mercredi 8 février 2017

Et si on faisait du droit ?

Et si on faisait du droit ?
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
Si l’on met de côté l’aspect moral de ce que l’on appelle l’affaire Fillon car chacun peut penser ce qu’il veut des conditions légales d’emploi et de rémunération de Mme Fillon il faut s’attacher à l’autre volet du dossier celui qui concerne le droit..En effet qui peut juger à part son patron ? N’ y -a -t -il pas du travail au noir, des revenus en espèces et pas déclarés, quelques triches avec les notes de frais, enfin tout ce qui fait le «  charme de l’existence » et qui ne nous parait pas être une fraude car les montants sont minimes .Certains sont maximalistes et je ne sais pas jusqu’où il faut aller. M.Bayrou dont le parcours sous des airs vertueux s’apparente à de l’opportunisme, est hypocrite car il a été député, ministre et a vécu de ses mandats, sauf erreur. Il est aussi sinueux –est-ce-bien moral de tromper ou d’abuser les électeurs -? une fois à droite en acceptant l’aide de M.Juppé pour conquérir la mairie de Pau ,puis une fois à gaucheen appelant à voter contre M.Sarkozy,  puis désormais  pour lui-même, et  accuse M.Fillon d’être sous domination des puissances d’argent pour avoir eu une société de conseil qui recevait  des honoraires, conseillait une compagnie d’assurance et des chefs d’entreprise riches. Tous les  consultants professions libérales, hommes d’affaire –y compris ceux qui  sont comme  M. Hollande , M.Montebourg, M.DSK  et d’autres tous avocats - doivent se retourner et bondir de leurs profonds fauteuils. Je ne parle même pas de M.Macron conseil en fusion- acquisition de la banque Rothschild. L’argument de M.Bayrou est nul et médiocre et peut être devrait il se regarder dans la glace lui qui est un professionnel de la politique qui pourrait détailler son patrimoine, composé a priori d’une maison, d’un tracteur et de bêtes ? Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre, sur celui qui profite de quelques occasions, légales de préférence bien sûr. Il serait naturellement  hautement souhaitable qu’un candidat à une  fonction publique  très importante, même pas celle de président de la république, prouve qu’il est sans tache -qu’il n’a pas hérité de fortune ou de biens suspects  par exemple- et que son parcours a été immaculé par des fréquentations exemplaires n’attendant aucun retour pendant des années. Il faudrait organiser les primaires de la vertu ! Car avant d’être candidat à la présidentielle il a fallu exister pendant des dizaines d’années, aller de victoires en défaites, beaucoup investir  politiquement donc dépenser, vivre professionnellement; assurer son avenir et celui de sa famille comme tout quidam. Faudrait- il n’avoir comme candidat qu’un « pauvre »,célibataire, sans enfant , sans animaux, sans logement, sans voiture avec fonction , sans diplôme qui lui permet d’avoir de confortables revenus, sans expérience parlementaire, étatique, de hauts fonctionnaires  ou d’entreprise, sans rien connaitre du pouvoir ou des pouvoirs qu’il doit dominer. Cela n’excuse évidemment   pas tout dérapage ou abus mais dès l’instant que c’est légal et que seules les conditions d’application sont moralement contestables-et encore faut il le démontrer  -il faut savoir ce que l’on veut ? Imagine- t- on que l’on aura des candidats députés ou sénateurs qui répondront à un zéro faute et à un examen d’innocence dans tous les domaines,  ou a l’absence de tout reproche possible, y compris sur les mœurs, l’origine, la religion, les idées : on ouvre la boite de pandore si tel est le cas .La démocratie est un régime fragile et  d’équilibre où l’éthique est au centre des débats mais où l’exagération et la démagogie devraient être bannis. Que l’on se rappelle que dans les pays où il y a une police de la pensée ou un ministère du vice et de la vertu, ou des interdictions diverses, c’est le totalitarisme qui règne  et les libertés de tous sont en cause. Je ne veux pas de big brother en France, ni de journalistes qui lavent plus blanc que blanc, en étant à l’abri de toutes poursuites avec  l’exigence de transparence qui conduit au lynchage ou à  la  lapidation  et à la dénonciation publique .La moralité est à géométrie variable  et elle est très personnelle. Ce que d’aucuns estiment être le mal , est le bien pour l’autre ou l’acceptable. On ne vicie pas une élection démocratique majeure à partir d’arguments filandreux qui ne correspondent d’ailleurs pas au droit qu’il va bien falloir aborder. Et on ne doit pas instrumentaliser la justice pour éliminer un candidat qui représente l’espoir de millions de français. L’erreur de M.Fillon et il s’en est excusé-même si cela peut sembler court- mais il ne va pas se pendre en direct à la télévision  alors qu’il sait avoir respecté la loi- est d’avoir cru que puisqu’il avait le droit d’employer ses proches (hautement diplômés ) le niveau de rémunération – certes élevé par rapport aux normes des travailleurs actuels- était de sa responsabilité, d’autant plus qu’il ne dépensait pas  toute l’enveloppe qu’il recevait comme les autres parlementaires. Bien sur chacun d’entre nous souhaiterait pouvoir employer son fils ou sa fille comme stagiaire en étant très bien payé ou sa femme comme collaboratrice avec un salaire conséquent. Certains peuvent le faire (par exemple dans leur entreprise) mais ce n’est pas une raison pour accabler M.Fillon  . La comparaison n’est pas un délit et regretter ce qui est légal non plus. En revanche si la loi est injuste et conduit à des excès il faut la changer , et peut être ne pas demander aux parlementaires d’être juges et parties. La cour des comptes qui vient encore de dénoncer diverses anomalies d’utilisation légale  de l’argent public,  pourrait être compétente à ce sujet ? Sortons donc du feuilleton (la méthode du canard enchainé consistant à publier du « nouveau » chaque semaine est- elle morale, alors que la justice devrait tout avoir ?) de l’indignation   , de l’émotion , de pseudos révélations qui n’ont qu’un but, empêcher M.Fillon d’être candidat à l’élection présidentielle et examinons le droit qui est neutre,  avec des règles objectives pour tous, sauf si des juges l’interprètent dans un sens orienté ce que je ne peux imaginer ! même s’il ne faut jamais être naïf. Faisons maintenant du droit.
Je suis conseiller prud’homme depuis des années  dans la section encadrement et je juge fréquemment des conséquences d’un licenciement c'est-à-dire la fin d’un contrat de travail de droit privé, ce qui est le cas pour Mme Fillon même si elle a été payée par des fonds publics. Puisqu’il n’y a pas de convention  collective nationale du travail à l’assemblée c’est le droit du travail qui s’applique : le salarié en fin de contrat ( un CDI par exemple ) sauf faute grave ou lourde a droit à des indemnités de préavis, congés payés, ancienneté qui sont variables en fonction du salaire. Plus celui-ci est élevé plus le total est lourd .C’est un calcul mathématique fait par l’employeur en l’espèce l’assemblée nationale. Il n’y a pas de triche,  c’est le droit. Quand il y a un  procès et que le conseil de prud’homme juge qu’il n’y a pas de cause réelle et sérieuse il accorde en plus des dommages intérêts qui peuvent être conséquents, (tous les employeurs le déplorent) même si le salarié a retrouvé un travail dès le lendemain de son licenciement y compris avec un nouveau travail mieux payé. C’est la jurisprudence de la cour de cassation. Que Mme Fillon ait reçu des indemnités de licenciement est la simple application du droit. Les journalistes qui bénéficient en matière de travail d’un statut favorable, et dérogatoire avec une clause de conscience (article L.7112-15 du code du travail) qui leur permet de démissionner en touchant des indemnités devraient être plus justes et modestes en rappelant ces faits. Que par ailleurs Mme Fillon ait «  cumulé  »parait –il quelques mois deux emplois est une question d’organisation, car le travail intellectuel et de conseil n’est pas la mine ou la chaine et de nombreuses personnalités comme des ministres y compris actuels le sont  à 100% jour et nuit  et y ajoutent leur présence dans leur circonscription dans la semaine et le week-end. Qui le leur reproche ? Imposer la durée maximale de 48 heures par semaine  ne correspond à rien dans certaines activités. Seul M.Hamon qui propose les 32 heures et le revenu universel pourrait émettre cette critique. Je plaisante  bien sûr s’il est permis de sourire tant les reproches contre M.Fillon sont détachés de toute réalité.
Après un moment de sidération où M.Fillon a été sonné par l’attaque  brutale du canard enchainé  et la curée médiatique, ce que l’on comprend ,et a répondu évasivement car il ne comprenait pas  le  procès en sorcellerie qui lui était intenté et la distinction entre le légal et la décence  c’est-à-dire le niveau des salaires versés dans un pays qui souffre du manque de travail et de salaires trop bas pour la plupart des travailleurs –travailleuses comme le disait Arlette Laguiller, ainsi que le rapport ambigu que les français ont avec l’argent des autres , M.Hollande ayant décrété que l’ennemi c’est la finance !, il a réagi  et ne s’est pas résigné car il a estimé que l’attaque était injuste.Il a décidé par ses brillants  avocats de s’intéresser à la compétence du parquet financier national qui avait été plus rapide que l’éclair à s’autosaisir à partir d’une simple  publication de presse, sans plainte de qui conque, sans que l’assemblée nationale ne réagisse, sans que le fisc prétende que les impôts sur salaires n’avaient pas été payés ou qu’on suggère que  les organismes sociaux avaient été floués .Il est possible que l’assemblée ou son bureau auraient dû être préalablement saisis pour une enquête interne, une décision de déposer plainte pour emploi fictif, et qu’ensuite et seulement ensuite le parquet national  financier soit saisi et ouvre une enquête ? Ce serait un cas de nullité de l’enquête .On peut envisager aussi que le délit de  détournement de fonds publics ne s’applique pas à un parlementaire, comme certains professeurs de droit pénal le soutiennent .On entend des détracteurs dirent que puisque M.Fillon commence  à « ergoter » en droit , sur la procédure et les éléments constitutifs des délits visés ,  c’est qu’il est coupable ! Et la présomption d’innocence ? C’est un comble car  chaque individu dans notre état de droit pour un litige banal,  peut contester devant les juridictions compétentes les incriminations qui lui sont faites et obtenir satisfaction : il ne suffit pas de prétendre, d’accuser, de fournir des éléments orientés pour avoir raison et de se laisser condamner pour faire profil bas. L’accusation doit prouver les délits c’est une règle de droit pénal de base, et le justiciable n’est pas là pour faire plaisir aux juges, même s’ils les respectent cela va sans dire. Le combat judiciaire commence donc  et sauf éléments que je ne connais pas –puisque comme beaucoup je commente sans avoir accès au dossier et je ne suis informé que par les déclarations des uns et des autres-  Je ne pense pas  que M.Fillon puisse être mis en examen avant l’élection présidentielle. D’abord il serait anti- démocrate  de saisir maintenant dans le contexte électoral un juge d’instruction qui se précipiterait pour mettre en examen M.Fillon pour l’éliminer d’office car il tiendrait sa parole ! Ce serait suspect et une véritable immixtion de l’autorité judiciaire dans un scrutin majeur démocratique. D’autant plus qu’il n’ y a aucune urgence puisque les faits sont anciens, voire prescrits, n’ont jamais été contestés par aucune autorité à ce jour, posent des problèmes de droit puisque la légalité a été respectée. M.Fillon pourrait exercer des recours en appel et en cassation on ne peut lui retirer les droits de la défense . Ensuite je crois qu’il doit y avoir un classement sans suite puisqu’il ne suffit pas non plus de «  démontrer » , comment d’ailleurs ? qu’il n’y a eu aucun travail tangible de Mme Fillon ; seul son employeur le sait et peut  s’en plaindre puisqu’il est le donneur d’ordre et   peut le prouver, et un travail auprès de M.Fillon qui est un homme politique  par son épouse et ses enfants ne se mesure pas comme pour un salarié classique. On l’a assez dit, surtout  ses collègues  parlementaires-y compris de gauche- qui ont utilisé la même méthode et les mêmes opportunités. S’il faut changer la loi faisons le mais que les parlementaires ne soient pas juges et parties. Qu’un corps, indépendant des assemblées vérifie les contrats , la réalité du travail et lève toute incertitude. Je ne doute pas que M.FILLON élu président s’attachera à cette réforme qui rassurera les français.
Se pose aussi le problème des médias. J’ai entendu sur BFM mardi 7 février  mon excellent  et talentueux confrère Dupond Moretti –qui n’est pas l’avocat de la famille Fillon- rappeler des évidences en droit, accuser des journalistes du Monde d’avoir reçu des PV de l’enquête pénale et s’interroger pour savoir qui les leur  avait remis ; les enquêteurs, le parquet , un fantôme, qui ? sachant qu’à ce stade de la procédure les avocats de M.Fillon ne possèdent pas de copies pénales. Certes les journalistes bénéficient de la protection des sources et peuvent attaquer ou dénoncer  ce qu’ils veulent selon leurs opinions  ou convictions en nouveaux justiciers ou procureurs que certains sont devenus, en toute impunité. Mais ils doivent être aussi irréprochables puisqu’ils font la leçon aux autres. Le parquet ouvrira peut être une information pour violation du secret de l’enquête et savoir d’où vient la fuite. Tout ceci ne crédibilise pas l’accusation.
Si on raisonne en droit il n’y a rien à voir ni à attendre. M.Fillon est le candidat légitime  de la droite républicaine qui triomphera en mai , je l’espère.

Cessons la chasse à l’homme qui devient indécente et retrouvons notre sérénité. Nous avons besoin d’un vrai débat d’idées, d’explications –je récuse le terme promesses qui ne sont pas souvent tenues ou alors pour notre malheur-pour bâtir une France qui gagne pour tous, pour sortir de cette défiance généralisée , pour unir tous ceux qui veulent s’en sortir, faire la grandeur de la France  et lui rendre sa fierté  , et ne pas laisser à nos enfants des dettes encore plus importantes. Abordons donc la politique, du choix entre les hommes et les programmes pour notre avenir commun qui n’est pas fictif. Seule cette exigence démocratique compte. Profitons en pour parler de la justice, de sa place , de ses moyens, pour qu’elle devienne insoupçonnable. Mais qu’elle  ne soit pas dans l’histoire, à partir d’un dossier monté de toutes pièces bancal et inconsistant en droit ,celle qui aura fait manquer son destin aux français. Son aura ne sortirait pas grandie. J’ai  confiance dans les juges qui sont républicains  et ont le sens de leur responsabilité. Il sera temps après l’élection si c’est nécessaire,  de revenir sur des règles devenues  obsolètes et qui ne sont plus acceptées. Mais que la morale pèse de ce qu’elle représente : une théorie de l’action humaine en tant qu’elle est soumise au devoir et a pour but le bien. Ce n’est pas un bulletin de vote stricto sensu, sinon on a  des surprises.

mercredi 1 février 2017

De la nécessité d’une justice insoupçonnable

De la nécessité d’une justice insoupçonnable
Par christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Plus on parle de la justice et plus je me réjouis car il va bien falloir qu’un jour on engage un vaste débat de fond sur ses moyens, sa légitimité, et sa place dans un état de droit. On sait que la justice est en faillite , qu’elle est critiquée de toutes parts, qu’on la croie politisée à outrance, et qu’on ne lui fait pas confiance surtout si l’on a perdu un procès ou qu’un ami (politique ) est mis en cause. Mais on a la justice que l’on mérite et si on ne veut pas la réformer et lui donner des moyens modernes et conséquents de fonctionner il y aura toujours des insatisfactions  et toutes les lois que l’on vote si elles ne sont pas appliquées et arbitrées ne serviront à rien .Le dossier de M.Fillon illustre mon propos. C’est Guy Mardel qui chantait avec grand succès, jadis, « n’avoue jamais » ce que parfois les avocats conseillent à leurs clients. Mais faute avouée est à moitié pardonnée, parait-il, et je le confesse : je voterai en mai pour le candidat de la droite républicaine libérale et conservatrice ce qui est compatible (lire mon blog : fremauxchristian.blogspot.com du 4 /12/2016 : « to be or not to be libéral et conservateur »). Je suis donc partial et partisan. Cela n’empêche pas de réfléchir en morale comme en droit à ce qui est, aux procédures en cours, en toute objectivité, du moins je le pense. Je m’étais interrogé dans un article de mon blog du 5 septembre 2016, donc bien avant ce qui défraie la chronique pour savoir si « la justice pénale fait-[elle ]l’élection » donc du rapport entre la justice et la politique, ou l’opposition entre les juges et les citoyens (surtout les militants). J’avais conclu que « comme l’hirondelle la justice ne fera pas le printemps en mai 2017. Mais elle peut couvrir d’un manteau d’hiver divers postulants à la présidence de la république, ce qui  les entravera dans leurs envolées pour nous convaincre ». A l’époque j’avais réfléchi à partir des cas judiciaires de MM.Cahuzac  et Sarkozy. J’ai été rattrapé par l’actualité avec M.Fillon qui me paraissait être à l’abri de toute investigation des juges !  et ayant gagné haut la main la primaire de la droite avec un programme de réformes audacieux et la volonté de bousculer les acquis, les privilèges (tous y compris ceux des parlementaires) et les habitudes .Comme quoi on  peut se tromper sur les hommes même si j’espère que la dénonciation est calomnieuse et que M.Fillon sortira de cette épreuve encore plus fort, ce qui lui permettra de se pencher aussi sur le sort de la justice puisqu’il  en aura apprécié les fourches caudines .La réalité dépasse toujours la fiction, et  la présomption d’innocence est  piétinée par une information inattendue tirée d’un organe de presse, qui vaut « preuve » selon le tribunal de l’opinion - un journaliste n’ayant pas  à dévoiler ses sources ce qui est fondamental - presse qui est moins rapide à s’excuser et à réparer les dégâts lorsqu’il y a un non-lieu ou un classement sans suite. Personne n’est dupe de la manœuvre politique à trois mois de l’élection. Mais s’il n’y avait pas eu des faits même très anciens peut être prescrits d’ailleurs ? datant pour les premiers de 1988 d’après ce que je lis, la justice n’aurait pas réagi .Il n’y a pas de complot mais une volonté politique de ne pas faire élire le candidat désigné en lui renvoyant la monnaie de sa pièce : l’honnêteté concerne tout le monde et quand on parle de morale, il faut être irréprochable, ce dont –comme militant-je ne doute pas pour M.Fillon. N’accablons donc pas les juges(ceux du parquet seulement en l’espèce)de faire leur travail et examinons les questions en jeu à savoir : qu’est une enquête préliminaire, et peut on commettre une infraction ( le détournement de fonds publics par un travail fictif) alors que l’emploi d’un assistant parlementaire  est légalement  discrétionnaire, contrôlé par le parlementaire exclusivement et même pas par l’assemblée qui  est le payeur? .Si la loi est floue il n’y a pas forcément un loup, et des dizaines de parlementaires de toute tendance politique vont devoir se justifier. Quel séisme dans les familles et dans l’antre de la fabrication de la loi  et des « privilèges » des parlementaires, qu’il va falloir modifier … pour l’avenir. En lavant plus blanc que blanc , le linge devient -il gris ou incolore comme le disait à peu près Coluche pour les lessives ?.
Une enquête préliminaire est prévue aux articles 75 et suivants du code de procédure pénale. Elle résulte le plus souvent d’une dénonciation formelle, d’une plainte d’une victime qui prétend avoir subi un préjudice ou que l’on a voulu lui nuire ,ou elle est ouverte d’office par le parquet qui se trouve dans chaque TGI. sur le territoire. Elle est confiée à la police et a pour but d’éclairer le ministère public (les procureurs, magistrats chargés de faire respecter la loi au nom de la société) sur le bien fondé d’une poursuite, ou non. On est dans le soupçon. Chacun connait aussi le flagrant délit, ou le crime flagrant. Le délai de l’enquête doit être raisonnable : de 6 à 12 mois selon l’article 77-2 du code de procédure pénale. La garde à vue est possible, avec recours à un avocat dans ce cas. Mais  on a créé spécialement un parquet financier national pour les infractions d’envergure plutôt complexes , comme les affaires de corruption, de marchés publics frauduleux, de fraudes fiscales, de blanchiment et en l’occurrence de détournements d’argent public. Le parquet financier national n’a pas à justifier de ses saisines d’office, plusieurs dizaines d’enquête étant en cours actuellement .C’est Mme Éliane Houlette qui est la cheffe depuis 2014 du parquet national financier,  sous l’autorité du procureur  général de paris. Laissons donc faire la justice qui prendra ses responsabilités et qui, quelle que soit sa décision sera critiquée ; si elle classe sans suite le dossier de M.Fillon la droite exultera mais on accusera la justice de n‘être pas courageuse voire instrumentalisée ou  servile en réservant l’avenir. Si la justice estime qu’il y a des éléments permettant soit de renvoyer M.Fillon directement par citation directe devant un tribunal correctionnel,  soit de soumettre le dossier à un  juge d’instruction (donc avec un temps long et une possible mise en examen) la droite criera à la machination et au gouvernement des juges qui pèseront sur le résultat de la future élection. Les juges peuvent aussi  estimer que le détournement de fonds publics n’est pas démontré et donc exonérer M.Fillon,  et ne s’intéresser qu’au travail de Madame Fillon à la revue des deux mondes en estimant que M.Ladreit de la charrière son propriétaire ne peut utiliser son propre argent comme il le souhaite et que c’est un abus social de rémunérer cher, une dame qui collabore occasionnellement et donc de juger ce qu’un employeur doit faire… dans son entreprise ! Dans ce cas seuls le patron de la revue et sa collaboratrice Mme Fillon (pour recel) seraient  renvoyés devant le tribunal correctionnel. Que ferait M.Fillon ? Je ne doute pas que naturellement il défendrait sa femme puisque cette situation est de sa responsabilité, mais n’étant pas lui-même mis en examen il ne renierait pas sa parole et son honneur ne serait pas atteint. Je galège bien sûr, car le pire n’est jamais certain et les magistrats sont suffisamment juristes, diplomates et citoyens pour mesurer leur responsabilité et choisir la solution qui correspond au droit et à l’éthique. Les justiciables -citoyens ne comprendraient pas qu’il n’y ait pas égalité devant la loi et il ne faut pas ajouter à la confusion politique qui rejaillit sur la démocratie un  désastre judiciaire qui discréditerait la justice en plus. Mais le plus simple et le plus satisfaisant est que M .Fillon justifie du travail de son épouse que l’on n’est pas obligé de mesurer selon les critères classiques du temps passé, des courriels envoyés, des cérémonies, des réceptions diverses dans la sarthe, à l’assemblée ou ailleurs…  .Toute personne élue même à un  plus petit niveau localement  comme moi ( maire, conseiller départemental ou régional…) sait combien l’épouse ou la compagne voire les enfants jouent un rôle important  pour les concitoyens auprès des candidats, des élus , à toute heure, à la maison ou ailleurs, comme conseil , soutien moral ,familial, politique voire plus et sacrifient leur propre carrière .  Il est donc normal de les rémunérer.
L’opposition est coite et rase les murs  car les élus de gauche, extrême aussi ou du front national sont dans la même situation : à compétences égales voire supérieures, puis qu’il n’est pas formellement interdit d’employer un membre de la famille au sens large, un neveu ,un cousin, un ami, un copain d’un ami.. .pourquoi vouloir faire un cas particulier ?. Que pense- t- on des cadres autonomes qui ne font pas les 35 heures(mais beaucoup plus sans remarques) et n’ont pas à justifier de leur travail, dès l’instant que l’employeur est satisfait ; ou du télé-travail ;  ou de celui qui voyage  en avion ou dans les trains ou sur la route tout le temps, ou du haut fonctionnaire qui dépend seulement de son ministre ou de l’Etat même quand il se fait cirer les pompes à l’Elysée… …Ne commençons pas à être poujadiste et à accabler l’autre payé sur des fonds privés ou publics même si pour ce dernier cas il faut être encore plus  strict .Additionner  comme le fait le canard enchaîné les sommes reçues sur 20 ou 25 années  pour obtenir un total gigantesque et marquer faussement les esprits n’est pas pertinent et est d’une particulière mauvaise foi : si on cumule les salaires de chacun (notamment les cadres supérieurs) sur une période aussi longue cela fait des sommes considérables, toutes proportions gardées, mais ne correspond pas à un abus. On est dans le registre de la démagogie  et on dénonce les prétendus riches aux smicards. Ce n’est pas un argument de droit et de haute politique ! Attendons la fin de l’enquête avant de se féliciter ou de se désespérer et ayons confiance. M . Fillon vaincra. Si l’on voulait rire on ajouterait que M .Hamon par son revenu universel veut payer par fonds publics tous les citoyens du pauvre au milliardaire sans aucune obligation de travailler : serait ce une proposition de loi pour rendre le travail fictif légal et … encouragé ?
Le droit français permet de répondre à une autre question : comment ce qui est légal (faire rémunérer par le parlement un travail d’assistant, sans contrôle sur ledit travail de l’assemblée ou de la cour des comptes ou de tout organisme financier public) peut il se transformer en  ce qui serait une infraction pénale ? On a le droit ou non dit le quidam qui a du bon sens. En France on n’a pas de pétrole mais on a des idées et les juristes ont l’imagination fertile, surtout ceux qui travaillent à Bercy. En droit fiscal il y a la notion d’abus de droit que l’administration invoque quand la légalité a été respectée, mais qu’il y a eu des montages prouvant que l’on a voulu éluder le paiement de l’impôt. Avec M.Fillon cet argument ne tient pas. Il est de bonne foi : il a appliqué les règles et la pratique du parlement. Il est l’employeur et n’a évidemment rien à reprocher au travail de sa femme (avocate de formation  et spécialiste littéraire), mais surtout partageant tous ses combats et ses difficultés ou de ses enfants étudiants en droit (comme nombre d’assistants parlementaires  en fonction)  compétents puisque devenus avocats. Il n’y a donc pas eu d’abus de droit. Rappelons que l’on reproche à M.Fillon une infraction pénale. Le droit pénal est autonome et d’application stricte. Le doute profite à l’accusé ; ce sont des principes de base dont M.Fillon comme tout citoyen doit bénéficier. On peut être tenu pour responsable financièrement sur le plan civil sans que cela soit une infraction pénale. Et on peut être condamné pénalement sans avoir de sanction civile et devoir payer quoique ce soit. Ce sont des constantes de la loi et de la jurisprudence. Tout juriste sait cela. Tout avocat les invoque. Tout juge doit les appliquer .Quant à l’argument émotionnel consistant à dire que M.Fillon a fait le contraire de ce qu’il demande aux autres, chacun l’appréciera s’il est avéré qu’il est coupable, ce qui ne me parait pas être le cas. En droit civil encore il y a une disposition  qui dit qu’un texte dont la signification est confuse s’interprète contre celui qui l’a émis. En l’occurrence le parlement doit balayer devant sa porte : si ses règles appliquées par beaucoup de parlementaires sont obsolètes compte tenu de l’évolution des moeurs qui veut la transparence et que les puissants n’aient pas de privilèges et rendent des comptes, ce qui est légitime pour être exemplaires, il faut les changer et en voter d’autres, claires, courtes, précises surtout en matière répressive. Les régimes dits spéciaux (comme les diverses indemnités parlementaires à usage discrétionnaire)) doivent être supprimés… La réforme en tous ses états est donc indispensable.
A propos de changement je reviens  à mes propos d’origine sur la nécessité de rénover la maison justice,  civile comme pénale de fond en comble. Dire que les juges sont indépendants n’a plus de signification réelle .Par rapport à qui ou à quoi doivent -ils être indépendants ? Faut-il les élire comme aux USA ?. On se rassure et on veut y croire et ce n’est pas les juges qui sont en question mais le système. La cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg considère que les procureurs, les membres du parquet, ceux qui poursuivent, ceux qui enquêtent sur M.Fillon ne sont pas des magistrats au sens commun  du terme, puisque leur hiérarchie remonte jusqu’au ministre de la justice ? Pourquoi ne pas en faire un corps «  d’accusateurs  ou d’enquêteurs publics » ?  sous l’autorité d’une personnalité qui doit obtenir l’approbation des 3 /5 ème du parlement ? et qui transmettent les dossiers-après enquête non publique pour protéger la présomption d’innocence, que la presse doit respecter-seulement quand les faits sont établis aux magistrats du siège. Certes il n’y a plus actuellement d’instructions données dans les dossiers individuels mais on s’interroge toujours en ayant en outre le sentiment faux-mais parfois vérifié il faut l’admettre- que des juges syndiqués qui s’expriment publiquement  et politisés –dits rouges -pullulent dans les juridictions. Quelle est la vraie légitimité des juges qui ont passé jeunes un concours très difficile, qui sont payés par l’Etat et qui défendent l’intérêt général incarné par la loi. ? Indépendance ne veut pas dire impunité. L’intérêt général est aussi de la compétence du privé. Le justiciable ne sait pas  quoi penser et il s’imagine n’importe quoi. En quoi la légitimité d’un élu doit-elle s’effacer devant celle des juges, sauf infraction démontrée ce qui est un cas devenu  relativement moins rare. Le général de Gaulle a voulu dans la constitution de 1958 une simple autorité judiciaire face au pouvoir exécutif et au pouvoir législatif. N’est il pas temps de revenir vraiment  à Montesquieu et de créer un véritable pouvoir judiciaire, avec des garanties certes, des contrôles démocratiques pour éviter tout dérapage, sans pour autant constituer  un gouvernement des juges qui fait peur à beaucoup de monde ? L’indépendance des juges ceux qui sont assis, qui siègent en tranchant les litiges doit être confortée réellement en leur garantissant leur carrière , des traitements augmentés car ils ont  le sort d’individus entre leurs mains et doivent prendre des décisions graves concernant la société en tous les domaines ,  et peut être en pouvant engager leurs propres responsabilités en cas de fautes avérées , d’erreurs ayant de graves conséquences…L’égalité est pour tous. Enfin il ne faut pas « mégoter » et être pingre : la justice a besoin d’un vrai budget avec plus  de moyens matériels et humains (juges, greffiers, assistants…)  pour qu’elle puisse être  moderne et rapide dans la prise de décisions  et être un arbitre impartial des conflits puisqu’il est acquis que chacun veut  que l’on tranche ses litiges objectivement , sachant que celui qui  perd son procès maudira toujours son juge. C’est humain. Une justice forte obligera à l’exemplarité ce qui est  aussi le but recherché.

Comme la femme de César la justice et les magistrats doivent être insoupçonnables : ils ne doivent rouler pour personne, et ne servir que la loi (qui est objective et neutre) qui quand elle se confond avec la morale (qui est subjective) satisfait les citoyens.  Le premier président Séguier, déclarait il y a longtemps, que  la justice rend des arrêts et pas des services. Justice et politique ne sont pas des adversaires. Il faut cesser de les opposer.  Chacun doit rester dans son domaine et collaborer dans l’intérêt supérieur de la nation donc des citoyens.