lundi 21 décembre 2020

un procès singulier: des juges contre thémis

 

                

                   Un procès singulier : des juges contre Themis.

                              Par Christian Fremaux avocat honoraire.

                                                   Un dïner de c.

 Je pourrai choisir un exemple inédit : parmi les 10 qui ont diné à l’Elysée mercredi 16 décembre avec le président et le premier ministre je lis que certains d’entre eux et des associations auraient déposé plainte pour mise en danger de la vie d’autrui si ce n’est pas une fake- news, puisque on a appris par la presse que le président était atteint du covid. C’est un manque de reconnaissance du ventre, et un défaut de responsabilité personnelle. On peut accepter d’aller diner à 10 dans l’antre du pouvoir en passant par la cheminée sans respecter les gestes barrières pour profiter de la parole et de la table du président. Mais on ne se plaint pas après ! On pouvait décliner l’invitation. Comme dirait Francis Veber ce fut un dîner de c.

                                      Des juges vigilants qui s’autosaisissent quasiment.

Par ces temps énervés et d’esprits égarés, j’ai choisi un exemple singulier pour montrer jusqu’où peuvent aller des juges, ces juges dont on a besoin et qui arbitrent la vie ou l’avenir des hommes et des femmes.  On a envie de croire qu’ils sont sur les hauteurs et qu’ils ne s’attaquent pas à des détails, même si des détails posent problèmes. On a besoin de sérénité et de repères solides mais tout explose.  Des juges surtout syndicalistes ont craqué et attaquent en justice leur propre ministre qui incarne Thémis pour conflit d’intérêts et peut être d’autres infractions en l’accusant de profiter de ses fonctions ministérielles pour arranger ses dossiers d’ancien avocat. Ils ne lui adressent plus la parole ? : on n’ose y croire.   Essayons d’être clair d’après ce que l’on sait ou cru apprendre de cette affaire obscure des écoutes de Paul Bismuth alias N.Sarkozy ou l’inverse qui vient de se terminer dans l’indignation du barreau vent debout  et les larmes de l’infâmie  : si j’ai bien compris car les poursuites sont confuses  et non documentées l’avocat  Dupond-Moretti qui a été écouté pendant des années comme un criminel potentiel est soupçonné comme d’autres avocats - qui ont été plutôt victimes des procédures secrètes et curieuses du parquet national financier- d’avoir été ou d’avoir profité d’une  taupe (sic)  au sein de la cour de cassation à son profit personnel ? ou  pour informer son confrère avocat de M. Sarkozy.  On attend la décision au fond du tribunal pour l’ancien président et ses éventuels « comparses » pour le 1er mars 2021. Et si M. Sarkozy était relaxé, on ne peut l’exclure ! La justice rend des arrêts et non des services disait au 19ème siècle le 1er président de la cour d’appel M. Séguier. Mais concernant Me Dupond -Moretti des juges le soupçonnent d’autres vilénies dans des dossiers qu’il a gérés pendant qu’il était avocat, que l’on ne connait pas et heureusement secret professionnel oblige pour le moins. Les juges pensent que Me Dupond-Moretti n’est pas blanc-bleu dans d’autres dossiers qu’il a eu à défendre. C’est l’ère du soupçon qui monte jusqu’à un ministre. Alors pour la valetaille attention ! 

                                                 Partira partira pas ?

En attendant d’éventuels jugements publics ou plus de précisions puisque tout est confiné et couvert par le secret -sauf les fuites organisées- des juges poussent les feux, car ils n’ont pas aimé être critiqués même quand c’était légitime, et estiment avoir été maltraités pendant des années par celui qui est devenu leur ministre. On dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. « Vengeance ? » répondent-ils pas le moins du monde simplement application du droit puisque le ministre n’est ni au-dessus ni au-dessous des lois surtout quand il était avocat. A chacun de choisir sa version ! Comme si un avocat même de talent pouvait à lui seul mettre à bas la magistrature qui s’exprime aussi.  La roue tourne pour tout le monde. Des juges se mordent la queue et on ne sait pas bien ce qu’ils veulent : le départ honteux de Me Dupond-Moretti et son remplacement par un ministre que les juges adouberaient partageant leurs visions de la justice. Ou que le ministre se rende à Canossa c’est-à-dire à la rentrée judiciaire de début 2021 à paris c’est moins loin et avoue son crime sinon ses turpitudes de sa vie passée ce qui permettrait ainsi d’avoir un aveu pour le faire démissionner ou pouvoir dire que le grand avocat avait tort et a cédé devant ses juges comme un vulgaire délinquant. Quelle victoire à la Pyrrhus quoiqu’il arrive. Sauf si le ministre persiste et signe, fait la preuve de son innocence alors que les procureurs devraient démontrer sa culpabilité, et que les juges soient renvoyés au fin fond des palais de justice pour qu’ils se contentent de faire leur métier, travaillent vite et bien, ce qui après tout n’est pas une sanction dégradante.

                                                La plainte contre le ministre

  Mieux vaut en rire qu’en pleurer mais je dois dire que cette nouvelle m’a démontré s’il le fallait encore que nous vivions dans une époque étrange où l’on fait n’importe quoi et où l’exemplarité n’a plus de sens. Et l’on s’étonne de vivre en Absurdistan quand nos élites technocratiques- pour notre bien cela va de soi - nous imposent des décisions a priori incohérentes en matière de santé même si je ne sais pas s’il y a des solutions qui n’ont pas d’effets secondaires néfastes pour certains et leurs professions, et que les juges qui doivent être exemplaires et tourner 7 fois leurs codes dans leurs mains s’y mettent aussi.  Ainsi deux syndicats de magistrats ont- ils déposé plainte devant la cour de justice de la république qui est déjà débordée par les plaintes liées à la crise sanitaire, contre leur ministre pour conflit d’intérêts entre autres, M. Dupond-Moretti aurait parait- il mélangé les genres. Quand il était avocat le ministre gérait dans son cabinet dans l’intérêt de ses clients ce qui est la base du métier, des dossiers dits sensibles soit par les problèmes de droit à régler soit en raison de la personnalité de ceux qu’il défendait et des causes qui avaient électrisé le pays. On le sait l’avocat Dupond-Moretti n’a jamais ménagé les juges en général. Le premier syndicat qui a déposé plainte est celui de la magistrature SM qui tire à boulets rouges et conduit à gauche. Le second majoritaire dans la profession est l’USM Union syndicale des magistrats, apolitique, de l’extrême centre technique et corporatiste. Pour que les deux se plaignent il faut un évènement très grave, au moins un crime, et pour un ministre de la haute trahison ou de la forfaiture sinon une question de principe supérieur. Il semble cependant qu’on soit dans une catégorie plus secondaire : de profiter d’être ministre pour régler des difficultés d’avocat ! Mais avant de dénoncer l’autre et de donner des leçons il faut montrer patte blanche, ou main désinfectée au gel hydro alcoolique.

                                            Sur la responsabilité personnelle des juges

 Rappelons que les magistrats sauf cas exceptionnel et faute lourde ne peuvent pas être poursuivis individuellement pour faute professionnelle comme un vulgaire avocat ou membre de n’importe quel métier, encore moins pour les décisions qu’ils prennent car on ne commente pas les jugements sauf techniquement sur le fond du droit, et que ces avantages font partie de leur indépendance et de leur statut bien qu’ils ne soient qu’une autorité et pas un pouvoir depuis la Constitution de 1958. S’ils se trompent - et cela arrive avec des détenus relâchés à raison d’un oubli ou d’un jugement contestable ou d’une appréciation erronée sans compter des jurisprudences dans tous domaines (social, civil …) qui prêtent à polémiques, ou des retards très importants dans le rendu des jugements pour des raisons diverses dont matérielles- l’Etat est poursuivi à leur place, et ils continuent leur carrière. Ce quasi régime d’exonération que les méchants qualifient d’impunité en titille plus d’un, car qui peut se vanter de ne rien craindre judiciairement à l’heure actuelle : personne. Un ancien premier ministre poursuivi pendant la campagne présidentielle de 2017 plus vite que l’éclair par le parquet financier national qui venait d’être créé pour lutter contre la grande délinquance a été condamné à 5 ans dont 2 ans de prison ferme. Il attend l’appel. Un ancien président de la république s’est entendu réclamer par les procureurs qui requièrent au nom du peuple français donc de tout citoyen d’accord ou non, une condamnation de 4 ans deux 2 ans de prison ferme, à égalité avec son avocat à qui on a ajouté 5 ans d’interdiction professionnelle ce qui met fin à sa carrière, et un présumé complice un ancien magistrat avocat général auprès de la cour de cassation pas moins.

                                      Réviser la Constitution : est-ce le moment ?

 Mais il faudrait au moins réviser la constitution si l’on veut modifier le régime de responsabilité des magistrats, sachant que la cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg considère que les procureurs ne sont pas des magistrats comme les autres puisqu’ils sont soumis au pouvoir exécutif. On vit donc une époque « formidable » puisque chacun vit selon ses droits et son statut protecteur ou sa vérité, ou sa vision des obligations de l’autre, voit midi à sa porte, et ne se soucie pas de l’ensemble et de l’image qu’il renvoie. Les syndicats de magistrats qui ont déposé plainte contre M. Dupond-Moretti Garde des Sceaux sont les gardiens de la justice : ils se veulent les gardes du corps de Thémis déesse de la justice, qui on le sait est souvent représentée avec un bandeau sur les yeux et le glaive à la main.

 La justice ne se grandira pas à instruire le ou les faits dénoncés contre le ministre pour savoir s’ils sont ou des délits. Comme avocat je préfèrerai que la justice aille ultra rapidement pour instruire les dossiers de toutes natures des justiciables et pour prendre des décisions exprèsses. Et comme citoyen je souhaiterai que la justice se concentre sur l’Etat de droit, sur les libertés, mais aussi sur la protection du collectif, n’invente pas des interprétations du droit qui ne font pas l’union, ne voit pas racisme et discriminations partout pour complaire aux minorités, et réponde des errements de certains rares magistrats voire fautes quand il y en a puisque personne n’est parfait et ne peut se vanter d’être irréprochable. Les leçons de vivre ensemble ou morale ne sont pas de mon goût. On gausse beaucoup sur les tendances sociétales ou politiques d’une très petite minorité de juges. Redonnons confiance aux justiciables en responsabilisant encore plus les magistrats : ils ne retrouveront leur lustre qu’avec leurs devoirs. Ils ne doivent pas être soupçonnés mais ils ne sont pas propriétaires de la justice, pas plus que les avocats ou l’opinion publique des groupes de pression. Seul le peuple est souverain et la justice est rendue en son nom.  Que les magistrats ne veuillent plus parler avec leur ministre est honteux : les citoyens ont le droit d’avoir une justice qui fonctionne, qui est reformée dans le consensus avec des débats constructifs en interrogeant les praticiens et les utilisateurs, sans qu’il y ait des dissensions au plus haut niveau. La responsabilité c’est de ne pas bouder mais de passer au-dessus de ses propres convictions et d’engager un dialogue même viril.

                                        Le match magistrats-ministre  

Revenons à nos moutons le match magistrats syndicalistes contre leur ministre. Belle affiche.  Depuis sa nomination pour ses qualités selon le président de la république et malgré ses défauts selon les magistrats, le ministre de la justice est conspué par les juges. Dans ce milieu fermé - il dit entre-soi ce qui n’est pas apprécié ! -on ne l’aime pas, et il le sait. On le somme de choisir entre prévention et répression alors que les deux sont nécessaires comme sécurité et libertés vont de pair.  Chez les citoyens il est un ténor du barreau et on compte sur lui pour mettre de l’ordre dans la maison place Vendôme, faire collaborer efficacement les uns et les autres en leur donnant des moyens matériels et humains, et en valorisant les juges essentiels dans un Etat de droit. Il ne s’agit pas de transformer la belle endormie en une pin- up moderne dont on se gargarise de sa beauté et des grands principes qu’elle porte fièrement. Mais elle doit être respectée, performante, protectrice des libertés et du collectif. Elle doit permettre de restaurer l’autorité tout en restant humaine avec ceux qui ont fauté. Tout ceci est possible mais il faut y croire et ne pas entraver l’action du ministre, même s’il doit répondre de ses responsabilités comme tout un chacun. Le risque potentiel voire structurel de ne pas répondre à la justice appartient au passé. Nul n’en est exempt.    

On est dans le paradoxe. A peine élu M. Macron avait voulu supprimer la Cour de justice de la république à la composition atypique de juristes et de politiques. Le congrès que l’on a réuni à Versailles avait refusé. Et cette cour n’a jamais eu autant de travail en 2020 et pour 2021.  

                                      La Cour de justice de la République

Des juges professionnels toute affaire cessante également parties selon la plainte, comme des parlementaires qui sont le pouvoir législatif aussi juges et parties puisqu’un ministre c’est un justiciable comme un autre qui doit répondre de ses actes mais c’est en même temps le pouvoir exécutif, vont dire si les faits sont avérés ou non après examen de la recevabilité de la requête. Déjà l’association anti-cor qui lutte contre la corruption avait saisi la justice ainsi qu’un militant écologiste. Le ministre avait cédé son cabinet d’avocat en hâte, avait répondu aux questions de la haute autorité sur la transparence de la vie publique notamment sur d’éventuels conflits d’intérêt, avait transféré lentement- c’est un des reproches constitutifs du présumé délit- au 1er ministre son pouvoir légal de connaitre comme ministre les remontées d’information de ses parquets sur ses dossiers, rien n’y a fait. Les réformes qu’il a initiées que l’on approuve ou non et qui sont en cours de discussion avec un budget très augmenté pour le ministère ne sont pas des circonstances atténuantes. Des syndicalistes magistrats veulent la peau du ministre. C’est grave et je dénonce la méthode, pas le ministre qui n’a pas besoin d’être assisté, il sait se défendre très bien.  Le droit est fait par les parlementaires élus, légitimes, et les magistrats doivent l’appliquer. Ils n’ont pas à choisir leur ministre. Personne ne détient la vérité.  Elle est la propriété du peuple souverain au nom de qui elle est rendue. 

                                          Pour quel profit ? 

Cette plainte contre le ministre ne va pas améliorer l’opinion du quidam sur la justice. Si les élites se battent entre elles, gare au justiciable de base. Au secours Thémis et Montesquieu réunis, ils sont devenus fous. Notre Etat de droit est fondamental par ces temps troublés et dangereux. Accrocher un ministre sur leurs robes noires ou d’hermines ne sera pas pour nos juges une décoration flatteuse. Qu’ils ne se perdent pas dans des querelles d’allemand s’ils veulent retrouver la confiance des citoyens. Qu’ils soient assidus dans les prétoires ce sera déjà une victoire et qu’ils s’interrogent sur eux- mêmes : n’ont-ils pas aussi des progrès à faire ? 

 

mardi 15 décembre 2020

justice impitoyable pour certains

 

                       Justice impitoyable pour certains ?

                      Par Christian Fremaux avocat honoraire.

 

Tout le monde a un avis sur tout même celui qui n’y connait rien surtout en matière de justice où la nuance devrait être la règle. On subit les commentaires et parfois on n’en croit pas ses oreilles. Chacun se met à la place de celui qui doit prendre ses responsabilités et donne un avis péremptoire sans avoir accès au dossier. On prend pour argent comptant le compte rendu que l’on lit dans la presse ou ce que l’on entend dans les médias alors que souvent le journaliste croit faire son travail mais n’était pas sur place, ou est partisan, ou n’a pas vraiment compris le débat de fond. Il est resté à la superficie des faits, au people, au spectaculaire, au scoop qu’il recherche, à l’émotion, éléments qu’il confond avec la recherche de la vérité judiciaire en particulier. Et quand un puissant comparait devant ses juges comme s’il allait à Canossa, c’est pain bénit. Tous ceux qui n’osaient hausser la voix sonnent l’hallali.

                                        Une société exigeante et énervée.

 Je vais donc être un peu excessif, partial et corporatiste cela me fait un bien fou par ces temps post coloniaux orientés et lacrymaux voire exonératoires selon ce que tu es et d’où tu viens. Je résiste comme le vieux nostalgique presque geek par force que je suis dans cette magnifique période où l’on nous parle des droits de l’homme pour tout et rien, des minorités agissantes qu’il faut saluer même si leurs combats sont antinomiques avec les intérêts de la société globale, des discriminations et du racisme qui seraient institutionnels et devant lesquels il faut se mettre à genoux pour s’excuser.  On devrait se réjouir de ces années dites humanistes où les policiers et gendarmes sont mis en cause et accablés de tous les maux, poursuivis et sanctionnés durement  quand ils ont commis une faute déontologique ou un  délit,  alors que leur agresseur  a un  simple rappel à la loi le plus souvent ; où l’on n’incarcère plus personne puisque les prisons sont pleines et que la détention conduit à de la radicalisation ; où la victime s’est trouvée de sa faute à un mauvais endroit à un mauvais moment ; où le droit sert à réparer les injustices de la vie sociale ou de la couleur de peau ; où l’autorité dans la rue, à l’école ou ailleurs est forcément le début de la dictature ; où la moindre remarque est considérée comme une odieuse  attaque et où l’on est prié d’accueillir qui décide à l’insu de son plein gré sous des justifications fantaisistes sauf les vrais réfugiés politiques de venir en France et bénéficier de nos aides sans contrepartie et sans dire merci, sous peine d’être traité comme un égoïste, donc un moins que rien qui ne connait pas la fraternité. Chacun aura son exemple qu’il vit ou connait de près.

                                            On est contre tout.

 Le discours dominant est anti fa. , anti -capitaliste, anti- démocratie libérale, anti- ordre public, décroissant si possible car la nature et les animaux seraient plus précieux que les hommes-femmes,  et il  faut privilégier  les libertés individuelles de ceux  qui n’ont pas à se soucier des autres dont la majorité qui respecte les lois et paie ou cotise. Dont acte mais on n’est pas obligé de partager ce discours peu citoyen et contraire aux valeurs universelles républicaines qui ne fait pas l’union. L’air du temps est d’être cool. Gramsci avait raison : la révolution et la mise à bas des démocraties et de leurs institutions commencent par gagner la guerre des esprits pour créer les conditions du changement en dénigrant tout et en relativisant ce qui est sombre. Nos beaux esprits participent à cette désagrégation, a priori sans le vouloir on l’espère. Mais il ne s’agit que d’une bataille et il appartient aux républicains et aux gens de bonne volonté de reconquérir le terrain car rien n’est inéluctable et à force de tirer sur la corde elle casse. J’avais prévenu que je serai peu dans la nuance alors que moi aussi je m’estime humaniste et n’aie aucune leçon à recevoir.  C’est fait !

                                                   Sur la justice

 Heureusement la justice est sévère envers certains. Le tribunal judiciaire de paris nouvellement installé après des débats qui remontent à M.Sarkozy quand il était président de la république et qui siège aux Batignolles dans le 17ème arrondissement est un magnifique bâtiment de verre, transparent , élancé vers le ciel comme une cathédrale si le rapprochement spirituel- profane ( juridique) est recevable ? Mais les juridictions statuant au nom du peuple français qui incarne la souveraineté pourquoi pas ? M.Giscard d’Estaing a eu le centre Pompidou-Beaubourg ; M.Mitterrand la pyramide du louvre ; et  M.Sarkozy a le tribunal ce qu’il regrette  peut être  compte tenu  des procès qu’il doit affronter ? Mais je m’égare. Le tribunal judiciaire s’est- t- il transformé en règlements de comptes à OK.Corral où l’on flingue  à coup de réquisitoires et de jugements  et où il faut un cadavre virtuel ou au moins des grands blessés pour que la justice passe ? Je suis scié comme on dit chez les menuisiers ou scotché selon les jeunes à la suite du procès de M.Sarkozy, de son avocat et d’un présumé complice un haut magistrat de la cour de cassation pas moins,  à la suite des réquisitions du parquet national financier PNF  existant depuis 2013 pour lutter contre la grande délinquance, prononcées à leur encontre : 4 ans dont 2 de prison  ferme pour chacun  en y ajoutant 5 ans d’interdiction professionnelle pour l’avocat ce qui signifie sa mort professionnelle. Je vous prie de croire en ma modeste expérience d’avocat plaidant depuis des décennies. Pour condamner quelqu’un à 4 ans dont 2 de prison ferme il faut quasi un crime voire un délit aggravé constitué avec une ou des victimes, des préjudices établis, des preuves irréfutables, et un délinquant qui a un passé déjà très chargé. Pour comparaison les premiers terroristes avérés jugés avec une législation moins répressive à l’époque -qui seront libérés prochainement – ont eu des peines de quelques années fermes.  Avec le passage au ministère de la justice de Mme Taubira les juges ont été enclins à la modération.  On se rappelle que M.Fillon  – avec l’enquête la plus rapide de France  pendant la campagne présidentielle de 2017 déjà du parquet financier national- a été condamné à 5 ans de prison  dont 2 de prison ferme outre de considérables dommages-intérêts sur constitution de partie civile de l’assemblée nationale.  Il prépare son appel car il s’estime innocent et veut que les juges correctionnels prennent une veste - si j’ose persifler - devant la cour d’appel.

                                                       Un rapport ?

Quel est le rapport entre M.Fillon et M.Sarkozy en leur qualité de justiciables naturellement , même si le jugement  que l’on ne peut prédire  car les juges  peuvent surprendre, sera rendu en mars 2021 pour l’ancien chef de l’Etat - garant à l’époque des institutions dont celle de la justice ? Ce sont les 2 ans fermes et pourquoi ? Parce que les procureurs appliquent le « en même temps » prévu par le code pénal qui consiste pour faire plaisir à l’opinion publique à réclamer de la prison ferme contre des puissants contemporains ou anciens ou supposés tels, et de savoir qu’en réalité la loi applicable aux faits reprochés aux prévenus qui datent de quelques années, n’entraine pas à 2 ans et au-dessous une incarcération. La loi obligeait à une mesure alternative comme un travail d’intérêt général, le port d’un bracelet électronique, les jours amende, un stage de citoyenneté, la surveillance électronique… Imagine-t-on le général de Gaulle porter à sa retraite politique un bracelet électronique ou travailler pour une association d’anciens dealers ou repentis de toute nature ou ramasser des feuilles mortes au fin fond d’une commune obscure ?

 La loi du 23 mars 2019 a revu ces dispositions pour les durcir notamment pour abaisser le seuil des 2 ans à 1 an. A partir de cette peine l’incarcération est effective. Attention donc pour les futurs politiques qui risquent la prison depuis le 24 mars 2020. Encore faut -il que l’intendance suive c’est à dire qu’il y ait des places de prison. Et sachant que les juges sont encouragés à aménager les peines par des mesures alternatives.

           « Selon que vous serez puissant ou misérable » (Jean de la Fontaine).   

Je ne me prononce pas sur le fond des dossiers que je n’ai évidemment pas lu comme les journalistes sauf s’ils bénéficient de la violation du secret de l’instruction ou professionnel, mais qui sont couverts par le principe de droit de la protection de leurs sources. Et chaque partie divulgue ce qui peut lui servir tant pour l’accusation que pour la défense, ne soyons pas naïfs. M.Fillon a des avocats de talent et j’espère qu’il sera relaxé. Mais j’admets que l’on peut être indigné par ce qui est reproché aux politiques et que l’on souhaite au nom de l’égalité devant la loi qu’ils soient jugés comme n’importe quel justiciable,et que les peines soient plus sévères car ayant eu tout ils doivent donner l’exemple.

                       Ne pas être impartial ça fait du bien !

 Je vais désormais être partial car le dossier de M.Paul Bismuth alias N.Sarkozy  ou  le contraire m’a choqué. Il repose sur une enquête préliminaire « secrète »   du parquet financier national pendant des années où les plus célèbres avocats pénalistes- dont Me Dupond-Moretti actuel garde des sceaux- gravitant autour de l’avocat de M.Sarkozy ont été écoutés pour savoir qui était une taupe auprès de la cour de cassation ! (Sic). Personne n’a été identifié, des hauts magistrats ont été interrogés pour un résultat nul en violant de mon point de vue tout ce qui est la base de la justice pénale : des enquêtes contradictoires, le respect absolu du secret professionnel de l’avocat ; des écoutes réglementées et contrôlées ; la preuve par l’accusation que les faits sont établis et constituent des infractions ; la présomption d’innocence… Je connais bien l’avocat historique de M.Sarkozy : nous avons débuté presque ensemble et nous nous sommes croisés dans des affaires. Il était au cabinet du très grand pénaliste Me J.L. Pelletier et j’étais collaborateur auprès de l’illustre Me J.L. Tixier-Vignancour. Il a un grand talent outre une expérience professionnelle exemplaire. Il s’est contenté de défendre un client qui était son ami ce n’est pas interdit et qui a eu la malchance- pour des juges- d’être un président de la république qui a quelque peu bousculé les magistrats. Je crois comme l’a dit aussi M.Sarkozy à l’audience en la justice de mon pays qui est le symbole de l’Etat de droit et qui remplit une fonction  indispensable pour trancher les litiges et pour punir ceux qui le méritent. La sanction n’est pas pour moi un gros mot. L’indulgence non plus quand elle est justifiée. Relaxer ou acquitter n’est pas un désaveu : c’est la simple prise d’acte que les infractions ne sont pas constituées ou qu’il y a un doute qui doit toujours profiter à celui qui est accusé. Le légal doit être juste et la qualité d’ancien chef de l’Etat n’est pas une circonstance aggravante. La justice qui ne se confond pas avec la morale ou l’analyse du comportement des autres que l’on n’aime pas -moi je n’aurai pas fait cela- doit être impitoyable mais seulement avec ceux qui sont des délinquants avérés, des menaces pour l’ordre public, des dangers pour la population. Elle doit aussi être exemplaire et ne pas dresser des murs qui lui ont fait honte.

                                       Ce que les juges ne font pas.

 Les procureurs ont dit à l’audience que la justice n’est pas la vengeance. Bravo on y croit mais parfois on s’interroge. Elle n’est pas là non plus pour couvrir les erreurs ou les initiatives curieuses de collègues.  On l’espère et on sait surtout que la responsabilité individuelle des magistrats ne peut être engagée sauf faute lourde, et c’est l’Etat qui assume. Pourtant le pendant de l’indépendance revendiquée à juste titre et à haute voix en demandant l’intervention du président de la république quand il y a un fait divers qui pose problèmes (par exemple un détenu libéré qui récidive) devrait être la responsabilité personnelle.  Qui ne répond pas de ses actes à notre période : qui bénéficie de l’impunité ? Personne. Pour ma part au lieu de la discussion sans fin sur l’indépendance non discutée pour les magistrats du siège mais contestée pour ceux du parquet avec la Cour Européenne des droits de l’homme à Strasbourg, et un homme ou une femme ayant leurs qualités et leurs défauts, je préfère les termes d’impartialité et d’objectivité. Et je fais confiance dans le lien juges-avocats qui reste à conforter. 

 Au-delà de la ligne téléphonique ouverte par au plus usurpation d’identité, mais il n’y a pas de plainte et tout ceci est petit, je ne me prononce pas sur ce qui est principalement reproché au fond à M.Sarkozy et ses co-prévenus à savoir un pacte de corruption. Je retiens des commentaires extérieurs au tribunal qu’il n’est pas prouvé, que le magistrat n’a pas été nommé à Monaco, que l’avocat est resté avocat, et que M.Sarkozy n’a bénéficié de rien judiciairement parlant ?   Le tribunal se prononcera et il sera d’autant plus indépendant qu’il ne suivra pas les réquisitions.

Mais je demande aux procureurs de la république en général qui me représentent puisqu’ils portent l’accusation au nom du peuple français donc de moi simple citoyen, de ne pas vouloir satisfaire l’opinion publique ou une minorité agissante en frappant fort, très ou trop fort pour marquer les esprits et montrer qu’ils n’ont peur de personne.  Ils se discréditent et vont obtenir l’effet inverse de ce qu’ils recherchent.  

La justice ne peut être à géométrie variable. C’est sa grandeur.  

jeudi 10 décembre 2020

Vous avez dit indépendance?

 

                    Vous avez dit indépendance ?

                Par christian fremaux avocat honoraire.

Dès qu’une émotion submerge les esprits et actuellement c’est le cas pour tout sujet avant même de savoir si les faits sont réels car on se fie à ce qui est montré et parfois déformé ou partiel sans connaitre ce qui s’est passé avant l’extrait choisi et pourquoi, on crie au scandale, et les médias font de l’information continue avec des prétendus experts qui n’étaient pas sur place mais qui expliquent ce qu’ils ne savent pas n’ayant pas accès au dossier d’ailleurs pas encore constitué. Cela n’empêche personne d’exiger des sanctions immédiates ou une enquête dans telles ou telles conditions, et de contester tout et son contraire. Le tribunal médiatique siège jours et nuits, sans avocats mais avec des procureurs et la reconstitution se fait en direct en studio avec décors et sans faits contradictoirement débattus. Le scoop vaut jugement. La bonne conscience et l’empathie sont raison et il est réclamé la création de n’importe quoi qui serait indépendant. Indépendant de quoi et de qui c’est la question.

 Ainsi dans l’arrestation musclée et filmée choquante a priori à la seule vue des images du producteur Michel Zecler dont le juge pénal est déjà saisi ! ( au passage notons que  les ardents défenseurs de la vie privée ne critiquent pas  les caméras de vidéoprotection quand elles vont dans le bon sens c’est -à -dire contre ce qui est l’autorité) , on s’indigne que l’IGPN l’inspection générale de la police nationale composée d’officiers de police judiciaire notamment soit chargée de l’enquête, car on la soupçonne d’office de partialité et de complaisance envers les fonctionnaires de police qui pensent le contraire au vu des nombreuses sanctions prononcées contre eux, et on demande à sa place de créer ce qui serait une autorité ou commission administrative indépendante composée de personnalités neutres, de magistrats, peut- être d’avocats ?, de quelques policiers mais ce n’est pas sûr et de citoyens surtout, comme si le fait d’être un simple quidam était un gage de compétences et de bon sens, sans rien connaitre au métier considéré, au maintien de l’ordre, et à la sureté en général. On veut des personnes honnêtes dans tous les sens du terme, non partisanes, transparentes pour tout ce qui les concerne, sans passé discutable, sans aucun conflit d’intérêts, et qu’ils soient savants. Bonjour aux candidats qui cochent toutes les cases. On cherche les oiseaux rares voire inexistants car les hommes comme les femmes ont leurs qualités et défauts. Et s’ils rendent une décision d’exonération alors que l’on attend une confirmation de la culpabilité que se passera- t -il ? C’est vrai que l’on a bien tiré au sort 150 individus venant de nulle part pour la convention citoyenne sur le climat et que le président de la république avait dit qu’il reprendrait leurs conclusions- sauf 3 -sans filtre. II a changé d’avis et est maintenant empêtré : l’exécutif ne sait plus comment sortir du piège qu’il a construit innocemment pour être transparent et participatif.

Après des décennies de barreau je crois savoir ce qu’est être indépendant, surtout dans cette période de confinement où on aide à juste titre les salariés et les entreprises, mais où les professions libérales doivent se débrouiller et continuer à se battre quasiment seules. Pour avoir la joie de ne rendre de comptes à personne on a l’indépendance qui est la rançon de la liberté et de la responsabilité personnelle. On assume le bon comme le mauvais à savoir ses erreurs ou ses fautes. Qu’en est -il pour une commission administrative indépendante, quelles légitimité et liberté a-t-elle dans ses rapports à l’Etat ? et que fait -on si ses conclusions sont contestables ?

  G.Clémenceau disait que lorsque on veut enterrer un problème on nomme une commission. Le général de Gaulle parlait de machin pour des institutions internationales comme l’Onu et était pour la suppression des comités dits Théodule peu utiles à ses yeux et qui devaient servir à compléter voire démembrer la politique publique. Rien n ‘y a fait la technostructure renaissant toujours de ses cendres comme le phénix. 

 Le terme autorité administrative indépendante (AAI) a été utilisé pour la première fois par la loi du 6 janvier 1978 avec la création de la CNIL commission nationale informatique et libertés. Ce terme a été consacré le 26 juillet 1984 par la jurisprudence du conseil constitutionnel. La loi du 20 janvier 2017 a fixé une liste - un peu à la Prévert - de 25 autorités ou commissions  administratives indépendantes ( comme  CSA pour l’audiovisuel ;  AMF pour les marchés financiers  ; AFLD contre le dopage ; Autorité de la concurrence ; CADA pour l’accès aux documents administratifs ; HATVP pour la transparence de la vie publique…).Selon le Conseil d’Etat ce sont des organismes administratifs qui agissent au nom de l’Etat et disposent d’un réel pouvoir, sans pour autant relever de l’autorité de l’Etat. Bien sûr ils ont une organisation, un siège social, des collaborateurs et un budget. Pour garantir leur indépendance on les a placés sous la protection du parlement  qui garde lui, ses systèmes internes d’enquête bien connus.

Les AAI sont contestées car elles sont nombreuses malgré des regroupements comme avec la création du Défenseur des droits (M. Jacques Toubon a été nommé en 2014 et vient de quitter ses fonctions) qui a absorbé divers domaines comme celui du médiateur de la république et qui est prévu à l’article 71-1 de la Constitution. Il veille au respect des libertés. Il peut intervenir en matière de déontologie des forces de l’ordre. Faut-il donc inventer une nouvelle commission administrative indépendante à la place de l’IGPN entre autres en appliquant le principe de la destruction créatrice de Schumpeter ? Je ne crois pas. Les députés Dosière et Vanneste avaient rendu un rapport en 2010 conseillant de rationaliser les commissions pour qu’il y en ait moins.

 Les AAI sont aussi décriées car on pense qu’elles participent à un démembrement de l’Etat qui perd ainsi de son pouvoir régalien alors qu’il parait nécessaire au contraire qu’il renforce son autorité. On peut en effet s’interroger sur le fait de confier à une structure administrative ex-nihilo dédiée un pouvoir d’actions et de sanctions - sous le contrôle du juge - ou de formuler un avis voire de prendre place à un procès en accompagnant telle victime ou supposée avoir cette qualité souvent dans des affaires très sensibles qui sont discutées,  donc à des entités sui generis qui ne détiennent aucune légitimité démocratique ni électorale ni technique incontestable et qui ne tiennent leurs prérogatives que d’une nomination du seigneur de l’instant. Bien sûr les personnes choisies ne sont pas en cause. La méthode est paradoxale alors que pour la justice on discute à longueur de temps surtout quand des personnalités politiques de 1er plan -c’est l’actualité-ou connues répondent de leurs actes comme tout citoyen ni au -dessus ni au -dessous des lois. La justice est une autorité -et non un pouvoir- dans la Constitution de 1958 approuvée formellement par le peuple.  Aucun gouvernement de gauche comme de droite ou d’ailleurs n’a jamais voulu changer cette disposition, même si on estime que dans l’Etat de droit les magistrats doivent jouer un rôle essentiel. De là à en faire un pouvoir, soyons prudents pense-t-on ! Les juges du siège sont indépendants. Ils appliquent la loi et décident en conscience qu’on le déplore ou l’approuve. Il y a débat pour les membres du parquet, actuellement pour ceux du parquet national financier eux qui portent l’accusation pour la société. Les procureurs ne sont pas considérés par la Cour Européenne des droits de l’homme de Strasbourg comme des juges indépendants puisqu’ils dépendent du ministre de la justice qui lui fait partie du pouvoir exécutif. Et on se pose des questions sur l’indépendance ou plutôt sur l’impartialité et l’objectivité car chaque citoyen donc chaque juge, procureur, avocat, ou membre d’une AAI a le droit d’avoir des convictions et faire des choix politiques.

Croire qu’en créant une commission administrative l’indépendance suivra et qu’il n’y aura pas de contradictions ou d’indignations du peuple ou des minorités qui veulent avoir raison et poursuivent d’autres buts que celui de l’objectivité, est une erreur et pour le moins de la naïveté ou de la démagogie. En outre en général les personnalités fortes n’arrivent pas là où on les attend et ne concluent pas forcément dans le sens souhaité.  Je me méfie de la France des auto-proclamés experts ou sachants, des grands témoins voire désormais de quidams de tout genre et de toute confession pour ne pas discriminer, qui représenteraient l’innocence incarnée, le bon sens presque la vérité, et qui ont l’opportunité de choisir ce qu’ils veulent puisqu’ils n’ont aucune responsabilité personnelle de droit. Ils peuvent se tromper avec panache en invoquant les grands principes. Ressaisissons-nous et remettons chacun à sa place en étant pragmatique.  

Laissons les inspections de contrôle qui existent jouer leurs rôles puisque de toutes façons la justice peut être saisie par celui ou celle qui n’est pas d’accord, et que l’ambiance actuelle où tout doit être transparent jusqu’à l’intime ce que je regrette, permet de tout savoir. L’indépendance est l’état de quelqu’un qui n’est tributaire de personne sur le plan matériel, moral, intellectuel, ni de l’opinion ni de l’Etat même si celui-ci l’a nommé. Il doit passer au -dessus de ses propres inclinations pour trouver l’intérêt général.  Quel défi. C’est la plus difficile des missions.  L’indépendance n’est pas un cadeau surprise, même à Noël.