mardi 3 avril 2018

SUR L'ESPRIT FRANÇAIS DE RÉSISTANCE


                       Sur l’esprit français de résistance.
             Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
Je réapparais depuis mon dernier article écrit il y a plusieurs semaines. J’étais pris professionnellement  puis  je suis parti en Russie avec des universitaires, des experts,  des diplomates et des parlementaires français, comme observateur international à l’occasion de l’élection présidentielle du 18 Mars 2018. Nous avons retrouvé sur place d’autres observateurs de nombreuses nationalités différentes, envoyés par les organisations inter nationales  ou des ONG s’intéressant à la sincérité du scrutin. On connait le résultat : M.Poutine a été réélu. Je n’ai pas à commenter. J’avais été affecté à des milliers de kilomètres de Moscou, dans une métropole de plus d’un million d’habitants, située dans l’Oural du sud, aux portes de la Sibérie. J’ai  parcouru, un peu, la steppe enneigée et parfois glaciale. Nous avons rencontré des électeurs voulant voter et contents d’exercer ce droit élémentaire, vraie première élection libre selon eux, sans que nous soyons dupes des imperfections  voire d’irrégularités qui affectent aussi d’ailleurs des pays habitués à l’état de droit, nul n’étant parfait, ce qui n’excuse rien. La démocratie selon nos critères à nous, s’apprend. Je suis revenu non pas comme Ulysse qui est un héros mythologique, ni comme  celui  qui conquit la toison, je reste lucide, pour reprendre le cours ordinaire de ma vie. Et je renoue avec les commentaires franco-français à la suite des attentats de Trèbes commis par le même homme…et qui m’ont  choqué comme tout le monde. On ne peut s’habituer à la barbarie.

Le président de la république en rendant mercredi 28 Mars un hommage national au colonel de gendarmerie- Arnaud Beltrame défini  à juste titre comme un héros qui s’est sacrifié-on l’a égorgé  semble- t- il ce qui est significatif -  pour sauver la vie d’une otage , a évoqué l’esprit français de résistance, avec  raison. Ce militaire ne doit être récupéré par personne. Il appartient à sa famille et à la nation tout entière.   Il n’y a pas naturellement  que les français qui ont résisté au cours des ans et qui ont le monopole de ne jamais céder .Winston Churchill avait promis au peuple anglais du sang, du labeur, des larmes et de la sueur le 13 Mai 1940. D’autres peuples ont résisté à l’invasion, aux tyrans de toute nature, ont fait tomber les murs , détruit les camps et se sont libérés en espérant vivre mieux dans la paix, ce qui est parfois difficile à obtenir  on le voit actuellement dans beaucoup de pays en guerre civile ou de conquête. Mais les français qui portent des valeurs universelles ont beaucoup donné au cours des siècles pour la résistance à l’oppression , pour les libertés en général  et pour montrer l’exemple :  il y a ainsi un esprit français -qui n’est pas du chauvinisme ou du narcissisme- qui est fait de nos qualités collectives voire de nos défauts, de notre culture, du sens de nos devoirs envers les autres et du message d’harmonie, de cartésianisme et de fraternité à délivrer. France Gall chantait « résiste, prouve que tu existes, cherche ton bonheur partout , refuse ce monde égoïste ». C’est beau mais très individuel.  Il faut que chacun d’entre nous à son niveau de moyens et là où il se trouve, assume ses devoirs et ne revendique pas que des droits, participe à la revitalisation et à l’ambition de la nation, sans se laisser séduire par des sirènes qui nagent dans des eaux troubles et n’abordent dans aucun port, et conforte les valeurs républicaines traditionnelles ou rénovées puisqu’il semble que tout le monde ne les partage pas ou ne les comprend pas de la même façon. Les principes ne sont pas intangibles , et ils ne sont pas toujours figés dans le marbre : il est possible de les revisiter en les appliquant cependant. Personne n’est infaillible : « Pour grands que soient les rois ils sont ce que nous sommes : ils peuvent se tromper comme tous les autres hommes »(Corneille).
Il ne s’agit pas pour le quidam de devenir héroïque. Personnellement je n’en ai ni l’étoffe ni l’ambition ne sachant pas d’ailleurs dans quel domaine exceptionnel je pourrai y parvenir : il me faudrait un évènement inattendu où je me dépasserai malgré moi, à mon insu. Le colonel Beltrame a agi volontairement, après une prise de décision ultra rapide, en ayant  pesé ses risques, mais en décidant  que c’était son devoir en conscience. Fermez le ban et képi bas.   Il aurait pu s’abstenir, diriger l’assaut et se protéger personne ne lui en aurait voulu. Le sacrifice n’est pas encore inclus dans les obligations du militaire ni dans sa déontologie. Mais il l’est dans ses gênes, dans son choix de servir, dans sa volonté de défendre une cause qui le dépasse. On devrait s’en souvenir en permanence pour tous ceux (y compris pompiers, infirmiers, médecins) qui ont fait le choix de notre sécurité et qui parfois sont attaqués quand ils viennent dans des cités ou ailleurs pour exercer leurs missions. Les français doivent être cohérents. Ils ne peuvent porter aux nues les forces de l’ordre à la suite d’attentats contre Charlie ou au bataclan, et dans le même temps voir des bavures partout lors d’interventions  difficiles contre des « petits jeunes » mais anciens et actuels délinquants -sauf infractions avérées car personne n’est au- dessus des lois, ni en dessous d’ailleurs- et toujours choisir le voleur contre le gendarme comme à guignol. Cela ne fait plus rire.
La résistance nous renvoie automatiquement aux figures légendaires des siècles passés et plus près de nous du général de Gaulle, de pierre Brossolette et jean Moulin, du  commando Kieffer et de  tous ceux anonymes qui ont donné leurs vies pour que nous vivions libres .Des héros inconnus comme le soldat sous l’arc de triomphe.  Le président  a cité aussi Jeanne d’Arc qui a réussi car elle ne savait pas que c’était impossible.
Tous avaient une certaine idée de la France.
Certes résister à l’agresseur ou à ceux qui nous menacent , qui ne respectent pas la vie des autres ni la leur au passage ou les libertés pour imposer leurs croyances et certitudes et qui ont décidé froidement de tuer le plus de monde possible,   est un devoir absolu. Mais encore faut- il en avoir l’abnégation, la dimension et le courage.  Il faut admettre que tout le monde n’est ni doué ni enclin à agir, et que le confort personnel permet de commenter de loin.  Pourtant la sécurité est l’affaire de tous. L’Etat ne peut mettre des policiers et gendarmes partout ; personne ne peut deviner même pas les spécialistes des mentalités  ou des psychologies complexes sauf à être des pythies,  le moment du passage à l’acte de quelqu’un qui dissimule ses intentions, ses idées , qui manipule les proches et les autorités, qui se prépare et attend un ordre ou décide tel jour d’aller au combat dans l’extase de son délire. Nous devons donc être collectivement convaincus  que notre sécurité nous appartient, que l’on ne doit pas constamment exiger ce qui nous plait, que nous avons un devoir de modération, que les responsables politiques, syndicaux ou médiatiques ne doivent pas tout monter en épingle ou dire non systématiquement à toute proposition,  et que de notre union qui n’exclut ni désaccord ni « lutte » pour ses droits dépend notre protection. Nos agresseurs ont identifié depuis longtemps la faiblesse des démocraties et des peuples qui aiment contester, être contre tout et son contraire, qui respectent le droit et les libertés. Il ne faut pas en rajouter par des polémiques stériles, politiciennes ou idéologiques. Il faut se dominer et agir tant à titre préventif qu’après coup sans rajouter de la loi aux lois, même si parfois elle est nécessaire.
L’indignation c’est bien mais après. Que signifie résister à notre époque ?
 On a connu la terreur de 1793 à thermidor an II en 1794, et les attentats à Paris à la fin du 19ème siècle par exemple. Les plus anciens dont je suis se rappellent ce que leurs parents et grands parents leur ont dit en l’ayant entendu de leurs parents avec les conflits dans la première moitié du  20ème siècle, puis l’ont  vécu avec  le nazisme et la shoah ; le communisme et le goulag ; les guerres de décolonisation ou les « évènements » sur des territoires extérieurs à la métropole ; les insurrections diverses  et les guerres civiles ; ou pour ceux qui sont des anciens plus jeunes,  les boat- people qui fuyaient le Vietnam, les khmers rouges au Cambodge, ( liste non exhaustive) ,et des réfugiés et des victimes de toute  nature.  Résister avait une signification claire. On luttait pour sa vie, pour celle du voisin, pour la survie d’une communauté, pour la nation, pour continuer à exister collectivement. Actuellement nous luttons sur des territoires extérieurs, nous nous associons à des libérations, nous participons à rétablir la paix. Nous ne voulons asservir personne, conquérir aucun Etat ou imposer par la force nos lois et valeurs. Nous voulons vivre libres selon nos choix.  Notre ennemi identifié -que nous partageons avec d’autres pays- est le terrorisme, qui est un moyen  pour implanter une idéologie l’islamisation radicale -ou aussi  islamisme souterrain puisqu’il n’apparait pas officiellement, n’a ni chef ni revendications précises à formuler et qui utilise des citoyens français nos compatriotes pour nous  détruire,  car ils estiment que leur échec ou leur mal être est de notre faute, de celle de  notre société  injuste et prétendue  islamophobe qui les exclurait et qui ne les respecte  pas, ou qui ont d’autres raisons  personnelles. Mais qui ont utilisé et profité de nos structures, qui ont étudié dans nos écoles, et qui ont bénéficié de nos règles de droit et valeurs républicaines, des avantages sociaux. Islamisation radicale qui veut gouverner par  la charia, la religion se confondant avec l’état séculier. On ne peut que se défendre, résister. On ne peut « dialoguer » par définition et principe avec celui ou ceux qui ont décidé de nous tuer.  Essayer de comprendre est déjà pris comme un recul. Résister c’est ne pas céder , ne pas s’altérer sous l’effet de la peur, du chantage ou pour d’autre motif honorable. On joue notre peau et ce que nous sommes collectivement. C’est plus facile à dire qu’à faire car  l’islamisme radical ne connait que la force on le voit , et envoie à la mort ses soldats réels ou prétendus. On ne discute pas avec un tel ennemi on le combat et tous nous devons soutenir les pouvoirs publics, même si des divergences sont légitimes sur les meilleurs moyens à retenir y compris les  règles de droit à utiliser (voir le débat sur les fichés S).  
On peut s’interroger pour savoir pourquoi depuis tant d’années on a laissé des quartiers  être gérés par des grands frères ou être mis en coupe réglée par des bandes de délinquants  et de trafiquants de drogue.  Nous avons une responsabilité collective à avoir abandonné les services publics y compris dans les zones rurales au prétexte d’économies, de rationalisation pour acheter la paix sociale ou pour éviter des émeutes dans les banlieues ou ailleurs sous des prétextes fumeux . Quand il n’y a plus de rapports humains , que l’ordinateur ou la machine  les remplace, la société se déshumanise  et les conséquences suivent.  On connait portant la réalité  depuis des années et les rapports s’amoncèlent de spécialistes qui ont enquêté sur place comme le professeur gilles Kepel ou georges Bensoussan et son livre sur les territoires perdus de la république. Les politiques pour des raisons diverses et toutes tendances confondues ont manqué de courage.  Comment a-t-on pu tolérer que des policiers ou des gendarmes soient caillassés voire pire quand ils veulent intervenir dans certains lieux et contre des voyous, que les pompiers, médecins  ou infirmiers qui portent secours soient maltraités  par certains ? On a vu  pour l’attentat de Trèbes que les journalistes de la télévision qui voulaient  filmer l’intérieur de l’immeuble où habitait le terroriste, s’étaient fait rejeter violemment par des habitants criant « dehors  vous n’avez rien à faire chez nous ». Les médias vont -ils réfléchir à cette leçon ? ! A force de voir des bavures policières partout quelque soit la cause  de l’intervention (voir l’évolution du dossier Théo et attendons  l’évacuation de la ZAD de notre Dame des landes où l’Etat joue son autorité) ) et sauf infraction avérée la police ayant droit aussi à la présomption d’innocence et le port de l’uniforme n’étant pas une provocation, on crée un climat délétère qui favorise ceux qui passent à l’acte  en leur donnant une approbation implicite sinon une justification.  
Résister  veut dire qu’il ne faut pas suivre la tendance du jour, avec son cortège d’approximations et d’exagérations, ses dénonciations cathodiques,  sans que les faits soient définitivement avérés. La loi ou le diktat  de la minorité - non légitime, non élue sans aucune responsabilité - ne doit pas prévaloir et il faut cesser de crier à la discrimination et au racisme généralisé y compris de la part de l’Etat. On ne peut nier les actes antisémites, voire anti -musulmans, et parfois anti -blancs ou chrétiens. Ce sont des comportements graves qui doivent être sanctionnés sévèrement par la justice car ils sapent le savoir vivre ensemble.  Mais il ne faut pas poser comme postulat que la haine l’emporte ; la très grande majorité  des citoyens  considère son voisin même lointain dans sa diversité et ses opinions, la laïcité  acceptée est la base de notre république, et pour cohabiter en harmonie  il faut admettre que l’autre a des droits dans le respect de nos lois,  valeurs, coutumes et art de se comporter.  Résister c’est donc d’abord réfléchir, ne pas réagir à chaud, tolérer et respecter.  
Résister c’est aussi considérer que le peuple est représenté à la suite d’élections où tout le monde peut se présenter y compris ceux qui rejettent le système démocratique. Il y a peu de pays où ce droit existe ! Résister c’est encourager la justice même si elle est imparfaite comme tout ce qui est régi par des êtres humains et qui est un arbitre neutre dans un Etat de droit. On demande aux tribunaux de tout juger, l’histoire,  l’humour, les idées dont certaines sont automatiquement des délits . 
Il faut essayer de résister à la judiciarisation de tout (comme avocat avec cette affirmation  je me tire une balle dans le pied mais tant pis). On n’a pas besoin d’une police de la pensée qui devient alors unique. Les juges n’ont pas à se substituer au citoyen qui a une conscience et aussi  une cervelle – peut être moins «  grosse » ce qui est à voir  que certains intellectuels ou donneurs de leçons patentés et auto-proclamés -et surtout du bon sens ,  qui sait distinguer ce qui lui convient ; cessons de nous infantiliser  pour tout ou rien , de nous dire comme à des gosses ce qui est bon ou non,  et que ceux qui ont la charge de gouverner fassent leur métier en réformant dans le sens de l’égalité ( par exemple en supprimant tous les régimes spéciaux y compris celui des parlementaires ou les petits avantages et privilèges entre amis ) et de l’efficacité plutôt que de polémiquer, en faisant adopter des lois claires, lisibles, compréhensibles , et applicables concrètement. On sait que c’est la loi qui affranchit et la liberté (échevelée ) qui opprime.    Laissons les juges interpréter le droit, protéger les libertés individuelles et publiques, trancher les contentieux, et ce sera déjà beaucoup pour eux.
Résister  c’est se rappeler que notre pays est irrigué et structuré par la laïcité  qui manifestement n’est pas entendue et vécue comme il conviendrait : elle n’interdit rien, elle ne s’oppose pas aux croyances personnelles et à la volonté d’exercer sa religion au grand jour. Elle a été créée pour combattre les excès du clergé - catholique faut- il le rappeler ? - qui voulait s’immiscer dans la gestion politique, et prendre ou participer au  pouvoir  donc imposer des normes.Les  religieux de toute confession  doivent demeurer des directeurs de conscience, point à la ligne. Ceci concerne toutes les religions, y compris celles qui mélangent spiritualité  et art de gouverner. Il ne faut pas confondre sphère privée avec la religion, et sphère publique avec les élections qui conduisent au pouvoir.
Résister c’est comprendre l’autre et appliquer  ce que Voltaire disait : « je ne partage pas vos idées mais je me ferai tuer pour que vous puissiez les exprimer ». Me laisser tuer est un grand mot je n’en ai pas le goût, mais favoriser l’expression sauf pour ceux qui passent à l’acte violent fondé sur un dogme,  et le débat oui.
Résister c’est aussi partager et agir sur le plan social pour faire en sorte que les inégalités se comblent que chacun ait les mêmes chances et se prenne en main pour réussir. Remarquons que les terroristes même issus de nos banlieues ne laissent jamais un message où ils se plaindraient de n’avoir pas de travail, d’avoir été discriminés, ou qu’ils ne peuvent pas développer un trafic de stupéfiants juteux de la faute de l’Etat ou de la police. Ils ne réclament pas du boulot mais la possibilité de rejoindre le paradis d’Allah au plus vite par TGV (quand il n’y a pas grève)  où une vie heureuse les attend. Je n’ai pas encore entendu de revendications sociales au delà de la volonté d’appartenir à Daech.  Il va de soi cependant que l’exclusion réelle ou supposée après une phase de délinquance - ce qui est la caractéristique de nos terroristes -  pourrait entrainer le désespoir qui pourrait  être un mobile très secondaire voire inexistant  à retenir, car rien  n’excuse le crime aveugle. La fin ne justifie jamais les moyens.  Résister c’est donc éduquer, former, tendre la main à ceux qui décrochent , qu’ils le veulent ou  non  d’ailleurs, plutôt que de les assister , les laisser dériver et déraper. Et ne pas croire qu’en déversant des milliards un peu partout - sauf dans les campagnes ce qui m’irrite comme élu rural -même s’il faut aménager les territoires urbains ou péri urbains, faciliter les déplacements, créer des structures publiques -  résoudra les problèmes. Ils sont aussi culturels, philosophiques, spirituels, avec des besoins de reconnaissance.
Résister c’est aussi faire mettre en sourdine les excités de profession  et ne pas tendre un micro complaisant  aux  plus braillards , ceux qui rêvent de refaire le monde,  de créer une société de partage selon eux  , d’une autre vie, de relations participatives ,d’un autre modèle de société. L’utopie est utile mais elle ne doit pas entraver les efforts d’amélioration de ce qui existe. Etre insoumis pour tout, a été pris en compte par les électeurs mais ce n’est pas un programme d’action. De même faire de la surenchère, sécuritaire en particulier ne rime à rien : ce ne sont pas les lois qui éradiqueront la violence, extrême en particulier, ou les polémiques qui clivent les français. On se doit de faire des propositions réalistes , mesurées, sans exclure personne sauf ceux  qui nuisent et s’attaquent à nos valeurs. On peut être ferme sans être excessif et on doit soutenir les pouvoirs publics même si on a évidemment le droit de ne pas être d’accord sur telle ou telle mesure et de se battre pour le pouvoir suprême.  Ni Jupiter ni un ou une  autre demi- dieu ou se prenant pour tel  de son olympe ne détiennent la vérité.
Résister c’est accepter aussi que l’on rogne quelque peu ses propres droits et avantages, à la condition que ce soit utile pour la collectivité. Le débat entre les libertés et la sécurité à chaque fois qu’il y a une nouvelle loi ou disposition anti -terroriste me parait surréaliste. Certains sont contre car on n’en fait pas assez et exigent  que l’état d’urgence soit  permanent ; d’autres sont aussi contre car ils estiment que l’on glisse vers un régime autoritaire et que nos libertés sont gravement menacées,  ou que toute législation d’exception peut ensuite devenir la norme pour tous les citoyens, devenus suspects putatoires. Enfin ceux qui votent pour sont taxés d’être d’horribles laxistes. Quand on interroge le quidam , ou un habitant d’une ville ou d’un petit village pour savoir s’il peut donner un exemple concret du rétrécissement de ses libertés  il ne sait que dire :  les lanceurs d’alerte sont sur le plan des principes. Depuis Trèbes ( 5000 habitants)  qui a été touché dans sa chair je me demande si les habitants des 25. 000 petits villages de moins de 500 habitants (sur 38000 communes) et ceux des villes, ne seraient pas désormais d’un état d’esprit plus… répressif ? A force de s’asseoir sur les principes, ils cèdent disait Talleyrand non pour le regretter, mais pour s’en réjouir car il atteignait son but. Il va de soi que nos valeurs et principes doivent être maintenus pour que notre état de droit soit exemplaire et que nos adversaires puissent éventuellement saisir les tribunaux (ce que certaines victimes ou autres déplorent soyons franc). Ceux qui ne respectent rien et sont en pleine illégalité se retranchent derrière nos lois soutenus par des professionnels ou des intellectuels.  Comme avocat je ne peux qu’approuver, mais comme citoyen je m’interroge  car il faut s’adapter aux menaces classiques comme nouvelles. Mais il faut résister à la tentation d’ajouter des textes nouveaux, sauf si on a vu une faille dans le dispositif de protection.
Résister c’est accepter d’ être en guerre  et ne pas céder un pouce d’autorité, avec discernement cela va sans dire, quelque soit la difficulté ; c’est de ne pas croire les prétendus prophètes qui prônent le changement  ou  la révolution du peuple sans dire où et comment on va aboutir ; ou le repli sur soi derrière sa ligne Maginot en étant entouré de murs, de fils barbelés  sous des interdictions diverses. On n’arrête pas l’eau qui coule parce qu’ailleurs c’est la sécheresse absolue des cœurs comme du terrain,  dans le chaos ,dans la misère. Il faut plutôt construire des ponts qui mènent au possible et des barrages qui permettent de produire de l’énergie, régulée et créatrice.
Tout ceci est l’esprit français de résistance.