mercredi 28 décembre 2016

MON DERNIER RÊVE DE 2016 SERA POUR VOUS

« Mon dernier rêve (de 2016) sera pour vous »( titre  de Jean d’Ormesson à propos de Chateaubriand).Par Christian FREMAUX président d’honneur de l’ANA-INHESJ.Avertissement : cet article a été rédigé pour L’AUDITEUR le bulletin de liaison de l’association nationale des auditeurs de l’INHESJ  et paraîtra en début 2017.

Enfin nous y sommes. L’élu(e ?) que nous attendions non pas comme le messie laïcité oblige mais comme celui ou celle qui porte tous nos espoirs sera choisi comme président de la république, ou sur le point de l’être, quand vous lirez ces lignes écrites fin décembre 2016 avant les primaires de la gauche, et bien sûr avant le résultat du 7 mai 2017. Les prévisions sont aléatoires surtout si elles concernent l’avenir, comme les sondages. Certains se réjouiront car leur favori aura réussi –et ils le savaient avec  certitude !-, d’autres se consoleront en attendant la suite, et les derniers maudiront le peuple qui n’a rien compris. C’est la loi du suffrage universel. Nous entrerons alors dans la campagne des législatives  car un chef de l’Etat sans vraie majorité  offensive, qui le soutient sans faille, est soudée et décidée à réformer, n’est presque rien. Le pouvoir exécutif a besoin du législatif dans les institutions de la Vème république où tout a été pesé au trébuchet, où l’équilibre entre les pouvoirs  a été pensé avec le poids de l’expérience de jadis où l’immobilisme la tractation et l’instabilité régnaient  , où par exemple l’article 49.3 que certains veulent supprimer  a été  beaucoup utilisé par les premiers ministres y compris l’avant dernier, et a un sens  puisqu’il permet d’engager la responsabilité du gouvernement ce qui est une respiration démocratique bienvenue. Avec les lois et encore plus pour la constitution il ne faut  réformer qu’avec des mains tremblantes, car comme pour les dominos ou l’effet papillon une petite modification peut bouleverser l’ensemble :on sait ce que l’on a et comment cela fonctionne et on ne peut se lancer dans l’aventure  expérimentale à partir  d’idées généreuses ou apparemment séduisantes  en perturbant  l’harmonie même s’il est permis d’améliorer et d’adapter les textes qui ne sont pas sacrés ou coulés dans le bronze à l’évolution  d’une démocratie moderne .Le retour vers le futur qui ressemblerait à une IVème république me parait à proscrire même s’il faut trouver de nouvelles  formes d’expression des citoyens entre deux scrutins et faire en sorte que l’individu  participe plus et régulièrement à son destin et aux grandes décisions prises en son nom. Les réformes constitutionnelles lancées à la volée (réduction du nombre des parlementaires, création à la place du sénat et/ou du conseil économique, social, environnemental d’un conseil de citoyens tirés au sort, passage à une VIème république plus « démocratique »avec un parlement revisité) sont à étudier mais elles ne me paraissent pas la priorité des français. Ce que veulent ces derniers  c’est un président de la république qui ait surtout du bon sens  et non une idéologie qui renferme et veut plier les faits à la théorie, qui a choisi après réflexion et études d’impact un cap ,qui assure la protection contre toutes les menaces et préserve les libertés,  qui gouverne avec  pragmatisme et qui tient compte de l’expérience  surtout pour résorber le chômage et faire repartir vraiment la croissance ; qui a de l’autorité pour l’expliquer et le faire admettre à partir du mandat clair qu’il a reçu par l’élection ;des projets concrets  de réforme qui vont peut-être bouleverser nos habitudes et nos célèbres droits acquis (qui deviennent parfois des privilèges dont tout à chacun veut le maintien ce qui est humain, en s’indignant de ce dont profite l’autre) ou conservatismes personnels ; un président avec du caractère (ni mauvais  ou rigoriste ni normal c'est-à-dire hésitant) sans être droit dans ses bottes et sachant trancher  sans vouloir faire plaisir à tout le monde et sans attendre que la situation s’arrange toute seule, selon l’ancien exemple de M.Queuille.Qui allie donc tradition et modernité  avec audace pour que la France retrouve sa place dans le concert des grandes nations  en portant ses valeurs universelles, et que les français tirent profit de leurs efforts, après la cure d’austérité  dont ils auraient «  bénéficié » ou « été victimes »,ce qui est relatif pour certains. On rêve d’un  progressisme réaliste débarrassé de prétendues certitudes qui ne décrète pas le bien et qui s’incarnerait dans l’intérêt général qui n’est pas selon la formule connue, la somme des intérêts particuliers, ou l’avantage d’un camp contre un autre, privé comme public. L’égalité est une partie de la devise de la république. Enfin qui rassemble  les citoyens de toute confession, y compris ceux qui ne croient qu’en l’homme en n’encourageant pas les communautarismes au nom de la diversité, en proposant des défis exaltants dans un avenir commun en rappelant les caractéristiques de ce qui fait  notre nation  avec son passé, ses échecs, ses succès, sans repentance pour tout et rien, et ses principes républicains. On a cru que l’on était sorti  des grandes hécatombes, des conflits, que l’ONU  réglerait les problèmes du monde qu’il n’y aurait « plus jamais cela ». On s’est trompé. Francis Fukuyuma avait prévu la fin de l’histoire  à tort : la démocratie à l’occidentale  ne rayonne pas partout, l’insécurité est permanente, les puissances se défient , le droit de veto paralyse le conseil de sécurité à New York ; Alep et ses habitants ont quasiment été rayés de la carte, le terrorisme frappe partout, et les peuples se rebellent  en ne votant plus comme on le souhaite pour les partis traditionnels et les élites qui se cooptent entre elles. Il y a des phénomènes nouveaux (la mondialisation , la cyber criminalité, les migrants de masse poussés par la peur ou la nécessité pensant trouver l’eldorado ailleurs que chez eux...) que personne n’a anticipé, ou le réveil des peuples comme les printemps arabes qui ont apporté plus de chaos que de bonheur pour l’instant. Il faut en tenir compte et trouver des solutions car l’être humain est essentiel  et on ne peut se barricader dans un camp retranché  et repousser ce que certains estiment être des assaillants. Certes on a le droit  et le devoir de défendre nos propres intérêts et valeurs, mais on ne doit pas être indifférents aux autres. C’est facile à écrire, encore faut-il trouver un consensus  et agir car si la compassion ne règle rien par elle-même, l’humanité doit se conjuguer avec l’économie, le social et la sécurité.
Des vagues de populisme portent au pouvoir des dirigeants improbables sinon imprévisibles (dont il faudra cependant s’accommoder).Et pourtant le populisme ne devrait pas faire peur : c’est une idéologie  qui se réfère au peuple pour l’opposer à l’élite des gouvernants ou aux privilégiés qui ont accaparé le pouvoir .C’est un mouvement politique né à la fin du 19ème siècle  en Russie pour  lutter contre le tsarisme. De nos jours populisme rime avec fascisme, ou autoritarisme voire ultra conservateur pour accabler certains par avance,  et est donc  un pouvoir dangereux  qui menacerait  les libertés et les citoyens. Dans d’autres pays le pouvoir théocratique est en place : la religion gouverne, les «  ayatollahs  » de toute nature  dirigent  en imposant leur croyance avec une main de fer .Il faut donc être très vigilant  car en France en particulier nous savons ce qu’est combattre des dogmes  qui veulent  participer à l’exercice du pouvoir : notre loi de 1905  de séparation de l’Etat et des églises doit être confortée et mieux explicitée. L’Europe  et ses institutions technocratiques  se cherchent  une voie démocratique  moderne et des gouvernances qui permettent aux Etats souverains de le rester, tout en participant  à l’histoire de tous. Tout le monde se méfie de tout  et cela ne peut conduire qu’à des impasses.
Il faut donc revenir à une société de confiance comme l’avait décrite M .Alain Peyrefitte ministre du général De Gaulle, en 1995.Il s’intéressait après Adam Smith, Max Weber et Fernand Braudel à ce « qu’est le développement, qu’est- ce qui permet la modernité, le progrès et la croissance ? ». A nous  en 2017 de répondre à ces questions si nous voulons entrer dans un avenir un peu plus radieux.
La fin de l’automne 2016 a été meurtrière dans le microcosme politique international et national. De grandes figures ont été poussées à la retraite et doivent chercher un nouveau job en urgence ! Aux U.S.A. Mme Hillary Clinton est rentrée à la maison, auprès de Bill. La favorite des médias et élites français qui ne supportent pas M.Trump élu par un plus grand  nombre de grands électeurs et battu par le nombre de voix, mais c’est le système électoral américain,  a chuté, car il y a eu un ras –le –bol du « cow-boy » de base. Est-ce un signe  pour nous ? Il va falloir s’adapter à M.Trump qui a nommé des ministres de choc, sans que nous donnions des leçons de morale qui est souvent notre travers, et sans tout accepter car notre vieil allié sait surtout préserver ses propres intérêts, et le dollar le mène .Mais on ne peut douter que les USA resteront une démocratie  avec un nouveau président populiste ou … simplement réaliste.
Les référendums  n’ont pas porté chance à deux jeunes : le Brexit a emporté le fringant David Cameron,  et le dynamique M. Matteo Renzi a quitté le pouvoir. Ni les succès économiques ni les perspectives de réussite n’ont sauvé ces dirigeants. Ailleurs ce fut limite. M.Rajoy en Espagne a enfin obtenu la queue et les oreilles de l’opposition : il a repris le pouvoir un peu flageolant .Mme Merkel en Allemagne, après un double salto arrière s’est rétablie et semble glisser vers un nouveau mandat de chancelière. L’attentat de Berlin  du soir du 19 décembre, revendiqué par Daech, sur le marché de noël  ne va pas cependant lui faciliter la tâche. En France ce fut un jeu de massacre. A l’issue de  la primaire de la droite-par ailleurs très réussie et qui a désigné très largement son champion, -MM. Juppé et Sarkozy ont été libérés de leur engagements avec les français .De même Mme  Duflot a dû avaler un O.G.M. qui n’est pas passé. Quant à M. Hollande il a préféré le renoncement à l’humiliation par une décision digne et courageuse humainement, même s’il l’a motivée par l’intérêt de la France et des français ce qui est le moindre des devoirs d’un chef de l’Etat.IL a nommé M. Cazeneuve qui fut un bon ministre de l’intérieur et a dû affronter des situations très difficiles, comme premier ministre avec un C.D.D. court non renouvelable. Comme  quoi le code du travail s’applique à tous.
Pendant ces mois la vie a continué avec ses hauts et ses bas, ses péripéties , ses malheurs, les sondages permanents erratiques et les commentateurs qui supputent dans le vide.  Il faut  rappeler les principaux faits.
Nous sommes toujours dans l’état d’urgence  qui a été reconduit avec juste raison jusqu’en juillet 2017.Ceux qui de bonne foi le critiquaient au nom de la préservation des libertés, de la vie privée, de la liberté d’aller et venir ou de conscience, ou de travail, et  sa prétendue inutilité puisque les terroristes peuvent quand même agir( le prêtre égorgé en juillet ; les policiers assassinés à Magnanville), n’ont pu donner aucun exemple concret permettant de se dispenser de cette protection élémentaire. Bien que non concerné par des mesures de contrainte (si tel était le cas j’aurais certainement un avis différent)  je préfère une précaution  à l’inconscience débridée. Entre de potentielles victimes  et quelques virtuels agresseurs simplement soupçonnés à tort ce que je déplore, j’opte pour les devoirs  ce qui nous change de l’individualisme échevelé, même si comme avocat, c’ est mon métier que j’exerce avec enthousiasme et conviction , je  défends tous ceux qui le méritent pour faire reconnaitre leurs droits, et estiment avoir affaire à une injustice. Mais comme citoyen je me fonds dans le modèle républicain  qui nous rappelle que nous avons aussi des obligations collectives. Certes on n’a pas pu non plus  empêcher l’attentat de masse du 14 juillet à Nice. Je m’incline devant les victimes. En revanche je n’ai pas apprécié la polémique  entre les responsables de la sécurité de la ville, et ceux de la police nationale, et les plaintes ou procédures en cours pour déterminer qui n’a pas fait quoi   . Les victimes  qui essaient de se reconstruire et d’être indemnisées  par la solidarité nationale au plus vite sans arguties juridiques,  n’ont pas pour objectif principal  –sauf erreur de ma part- de savoir qui a fauté ou n’a pas pris la bonne décision. Ce qui compte c’est que l’on détermine ce qui s’est passé, comment en tirer des leçons et être plus performant pour le cas où. A propos de bonne ou mauvaise décision publique, il faut désormais tenir compte du jugement  de la Cour de Justice de la république –juridiction d’exception créée  en 1993  pour juger exclusivement  les crimes et les délits des ministres  dans l’exercice de leurs fonctions- qui s’est prononcée  le 19 décembre  2016 dans le cas de Mme Lagarde ancienne ministre des finances et actuelle dirigeante du FMI. Elle était poursuivie pour négligences  ayant permis le détournement de fonds publics, à savoir notamment  de ne pas avoir exercé un recours en annulation  contre la sentence arbitrale (privée) ayant accordé des dommages  intérêts  extravagants  dont un  préjudice moral explosant toutes les normes  jurisprudentielles à l’inoxydable M.Tapie.  Devant cette cour outre trois juges professionnels, Mme Ract-Madoux est  membre de la cour de cassation  et présidait,   les  autres juges sont  des parlementaires. Est-ce  bien adapté à notre époque où le sentiment du quidam est de considérer-à tort mais la croyance est tenace- que les puissants sont protégés en justice et que les politiques ne se font pas la guerre ? Mme Lagarde a été reconnue coupable mais a été dispensée de peine, ce que j’approuve d’ailleurs compte tenu des circonstances de ce dossier atypique ( ce qui est conforme à la loi et dont profitent  d’autres prévenus non célèbres). Après l’inoubliable  «  responsable mais pas coupable » de  l’ancienne ministre Mme Georgina Dufoix dans le dossier du sang contaminé, on a désormais « coupable  sans sanction donc pas responsable ». La jurisprudence innove. Qu’en pensera le justiciable de base ?. M. Tapie lui continue à parader bien que mis en examen, car les sous il les garde pour l’instant. Tout ceci est-il bien juste? En tous les cas cette décision sonne comme un avertissement à tous les décideurs publics, dont je suis à un très petit niveau comme conseiller municipal : si on ne prend pas la bonne mesure politique- après avoir écouté les avis contradictoires d’éminents spécialistes-  qui se révèle mauvaise des années plus tard, à la suite d’une enquête difficile, peut on être poursuivi et condamné ? Si tel est le cas les vocations vont être moins nombreuses pour les fonctions électives bénévoles. Mais on est rassuré : les hauts fonctionnaires qui conseillaient Mme Lagarde  sont passés à travers les gouttes…
Revenons  à la sécurité et aux décisions prises après l’attentat de Nice. M. François  Heisbourg  qui a reçu jadis  le prix Akropolis de l’ANA-INHESJ conseiller spécial à la fondation sur la recherche stratégique,  auteur de « comment perdre la guerre contre le terrorisme » Ed. Stock, a protesté : « les mesures prises sont inefficaces et dérisoires »[Le monde du 19 juillet 2016 page 9] et a demandé : «il n’est pas trop tard pour s’engager  dans la voie du redressement (mais) nos responsables en sont-ils capables ? ». La charge est rude mais l’importance de l’attentat mérite que l’on pose des objections dans l’intérêt de tous. Prenons l’habitude de ne pas ignorer les questions qui fâchent. Un consensus mou ou taisant n’apporte rien.  Et  de ne pas faire l’autruche parfois, dans beaucoup de domaines. M. Boualem Sansal  qui a écrit « 2084 la fin du monde » Gallimard 2016, a décrit l’Abistan empire qui tire son nom du prophète Abi, « délégué » de Yolah sur terre. Son système est fondé sur l’amnésie  et la soumission au dieu unique... Cela nous rappelle une certaine actualité. Nous avons donc un travail de réflexion de fond à mener pour décider d’actions,  et consolider nos valeurs car la guerre se gagne aussi et peut être avant tout sur le terrain des idées. De son côté et inlassablement depuis des années  après avoir été elle-même victime du terrorisme à Paris, Mme Françoise Rudetzki-aussi  auditrice de l’INHESJ- fondatrice de SOS attentats se bat pour faire progresser la prise en charge des victimes avec des notions nouvelles : perte de chance, reconstitution de carrière, préjudice d’angoisse ou d’inquiétude, résilience… Nous avons le devoir collectivement de faire aboutir au plus vite ces dossiers. M. Pierre Nora éminent historien et académicien a réfléchi sur les rapports que nous avons avec l’histoire et la mémoire après les attentats de 2015 et 2016 :  « ces tueries ont changé  la situation de la France, la conscience de soi nationale, les clivages de la vie politique ,les fractures sociales. Pour autant ils n’empêchent pas  la majorité des français de vivre à peu près comme avant…Notre situation  ne correspond ni au déni ni à la résignation ni au catastrophisme. Chacun ressent une très profonde inquiétude et un immense besoin d’essayer de comprendre »[le figaro 13 novembre 2016 page14].Il conclut : « le roman national (celui d’Ernest Lavisse  et Renan) est mort. C’est devenu une romance… ».Mais «  vous n’aurez pas ma haine »comme l’écrit Antoine Leiris éd. fayard 2016, mari d’une victime au bataclan. Ce cri d’amour réconforte et force l’admiration.
Heureusement si je puis m’exprimer ainsi, dans l’actualité on traite d’autres sujets  qui peuvent paraitre secondaires mais qui touchent à notre identité et nos traditions. J’avais commenté le contentieux sur l’installation des crèches dans les espaces publics dans l’auditeur n° 44 de janvier 2016, où je demandais au Conseil d’Etat d’unifier la jurisprudence contradictoire. Après le burkini c’est fait, le conseil d’Etat par arrêt du 9 novembre 2016 a autorisé les crèches mais sous conditions. Les  juges administratifs attribuent aux crèches « une pluralité de significations » et estiment qu’elles sont aussi des « éléments de décoration profane ».Une crèche peut être autorisée avec une installation précaire en fin d’année, en présentant un caractère culturel , artistique ou festif ; ne pas exprimer « la reconnaissance d’un culte ou une préférence revisitée ».La crèche doit éviter tout prosélytisme religieux , correspondre à des usages locaux et ne pas être installée dans des bâtiments publics. Il y a feu vert pour les parvis de mairie, les accès aux bâtiments publics, les marchés de noël . Il appartient aux élus locaux  de comprendre et appliquer l’arrêt. Le mieux est aussi que les crèches soient installées dans ou près des églises ce qui est leur place naturelle et éviterait toute polémique. Mais il ne faut pas oublier le poids des ans et les usages. La laïcité –notion typiquement française et difficile à expliquer et exporter- est toujours un combat et il faut  se pénétrer de sa portée ![lire Caroline Fourest «  le génie de la laïcité ». Grasset 2016 ].Mme Caroline Cayeux maire de Beauvais (avec sa magnifique cathédrale et le choeur le plus haut du monde ) et sénatrice de l’Oise a déclaré : « je serais surprise si de nouvelles polémiques surgissaient au niveau national .Le Conseil d’Etat a trouvé le moyen de sortir de cette affaire par le haut »[ le figaro 2 décembre 2016 page 15]. De son côté « nous serons vigilants » a assuré M. Christophe Habas nouveau grand maître du Grand Orient de France, car il estime la jurisprudence du Conseil d’Etat comme « illégitime «  et affirme que «  ce ne sont pas les crèches qui vont nous préserver de la montée de l’islamisme ». C’est vrai mais ce ne sont pas non plus les mosquées ou l’absence de tout symbole  qui sont un  rempart contre l’islamisme et l’on s’étonne qu’une personnalité aussi  hautement républicaine que M.Habas n’estime pas que le Conseil d’Etat a dit le droit, légalement et légitimement. On peut ne pas être d’accord avec des magistrats y compris au nom de la laïcité dont personne n’a le monopole de l’interprétation et qui ne doit pas être un prétexte pour rouvrir des polémiques, mais il faut l’être avec modération. Que la paix  et la sérénité soient avec tous. Match nul 1 partout et faisons confiance au sens des responsabilités  des élus locaux.
                           La crise de la police
Le nouveau ministre de l’intérieur M. Bruno Le Roux est un auditeur de l’INHESJ : il connait donc les problématiques de la sécurité. On s’en réjouit.
Depuis des semaines les policiers arpentent le bitume  de nuit comme de jour, pour faire état de leur exaspération, en débordant leurs organisations syndicales. C’est inédit. Ils protestent contre leurs mauvaises conditions de travail matérielles, ce que personne ne conteste  ; les heures qu’ils passent en mission pas toutes rémunérées ;  l’absence de considération du public (qui les encensait après les attentats de janvier 2015)  et d’un soutien « mou » de leur hiérarchie ; du fait que selon eux la justice pénale serait laxiste (ce qui n’est pas démontré sauf quelques erreurs spectaculaires en matière de remise en liberté ou de condamnation) et un maillon faible dans la chaîne de la sécurité ; que la délinquance des jeunes en particulier est de plus en plus violente et dangereuse pour eux, et qu’ils ne disposent pas des moyens y compris de droit pour se défendre et faire face ; qu’enfin les spécificités de leur métier ne sont pas prises en compte et qu’ils n’ont pas plus ni moins de droits qu’un citoyen lambda. Ils ne le supportent plus alors même qu’on les agresse, les provoque ou que l’on cherche à les tuer. Le problème délicat en droit et en fait de la légitime défense a été enfin abordé. J’avais écrit sur mon blog(fremauxchristian.blogspot.com ou.fr « à propos de légitime défense » en date du 8 novembre 2016) qu’il fallait écarter la présomption de légitime défense et essayer d’harmoniser  avec les conditions imposées aux gendarmes .La réflexion a été confiée  par le premier ministre à L’INHESJ dont  la nouvelle directrice est Mme Hélène Cazaux-Charles magistrat du parquet de métier  qui en un temps record après de nombreuses séances de jour comme de nuit et audition de spécialistes et de praticiens, a remis son rapport au gouvernement. Un projet de loi a été adopté au conseil des ministres du 21 décembre, qui aligne semble-t-il pour les policiers  les règles de tir après sommations sur celles des gendarmes. Le tout encadré par le principe de proportionnalité et d’absolue nécessité selon les critères de la cour de cassation et de la cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg. Attendons le texte voté par les parlementaires pour être fixé. Ce ne sera pas un « permis de tuer  » comme en bénéficie le célèbre agent 007 : ce que veulent les policiers-comme les gendarmes- c’est un permis de vivre, celui de pouvoir exécuter leurs missions dans une plus grande sérénité, de se défendre à « armes »égales, d’être compris encore mieux par les magistrats et… les médias qui parlent de bavures à tort et à travers, et d’être reconnus au service de la population et de ceux qui ne commettent pas d’infractions. Mais la crise de la police est surtout humaine comme l’a écrit le professeur Olivier Gohin directeur du M2 sécurité et défense de Paris II : « il y a une inadéquation entre la nouvelle sociologie policière et les autorités publiques dépassées ».Après mai 2017 il appartiendra au nouveau gouvernement d’agir pour la chaine pénale y compris la pénitentiaire,  sans  se contenter de rassurer et poser des rustines. Il me semble que les français dans ce domaine sont prêts à faire l’effort nécessaire car la sécurité, la lutte contre la délinquance et le terrorisme, conditionnent notre manière de vivre  et permettent de progresser sur des territoires oubliés ou désertés, y compris en zones rurales où les services publics souvent ont pris la fuite !
                         La magistrature et la justice
Les magistrats qu’ils soient debout comme membres du parquet, ou assis comme juges du siège, se sont cabrés  et comme un seul homme/une seule femme  ont protesté d’un cri perçant : « basta » comme on dit  aussi en corse où la justice a eu divers contentieux. A ce propos je mentionne que M.Yvan Colonna  qui a été jugé par la cour d’assises spéciale anti-terroriste de Paris et condamné  pour l’assassinat du Préfet Claude Erignac  et l’attaque de la gendarmerie de Pietrosella (  comme avocat j’étais partie civile dans tous les procès du commando et de M.Colonna pour un gendarme  pris en otage puis relâché) , a vu son recours devant la cour européenne des droits de l’homme  de Strasbourg rejeté  le 8 décembre 2016 pour irrecevabilité (il n’avait pas épuisé tous les recours internes sur divers sujets dont il se plaignait).M. Colonna  n’aura pas une nouvelle « chance »de faire reconnaitre sa prétendue « innocence » et il doit accomplir la peine de prison à perpétuité avec une peine de sûreté de 22 ans qui lui a été infligée . Revenons à la colère-mesurée comme il sied- des magistrats. Les rapports entre la justice, autorité judiciaire selon les termes de la constitution de 1958, et le pouvoir exécutif n’ont jamais été un long fleuve tranquille, un lit de roses. Le président de la république Nicolas Sarkozy avait évoqué «   des petits pois sans saveur » à une rentrée solennelle ce qui avait le mérite d’une franchise publique. Cette métaphore légumière n’avait pas plu, on s’en doute, aux robes noires, rouges avec simarres et fourrures blanches. Le président de la république  M.François Hollande garant de l’indépendance judiciaire et du respect dû aux magistrats a fait plus fort, et croyait-il plus discret, dans les propos qui lui sont prêtés par deux journalistes dans le livre « un président ne devrait pas dire ça... » : il parle « d’institution de lâcheté », de « planqués », où «  l’on joue les vertueux. » (j’espère pour M .Hollande redevenu simple citoyen après mai 2017 , n’ayant plus l’immunité pénale attachée au chef de l’Etat, qu’une affaire judiciaire même banale ne le rattrapera pas et qu’il ne devra pas  s’expliquer devant des juges). Les plus hauts magistrats, prenant connaissance de ces  déclarations  , toutes affaires cessantes ont sollicité et obtenu un rendez-vous d’explications de texte avec M.Hollande qui les a apaisés, a évoqué un malentendu,  mais ne semble pas avoir démenti au fond. Sic transit gloria mundi.
Déjà les magistrats  n’avaient pas apprécié le rapport de la chancellerie  du 28 juin 2016 sur leur protection , évoquant les tentatives de déstabilisation des juges d’instruction par la défense c’est –à- dire les avocats (sic).Ceux-ci ont été offusqués, à juste titre même si  je suis corporatiste  mais connais le terrain, car leur métier est de s’opposer  aux juges non pas par principe ou méchanceté mais  s’ils l’estiment utile pour la défense de leur client, et n’ont pas à s’incliner devant le  rouleau compresseur de l’Etat  et les difficultés de la procédure pénale que dénoncent pour d’autres raisons les policiers [ lire le Figaro  du 13 juillet 2016 page 8]. Dans un état de droit  les droits de la défense sont une garantie contre l’arbitraire et le désir refoulé de sacrifier l’individu s’il le faut face aux diktats de l’opinion publique  . Ces deux légitimités doivent cohabiter .Les magistrats de l’ordre judiciaire ont constaté amers, que la justice administrative leur était préférée dans l’état d’urgence et ils ont  accusé le coup du décret du 5 décembre 2016 qui permet à l’inspection générale  du ministère de la justice (qui dépend du gouvernement) de contrôler aussi, la cour de cassation. Le malaise persiste….Il faudra bien qu’un jour puisque la justice est en faillite comme l’affirme avec raison M.Urvoas garde des sceaux  et est globalement incomprise, que l’on fasse un grand débat de fond sur la place, les rôles et les moyens de la justice dans une démocratie, avec peut être l’instauration d’un pouvoir judiciaire qui n’est pas un gouvernement des juges ; sur le besoin impératif d’arbitres impartiaux et responsables de leurs décisions avec des précautions pour éviter des mises en cause personnelles intempestives ;  de la nécessité d’alléger le travail des magistrats professionnels en les recentrant vers la politique pénale et les difficultés en droit essentielles de la vie quotidienne ; en les déchargeant de contentieux de masse qui leur prennent beaucoup de temps ; du rôle des juridictions administratives  qui devraient intégrer le système judiciaire ; de l’existence des autorités administratives indépendantes, de la non –création de comités Théodule; de la force de la loi et du droit et de l’autorité de la  chose jugée ; de la jurisprudence qui ne peut remplacer le législateur ou avoir des interprétations orientées …tout ceci avec un budget digne d’un état moderne et performant.  La justice civile est au bord de l’implosion. Mme Dominique  Lottin 1ère  présidente de la cour d’appel de Versailles explique  que les délais sont trop importants qu’il y a dix juges  en France pour 100.000 habitants alors que la moyenne européenne est de 21, et que l’on manque de greffiers, d’assistants  et de moyens matériels ...[le figaro du 7 octobre 2016 page 8].  Le justiciable explose aussi  car il pense que son dossier est négligé. M. Michael Janas  président du TGI de Grasse constate et déplore que le « juge est un artisan alors qu’il faudrait passer à l’ère industrielle ». Des spécialistes ont des propositions [ lire louis Vogel professeur et avocat : « Justice année zéro. 20 propositions pour la justice » préface de D. Perben ancien garde des sceaux .Ed. Ramsay 2016]. Mais c’est une question de priorité et il semble que la justice n’intéresse pas vraiment les politiques, qui s’en méfient quelque peu .Le gouvernement de M.Valls  a essayé d’améliorer la situation  avec la loi du 12 octobre 2016 sur la justice du XXI ème siècle qui a établie notamment la suppression des tribunaux pour mineurs ; le divorce sans juge ; l’abandon de la collégialité de l’instruction, un statut pour le juge des libertés ; l’action de groupe ; le regroupement du contentieux social (TAS ; tribunal de l’incapacité) devant les TGI… On s’intéresse aussi et enfin  à l’enfermement et à la prison qui n’est plus un sujet tabou,-  les prévenus radicalisés obligent à ouvrir les yeux-, et on  découvre  que  celle-ci n’est pas incompatible avec la dignité de l’homme détenu. On s’accorde pour construire de nouveaux établissements et  protéger aussi le personnel pénitentiaire qui doit faire face aux mutineries, aux agressions, aux trafics,  au prosélytisme religieux. On a créé une sous direction de la sécurité pénitentiaire. La droite a approuvé et on ne peut que penser qu’elle continuera sur cette voie si elle arrive au pouvoir. La loi du 3 juin 2016 a renforcé la lutte contre le crime organisé  et le terrorisme ,mais a aggravé, selon les policiers, la « paperasse » administrative. « Paperasse »peut être, mais il faut des garanties légales objectives .La transposition de la directive européenne  sur les droits de la défense  bouscule certes la chaine pénale (garde à vue avec attente de l’avocat ou d’un tiers), avec les difficultés liées aux écoutes téléphoniques. Mais la procédure protège de la tentation de faire trop vite. Enfin une proposition de loi de M. François-noël Buffet sénateur du Rhône et vice-président de la commission des lois prévoit de supprimer la contrainte pénale (mesure emblématique de Mme Taubira!) et d’établir un tribunal de l’application des peines. Pourquoi pas, mais il serait bon que le législateur ne balaie pas systématiquement tout ce que le prédécesseur a fait –sauf si c’est franchement et objectivement pernicieux- et qu’il y ait une stabilité des lois  qui devraient être  moins fourre-tout et bavardes,   au moins pour le temps d’une législature ce qui rassurerait le quidam qui a besoin de sécurité en droit et savoir à moyen terme ce qu’il peut faire ou non, dans tous les domaines (fiscal, administratif, public, social…).Mais c’est une autre histoire.

 Alors qu’il y aura tant de domaines à réformer, l’année 2017 sera-elle le point de départ  de la reconstruction de la  justice qui est un monument en péril , de sa modernisation ou de l’édification d’une œuvre innovante pour satisfaire le justiciable et son avocat ; les magistrats ; le pouvoir exécutif qui a la responsabilité de l’ordre public ; voire…  le délinquant qui saura précisément quels sont les risques  et les conséquences de son périlleux métier. C’est un vœu qui ne doit pas rester pieux. De mon point de vue l’homme /la femme a besoin de croire  en ce qui le dépasse sans pour autant que cela ressortisse au religieux ou au spirituel et sauf pour celui qui ne croit qu’en lui. La justice, organisation matérielle et vertu est un idéal atteignable.
                                Le terrorisme fléau récurrent
Les pouvoirs publics ne cessent de nous prévenir ; il faut apprendre à vivre avec toutes les menaces et d’éventuels attentats qui peuvent survenir n’importe où et n’importe quand. Dont acte, mais ce n’est pas vraiment rassurant même si l’on sait que les responsables font le maximum, déjouent des préparatifs , arrêtent de présumés acteurs et essaient d’anticiper. Berlin a été frappé sur le marché de noël qui est un symbole comme l’était le 14 juillet à Nice .L’Allemagne est en deuil et on s’incline devant la douleur des victimes et des familles. On est solidaire, de loin certes, mais de tout cœur d’autant plus que le modus operandi avec le camion nous rappelle de mauvais souvenirs. Notre ami Alain Juillet (ancien directeur du renseignement, auditeur de l’IHESI/INHESJ première promotion) a expliqué dans l’émission C .dans l’air le 23 décembre 2016  a propos du présumé terroriste tunisien de l’attentat de berlin qui a été tué à milan après être passé par la France semble t il, que l’on ne pouvait tout contrôler, qu’il fallait harmoniser les législations européennes,  et que les frontières de l’Europe ne devaient pas être des passoires. On souhaite que l’Union Européenne accélère la mise en place de ses dispositifs de lutte.
Lors du sommet de Bratislava  en septembre 2016 après la création en août d’un poste de commissaire à la sécurité  et à la lutte contre le terrorisme confié au britannique Julien King (le gardera-t-il après le Brexit ?) a été affichée une volonté  d’agir avec la directive anti-terroriste qui durcit le cadre juridique  en criminalisant toute forme de participation directe ou indirecte à des activités d’endoctrinement et de terrorisme. L’UE veut aussi renforcer les contrôles de citoyens  y compris européens rentrant dans l’espace Schengen .Elle veut aussi contraindre les opérateurs télécoms à collaborer dans les enquêtes pénales et pousser les acteurs d’internet à s’investir  et coopérer, enfin restreindre le champ des armes accessibles aux particuliers détenant une licence. L’union européenne a aussi lancé une agence européenne  de gardes -frontières et de gardes –côtes qui se situe à Kapitan-Andreevo point de passage entre la Bulgarie et la Turquie. Son directeur est un français M. Fabrice Leggeri, énarque, ancien responsable de la lutte contre l’immigration illégale. La France fournira environ 170 hommes et femmes soit 10% des troupes, pour la réserve opérationnelle. C’est un mandat de police  confié à un corps  placé sous commandement européen qui va au-delà des compétences et pouvoirs de Frontex. En France la première loi anti-terroriste date de 1986 et la dernière du 3 juin 2016 qui a renforcé la lutte contre le crime organisé et le terrorisme et a créé le renseignement pénitentiaire .Des mesures nouvelles sont en préparation à la suite du rapport de M .le député G.Fenech avec un rôle accru de la D.G.R.I , et  la création  d’une agence nationale de  lutte contre le terrorisme pour intensifier la coordination . Un nouveau plan «  vigipirate plus »a été validé  mercredi 30 novembre 2016 par un conseil de défense avec un système à trois niveaux : vigilance ; sécurité renforcée/risque d’attentats ; urgence attentats, le plus élevé ,avec l’aide de drones  et des mesures contre les cyber-attaques. Le S.G.D.S.N. souligne son secrétaire général M. louis Gautier  est d’une grande réactivité  et est chargé de préparer vigipirate (consulter www.gouvernement.fr/vigipirate).  Il faut développer la culture de la vigilance : chaque citoyen à sa place, avec ses moyens, doit être un acteur de la sécurité qui est l’affaire de tous, comme l’INHESJ l’enseigne depuis des années.  Ce n’est pas de la « délation » mais un devoir citoyen. Il faut donner aussi à la justice anti-terroriste  les moyens de rendre des décisions rapidement, tout en préservant les garanties de la défense. Une justice expéditive quelles qu’en soient les (bonnes ou mauvaises ) raisons n’est pas tolérable, car c’est faire le jeu de nos ennemis. Au TGI de paris il y a près de 183 enquêtes préliminaires ; 141 informations judiciaires et 982 individus concernés. [le figaro du 3 octobre 2016]. Ces chiffres ne cessent d’augmenter, malheureusement. Les cours spéciales d’assises anti-terroristes sont saturées d’autant plus qu’il a été décidé de criminaliser encore plus les peines. D’où des besoins en matériel et personnel outre une spécialisation accrue des juges qui doivent être protégés. Il faut savoir ce que l’on veut et se donner les moyens d’être efficaces. Sinon on a  la justice que l’on mérite, et les incantations ne servent à rien .Naturellement  la lutte contre le terrorisme dépend aussi du combat contre l’Etat islamique : de la guerre en Syrie et de la fin des carnages  ; des puissances impliquées et des alliances entre Etats parfois de circonstances ; des nouveaux élus comme M.Trump aux USA, et en Europe ; de la politique extérieure de la Russie avec qui il faut dialoguer (la diplomatie  c’est l’art du mouvement, faire bouger les lignes ,ne pas moraliser, condamner ou vouloir punir dit D.de Villepin ), ce qui ne veut pas dire approuver  aveuglément ; de l’influence des pays théocratiques (l’ANA-INHESJ a fait un voyage d’études en Iran en novembre 2016) et de la concurrence chiites/sunnites qui se répercute  sur notre territoire où notre conception de la laïcité  qui est une liberté est comprise par certains comme une interdiction de l’islam ou une restriction à la liberté de conscience. Ce genre d’incompréhension  est dangereux.
Il faut donc que nous soyons ferme sur nos principes et valeurs, et que tous quelques soient nos choix partisans, nous sortions de nos schémas binaires pour essayer de bâtir un consensus républicain.
                          Etre ferme sur les principes.
 Le philosophe Régis Debray (qui a soutenu Castro et Che Guevara puis s’est assagi) cité par Caroline Fourest,a répondu à la question « êtes-vous démocrate ou républicain » ?[le nouvel observateur 30 novembre 1989], comme suit : « la république c’est la liberté plus la raison. L’état de droit plus la justice.  La tolérance plus la volonté. La démocratie dirons-nous, c’est ce qui reste d’une  république quand on a éteint les lumières ». Le débat qui concerne l’état de droit en France  me parait aberrant car on n’a pas à choisir entre son abolition et « les effarantes promenades de santé des djihadistes avec bracelets » comme le note Natacha Polony. Il ne s’agit pas d’adapter au jour le jour le droit à la menace car nous serons toujours en retard mais on doit inventer des règles de droit qui répondent  à la situation exceptionnelle. Mme Chantal Delsol ,philosophe,  souligne la difficulté des démocraties à trouver un juste milieu entre le maximum de sécurité et le maximum de respect des droits.[ le figaro du 22 septembre 2016 page 16].L’ancien vice-bâtonnier  de l’ordre des avocats à la cour de Paris et pénaliste réputé Me Jean-Yves Leborgne rappelle une évidence : « n’est il pas tout aussi étrange de connaitre ceux qui demain vont poser des bombes et de devoir attendre qu’ils allument la mèche pour intervenir peut être trop tard… le devoir d’un homme politique n’est pas d’enfermer le  peuple dans un monde rassurant, mais de parler vrai et de faire face. L’humanisme est une valeur fondatrice de notre société… l’arbitrage entre la liberté et la sécurité  relève de l’art de gouverner… qu’on ne peut confier qu’à des responsables d’exception capables de maintenir l’état de droit, en affrontant l’état de guerre ».[le figaro du 22 septembre 2016 page 16].
Mme Mireille Delmas-Marty, professeure  agrégée de droit privé et de sciences criminelles membre de l’institut et du collège de France vient de publier au Seuil un « petit guide de navigation sur l’océan de la mondialisation. Aux quatre coins du monde ».Elle s’interroge sur les thèmes qui seront au centre de la campagne présidentielle et  des législatives : guerre contre le terrorisme, état d’urgence, immigration. … Sur la couverture de son essai est représentée une rose des vents avec le nord de la liberté ; le sud de la sécurité ; l’ouest de la compétition ; l’est de la coopération. Elle constate que « un état de guerre sans frontières  ni droit cela s’appelle la guerre civile mondiale permanente ».Daech veut obtenir le statut d’Etat et il faut l’empêcher absolument. Selon elle , il faut poursuivre le terrorisme comme un crime et dans les cas les plus graves comme un crime contre l’humanité relevant de la cour pénale internationale de La Haye. « La démocratie ça devrait être quoi ? » s’est interrogée la rédaction de  Philosophie magazine de novembre 2016 (dossier pages 43 et suivantes).Il s’agit de donner le pouvoir au peuple, ce qui est plus difficile qu’à Athènes comme aux temps anciens, l’agora contemporaine étant trop petite pour accueillir les 66 millions de français, outre les sujets de mécontentement. Mais c’est ce que réclament les partis qui se qualifient  de populistes, avant de se transformer par l’exercice du pouvoir comme des partis traditionnels, avec les mêmes travers ou deviennent autoritaires si le peuple ne les suit pas. Comment faire et éviter les débordements ? .Déjà en 1762 dans le contrat social ,Jean-Jacques Rousseau alertait : « on ne peut imaginer que le peuple reste incessamment assemblé pour vaquer  aux affaires politiques et l’on voit aisément qu’il ne saurait établir pour cela des commissions sans que la forme de l’administration change ».Ceux qui en 2016/2017 prônent la démocratie participative  mais ne sont qu’une minuscule minorité qui se prétend le phare de l’humanité et qui veut tout changer («  pour que rien ne change » comme l’écrivait  Giuseppe Tomasi  prince de Lampedusa  dans le  guépard ) sans avoir la moindre légitimité tels les membres de nuit debout ou divers zadistes et les anonymes des réseaux sociaux, qui ne  représentent qu’eux, autoproclamés veilleurs ou démocrates «  avancés », sont plus des adeptes de l’utopie qui n’a pas réussi au chancelier anglais Thomas more, que des réalistes concrets qui participent au progrès. Le progrès n’est pas d’ailleurs de nier l’expérience, la prudence et le bon sens y compris pour les institutions. Et de ne choisir que ce qui choque ou sort des règles. La politique est une chose trop sérieuse qui détermine le futur de tous pour la confier à n’importe qui,  celui qui  a une ou des illuminations et se prétend porteur d’un  projet formidable, y compris à moi citoyen de base. Cela n’empêche pas qu’il faut trouver des solutions pour réduire la fracture entre les représentants élus et les élites, terme pris dans un sens général, car des élites il en faut.  Pas forcément celles résultant d’une réussite à un concours très difficile dans sa jeunesse –ce dont je les félicite-  et qui prétendent ensuite tout savoir et être compétents à vie,  ou d’un statut privilégié qui protège de tout accident professionnel et permet d’être exigeant avec les autres. Ou pas nécessairement non plus les donneurs de leçons, au chaud sans responsabilité particulière .C’est un débat ancien et Montesquieu déjà, « de son temps » était pour la représentation au mérite. Pierre Rosanvallon  professeur au collège de France estime que les citoyens ont désormais besoin  d’une expression qui ait une dimension délibérative, car ils veulent peser sur les décisions qui engagent leur avenir. Après la démocratie d’autorisation il y a « l’attente d’une démocratie d’exercice ». A nous de l’inventer .Espérons dans les débats d’idées qui vont  « égayer » les mois de campagne électorale. Tout n’est pas que symbole. Il faut donner du corps à la pensée et du concret à la parole. L’homme est ce qu’il fait , pas ce qu’il promet. La sécurité et la justice l’aident à se trouver : « deviens qui tu es » est le slogan (de Nietzsche) à la mode. Dans cette fin d’année 2016 mon dernier rêve sera pour vous, pour nous, pour tous. Dans ce monde de «  brutes » et d’urgence où tout  parait se valoir sans hiérarchie,  où la violence matérielle, physique, intellectuelle, morale, psychologique semble dominer, faisons le pari d’un monde meilleur et plus éclairé et essayons par nous même de le construire en étant modéré  dans nos revendications et en jouant collectif. Soyons tout simplement humain.
Christian FREMAUX avocat honoraire, promotion 1991 de l’IHESI/INHESJ.



dimanche 4 décembre 2016

TO BE OR NOT TO BE LIBÉRAL ET CONSERVATEUR?

To be or not to be libéral  et conservateur ?
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Avec une délégation de spécialistes des dossiers économiques dont celui du pétrole, de sécurité et de défense, des intérêts français à l’étranger, et de religion notamment, je reviens d’un voyage d’études en Iran où nous avons rencontré divers responsables de ce régime religio-politique donc théocratique  et les représentants des gardiens de la révolution qui dirigent le pays, sous le contrôle du  guide suprême  l’ayatollah Ali  Khamenei  qui veille à la stricte observance  de la doctrine chiite. Nous allions vers l’orient compliqué avec des idées simples comme le disait le général de Gaulle, mais avec quelques avis préconçus car on connait globalement les positions de l’Iran dans les relations internationales, son bras de fer avec les USA qui ont imposé des sanctions économiques et son rôle réel ou supposé dans divers conflits en cours, notamment contre(ou avec) Daech ?.Nous n’avons pas été déçus  dans la vie quotidienne : interdiction de toute boisson alcoolisée ( ce qui nous a fait du bien !), de cigarettes, de rencontre même sans ambiguïté avec les femmes ; l’obligation pour celles-ci-y compris nos amies de la délégation- de porter le foulard et le tchador dans les lieux de culte, ou en public ;  et des règles morales et de mœurs qui correspondent à un bon musulman selon les autorités du pays. Nous avons été très bien accueillis, s’agissant par ailleurs d’un voyage validé par l’ambassadeur de France sur place et du quai d’Orsay ceci expliquant cela,  et on a vu ce que les autorités iraniennes. .. voulaient que l’on voit. La capitale de 15 millions d’habitants Téhéran est moderne, très polluée, d’un propreté à faire pâlir les responsables de nos trottoirs et rues, sans aucun policier dans les rues (ce qui nous a interrogés en matière de sécurité), avec de petits commerces et artisanats qui nous ont paru relativement prospères et affairés ; pratiquement pas de touristes ; et un bazar ordonné avec de la marchandise clinquante, qui ne ressemble pas à un souk. Les jeunes filles pimpantes et maquillées au dernier cri portaient un foulard qui mettait leur visage en lumière et paraissaient décontractées , avec leur portable comme toutes les jeunes femmes du monde moderne, tandis que les hommes avaient des vêtements sobres à manches longues, et les femmes plus âgées le tchador pas forcément de couleur noire. Nous avons vu des mausolées et des mosquées et encore des mosquées, certaines de grande beauté et fréquentées par les fidèles, à l’appel du muezzin dont on finit par s’habituer de l’entendre appeler à la prière. Nous avons vu circuler beaucoup de voitures-dont des Peugeot-  plutôt anciennes mais en très bon état. On a compris la demande d’ouverture des autorités qui appellent au commerce  notamment pour les voitures, et conseillent aux hommes d’affaires de venir sur place signer des contrats. Il faut le faire en vérifiant préalablement  le système judiciaire (qui n’a rien à voir avec le nôtre, le droit applicable), les garanties, et les moyens de paiement puisque la carte bancaire internationale n’est pas encore de pratique et que la finance islamique interdit certaines coutumes du commerce international ce qui impose des montages très particuliers ne serait-ce que pour contourner les interdictions internationales. Un litre d’essence vaut un quart du prix à la pompe en France,  et le salaire moyen est de 300 euros par mois, 500 à 600 euros pour un cadre ou un métier ayant nécessité de longues études. Il y a des riches  voire des très riches car on a pu constater la construction de très nombreuses maisons de luxe, et les  chantiers d’immeuble  de logement collectif sont très variés  et de bonne qualité : il y a donc des investisseurs, mais peut être sont ils étrangers ?Les routes sont entretenues et  la lumière est partout (ce n’est ni l’Afrique ou d’autres pays moins bien dotés ) y compris dans les déserts qui sont au centre  de ce pays montagneux où les températures varient de plus de 50 degrés  à des froids ardents et de la neige. Nous avions en tête la Perse et  Persépolis que nous avons visité. Nous avons découvert l’Iran et sa volonté de monter le niveau de plusieurs crans pour sa population. Nous n’avons pas été dupes et nous savons que nous avons surtout vu l’apparence,  l’écume d’un régime politique conservateur, l’histoire remontant à l’arrivée au pouvoir des ayatollahs, très sévère pour ses opposants et ses ennemis, très doctrinaire, vouant aux gémonies les usa et ses affidés dont la Grande -Bretagne,  et le modèle occidental trop permissif pour les mœurs et la finance, essayant de ne pas tenir compte des sanctions américaines, participant à la diffusion du chiisme, et intervenant dans divers conflits notamment celui qui  concerne le proto Etat islamique .Nous n’avons pas ignoré le problème aigu des libertés individuelles et publiques , l’absence de vraie justice,(il y a environ 800 exécutions capitales par an, et le guide nomme les magistrats et avocats), un président de la république croupion et un parlement qui ne vote que ce qu’on lui propose .La France a une bonne image et on espère dans notre intermédiation. Dans un dialogue mesuré et prudent  avec un gardien de la révolution expliquant que rien ne devait changer sur la doctrine, on a pu mesurer ce qu’est un conservatisme coulé dans le béton dans toute sa rigueur. Comme il vantait notre révolution de 1789, nous lui avons fait –diplomatiquement- remarquer qu’elle s’était terminée par le sacre de l’empereur napoléon premier,  que les printemps arabes récents avaient créé plus de chaos que de démocratie et que l’ouverture démocratique devait être tentée. Que nous n’avions pas oublié l’époque du Shah et les massacres et persécutions des opposants notamment religieux par la Savac triste police politique, mais qu’il ne fallait pas reproduire un régime de fer pour sauver à tout prix la révolution.(je pense aussi à Fidel Castro que certains politiques et intellectuels de notre pays ont encensé après sa mort, alors qu’il fut certes un révolutionnaire mais surtout un dictateur féroce). Qu’en France notre « quasi religion » était celle des droits de l’homme et de l’état de droit, et de valeurs universelles, notamment pour les libertés . J’espère en toute modestie -on a le droit de rêver-que notre message de libéralisme au sens général et de donner la  parole au peuple pour qu’il prenne son destin en mains, sera médité et entendu. Je ne crois pas  que nos explications sur la laïcité aient été comprises alors que nous avions accueilli l’ayatollah Khomeini en France ou peut être pour cette raison ? Nous avons parlé de libertés et de progrès , la religion étant par définition un regard dans le rétroviseur, surtout chez les sunnites et pas un modèle de modernité. Mais cet avis se discute et je respecte ceux qui croient car c’est du domaine de la sphère privée et des convictions, et ceux qui ne croient pas d’ailleurs.
Nous sommes revenus en étant heureux de retrouver la  France avec ses travers, ses contradictions, ses débats parfois byzantins, nos institutions solides même si elles sont insuffisantes en dialogue participatif et que l’on peut toujours améliorer, notre mode de vie, notre démocratie,  nos politiques et notre modèle républicain. Il suffirait à certains de voyager dans les pays qu’ils citent comme exemple pour aussitôt changer d’avis. Ce fut le cas avec le bloc communiste de l’est avant la chute du mur de Berlin ; c’est une leçon  pour nos candidats au djihad ou à une prétendue révolution pour redonner le pouvoir au peuple, qui devraient aller visiter  les pays  dominés par la religion ou une idéologie qui prétend détenir la vérité.
 En rentrant j’ai donc appris la victoire de M. Fillon à la primaire de la droite ce qui à titre personnel et partisan me réjouit, les palinodies à gauche et enfin le renoncement du chef de l’Etat M .Hollande à briguer un second mandat. Je mesure la décision difficile qu’il a du prendre à titre personnel, et je ne l’envie pas je le respecte. C’est une mesure enfin  d’autorité et lucide, digne, d’autant plus qu’il l’a motivée par l’intérêt de la France ce qui est le moins que l’on peut attendre du président de la république. Son message est clair pour ses amis : vous m’avez pourri la vie pendant des années : prenez les responsabilités et faites mieux que moi ! Espérons que non mais attendons le chevalier rose qui portera les couleurs de la majorité réduite à l’éparpillement. Parlons maintenant de la droite, du libéralisme et du conservatisme.
A peine victorieux M. Fillon a entendu les pires critiques : facho (c’est classique) ; catho(c’est devenu une tare), voire intégriste, ennemi du progrès ( sans dire lequel) et surtout traditionnaliste et conservateur ce qui serait l’insulte  suprême. En Iran je me suis rappelé l’interrogation de Montesquieu : « comment peut-on être persan ? ». A paris je réfléchis : peut on être tout à la fois libéral et conservateur ? et proposer une vision d’avenir et d’espoir aux français avec un programme qui réussisse, ce qui a priori devrait être possible car on aura beaucoup de mal à faire moins bien que ces dernières années .Libéral c’est mettre en avant les libertés, celle de vivre et d’entreprendre sans que l’Etat soit omnipotent et soit gérant du détail  . Le libéralisme incarné par Adam Smith est aussi une invention française de 19 ème siècle avec Frédéric Bastiat ou Alexis de Tocqueville. Karl Marx n’était pas loin mais adepte d’ une autre doctrine plus collective ! Le libéralisme est le produit de la Grèce, a été portée par le christianisme (qu’on le déplore ou non) et a été consacré par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, (lire Alain Madelin : aux sources du modèle libéral français. Perrin éditeur. 1997).Ce n’est donc pas une philosophie qui vient d’ailleurs ou est l’émanation du grand capital mondialisé et des multinationales, même s’ils ne la détestent pas ! Le libéralisme est d’abord philosophique et politique : l’homme est un être moral qui choisit de faire le bien ou le mal ,en conscience, en toute liberté.
Il y a un libéralisme juridique (on n’aime pas actuellement la prétendue dictature du droit surtout anglo-saxon et on se méfie des juges et de leur potentiel gouvernement, mais tant qu’en France la magistrature restera une simple autorité et non un pouvoir, on fantasme).Il faut cependant se rappeler ce que l’auteur de l’esprit des lois écrivait sur la séparation des pouvoirs : notre constitution de 1958 a posé des barrières. Enfin et c’est surtout le sujet qui fâche : il y a un libéralisme économique .C’est encore« l’horreur économique », un brûlot anticapitaliste qui a eu du succès  que Mme Viviane Forrester,  désormais  décédée, avait écrit en 1996.Le libéralisme économique libère des entraves de toute nature et favorise les initiatives notamment entrepreneuriales, celles qui créent de l’emploi. Ce n’est cependant pas la jungle, car il  a besoin d’un Etat fort recentré sur ses missions régaliennes ( autorité en général avec le respect de la loi, finances, justice, santé, sécurité, défense , éducation, social), délesté  des secteurs qui peuvent être gérés par le privé, mais qui contrôle, impose des régulations, protège le faible y compris dans les relations du travail , organise la redistribution… : ce n’est pas le laisser faire-laisser aller, ne caricaturons pas. Or être libéral en 2016-2017 dans notre pays a priori ouvert au modernisme et acceptant le débat d’idées, est un gros mot car il se traduit par ultralibéral  ou néolibéral , sans que l’on sache précisément ce que cela veut dire mais c’est grave docteur, (on parle de casse sociale, d’austérité, de sueur et de larmes, des riches toujours plus riches, de l’exclusion des faibles, n’en jetez plus la cour est pleine) et on cite immédiatement comme repoussoirs Mme Thatcher qui a pourtant redressé son pays et brisé ce qui freinait sa prospérité, et M. Reagan  –qui était républicain comme M.Trump - qui a fait réussir sa révolution conservatrice, ce que chacun doit admettre même ses opposants .Mais la France n’est pas anglo-saxonne, elle a ses traditions et ses principes historiques et a toujours mené un chemin d’indépendance sans copier le voisin. Nous n’avons pas le culte de la city et du dollar, et nous avons une valeur qui dépasse tout : l’homme dans toutes ses dimensions .M. Fillon veut « casser la baraque » ce qui n’est pas très conservateur, c’est-à-dire traquer les pouvoirs abusifs ou les rentes de situation, ou les statuts privilégiés (y compris dans le personnel politique) qui créent des inégalités que les citoyens ne supportent plus. Cela va être un dur combat car les conservatismes sont nichés dans toutes les catégories sociales y compris dans celles qui ne sont pas représentatives, ou ont perdu leur prétendue puissance .M. Fillon a déjà pris contact avec les syndicats ouvriers c’est un signe .Il adaptera son programme à la réalité du terrain puisqu’il n’a pas la science infuse : c’est cela aussi le libéralisme.
On n’a donc pas tout essayé comme le déplorait le président Mitterrand.
On peut en même temps être conservateur sur les sujets culturels, de mœurs, ou qui ne dépendent pas du strict champ économique et social. On a le droit d’aimer notre histoire avec aussi ses échecs ou abus, notre musique , littérature et arts classiques, notre culture traditionnelle en général, sans pour autant dénigrer la diversité et d’autres pratiques , dès l’instant qu’elles se coulent dans notre laïcité  qui est une liberté individuelle et le droit d’avoir ou non des croyances, La prudence et l’expérience qui ont fait leurs preuves peuvent être préférées à l’affrontement et à la volonté de vouloir changer par la masse et la pression ce qui a fait la France .On a donc le droit d’être attaché à l’Etat-nation et  de ne pas soutenir les communautarismes ; ne pas adorer une religion qui combat nos valeurs, et qui exige plus qu’une autre ;se rappeler d’où nous venons car la France est multiséculaire ;de demander que l’on respecte notre mode de vie même si ce n’est pas le meilleur et parce que d’autres voudraient lui  substituer un autre modèle. La tradition telle qu’elle se comprend est gage de repères donc de sécurité pour le citoyen qui ne vit pas dans le petit monde germano-pratin (habitants de saint germain des prés à paris) qui s’extasie de tout ce qui bouleverse, choque la majorité silencieuse qualifiée de ploucs, qualifie de racistes ceux qui ne pensent pas comme eux,  et s’estime être une élite guidant le peuple qui aurait besoin  de voir le progrès là où il n’y a aucun interdit, car ils pensent avoir la vérité. Edmond Burke(1729-1797) né à Dublin, homme d’Etat ,disait que certains hommes ont moins de raison que d’autres, et que la raison abstraite n’est pas la valeur suprême. Plus près de notre époque M.Philipp Blond  qui a été le penseur à Londres de la «  big society « de M.Cameron ( qui a chuté avec le brexit) plaide pour un conservatisme qui attaquerait de front  la prééminence de l’Etat et celle du marché (lire le figaro magazine du 21 octobre 2016 page 36 et suivantes).Il écrit : « trop longtemps le conservatisme a suivi la doxa  selon laquelle la poursuite des intérêts particuliers servirait l’intérêt général » et on a cru « que la mondialisation ou l’immigration de masse  bénéficieraient à tous ». Ecoutons un de ceux qui a vécu une expérience sur le terrain. La tradition, qu’il ne faut pas assimiler au conservatisme,  même relookée par la mondialisation ou de nouvelles idoles  qui encouragent l’individualisme au détriment du collectif, est moderne et peut redonner du sens à ceux qui en cherchent ou sont perdus  par la tyrannie de l’urgence  ou de la pensée unique. Google instrument utile, et les réseaux sociaux ne peuvent remplacer ce qui s’est transmis depuis des siècles , qu’il ne faut ni enterrer ni mépriser même si c’est parfois « ringard » et doit être revu .Un pays qui liquide son passé n’a pas d’avenir. Mais tout ceci n’est pas du conservatisme que l’on oppose souvent à la nécessité du progrès permanent . Etre progressiste c’est  aussi être circonspect avec   des idées qui ne viennent de nulle part , disparaissent aussitôt, ou n’apportent rien de précis sauf la confusion dans les esprits, et croire que les valeurs qui ont fait leurs preuves, comme liberté, égalité, fraternité, doivent être sanctuarisées dans le cadre républicain , sans pour autant ignorer ou repousser l’évolution des besoins de la société, ou l’utopie toujours nécessaire. Ne soyons pas figé dans ce qui fut. Le conservateur respecte l’opinion des autres, est tolérant , pragmatique, partisan de la raison non dogmatique ou donneuse de leçons et sait s’adapter car il n’est pas prisonnier d’une idéologie qui veut faire entrer la réalité dans son moule, avec des échecs sanglants. Regardons l’actualité. C’est avant tout un état d’esprit  qui réfute les idées toutes faites  ou celles qui sont tendance. Le conservatisme c’est aussi la réforme de l’Etat dont personne ne demande la disparition  avec des services publics dans les villes et surtout en zone rurale. Je suis élu d’un commune dans l’Oise de 600 habitants : on n’a plus de commerces et de moins en moins de services publics dans le canton (ni d’ailleurs plus de conseiller général de proximité, devenu conseiller départemental donc plus lointain). Les collectivités territoriales  avec leurs élus qui se dévouent quasi bénévolement, font ce qu’elles peuvent, mais le prétexte de rationalité lié aux économies budgétaires ont fait que notre territoire se languit .On a donc besoin de l’Etat avec ses fonctionnaires. M .Hollande en visite à Abu -Dhabi a lancé une pique à M. Fillon ; « un Etat sans fonctionnaires n’est plus un Etat ». Certes mais l’ancien maire de Tulle a du constater dans son département qu’avec nos cinq millions de fonctionnaires actuels, l’Etat était absent sur nos territoires ! Ce n’est donc pas une question de nombre, mais de temps de travail, de répartition et de pouvoirs sur place .Il ne s’agit pas de supprimer pour l’avenir les fonctionnaires sous statut avec la garantie d’emploi à vie, mais de ne les conserver que dans les domaines régaliens (finances, justice, défense  voire santé et éducation pour les cadres ou les professions indispensables qui ont besoin de stabilité). Et recruter d’autres fonctionnaires avec les contrats (et les retraites) de droit privé ce qui est une simple mesure d’égalité entre les citoyens. On peut être conservateur et initier des réformes de fond qui bousculent. Notre modèle social issu de la seconde guerre mondiale a atteint ses limites : il faut le revoir pour en conforter les piliers, protéger ceux qui en ont besoin par la solidarité, l’adapter aux nécessités nouvelles, au progrès de la science, le libérer des excès et abus, ce qui renforcera l’égalité. Si on ne fait rien dans ce secteur, comme dans tous les autres, c’est la faillite assurée. Le conservatisme c’est «  s’accrocher » à ce qui a marché, et le réformer pour le rendre encore plus performant. M .Fillon a par avance réfuté toute étiquette qui réduit : il veut casser la baraque de tous les conservatismes,  donc il est réformateur. C’est peut être parce qu’il ne savait pas que son programme était impossible à réaliser, ou ne veut pas le croire, qu’il le fera et réussira au nez des sceptiques  et de ceux qui renoncent par avance .Attention ces quelques considérations n’engagent que moi et je peux me tromper dans les définitions et la portée  des néologismes. Mais c’est mon opinion et je la partage.



samedi 26 novembre 2016

LA RESPONSABILITÉ DES CITOYENS ET DES MEMBRES DES CONSEILS SYNDICAUX EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

«  La responsabilité des citoyens et des membres des conseils syndicaux en matière de sécurité. » par Christian FREMAUX avocat honoraire au barreau de Paris et élu local,(conférence « face à l’insécurité, face à la délinquance , face aux terrorismes : tous concernés ? » pour la FNAIM du Grand Paris lors du salon de la copropriété à PARIS ) ,24 novembre 2016 .
Notre société  a développé l’assistance dans tous les domaines et l’on a perdu l’habitude d’assumer ses responsabilités. On a même fait figurer dans la Constitution le principe de précaution ce qui a découragé beaucoup de citoyens de prendre des initiatives .Beaucoup croient que tout problème n’arrive qu’aux autres  ou que si on est face à une difficulté on n’y est pour rien, que c’est la faute des autres, des circonstances, de l’Etat, et que la collectivité paiera voire l’assurance, ou la copropriété sinon le syndic quand il s’agit de l’immobilier. En un mot on estime avoir surtout des droits, on a oublié les devoirs. Cette période d’attentats nous appelle à plus de vigilance et à plus de responsabilité personnelle. Le droit nous interpelle  et nous rattrape  pour que nous assumions nos obligations de citoyen en particulier, et aussi quand nous décidons de nous impliquer dans la gestion de notre immeuble en devenant membre du conseil syndical, d’abord parce que nous y avons un intérêt personnel , c’est humain et ensuite parce que nous aimons nous  engager pour que les choses marchent bien en l’espèce la gestion de nos biens. Certes le copropriétaire fait confiance aux professionnels syndics ou gestionnaires, mais c’est une confiance mesurée, et il préfère parfois  être au cœur des dossiers. Engage t-il sa responsabilité en droit pour autant : c’est à cette question que je voudrai répondre dans une matière qui nous préoccupe tous : la sécurité.
Nous sommes en effet entrés dans un monde nouveau -déjà depuis plusieurs années - où notre sécurité est au centre des débats .Et cela va durer. Il faut entendre sécurité au  sens large. Les catastrophes naturelles comme les inondations d’avant l’été nous ont montré  qu’il y avait des insuffisances-certains parlent de fautes-  et qu’il y avait des dégâts considérables à réparer : des commerces n’avaient pas ré ouverts ; des maisons étaient au bord de la destruction ;  de nombreuses personnes avaient tout perdu et l’ETAT ou les assurances « flottaient »si je peux dire  en ne déclarant pas telle zone en catastrophe naturelle ou en ne versant pas les indemnisations. C’est aussi un problème de sécurité et il est possible que des procès s’ouvrent où on recherchera la responsabilité de tel service de l’Etat, de telles mairies, de tel propriétaire qui n’avait pas fait de travaux d’entretien ce qui a concouru indirectement aux dommages ,de tel syndic qui n’a pas pris de mesures préventives pour l’immeuble alors que le risque était connu, de tel syndicat de copropriétaires qui avait refusé de voter des mesures de protection .Mais il n’y a pas que des catastrophes naturelles : il y a aussi des fautes qui sont commises volontairement je parle surtout d’infractions comme le cambriolage ou le vol ou les trafics divers, ce qui concerne les copropriétaires,   ou involontairement , par négligences souvent,   en matière de gestion immobilière, ou parce que l’on n’a pas envie de décider une mesure qui va avoir un coût. La sécurité c’est donc la lutte contre la délinquance en général et comment se protéger, et ce sont aussi des mesures matérielles à prendre pour éviter tout incident humain ou matériel entrainant des dommages.
Je n’évoquerai pas la responsabilité des syndics car la jurisprudence est bien établie à leur encontre s’ils commettent des manquements, ou ne suivent pas les décisions de l’assemblée générale. Mon propos est de faire un point rapide sur la responsabilité en droit du citoyen copropriétaire ,et du copropriétaire qui s’est fait élire, et je l’en félicite, membre du conseil syndical, dans le domaine de la sécurité qui est une partie des obligations légales  mais qui prend  de plus en plus d’importance.
1°)LA RESPONSABILITE PERSONNELLE DU CITOYEN DANS LA GESTION DE SON BIEN .
La sécurité nous concerne dans notre vie quotidienne  et a pris une dimension nouvelle. Elle est la première des libertés et quand un pays n’assure plus la sécurité c’est le chaos, l’anarchie et donc des risques pour les biens et les personnes. Tout le monde peut citer des Etats-comme l’Afrique du sud, le Brésil et autres, la liste est longue- où les maisons ou appartements ont les portes blindées ; des grillages aux fenêtres ;  de la vidéo- protection ; du gardiennage armé, des vigiles… je n’y insiste pas .Les propriétaires ou habitants ne pouvant plus faire confiance aux pouvoirs publics organisent eux-mêmes leurs propres protections. Nous n’en sommes évidemment pas là en France et l’on peut remercier l’Etat et nos forces de l’ordre et de secours d’être aussi efficaces, même si on voudrait toujours plus et qu’il n’y ait plus de cambriolages, ou de vols ou de destructions de biens, et que les trafics disparaissent. Mais l’homme est ce qu’il est et il faut ne pas être naïf, mais réaliste. Nous devons donc agir aussi à notre niveau personnel. C’est un devoir, et le droit nous le rappelle : par exemple ne pas porter assistance à personne en péril, ou mettre quelqu’un en danger par une action ou une abstention, ce qui est prévu par le code pénal,   sont répréhensibles .Le citoyen doit le savoir : ne jamais rien faire n’est pas une garantie  que l’on sera toujours tranquille. Nul n’est censé ignorer la loi, mais la loi est devenue si confuse et nombreuse que parfois  on n’imagine pas ce qu’il faut faire !  Mais soyons optimistes .Les pouvoirs publics ont inventé des dispositifs pour nous rassurer  et protéger nos biens. Ainsi par exemple, et sans être exhaustif,  quand on part en vacances on peut demander à des policiers de venir sur place en notre absence vérifier que notre domicile n’a pas fait l’objet d’intrusions. Cela renforce la tranquillité du vacancier. Les mairies peuvent conclure une convention de « voisins vigilants » qui permet de signaler aux gendarmes  tel événement qui parait suspect mais qui n’autorise pas le citoyen à intervenir lui-même : il y a des limites à ne pas franchir sous peine de se mettre hors la loi, alors même que l’on aurait envie de « faire justice ». Des professionnels comme la FNAIM du Grand Paris ont signé des conventions de partenariat avec la plupart des autorités : leurs syndics sont parfaitement informés et peuvent intervenir en cas de signalement quelconque. Le citoyen doit jouer un rôle en matière de protection de l’immobilier, d’abord pour soi soyons un peu égoïstes.
On a compris, pour les attentats qui se multiplient désormais, qu’ils émanent de bandes de radicalisé(e)s ou d’individus qui se donnent des missions et s’auto -proclament martyrs, outre naturellement tout ce qui est organisé par l’Etat islamique dit Daech, ou autre structure malfaisante,  que le danger vient de l’extérieur comme de l’intérieur et qu’il y a des risques permanents, protéiformes  et que chacun  -je veux dire tout citoyen - là où il est, avec ses moyens, doit participer à la vigilance globale, et ne rien faire qui pourrait faciliter une action qui cause des dommages. Je ne veux pas dire pour autant que le citoyen doit se substituer aux professionnels et aux spécialistes, et dénoncer tout ce qui lui parait ne pas être normal. Il ne faut pas tomber dans la paranoïa : il s’agit d’être attentif et surtout responsable. C’est le cas dans l’immobilier.
*le propriétaire occupant doit respecter la destination de son bien (habitation, professionnel, commerce)  et ne pas en changer selon son bon vouloir ; il doit en profiter paisiblement et assumer ses obligations :payer ses charges en premier ; se conformer au règlement de copropriété ; s’intéresser à la gestion de l’immeuble ou de son lot ; aller aux assemblées générales sauf motif légitime ou s’y faire représenter  et voter, car la gestion d’un immeuble est une responsabilité collective mais qui dépend du vote de chacun ;collaborer avec le syndic  qui  est présent pour rappeler si nécessaire les règles de droit, conseiller et enfin exécuter les décisions votées .Il ne décide pas de son propre chef. En matière de sécurité le copropriétaire -citoyen  a des responsabilités accrues. Il doit accepter-selon moi- s’ il y a les moyens budgétaires et une raison forte, d’installer des moyens de protection ou de prévention et de contrôles ; d’entretenir l’immeuble, ses accès , ses fermetures, vérifier le va et vient dans l’immeuble ;  renouveler ou mettre aux normes le matériel, même si cela revient cher ;il doit réfléchir sur d’éventuelles difficultés accidentelles (inondations, incendies, explosions ,chutes..) ; il doit renouveler  en assemblée générale tous les ans l’autorisation pour les forces de l’ordre et de secours de pénétrer en permanence dans l’immeuble… Cela va de soi comme citoyen, mais s’additionne à ses obligations de copropriétaire .Autrement dit le copropriétaire citoyen a les mêmes devoirs que tout individu , mais il doit y ajouter des obligations spécifiques pour son immeuble, concernant la sécurité.
*Les articles 1382,1383 du code civil, 1384 dudit code pour les biens que l’on a sous sa garde et d’autres articles ou textes particuliers du code de l’urbanisme, du code pénal ou des lois particulières permettent d’engager sa responsabilité relativement à son bien, pour un comportement personnel « inapproprié », ou une faute commise dans l’utilisation de sa propriété, pour des dommages causés aux tiers. D’où d’ailleurs, la nécessité d’une bonne assurance que l’on soit occupant ou non.
* le copropriétaire est responsable   de son locataire pour divers manquements que celui-ci commet dans l’utilisation des parties communes, mais aussi  en ce qui le concerne pour des défauts de construction de l’immeuble, ou insuffisance de moyens de protection. Le locataire pourrait  lui reprocher par exemple s’il a été cambriolé, que l’immeuble ne soit pas assez protégé et qu’en assemblée générale des dispositions de sûreté n’aient pas été acceptées ?.

*il est responsable des fautes de son locataire à travers la jurisprudence dite des troubles anormaux de voisinage (sur la base de l’art.1382 du code civil et de l’art. 544. du même code): c’est celui qui joue du violon ou du piano dans la nuit ; qui fait la fête à toutes heures ; qui fume du cannabis partout ;  qui a des colocataires inconnus  et nombreux … enfin qui fait du bruit au delà de ce que l’on accepte habituellement ou de façon normale. (à condition de savoir ce qui est normal).[ cour de cassation ch.civ.3 .16 septembre 2015  pourvoi n°14-14518 pour la pratique d’un culte religieux contraire à la destination de l’immeuble ; et Cour de cassation ch.civ.3. 11 février 2016 n ° de pourvoi 14-16.309  transformant un lot en parking  pour les clients d’une salle de sport à l’intérieur de la copropriété].
*enfin, mais ce n’est que mon avis personnel et je peux me tromper, il pourrait être responsable  s’il refusait systématiquement toute proposition du conseil syndical ou du syndic en matière de sécurité , d’amélioration ou de protection des parties communes, des divers locaux, des parkings, des caves…et qu’un incident grave survenait ou qu’un copropriétaire était victime et subissait des dégâts tant matériels que moraux. Naturellement cet avis se discute, mais l’évolution de notre société tend à trouver des responsables ET coupables et plus personne n’accepte de n’être pas indemnisé, et d’accepter la fatalité, personne n’étant responsable de rien. Le citoyen est exigeant : il veut les avantages pas les inconvénients. Il veut pouvoir être libre de faire ce qu’il veut de son bien et n’avoir pas à se justifier. Mais si on y touche, alors attention aux autres, tout devient urgent et il faut une solution immédiatement… C’est compréhensible.

La qualité de copropriétaire n’assure donc pas la tranquillité car on peut être rattrapé par sa qualité de citoyen. Et il ne suffira pas de dire que c’est la faute des autres ou du syndic. Le copropriétaire a en effet des droits pour tenter de trouver des solutions.
Il peut solliciter l’inscription de questions qui l’intéresse à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale (article 10 du décret du 17 mars 1967) en respectant le délai de 21 jours avant la date de la réunion ( article 9 du décret).Et si le syndic résiste ou refuse ,la procédure de référé existe pour les questions urgentes et sérieuses.
On peut préciser qu’en cette période d’extrême vigilance liée aux attentats le copropriétaire ne peut vendre (voir les obligations liées à Tracfin) ou louer dans n’importe quelles conditions y compris financières, en se désintéressant de qui est son locataire ; ne pas s’inquiéter s’il s’aperçoit de mouvements inhabituels ou d’occupation « curieuse » ou de va et vient  qui sort de l’ordinaire ; de propos provocateurs…Son devoir-selon moi- est de s’en ouvrir à qui de droit, d’abord au syndic. Il ne s’agit pas de dénoncer, ou de se mêler de la vie privée ou de la liberté d’expression ou de conscience. Ce n’est pas de la délation. Mais un citoyen a un devoir même non écrit : celui  de participer à la paix et à la tranquillité collectives et donc de faire savoir à ceux qui sont chargés d’agir-avec des éléments tangibles et vérifiés- que tel comportement parait enfreindre la règle générale. Cette évidence me semble valable pour un copropriétaire qui est d’abord un citoyen. La sécurité est l’affaire de tous.
2°)LA RESPONSABILITE DE MEMBRE D’UN CONSEIL SYNDICAL..
Le citoyen copropriétaire peut vouloir s’investir encore plus et se faire élire au conseil syndical .Il a raison et j’encourage tous ceux qui le peuvent à le faire et à prendre le destin de leur immeuble en mains .Il va être bénévole, perdre du temps et parfois dépenser un peu de frais : il va devoir prendre des décisions. Sa responsabilité peut elle être engagée ce qui serait injuste ou le comble ?. Rappelons d’abord quelques principes avant de répondre à la question.
a)     L’article  21 de la loi de 1965 dispose que « dans tout syndicat de copropriétaires, un conseil syndical  assiste le syndic et contrôle  sa gestion ». Il est donc obligatoire de créer un conseil syndical : rapport de M.BONNEMAISON assemblée nationale  loi du 31 décembre 1985 doc.parl. AN, 1985, n°2960 page 16.Il faut donc qu’il y ait des conseillers pour constituer le conseil syndical, c ‘est une évidence. Les candidats sont les bienvenus .Cependant une assemblée générale  peut décider, par un vote à la double majorité de l’art.26 de ne pas instituer de conseil syndical, ce qui n’est jamais recommandé. Une nouvelle assemblée peut alors décider de revenir sur ce vote à la majorité de l’article 25 et constituer un conseil syndical. S’il y a blocage ou aucun candidat, l’article 48 du décret prévoit qu’un juge peut désigner les membres du conseil syndical et fixer la durée de leur mandat. Les copropriétaires ont donc intérêt à se dévouer plutôt que la justice s’en mêle.
Les membres du conseil syndical défendent les intérêts de la copropriété, cela va sans dire mais il est préférable que ce soit clair. Ils ne défendent pas leurs intérêts propres ou ceux du syndic .Ils contrôlent ledit syndic et l’assiste. Celui-ci doit consulter le conseil syndical pour diverses questions : dépenses dépassant l’autorisation des décisions votées en AG; élaboration de l’ordre du jour ; préparation du budget notamment. C’est le syndic qui représente le syndicat de copropriété (art.18 de la loi du 10 juillet 1965). Il agit avec l’autorisation de l’AG. ( art. 24 de la loi). Sauf pour les actions en recouvrement de créances (art.55 al.2 du décret du 17 mars 1965) ou en cas d’urgence ou d’une action intentée contre le syndicat.
b)    L’article 14 de la loi de 1965  dispose que « le syndicat est responsable  des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d’entretien des parties communes   , sans préjudice de toutes actions récursoires ( ce qui veut dire concrètement que l’on se retourne contre le copropriétaire qui est présumé responsable).[ Cassation civile 3ème chambre .17 décembre 2015 pourvoi n° 14-16.372 FS-P+B. jurisdata n°2015 -02309].
Si des infiltrations causent un préjudice dans un lot par exemple, le syndicat des copropriétaires est responsable : [Cour d’appel de paris -pôle 4. Ch.2 -janvier 2015 RG n°13.04476 jurisdata 2015. 002067].
Le syndicat des copropriétaires voit encore sa responsabilité engagée s’il procède à des travaux nécessaires voire obligatoires- pour des raisons de sécurité par exemple- mais qui ont des incidences sur des parties privatives : par exemple des boutiques doivent fermer plusieurs mois .Il pourrait être condamné  sur le fondement de l’article 9 de la loi qui dispose « que les copropriétaires qui subissent un préjudice par suite de l’exécution de travaux… ont droit à une indemnité ».[Cour de cassation.3ème civ. 14 janvier 2015 arrêt n°23 FS+P+B+1 pourvoi n° 13.28.030].
c)     Les « risques » liés aux gardiens et concierges de l’immeuble.
Ils sont des salariés  mais sont dotés d’un statut légal spécifique et dérogatoire :[voir jurisclasseur travail. Traité. Fasc. 5.50 n°1 et s.].
En effet ils assurent la garde de l’immeuble, leurs abords et dépendances  . Leur statut est régi par les articles L.7211-1 à L .7215-1 du code du travail. Une obligation de sécurité de résultats pèse sur l’employeur, outre les actions de prévention, de protection , et désormais de la pénibilité au travail :article L.4121-2 du code du travail (voir aussi pour la simplicité  du code du travail la loi dite REBSAMEN  sur le dialogue social et l’emploi n°2015-994 du 17 août 2015, et celle dite de Mme EL KHOMRI votée grâce à l’article 49.3 de la Constitution et promulguée  le 9 août 2016 ,mais toujours contestée).L’employeur doit respecter des principes de prévention ( par exemple pour que la sortie des poubelles ne soit pas une tâche trop difficile). Il faut identifier les risques et les éliminer à la source (en tenant le document unique d’évaluation, pièce obligatoire (art.L.4121-3 du code du travail). D’où l’intérêt d’avoir des conseillers syndicaux qui s’y intéressent, transmettent leurs conclusions et proposent des solutions. L’obligation de résultats veut dire que s’il y a un accident l’employeur devra prouver avoir mis en place tout moyen pour qu’il n’y ait pas de conséquences en cas de mauvaise manœuvre, ou erreur, voire mauvaise manipulation du salarié qui a contribué à son propre dommage. On ne pourra pas dire « je ne savais pas ; ou on en a discuté mais on n’a pas décidé ; ou on n’avait pas le budget ». On ne regarde que le résultat, pas ce qui s’est passé avant  et s’il y a des circonstances atténuantes. Certes la Cour de cassation vient de nuancer la sévérité de sa jurisprudence par un arrêt du 25 novembre 2015 qui indique : « ne méconnait pas l’obligation légale lui imposant de prendre des mesures nécessaires pour assurer la sécurité et pour protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui JUSTIFIE avoir pris les mesures prévues par les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail »[Cour de cassation ch.civ.1 pourvoi n°14-21434].Cela ne veut pas dire que l’obligation de résultats est devenue une simple obligation de moyens. Elle reste au moins une obligation de moyens renforcée et les employeurs en cette matière de la sécurité doivent être très entreprenants. A défaut leur responsabilité peut être engagée.
Et je réponds donc à la question : les membres du conseil syndical constituent en fait le syndicat des copropriétaires  et c’est vers eux que l’on va se tourner s’il y a une grave difficulté. Ils répondront : «  je ne savais pas ; on ne m’a pas écouté ; les autres ont dit non ; c’est la faute de X ou Y, de l’entreprise… ». Peut être mais ils devront aussi répondre aux questions, ce que personne n’aime.
Alors faut il continuer à être conseiller syndical ? Je réponds fermement oui, car l’immeuble vous appartient, votre bien personnel et vos finances sont concernés et vous avez intérêt à vous investir. Le droit l’a bien compris, on peut être rassuré.
d)    LE DROIT EST BIENVEILLANT POUR LES MEMBRES DU CONSEIL SYNDICAL.
Il résulte d’une étude de Me Colette CHAZETTE avocate au barreau de Lyon [informations rapides de la copropriété n°620 .Juillet-août 2016 page 13 et suivantes] qu’il y a en réalité une redistribution des rôles au sein des copropriétés, et que si les professionnels sont indispensables et de mieux en mieux formés, les copropriétaires doivent plus participer et être soutenus. C’est une bonne nouvelle .On se dirige vers une nouvelle gouvernance : l’avenir nous dira si c’est vrai et surtout efficace. Y aura – t il plus de mise en cause de la responsabilité des membres des conseils syndicaux ?. J’espère que non, sinon la démocratie dans l’immeuble n’aurait plus de sens : on ne peut vouloir que les copropriétaires prennent des décisions et en même temps les sanctionner s’ils se trompent, forcément de bonne foi  .La loi évolue et parfois en contredit une précédente : on ne peut incriminer ceux qui essaient de comprendre et d’agir. Prenons un petit exemple. La loi ALUR  n°2014-366 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové de Mme DUFLOT  promulguée le 26 mars 2014 a imposé au conseil syndical une mise en concurrence du syndic lors de chaque désignation, entre autres diverses et nombreuses mesures qui sont encore décriées à ce jour, et qui ont fait l’objet de nombreux textes à connaitre , puis à interpréter par les tribunaux.(c’est ce que l’on appelle l’insécurité juridique même pour les professionnels du droit).Mais vous le savez dans notre beau pays les gouvernements changent et ce qu’un ministre a fait , un autre peut le défaire même s’il est du même parti politique, avec le même chef de l’ETAT.
Ainsi la loi de M.MACRON du 6 août 2015  n°2015-990  pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques contenait des dispositions sur le logement et a  assoupli ce que je viens de citer pour Mme DUFLOT : désormais l’article 21 dispose que « tous les trois (3 ) ans le conseil syndical procède à la mise en concurrence  de plusieurs projets de contrats de syndic ». Sauf si par AG à la majorité de l’article 25, celle-ci en a dispensé le conseil syndical. C’est donc moins contraignant et il y a moins de risque d’oubli des membres du conseil syndical, car en la matière –et c’est logique- le syndic en place ne va pas pousser  à sa sortie.
On tend vers plus de pouvoirs pré-décisionnels  pour le conseil syndical ce qui ne veut pas dire plus de responsabilité pour chacun de ses membres. Je vous invite donc à être candidat et vous faire élire   , à travailler collectivement, et à collaborer avec loyauté avec le syndic, réciproquement naturellement.
Le conseil syndical donc ses membres, a aussi des obligations. Il devra rendre compte verbalement ou par écrit ce que je conseille, de sa bonne gestion  ce qui n’est pas vraiment nouveau : [réponse ministérielle 30 novembre 2004 p.9511 n°46780].S’il y avait carences ou manquements avérés par exemple pas de mise en concurrence au moment voulu ; défaut de vérifications comptables ; choix d’un mauvais prestataire ou collusion avec des entreprises, ( ce que personne n’ose imaginer) il pourrait y avoir engagement de responsabilité  pour faute personnelle . D’où l’intérêt de contracter une bonne assurance pour ces fonctions ? : [lire J.M.GELINET la responsabilité des membres du conseil syndical Revue des loyers n°880 octobre 2007].
On peut être rassurés. On ne recherche pas particulièrement la responsabilité d’un membre d’un conseil syndical pour la raison suivante :«la complexité des textes juridiques et comptables actuels ainsi que le manque de formations théorique et pratique des conseillers syndicaux plaident en faveur d’une bienveillance du juge à leur endroit »[info.rapides copro. septembre 2011- J.M. ROUX].Le mieux est évidemment de n’avoir jamais affaire au juge ce qui évite tout stress.
           
                   EN GUISE DE CONCLUSION
En matière de sécurité, d’une façon globale, tout le monde doit prendre ses responsabilités  comme citoyen attaché à nos valeurs, à nos principes de droit, et à notre manière de vivre. Les pouvoirs publics et les professionnels ne peuvent être partout et tout faire. Il nous appartient d’être actif.
Un immeuble est un microcosme qui résume à lui seul les problèmes de sécurité qui nous défient et souvent nous bouleversent, par ses habitants permanents, ceux qui y passent, ceux qui y travaillent, les professionnels qui le gèrent, et les forces de l’ordre et de secours qui accourent quand nous en avons besoin. L’immeuble nous oblige à ne pas revendiquer que des droits, et nous impose d’accomplir nos devoirs même si notre intérêt direct est concerné. L’immeuble est un lieu de vie entre des individus différents, un espace de compromis, de négociations   ,de tentatives de comprendre les autres, donc d’être tolérants.
La sécurité est l’enjeu des prochaines années. Nous devons tous en être conscients et décidés à jouer notre rôle modeste. Restez citoyen en étant copropriétaire et la société tout entière y trouvera profit.