est du devoir du président de mener les débats à charge et à décharge envers toutes les parties . L’avocat de la défense comme celui des parties civiles s‘il l’estime utile doit pouvoir aussi aller aussi loin qu’il le souhaite dans son interrogatoire, avec délicatesse mais tout dépend de l’interrogateur,  sans insulter ou rabaisser  celui ou celle qui est concerné. Une audience n’est pas un lynchage en direct mais le moment où l’on essaie de faire émerger une vérité qui sera judiciaire. On doit pouvoir poser des questions qui dérangent, qui touchent à l’intimité en matière de viols ou agressions sexuelles, car les enjeux sont graves pour toutes les parties. On n’envoie pas une personne en prison pour de longues années sous le coup de l’émotion, ou pour faire un exemple. L’intime conviction des jurés d’assises doit être étayée par des faits avérés, une convergence tendant à la culpabilité ou mieux des preuves quand elles existent. Le climat extérieur comme «  balancetonporc » ou l’affaire «  Weinstein » ne sont pas des éléments à charge.
-« la foi du palais »  qui est un élément structurant pour un avocat comme le secret professionnel. Qu’est ce que c’est ? C’est une réunion informelle ou une discussion  entre avocats, ou entre avocats et magistrats pour faire le point d’une difficulté et essayer de trouver une solution qui satisfait tous les participants . Elle est confidentielle par nature et tout ce qui s’y dit ne doit pas être répété ou utilisé contre quiconque .Chacun peut exprimer ses interrogations, faire part de ses états d’âme, émettre des hypothèses, proposer un compromis sans que cela n’aboutisse d’ailleurs . C’est comme cela qu’on arrive à des accords ou à apaiser des contentieux.  Si l’on prend une comparaison, en matière diplomatique on essaie de rapprocher les points de vue  de façon discrète voire secrète avant d’organiser la réunion officielle et de signer un traité .La foi du palais est une  pierre angulaire de la justice et la trahir est grave. Dans le procès Tron il semble que le président ait laissé perçer son amertume d’avoir été mis en cause, et s’est demandé si une femme président  n’aurait pas fait mieux que lui. De ce point de vue je ne partage pas son avis ; une femme aurait pu être tout aussi intrusive, voire plus féroce.
Toujours est-il qu’à la reprise de l’audience l’avocat de M.Tron a parlé publiquement de ce qui s’était dit sous la foi du palais  pour justifier une demande de renvoi qui lui avait été précédemment refusée, et ce fut un tollé des autres avocats et certainement des magistrats. Ledit avocat a justifié la violation de la foi du palais par l’intérêt supérieur de son client . Cela se discute et ne doit pas se renouveler selon moi car une brêche -une de plus- s’est ouverte dans les relations de confiance entre le barreau et les magistrats qui ont déjà tendance à malmener le secret professionnel des avocats pour diverses raisons avec des motifs alambiqués et peu crédibles souvent, ce qui est très très grave. La défense a le droit et le devoir si c’est son intérêt d’être en rupture mais pas au point de menacer l’ensemble des avocats  qui croient encore naïvement ou  bêtement en  la foi du palais  qui a fait ses preuves et permet de résoudre des difficultés. A ce sujet le public a du être surpris et se méfiera désormais de ce que peuvent dire ou non  des avocats, pas tous heureusement. Finalement le renvoi a été ordonné. Twitter a gagné contre la foi du palais. La fin justifie- t -elle tous les moyens ?
En réalité ce qui est en jeu c’est le poids de l’opinion publique. C ‘est elle qui justifie les informations en continu inlassablement répétées jusqu’à satiété en fonction  du principe de transparence qui se moque de la vie privée ou de la présomption d’innocence, qui oblige chacun à répondre au moindre soupçon ou rumeur dans l’heure sur tous sujets, tout étant égal, les valeurs étant confondues, sous peine d’être déclaré immédiatement coupable ou suspect. Robespierre n’avait pas fait mieux mais il avait au moins l’excuse de vouloir la vertu dans l’intérêt du peuple tout entier, et non pas de ceux qui braillent le plus en criant au scandale pour tout et rien même si leur cause peut être juste . Le procès Tron est  un échec terrible pour la justice et ce n’est pas une satisfaction pour la cause des femmes . C’est une victoire à la Pyrrhus  pour la défense de M .Tron car il n’a pas été innocenté et le doute persiste.
Il n’y a cependant rien de nouveau. Mon illustre confrère Me Moro-Giafferi (1878-1956) avait déclaré lors d’un fameux procès d’assises : « l’opinion publique ,chassez la [du prétoire] cette prostituée qui tire le juge par la manche ».Comme ailleurs, dans  le combat judiciaire n’est pas Me yoda ou jedi de star wars   qui veut et croire que tout est permis en vertu d’une notoriété ou de la grosse tête que donne le talent. Il faut savoir utiliser la force pour arriver au bien. Mais si la justice sans la force est impuissante,  la force sans la justice est tyrannique a écrit blaise Pascal. Un procès est un affrontement entre deux logiques , entre deux vérités humaines. La stratégie judiciaire existe mais ni la haine ou le mépris ni la manipulation  n’y ont  leur  place  car elles sont  contradictoires avec ce qui est juste. Notre société cloue au pilori médiatique [lire Vincent Trémolet de Villers le figaro du 19 décembre 2017 page 19 ]ceux qui ne partagent pas le délire collectif. Sans rapport ou peu avec tout ce qui précède cela me rappelle le bateau ivre d’Arthur Rimbaud :
« comme je descendais les fleuves impassibles,
Je ne me senti plus guidé par les hâleurs ;
Des peaux rouges criards nous  avaient pris pour cibles ,
Nous ayant cloués nus aux poteaux de couleurs ».
C’est « un grand  tort d’avoir toujours raison » a écrit Edgar Faure, célèbre personnalité politique et avocat. La lumière ne brille pas à tous les étages des hurleurs et indignés professionnels et souvent leurs cris entrainent l’effet contraire à ce qu’ils recherchaient . j’ai sûrement tort car je ne suis jamais dans le camp majoritaire. Mais je vous ai compris comme avait dit un général idolâtré y compris par ceux qui ne l’ont pas soutenu et leurs héritiers .En 2018 je vais me rattraper et faire mon coming out. Je n’essaierai plus de comprendre, de douter, de vérifier les faits, d’essayer de réfléchir par moi-même et de choisir la raison. J’adhérerai au prêt à penser et au premier coup de sifflet je me mettrai au garde à vous . Je ne veux plus être traité de conservateur c’est ringard, ni encore moins de réactionnaire c’est dépassé .Je verrai une atteinte aux droits de l’homme dans tout, du racisme y compris d’Etat  avéré, et de la discrimination avec du harcèlement dans  les rapports humains. Le faible ou le minoritaire  aura raison sans discussion et le puissant ou le riche sera coupable par principe. Je serai pour tous les anti, anti-sémite, anti-musulman, anti -religieux ou capitaliste en général, anti- bourgeois, anti – propriétaire, et la liste n’est pas exhaustive.Sans oublier l'anti-virus, l'anti-rouille et l'anti-connerie mais je m'avance pour elle  car c'est un vaste programme.
En 2018 je signerai toutes les pétitions depuis pour  les bébés phoques jusqu’à l’éradication du paupérisme  après 18 heures surtout en hiver ; je serai pour l’accueil de tous les migrants chez les autres car chez moi c’est trop petit ; j’hurlerai avec les loups ce qui ne fera pas plaisir à nos bergers ; je soutiendrai les battu(e)s car il faut être inclusif ;  je haïrai les coupables désignés car les entendre est une perte de temps ; et j’enfoncerai les portes ouvertes .Je ferai repentance pour les croisades;  pour Clovis qui a cassé le vase de Soissons ; pour la saint- Barthélémy ; et pour Charles Martel qui a osé arrêter les arabes à Poitiers ; je n’oublie pas Jules Ferry et son passé colonial, ni la terreur ou l’empire autoritaire. Et pas de liberté pour les ennemis de la liberté ou de la croyance du jour les maoïstes sont de retour. C’est déjà une longue liste pour ce qui n’est pas contemporain et je risque de manquer de temps pour expier.
En 2018 j’aurai enfin bonne conscience  et j’aurai atteint le but ultime : être un progressiste c’est-à-dire être contre ce qui est pour et inversement , ceci sans responsabilité, sans légitimité, sans qu’on ne m’ait rien demandé. Le pied quoi, comme le dirait M.Tron. Espérons que l’année 2018 sera réussie car il n’y a pas d’élections sauf la préparation des européennes de 2019 pour tous les battus de 2017 qui espèrent ressusciter. On croit en plus de croissance et moins de chômage ; en plus de fraternité et moins de polémiques subalternes ; en plus de sécurité et moins de fous de dieu ; en plus de sérénité et moins de violences…
Comme on n’est pas à l’abri d’un succès,   l’année 2018 devrait être magique, mais pas à la façon de l’illustre illusionniste Harry Houdini [1874-1926] qui avait l’art de faire croire ce qui n’est pas et de faire prendre les vessies pour les lanternes.
Bonne année à toutes et à tous , selon la syntaxe présidentielle .







jeudi 7 décembre 2017

« Retiens la nuit » car « c’était bien ».

« Retiens la nuit » car «  c’était bien ».
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Pierre Desproges avait ironisé : « quand Coluche est mort j’ai pleuré alors que quand Tino Rossi est mort j’ai repris deux fois des moules ». Nous n’aurons l’occasion que d’être triste à la suite du décès à quelques heures d’intervalle de Jean d’Ormesson et de Johnny Hallyday : deux voix se sont éteintes mais on les entendra encore longtemps car elles sont gravées dans notre mémoire.  
L’un était la gloire, incarnait les anciens, la connaissance, la littérature, la philosophie, le bonheur et l’art de vivre. L’autre était l’idole qui représentait les jeunes  et leurs espoirs quelques soient leurs âges, la musique, l’artiste,  l’amour , ce qui fait la vie avec ses joies.
L’âge ne comptait plus et ils étaient tous deux très modernes chacun dans son  domaine ayant passé les époques, les modes, les polémiques, l’histoire. On le lisait ou on l’écoutait en l’aimant ou non, mais ils faisaient rêver et on aurait voulu être comme eux. Jean d’Ormesson  avait eu tous les honneurs de la république et de l’élite intellectuelle ou de celle qui se prétendait telle,  et populaire car les livres ouvrent l’esprit de ceux qui n’ont pas eu la chance de naître au bon endroit ou qui veulent approcher le savoir qui libère. Johnny avait eu tous les honneurs du peuple  qui aime ceux qui viennent de loin et se sont hissés au sommet,  ce qui vaut toutes les médailles et l’académie. Ils auront tous deux à juste titre des funérailles nationales, le président de la république sera présent et pour l’un et pour l’autre.
J’ai beaucoup lu Jean d’Ormesson mais avec ses derniers livres surtout je ne l’ai pas entièrement compris. Il volait trop haut pour moi.  J’ai aimé en revanche son sens de la conversation, son humour, ses citations, comme André Malraux qui m’avait fasciné quand j’étais adolescent pour son personnage et sa culture.  Je n’ai pas apprécié certaines périodes et inspirations des chansons de Johnny tout en reconnaissant son immense talent sur scène, alors que j’avais été subjugué quand j’étais jeune par les textes de Georges Brassens. 
Je ne sais de jean d’Ormesson ou de Johnny celui qui m’a le plus formé et donné envie de m’investir en me créant un destin, petit certes, mais le mien.
Jean était un raconteur d’histoires, de grandeur , de sublime  même parfois dans le trivial .  Johnny donnait des leçons de vie pratique et d’espoirs, de désespoir qui se terminait bien.  Comme Corneille écrivait des vers pour montrer ce qu’il faudrait faire dans la vie, tandis que Racine nous disait ce qu’il en est dans la réalité. Les hommes tels qu’ils devraient être face aux hommes tels qu’ils sont.
Il n’y a pas d’art mineur : il y a du talent ou non, et le public sait le reconnaitre.
Tous les deux étaient le symbole de l ‘amour : courtois et parfois badin pour l’un, plus heurté  pour celui qui chantait le rock-and-roll.  Ils ont partagé les difficultés de la vie chacun à sa manière car la réussite n’exclut pas les épreuves, comme pour tous les hommes. Ils nous ont appris à vivre et c’est une leçon extraordinaire.
« Je dirai malgré tout que cette vie fut belle » a conclu Jean d’Ormesson. Johnny a cherché à « retenir la nuit ». Ils ont réussi leur pari : nous rendre heureux.

Au revoir et merci. 

mercredi 8 novembre 2017

Voir le procès Abdelkader Merah par le petit bout de la lorgnette.

Voir le procès Abdelkader Merah par le petit bout de la lorgnette.
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Je ne vais pas commenter l’enjeu de ce procès et son résultat qui a été observé à la loupe grossissante et je partage les analyses dominantes au fond tout en étant réservé sur les prétendus spécialistes et ceux qui croient détenir la vérité, jugent les avocats et les magistrats, et savent ce qu’il faudrait faire pour éradiquer le terrorisme tout en conservant une législation qui n’est pas liberticide mais efficace(sic). Les conseilleurs n’ont jamais été les payeurs.  Je vais m’attarder sur des détails qui sont essentiels pour moi et essayer de faire connaitre un peu de l’envers du décor et du rôle de l’avocat qui défend un terroriste. Ce n’est que ma vision par le petit bout de la lorgnette. Que les avocats réels cités dans cet article me pardonnent mes approximations et commentaires car rien ne remplace la présence  à l’audience, les rapports physiques, la confrontation intellectuelle, l’ambiance générale, le décorum solennel avec les robes  noires ou rouges, le public dont certains sont au spectacle, la presse qui a des exigences et des préférences, l’émotion qui submerge la raison…Dans un procès qui concernait l’assassinat d’un préfet devant ladite cour d’assises anti-terroriste Me Dupont-Moretti a été mon adversaire. Il a été loyal tout en étant ferme. On a la personnalité que l’on s’est créée et le succès ne vient qu’à ceux qui le méritent. Avocats de parties civiles comme ceux de la défense sont égaux. Le meilleur gagne, si le dossier s’y prête.
Il fallait naturellement que ce procès ait lieu pour que les victimes puissent dévisager en direct et haïr physiquement celui qui comparaissait dans le box et d’après ce que j’ai vu dans les dessins d’audience portait cheveux longs et barbe hirsute et avait une mine patibulaire. Il était condamné déjà sur son apparence. Je partage naturellement l’émotion des victimes et j’en suis solidaire sans avoir été touché à titre personnel, comme je suis ému à chaque fois qu’il y a un attentat ou un évènement grave qui aurait pu me concerner ou un de mes proches. Il fallait que la société tout entière se fasse une idée de celui qui a été présenté comme celui qui a armé le bras de l’assassin odieux -si ce n’est toi c’est donc ton frère comme l’écrivait le doux  psychologue et poète Jean de La fontaine dans le loup et l’agneau-  et  essayer de comprendre pourquoi certains qui sont nés sur notre territoire, ont été élevés dans nos écoles avec le principe de laïcité, ont partagé notre culture,  nous ont fréquenté, ont profité de notre état de droit, de notre démocratie, de notre solidarité, nous détestent au point de vouloir nous tuer,  discréditent  nos valeurs, combattent nos principes, et sont prêts à tout  perdre et à accomplir le pire en devenant des barbares ,en prenant la vie au hasard d’innocents dont des enfants, au nom d’une religion en s’inféodant à des terroristes lointains et désincarnés, bourreaux professionnels ? Cette question reste quasi sans réponse mais elle est pourtant pour moi, LA question fondamentale. Certes je ne suis pas un rebelle cela se sent et se saurait et j’incline plus vers l’ordre public, le respect de l’autre et le combat démocratique, tout ceci étant certainement ringard et sans importance aucune. Je me fonds dans le collectif en essayant d’apporter ma pierre à la construction d’une société qui rassemble et qui est plus juste surtout pour ceux qui ne sont pas nés avec une cuillère dans la bouche et n’ont ni tous les codes ni la connaissance des filières qui gagnent. Mais je m’interroge : qu’avons-nous fait à ces terroristes ? Avons-nous seulement tenté de les priver d’un élément essentiel pour eux, de leur identité, de leur personnalité, en les rejetant, en les discriminant, et les dédaignant, en les cantonnant dans ce qu’ils croient être leur ghetto, en ne leur donnant pas les mêmes chances qu’à d’autres ce qui expliquerait qu’ils nous méprisent ? Je réponds non ce qui est peut-être une explication courte, mais je ne suis pas partisan de la repentance en général, de la culpabilité collective même si la France n‘a pas tout bien fait dans l’histoire mais comme pour la révolution elle est un bloc : on la prend comme elle est avec sa grandeur et ses défauts, et on peut s’y investir pour en améliorer le fonctionnement et introduire plus de justice sociale, plus de fraternité, plus de tolérance, plus de rapports humains. Mais on n’essaie pas de la détruire, de la toucher au cœur, de créer des haines entre communautés, de l’abaisser. Que faudrait-il changer pour que les terroristes ou assimilés de toute délinquance soient satisfaits, qu’il n’y ait plus d’Abdelkader et de Mohamed Merah. Mais surtout est-ce à nous de changer ? Dans le pays des droits de l’homme et de la démocratie même imparfaite et j’exagère volontairement, exemple rare dans le monde surtout sur la terre d’islam, faut-il céder au chantage à la violence de quelques individus voire quelques centaines, ce qui serait une défaite impensable en rase campagne de la pensée, des libertés et de nos valeurs ? Bien sûr que non, et nous devons faire face. No pasaràn disaient les républicains espagnols…
Revenons à nos moutons, et je ne parle pas du troupeau Merah mais de la cour d’assises anti-terroriste spécialement composée qui pendant cinq semaines a essayé de garder la tête froide et de ne pas céder à la pression.  Pour moi le petit bout de la lorgnette était de vouloir faire le procès de Mohamed qui ne sera jamais jugé, à travers son frère Abdelkader et sa mère. On comprend la frustration des familles de victimes qui auraient voulu que l’assassin encore vivant réponde de ses crimes, voire les explique et les justifie selon lui. Cela aurait été un tollé. Mais que peut- on attendre d’un barbare ? Sûrement pas qu’il s’excuse, qu’il regrette, qu’il indique comment il s’est procuré des armes et des munitions, pourquoi il a choisi pour mourir tel ou tel sur leur foi apparente ou leur uniforme ou leur innocence, ou en suivant son inspiration maudite et le hasard ? En un mot qu’il « collabore » avec cynisme à sa propre condamnation.  Cela aurait été insupportable à entendre et les polémiques qui ont émaillées le procès d’Abdelkader auraient franchi toutes les bornes et auraient créé des fossés incomblables entre tous. Tant mieux si Mohamed l’arrogant d’après les descriptions n’a pas comparu puisque les forces de l’ordre qui ont porté l’assaut ont fait leur travail. Il nous manquera des réponses à des questions légitimes mais l’on n’est pas obligé d’aller tout au bout de l’horreur pour avoir une conviction et détester celui qui est passé à l’acte. Je vais certainement choquer certains en écrivant ce qui précède mais il faut être réaliste et ne pas se lamenter pour rien il y a d’autres motifs pour être en colère. Quand c’est impossible ayons la certitude que nous avons raison et privilégions la conciliation entre les victimes toutes plus honorables les unes que les autres, la société qui a besoin d’être soudée dans l’affrontement et les menaces protéiformes, et nos valeurs de paix.
Le petit bout de la lorgnette c’est aussi de se réjouir que M. Abdelkader Merah ait été condamné à juste titre au maximum avec une peine de sûreté pour sa participation à une association de terroristes et de féliciter les juges, mais de les critiquer parce qu’ils ont prononcé -également à juste titre selon moi mais je suis un petit juriste en droit pénal-, un acquittement pour les poursuites de complicité d’assassinat. Me Dupont-Moretti seul contre tous on l’a vu et certainement à rebours de l’opinion a encore frappé, et je l’en félicite, car le droit ne doit pas céder à l’émotion même si celle-ci est constamment présente et doit être prise en compte naturellement.
Le plus important dans ce drame qui est jugé  c’est  la culpabilité avérée d’Abdelkader  Merah l’idolâtre, le penseur avéré , celui qui a réfléchi au meilleur moyen de faire le mal, qui a organisé et fourni les moyens, a armé le bras qui a tué à savoir son propre frère d’ailleurs (merci l’amour entre eux) et l’a laissé se sacrifier .Je ne sais pas s’il peut se regarder tranquillement dans la glace de la  prison ou en parler avec sa mère  qui vient lui rendre visite au parloir, et sauf s’ils étaient tous les deux d’accord ce qui ne ressort pas des audiences? C’est Abdelkader le plus dangereux car Mohamed qui se pavanait au volant de bolides puissants n’a pas été décrit comme un cerveau exceptionnel mais plutôt comme une petite frappe délinquante sans envergure.
Le petit bout de la lorgnette encore c’est de braquer les projecteurs sur le kamikaze sans foi ni loi, sur l’exécutant, sur l’opérateur pas fou bien sûr ce serait trop facile mais drogué à la haine et indifférent à l’autre -son frère en humanité - qu’il voit comme le reflet de son échec. Ce qui compte c’est de s’interroger sur les commanditaires, tenter de comprendre leurs réflexions, leurs répulsions, leurs envies et leurs haines ce qui va de pair, pour essayer d’anticiper leurs actions coupables et stopper ou minimiser les attentats autant que faire se peut.
J’attendais ce procès impatiemment car il devait permettre de répondre à des questions de fond, notamment sur la justice anti-terroriste qui existe  dans notre état de droit depuis 1986 et qui va avoir encore beaucoup de travail, alors que l’état d’urgence a été intégré dans le droit commun avec quelques réserves et inquiétudes  justifiées dans les principes pour les libertés individuelles comme publiques, mais si on ne prenait pas  des mesures de protection collective préventive, et si  l’on ne fournissait pas des armes légales à ceux qui luttent contre le terrorisme et à ceux qui jugent,  que ne dirait- on au prochain attentat !
Ce procès ne m’a pas plu car les attaques personnelles et les menaces contre Me Dupont-Moretti ont été honteuses.  On me dira que c’est encore le petit bout de la lorgnette et surtout de la solidarité corporatiste, mais non. Personne -sauf les rares confrères qui sont présents à la barre dans les procès qui défraient la chronique - ne peut connaitre la solitude de l’avocat qui défend un monstre aux yeux des victimes et de l’opinion qui voudraient qu’un exemple ait lieu, que l’on ne fasse pas du juridisme et que l’on ne s’embarrasse pas des grands principes, puisqu’il est coupable « forcément coupable » comme aurait pu l’écrire Marguerite Duras, qui voyait du sublime dans le tragique ou le sordide.  C’est le petit bout de la lorgnette de confondre l’avocat avec son client. Entendre un avocat partie civile ce qui est admettons le une tâche fondamentale mais peu risquée -sauf erreur de ma part car je n’étais pas à l’audience, je n’ai rien entendu et je me réfère aux commentaires ou compte rendus lus dans la presse parfois partiale ou incomplète sauf exception et je parle d’expérience- insulter l’avocat de la défense qui a le poids du procès outre l’hostilité générale en lui disant qu’il est le déshonneur du barreau m’a laissé médusé et en colère. Un avocat ne peut tenir ce genre de propos car il n’a plus de distance avec son client et il le surpasse dans la détestation qui ne devrait concerner que l’accusé qui lui incarne en l’espèce le mal absolu ce qu’admet son avocat d’ailleurs sauf erreur de ma part. Il faut beaucoup de talent et de courage à l’avocat de la défense pour faire respecter les grands principes du droit, celui de la preuve que l’accusation doit établir, du doute qui profite à l’accusé et chasser du prétoire l’opinion publique cette « catin » comme l’avait dit il y a longtemps le célèbre avocat Me Moro-Giafferi. L’avocat qui a insulté Me Dupont-Moretti devrait lire les maximes de La Rochefoucauld de 1664 sur la vanité et l’honneur, et surtout la bible de la défense à savoir l’ouvrage de Me Albert Naud « les défendre tous ». Chaque avocat a ses raisons d’accepter une défense qui sont des motifs personnels et qui relèvent de sa seule conscience. On n’est pas obligé de l’approuver mais on n’a ni le droit ni la supériorité de l’accabler. Rappelons-nous Voltaire : « je ne partage pas vos idées mais je me ferai tuer pour que vous puissiez les exprimer ». Me tuer est excessif car je n’ai pas ce courage, et pour quelle cause se tue-t-on dans nos sociétés consuméristes ? même si je suis tolérant pas plus que la moyenne cependant et que la liberté d’expression surtout à la barre est l’apanage des grands.
On devrait remercier Me Dupont-Moretti d’avoir développé devant la cour une véritable défense sur les faits en débats,  plutôt que d’avoir adopté une posture ou une défense de rupture comme Me Jacques Vergès (qui se qualifiait de salaud « lumineux » titre qu’aucun avocat  ne lui a contesté quand il défendait sous les huées en 1987  le bourreau nazi Klaus Barbie  pour crime contre l’humanité) et d’avoir plaidé l’acquittement ce qui a obligé l’avocate générale -qui représente la société- à être très offensive et rigoureuse en droit  pour démontrer un faisceau d’éléments à charge et ainsi obliger la cour à motiver point par point sa condamnation( j’avoue n’avoir pas lu l’arrêt). Il n’y a ainsi pas eu de débats sur la légitimité de la cour, sur sa nécessité. Et pour l’avenir les terroristes qui comparaitront sauront à quoi s’en tenir. Ce n’a pas toujours été le cas dans notre histoire.   
Je me permets un souvenir personnel qui rejoint le procès Merah sauf pour les motivations des accusés qui défendaient la France, puisque j’ai été le jeune collaborateur de Me Tixier-Vignancour de 1973 à 1981, pendant mon stage ; il fut mon seul patron au palais. Je n’ai pas hérité de son talent, hélas.
Devant la cour de sûreté de l’Etat qui a jugé entre 1963 et 1981   des accusés  notamment pour des faits  en relation avec les évènements d’Algérie (des algériens étaient considérés comme des terroristes et les partisans de l’Algérie française avec l’OAS se considéraient comme des patriotes), le  lieutenant- colonel Bastien-Thiry, décoré de la légion d’honneur, poursuivi pour avoir organisé un attentat contre le général de Gaulle  était défendu par Me Jean-Louis Tixier-Vignancour et Me jacques  Isorni (qui avait défendu juste après la fin de la guerre le maréchal Pétain ).La défense était incarnée par des ténors du barreau. Le pouvoir exécutif leur était hostile et ils s’étaient fait huer au parlement. On n’a jamais aimé les terroristes ou présumés tels, ni les avocats qui les défendent, ce qui se comprend. Au cours d’une audience Me Isorni s’attaqua à l’indépendance des juges et à la légitimité de la cour : il fut inculpé sur le champ pour outrages et il comparut en flagrant délit. Me Tixier-Vignancour le défendit. Me Isorni écopa de trois oui trois ans, de suspension. La défense est parfois à risques par les temps troublés ce qui est notre cas actuel. 
Par sa défense au procès Merah Me Dupont -Moretti a confirmé ses lettres de noblesse -qu’elle avait déjà dans des affaires passées- à notre justice anti-terroriste. Ce n’était certainement pas son objectif ? mais ainsi l’état de droit a été renforcé et les terroristes n’ont pas gagné : nous avons conservé notre liberté de juger. A défaut notre justice serait l’exécutrice des basses bien que compréhensibles œuvres du pouvoir, ce que personne ne tolérerait car la fin ne justifie jamais les moyens y compris pour l’Etat. C’est le chancelier Séguier premier président de la cour d’appel de Paris qui déclarait jadis que « la cour rend des arrêts pas des services ».  
On a reproché à Me Dupont-Moretti d’avoir cité la phrase de Camus : « entre la justice et ma mère je choisis ma mère ». C’était pendant la guerre ou les évènements d’Algérie, (d’où mon aparté sur la cour de sûreté de l’Etat plus haut) et Me Dupont -Moretti n’a certainement pas voulu comparer Camus et Merah ? Ils n’évoluent pas dans la même catégorie humaine et philosophique ! Mais que pouvait- on attendre du témoignage de la mère d’Abdelkader et Mohamed Merah ? Qu’elle les accable, qu’elle accuse ses fils ou l’un pour sauver l’autre ? Le jugement de Salomon n’est pas possible dans une justice républicaine de surcroît. Et l’autocritique comme au temps des maoïstes ou des khmers rouges est passée de mode. Regrette-t-on ces grands moments d’humanité ?
Le petit bout de la lorgnette enfin est que tout le monde est mécontent ce qui est bon signe. Les parties civiles qui ont eu une défense médiatique très lacrymale sont des victimes à vie ce qu’il faut respecter et sont déçues car M. Merah avec ce verdict sortira de prison dans quelques-longues- années. Qui sera-t-il ? Aura -t- il des remords ? Sera-t-il prêt à une vraie reconversion passant par une intégration dans notre société ? Dédommagera-t-il les parties civiles ? Elles veulent que l’acquittement soit effacé et que M. Merah soit condamné à la peine perpétuelle avec mesure de sûreté maximum.
La défense avec l’autre accusé et M. Merah défendu par Me Dupont-Moretti qui a fait une cure de silence médiatique, très bonne tactique au demeurant qui a exaspéré ses adversaires au passage, est aussi déçue car la cour n’a pas fait droit à tous les arguments de droit qui ont été avancés et a retenu à charge des faits et leurs conséquences qu’elle contestait. Enfin l’accusation représentée par Mme l’avocate générale n’est pas d’accord avec l’arrêt et elle a interjeté appel. Puisque tout le monde proteste du résultat peut-on en déduire que la justice a été bien rendue ?
Il y aura donc un nouveau procès. En attendant Abdelkader est détenu. C’est une bonne nouvelle.
Mais il faut quand même que je critique Me Dupont-Moretti. Il aurait déclaré à la barre que des crachats sur sa robe valaient la légion d’honneur qu’il a d’ailleurs refusé. Il a tort. Personnellement je ne suis pas assez talentueux, effronté et important pour refuser la légion d’honneur que l’on a bien voulu m’accorder pour des mérites liés à la justice mais pas seulement. On peut briller ailleurs qu’au prétoire, et une décoration n’est pas le signe d’un talent avéré. Si c’était le cas la bataille pour l’obtenir serait rude. Quant au crachat il ne souille que celui qui le projette : c’est l’argument ultime des médiocres.

J’espère qu’en appel la sérénité régnera, l’enjeu restant fondamental. 

lundi 6 novembre 2017

La justice entre Halloween et la Toussaint, réflexions banales.

La justice entre Halloween et la Toussaint, réflexions banales.
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Pendant que certains étaient en vacances la semaine du 30 octobre au 5 novembre a été riche d’évènements. On ne sait plus s’il faut fêter les saints ce qui est du domaine du religieux ou la simple visite à nos chers disparus au nom de la mémoire et de l’amitié ou de l’amour, ou pousser des cris d’horreur avec la fête païenne d'Halloween plus proche du grand guignol et du commerce que de la méditation. Notre société balance entre le spirituel-même si les églises ne se sont pas en odeur de sainteté-  et la tradition, et le prétendu modernisme du spectacle et de la futilité.
La justice n’a pas été au repos en raison d’une actualité qui a pu choquer.
1°) Commençons par les USA qui ont poussé des cris d’horreur réelle car il y a eu récidive d’un grand classique : une tuerie de masse. Concernant l’attentat à Manhattan à la voiture- bélier par un originaire d’Ouzbékistan ce qui n’est pas une circonstance aggravante, je ne crois pas que le président Trump va déclarer en twittant la guerre à ce pays, mais il va essayer de réintroduire son décret anti-migrant et suppression de la « loterie » ou tirage au sort qui permettait à certains de venir aux USA, et la justice à savoir la cour suprême va devoir se prononcer de nouveau. Puis on est dans le connu :   après le massacre  il y a un mois de Las Vegas où il y a eu plus de 50 morts et des dizaines de blessés , perpétré par un américain blanc, riche, fréquentant peut être une église , sans histoire apparente, sûrement sain d’esprit  si on l’est quand on tue à vue ?, avec famille et enfants, possédant un arsenal d’armes en toute légalité a priori et qui s’est suicidé  ou a été tué par la police c’est un peu glauque , un ancien soldat de 26 ans est entré dans une église d’un petit village dimanche et a tiré sur tout ce qui bouge faisant 26 morts et des blessés, avant d’être retrouvé mort dans son véhicule. Y a-t-il une leçon à tirer de ces deux drames ; la justice ne passera pas puisque les auteurs sont décédés ; la législation sur les armes aux USA ne sera pas revue. Le président Obama a échoué dans sa tentative et le président Trump   est plutôt un partisan de la « national rifle organisation » qui est le puissant lobby des armes et ses électeurs le soutiennent. Halloween a bien porté son nom.
Toujours aux USA des proches du président ont été inculpés   de complot contre les USA ce qui est d’une gravité inouïe. Le procureur spécial Bob Mueller semble déterminé. La justice américaine n’est pas tendre, elle qui peut condamner des individus à des centaines d’années de prison. Le feuilleton continue et les adversaires de M. Trump visent l’impeachment du président. Qui gagnera ?
2°) En catalogne c’est la débandade. Je ne critique pas ceux qui considèrent qu’un peuple a droit à son autodétermination-sinon tous les tyrans, massacreurs, dictateurs ont des beaux jours devant eux-, ou à une autonomie prononcée, ils ont le droit d’y croire et de le vouloir par les urnes en convaincant et en respectant ceux qui ne sont pas d’accord et jamais par la violence , l’assassinat  ou les armes ou la sédition auto- proclamée surtout dans une démocratie et en profitant d’un état de droit et des avantages de la nation qui leur a permis de pouvoir prendre leur essor. Leur réussite est aussi celle des autres membres de la communauté nationale dont ils veulent se séparer, de la solidarité, et de l’État central qu’ils exècrent. Manifestement M. Puigdemont et ses amigos ont été débordés par leur audace. Ils ne savaient plus que faire à la suite de leur coup d’éclat-sinon d’État-, le départ de beaucoup de banques et d’entreprises, la fermeté de Madrid, et le refus évident de l’union européenne qui les a accueillis à bras fermés.  Ils ont eu tout faux. Ils n’avaient pas suffisamment réfléchi à l’après, ont entraîné leurs partisans dans une impasse, et ont donc eu un comportement irresponsable. Ils ont dû pour les uns se livrer à la justice espagnole et pour le leader M. Puigdemont s’exiler en Belgique ce qui est lamentable. C’est une reddition croquignolesque pour reprendre une expression de M. Macron.   Un mandat d’arrêt européen est en cours d’exécution. Les justices belge et espagnole vont se prononcer, tandis que des élections auront lieu en décembre. Je souhaite le possible à M. Puigdemont qui doit être sincère même s’il se trompe, car on ne tire jamais sur un homme qui a un genou à terre. 

3°) Mais c’est notre Conseil d’État qui s’est distingué par son arrêt du 25 octobre 2017 -connu la semaine de la Toussaint quelle coïncidence ! -, n°396 990 Fédération Morbihannaise de la libre pensée, Mme C .  et  M. D.  contre la commune de Ploërmel, obligeant celle-ci à retirer uniquement  la croix qui surmonte  la statue en conservant celle-ci  ! de Jean-Paul II édifiée sur une place publique. Les catholiques ont été outrés, et les laïcs ont applaudi. La justice est -elle en cause ? Les demandeurs de la libre pensée qui se gargarisent d’une victoire à la Pyrrhus de la laïcité ont obtenu l’effet inverse qu’ils recherchaient. Partout dans le pays il y a eu une vague d’indignation et des comités « montre ta croix » se sont créés. Il y a du futur contentieux dans l’air, et en visant les signes ostentatoires catholiques qu’en sera – t -il des signes ostensibles et visibles musulmans, des prières de rue, des mosquées ou autres bâtisses construites après 1905, et des prières dans la rue espace public par excellence. Sans compter l’autorisation du burkini dans les piscines publiques comme à Rennes sauf erreur. (ce qui  nous change de Paris où Mme Hidalgo semble vouloir  des piscines pour naturistes : quel sera l’objet du délit qui offense la vue ?) .  Je crois que nos libres penseurs de Bretagne et d’ailleurs ont du pain (non béni) sur la planche, avec la liberté   d’être aussi offensif contre tout ce qui heurte la laïcité. Pour bien comprendre le débat de droit et non de l’émotion ou de la croyance il faut connaitre les textes.
La lecture de l’arrêt du conseil d’état laisse sceptique même si la lettre de la loi est claire. Mais on le sait : les juridictions ont parfois un prisme  orienté et la jurisprudence sait contourner la lettre.  On vise l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation DES églises et de l’État, même si on se rappelle que le combat de l’époque concernait non pas le culte ou la foi catholique mais son expression séculière à savoir le clergé et son influence avec la volonté de s’immiscer dans le profane voire de gouverner les affaires de l’État. Cet article dispose littéralement : « il est interdit à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte , des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires ainsi que des musées ou des expositions ». Nos cathédrales, églises, calvaires notamment  ont donc échappé à la loi. Depuis 1905 cependant l’eau sous les ponts a coulé et les croyances se sont raréfiées au profit du consumérisme matériel, et d’une spiritualité à géométrie diverse : nos idoles pour la plupart des citoyens ne sont plus celles d’antan, ce qui n’est pas une raison pour admettre n’importe quoi et fouler au pied les principes de la république et de la laïcité, nous sommes d’accord. Mais la tolérance et l’ouverture d’esprit ne sont pas non plus à reléguer au magasin des idées ringardes. Dura Lex Sed Lex. Selon moi la laïcité doit être entendue comme l’obligation par l’État - et donc son bras armé les juridictions - de ne pas interférer dans les libertés intimes   et dans le domaine privé de la religion, en donnant les moyens  à ceux qui croient d’exercer leur culte en contemplant s’il le souhaite  des statues (ne n’est pas le veau d’or en l’espèce) , et à ceux qui ne croient pas, de n’être pas agressés  par un prosélytisme apparent car  en effet une statue ne parle pas ,et muette elle ne délivre pas de message d’adhésion. Sinon les statues de nos généraux et maréchaux ou soldats morts pour la France appelleraient à la guerre, alors qu’elles militent pour le plus jamais cela et la concorde. La laïcité est une arme de paix si je puis utiliser cet oxymore entre les groupes, entre ceux qui ne pensent pas pareil, en obligeant à l’ouverture des esprits et en pratiquant la tolérance. C’est ce qui se passe dans une commune qui en son conseil municipal représente des citoyens à croyances et sensibilités diverses sans compter les agnostiques et les athées, fait des choix dans l’intérêt général discute d’une installation de qui et où, est libre de ne pas se censurer et de plier devant une maigre opposition et de rendre hommage à un homme public fut-il religieux. Jean Paul II pape certes catholique est le héros des anti communistes et a contribué à donner des libertés à des peuples opprimés qui ne se réclamaient pas de la croix.  Sa statue n’est pas un appel à la foi catholique. Elle est la reconnaissance du courage et de l’amour entre les hommes. Et un appel à ne pas avoir peur. Cela concerne tout le monde.  C’est certainement pour cela que nos amis libres penseurs ont accepté la statue mais pas la croix qui leur cause un préjudice, de principe, esthétique, de conscience ils doivent le préciser ? Demie mesure qui n’a pas de sens et qui crée la polémique au lieu de l’éteindre outre l’argent que cela coûte aux contribuables de Ploërmel en frais de justice et autres. Ils ont préféré la lutte des consciences à la communion des âmes. Que la paix soit avec eux. Je ne défends naturellement ni la croix, ni le croissant, ni l’étoile de David, ni une spiritualité quelconque qui sont de la sphère privée. Mais je ne m’offusquais  pas  et je n’aurai pas saisi la justice si j’en avais eu les moyens, quand je voyais il y a peu ,des monuments ou des rues à la gloire de despotes ou de massacreurs en série des libertés dans des communes politiquement engagées soutenant  les bilans globalement positifs, et je ne suis pas partisan de la repentance ou de voir débaptiser  certains noms de notre histoire au nom d’une bien pensance nouvelle ou d’une appréciation correspondant aux droits de l’homme revisités et opportunistes de notre période contemporaine .Il reste du boulot à nos libres penseurs intégristes de la laïcité qui  bien sûr, doit se défendre quand elle est attaquée ou que l’on veut la réduire à rien.  Ou à une religion précise. Mais il faut choisir le bon combat et ne pas revenir aux vieilles lunes et à la traditionnelle calotte   qui a été remplacée par d’autres symboles visibles.
Pourvu que vos valeureux libres penseurs bretons ne s’attaquent pas comme Astérix aux romains, y compris ceux qui leur ressemblent chez nous, c’est-à-dire à Rome ville catholique avec le Vatican et dans nos campagnes, à la croix de lorraine ; à la Croix-Rouge ; aux croix de bois ; aux croix de nos pharmacies ; aux croi..ssants…
Le conseil d’État a rendu le 9 novembre 2016, avec  la fédération départementale  de la libre pensée de seine et marne (lire aussi l’arrêt n°395223 fédération de la libre pensée de Vendée), un arrêt  n°395 122  qui rappelle la liberté de conscience et la garantie de libre exercice des cultes, et qui est nuancé sur les crèches qui sont aussi une tradition et des décorations profanes avec un caractère culturel, artistique ou festif et n’ont pratiquement plus de connotation religieuse sauf pour ceux qui voient partout du religieux. Inspirons-nous-en et faisons une croix sur nos querelles dépassées. Jean-Paul II ne mérite pas ce déshonneur.
La justice qui tranche les problèmes spirituels a une mission quasi « divine » !

4°) Enfin pour terminer il y a eu le verdict dans le procès contre Abdelkader Mérah - celui que tout le monde déteste il fait l’unanimité de ce point de vue-  procès qui a échauffé les esprits. Les parties civiles sont déçues, c’est constant. La défense aussi car elle estime que la cour a condamné trop sévèrement malgré l’acquittement partiel un de plus au palmarès de Me Dupont-Moretti qui n’oubliera pas ce qu’il a honteusement subi personnellement. Enfin il y a appel du ministère public.
Puisque personne n’est content n’est-ce pas le signe que les magistrats ont bien jugé ? Je ferai part de mes commentaires dans un article ultérieur. A suivre!

dimanche 29 octobre 2017

Billet d’humeur sur l’air du temps : les croyances, les élites et l’argent, la politique évidemment…

Billet d’humeur sur l’air du temps : les croyances,  les élites et l’argent, la politique évidemment…
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Ce sont les vacances autorisons nous de la légèreté. On ne fête plus la toussaint et la visite des cimetières qui ne m’a jamais enthousiasmé ,  car c’est ringard sûrement et cela rappelle trop pour certains l’église que je ne fréquente d’ailleurs pas. Se souvenir de ceux qui ne sont plus est suspect sauf le culte pour ceux qui témoignent de  diverses révolutions car on tuait pour la bonne cause, parait- il. On attendra donc  le 11 novembre pour commémorer  les morts pour la France ou ceux qui sont tombés en combattant le terrorisme  ou les délinquants de toute nature .Le conseil d’Etat  champion de la protection des libertés publiques-après des années de contentieux initié par la libre pensée de bretagne - vient d’ interdire de garder  une croix sur un monument  construit sur le domaine public d’une commune  qui avait voulu rendre hommage à Jean-Paul II  pape catholique,  un de ceux qui ont combattu le communisme et aider à  rendre la liberté à certains peuples . Laïcité extensive et radicale oblige . Je ne défends évidemment ni la croix, ni le croissant, ni l’étoile de David , ni autre symbole. Mais faudra- t-il décapiter le sommet de nos églises et le mont saint Michel qui incarnent  la croix ? Sans compter les cathédrales dont la dernière à paris de l’église orthodoxe.  On espère qu’il en sera de même quand  des fidèles  d’autres religions voudront faire connaitre leur croyance à tout le monde, et l’afficheront sur le domaine public, dans nos rues en particulier.  Nos libres penseurs doivent être attentifs à toute manifestation de religion sur l’espace commun, quelle soit en béton ,  en vêtements ou en psalmodie. Et surtout être tolérant s’il n’y a pas de prosélytisme. La laïcité  n’est pas faite que d’interdictions. Elle est aussi un moyen pour conserver la paix  et admettre l’histoire d’un peuple et ses racines. 
On préfère célébrer Halloween et se faire peur, fête paienne  de samain  dieu de la mort,  sorte de nouvel an  celte  en vogue chez les anglo-saxons et qui sauf erreur de ma part n’a pas une dimension spirituelle très affirmée. On mange des bonbons après avoir revêtu un masque d’horreur, ce qui ravit nos boulangers et autres vendeurs de sucreries, ainsi que les dentistes bien sûr.
 Je préfère essayer de rire autrement  dans ce monde de brutes et d’indignations pour tout et rien comme si le ciel allait nous tomber sur la tête plusieurs fois par jour. Puis l’écume disparait et reste la réalité.  L’actualité nous donne des exemples.
Je suis toujours étonné par les polémiques qui démarrent de façon tonitruante, qui durent « intensément » l’espace d’un moment plus ou moins court, mais échauffent les esprits comme s’il s’agissait d’une affaire cruciale remettant en cause notre destin  pas moins. Ainsi la tentative d’exclusion des « traîtres » -on n’a pas peur des mots-qui ont choisi de travailler et soutenir M.Macron tout en restant membre du parti  les républicains, et qui contribuent à faire voter des mesures que la droite soutient  depuis des années. Pour le militant qui est le traître ? La procédure de radiation a tourné à la pitrerie, malgré la haute qualité auto-proclamée et le souci de cohérence des dirigeants des  républicains transformés  en  juges et ne pensant pas à leurs propres intérêts, bien sûr. Quel est l’intérêt des électeurs de la droite républicaine : que les mesures  revendiquées depuis des années que les gouvernements de droite n’ont pu réaliser soient prises et que la France réussisse même si le président n’est pas  membre des républicains canal historique. Ce qui ne veut pas dire forcément approbation de tout ce que fait le chef de l’Etat qui semble avoir un vocabulaire qui ferait pâlir de dépit Nicolas Sarkozy qui a été vilipendé pour rien dans cette sémantique. Mais ce que l’on ne pardonne pas à l’un, on s’en gausse avec indulgence pour l’autre.    
Pour d’autres sujets on jette des anathèmes à la figure, on cite des noms (en faisant fi de toutes précautions, de la présomption d’innocence, et de la réalité des faits ou non). Le dénonciateur  ou la dénonciatrice ne tombons pas dans l’exclusion et respectons la parité, a bonne conscience car il ou elle  est certain de sa vérité, parce qu’il ou elle est une victime forcément sublime aurait écrit marguerite Duras,  et qu’il ou elle  se bat pour les autres. Mais les autres -moi en particulier - ne lui ont rien demandé et  ne sont intéressés que de loin souvent ou pas du tout par son malheur présumé. Autrefois on parlait de l’avant-garde du prolétariat qui éclairait le peuple tout en lui dictant sous peine de représailles des règles brutales. Aujourd’hui une poignée prétendent être les porte- paroles de l’éthique,  de l’anti racisme et de la lutte contre toutes les discriminations, en montrant  où est le bien et quelles sont  les conduites à tenir. Non merci ! comme disait Cyrano de Bergerac. Je n’ai pas besoin de nounous . J’agis selon ma conscience.
M. Bruno Le Maire  sémillant  ministre qui avait  voulu être président des républicains de droite et qui a été sèchement  battu  aux élections internes mais rattrapé au tirage par le  chef de l’Etat , est passé par convictions sans aucun doute chez M.Macron  et  vient de rétropédaler après avoir répondu qu’il ne dénonçait pas-par haine de la dénonciation qui rappelle de mauvais souvenirs - dans le milieu politique les harceleurs. Il a publié immédiatement après la bronca qu’il a suscitée une vidéo pour dire que la  dénonciation du harcèlement en politique aussi -comme félicie- s’imposait en réalité mais qu’il n’avait personne à dénoncer. Ouf ! Le politiquement correct a frappé même si la cause est juste.
Des dénonciations sont permanentes : on tape sur les élites et l’argent , bien que le niveau pour être riche descende dangereusement. Personnellement je l’avoue, ce qui devrait m’être à moitié pardonné : j’ai toujours rêvé de faire partie de l’élite et d’être riche comme un jeune footballeur brésilien ou français ou un adolescent qui a créé une start-up, ce qui m’aurait permis de ne pas payer beaucoup d’impôts voire que le trésor public m’adresse un chèque comme pour Mme Bettencourt, paix à son âme . La contribution à l’impôt est la base de la vie en société car elle permet la redistribution donc la lutte pour l’égalité. A la condition que chacun mette du sien, à son niveau, avec ses moyens. Quand c’est gratuit c’est-à-dire que l’on ne participe  pas même de façon symbolique, cela n’a plus de sens et ne responsabilise personne. Cette remarque ne plaira pas à tous puisqu’il faut faire payer les riches qu’ils le soient par leur mérite et leur travail ou non. J’assume.  Mais si je pouvais pour des raisons de droit à ne pas confondre avec la morale être exonéré d’impôts , tout en profitant de tous les services en France , de la solidarité, de la protection de l’Etat  et de mon confort, j’approuve. Personne ne paie plus que le calcul  et le montant qu’il reçoit du centre des finances publiques, il y a des limites à  la philanthropie. Je ne fais partie selon moi, que de la classe moyenne devenue supérieure parce que je suis propriétaire immobilier-merci le nouvel ISF- et j’ai toujours payé impôts et taxes sans jamais recevoir une quelconque aide publique. Je suis donc illégitime à parler justice sociale comme de n’avoir pas bénéficié d’une HLM avec un sur- loyer pourtant largement inférieur au prix du marché. Je n’ai pas su faire, et donc il est normal de me punir en me classant parmi les riches qui vont payer à leur retraite une CSG augmentée, sans bénéficier de la disparition de la taxe d’habitation.  Dura lex sed lex qu’elle soit injuste ou non.  Cela m’apprendra à avoir économisé et eu des ambitions.  M.Hollande n’aimait pas les riches c’était clair. M.Macron les adore et veut qu’ils investissent. Dans les deux cas je  suis à contre courant. Cherchez l’erreur.
Je ne suis pas non plus une élite, un grimpeur exemplaire, j’ai le vertige quand je monte trop haut y compris sur un escabeau, et je fais partie de ceux qui s’accrochent à la corde comme la corde soutient le pendu. M.Laurent Wauquiez qui est candidat à la présidence du parti les républicains est un premier de la classe, un premier de cordée dirait M.Macron qui en est un autre. Il est bardé de diplômes les plus prestigieux, appartient à l’élite intellectuelle, et se dit non héritier en politique. Il a dû oublier que c’est M.Jacques Barrot qui lui a laissé son siège de député en haute- Loire . Pourtant M.Wauquiez devant les militants de droite à  la Napoule vient de déclarer   qu’il voulait être le porte- parole  de la majorité silencieuse- ce qui nécessite une ouïe  affûtée ou un appareil  auditif  de bonne qualité - qui n’était pas entendue: « alors le peuple vote pour les extrêmes et les élites : pour faire taire le peuple on brandit l’étendard du populisme ». Mais qui sont les élites si on exclut M.Mélenchon et Mme Le Pen  et M.Wauquiez qui aime le peuple, lui ? Il a évoqué « le moule [de la pensée] forgé par les grandes écoles » (dont il est issu) .Il a dénoncé les censeurs du débat, la bien pensance de la gauche -j’ajoute de l’ultra gauche  car le parti socialiste a disparu avec ses idées d’un autre siècle -et il  a raison car les donneurs de leçons de toutes catégories  qui culpabilisent l’autre qui ne croit pas dans leurs  valeurs mais en a  des différentes, m’exaspèrent et les débats factices d’une communauté ou d’un genre me sont insupportables.  M.Wauquiez préfère la France au village global. Mais l’un n’exclut pas l’autre et on ne peut se replier sur soi en ignorant ce qui se passe ailleurs. Le brexit nous le démontre. C’est un grand tort d’avoir toujours raison comme le disait Edgar Faure. La vraie catégorie élite, celle qui éclaire sans dénoncer ou  rejeter est donc très réduite.
Il nous faut des élites entendues comme celles qui savent , réfléchissent et proposent des solutions d’intérêt général  qui ne sont pas dogmatiques. Celles autoproclamées  autour de saint -germain- des prés ou dans des pré-carrés résultant de leurs statuts sociaux  ne vivent que de leurs protections, copinages , absence de prise de risque, connaissance du système institutionnel ,renvoi d’ascenseurs, et de  l’héritage culturel. L’espoir est de proposer la même chance pour tous et de sortir par le haut. Ce n’est pas une simple question d’argent mais de moyens mis à la disposition des plus doués d’où qu’ils viennent et du bas en particulier et qui veulent s’intégrer dans la partie qui réussit, en faisant sauter les barrières d’une société codifiée et construite en silos. Le mérite comme l’effort doivent être récompensés. Et puis sortons de notre rapport conflictuel à l’argent. Le comédien Fabrice Luchini en parle au théâtre des bouffes parisiens. Il n’évoque pas les yachts, les voitures de luxe, les tableaux de maître, les propriétés improbables, les lingots…tout ce qui est vulgaire mais biens matériels détenus par les vrais riches  notamment  par des dirigeants de sociétés mondiales qui créent des fondations pour devenir mécènes.  M.Macron ne s’est pas encore attaqué à ces phénomènes de nouveaux ou anciens possédants sauf pour dénoncer la jalousie à leur encontre. Il parle d’or venant de la banque Rothschild !  M.Luchini fait parler les écrivains qui se sont exprimés sur l’argent . Il cite notamment Sacha Guitry : « si j’étais le gouvernement comme dirait ma concierge, c’est sur les signes extérieurs de feinte pauvreté que je taxerais impitoyablement les personnes qui ne dépensent par leurs revenus ». Les élites qui écrivent ont tout dit sur l’argent.
 Après Me  Raquel Garrido qui  a dû quitter son hlm alors qu’elle est une avocate pauvre selon elle  qui ne paie pas -ou ne payait  pas- ses cotisations à la caisse de retraite ou à l’ordre des avocats  tout en travaillant  chez T. Ardisson et est marié ou vit avec M.Corbière député de  la France insoumise et très proche de M.Mélenchon, une élue du même parti qui occupe légalement  une hlm de  la ville de paris de 80 m2 pour 1300 euros par mois et refuse de partir a déclaré : « je ne vais pas payer un loyer pour enrichir un propriétaire et augmenter la spéculation immobilière » (SIC) . Les étudiants ou les familles nombreuses qui louent un studio ou une chambrette pour à peu près le même prix apprécieront.  Vivement que M.Hulot qui protège les espèces rares  s’intéresse  à ces catégories de politiques qui se sentent discriminés !
Que ces polémiques démagogiques cessent et que l’on s’attaque à la réalité des dossiers. Une société apaisée doit rassembler tout le monde.  Dans une équipe de foot pour que l’avant- centre et les ailiers soient efficaces, la défense doit être solide, et les milieux de terrain remonter inlassablement la balle pour la passer dans les meilleures conditions possibles à ceux qui ont le talent de marquer les buts. C’est cela une nation.