dimanche 29 octobre 2017

Billet d’humeur sur l’air du temps : les croyances, les élites et l’argent, la politique évidemment…

Billet d’humeur sur l’air du temps : les croyances,  les élites et l’argent, la politique évidemment…
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Ce sont les vacances autorisons nous de la légèreté. On ne fête plus la toussaint et la visite des cimetières qui ne m’a jamais enthousiasmé ,  car c’est ringard sûrement et cela rappelle trop pour certains l’église que je ne fréquente d’ailleurs pas. Se souvenir de ceux qui ne sont plus est suspect sauf le culte pour ceux qui témoignent de  diverses révolutions car on tuait pour la bonne cause, parait- il. On attendra donc  le 11 novembre pour commémorer  les morts pour la France ou ceux qui sont tombés en combattant le terrorisme  ou les délinquants de toute nature .Le conseil d’Etat  champion de la protection des libertés publiques-après des années de contentieux initié par la libre pensée de bretagne - vient d’ interdire de garder  une croix sur un monument  construit sur le domaine public d’une commune  qui avait voulu rendre hommage à Jean-Paul II  pape catholique,  un de ceux qui ont combattu le communisme et aider à  rendre la liberté à certains peuples . Laïcité extensive et radicale oblige . Je ne défends évidemment ni la croix, ni le croissant, ni l’étoile de David , ni autre symbole. Mais faudra- t-il décapiter le sommet de nos églises et le mont saint Michel qui incarnent  la croix ? Sans compter les cathédrales dont la dernière à paris de l’église orthodoxe.  On espère qu’il en sera de même quand  des fidèles  d’autres religions voudront faire connaitre leur croyance à tout le monde, et l’afficheront sur le domaine public, dans nos rues en particulier.  Nos libres penseurs doivent être attentifs à toute manifestation de religion sur l’espace commun, quelle soit en béton ,  en vêtements ou en psalmodie. Et surtout être tolérant s’il n’y a pas de prosélytisme. La laïcité  n’est pas faite que d’interdictions. Elle est aussi un moyen pour conserver la paix  et admettre l’histoire d’un peuple et ses racines. 
On préfère célébrer Halloween et se faire peur, fête paienne  de samain  dieu de la mort,  sorte de nouvel an  celte  en vogue chez les anglo-saxons et qui sauf erreur de ma part n’a pas une dimension spirituelle très affirmée. On mange des bonbons après avoir revêtu un masque d’horreur, ce qui ravit nos boulangers et autres vendeurs de sucreries, ainsi que les dentistes bien sûr.
 Je préfère essayer de rire autrement  dans ce monde de brutes et d’indignations pour tout et rien comme si le ciel allait nous tomber sur la tête plusieurs fois par jour. Puis l’écume disparait et reste la réalité.  L’actualité nous donne des exemples.
Je suis toujours étonné par les polémiques qui démarrent de façon tonitruante, qui durent « intensément » l’espace d’un moment plus ou moins court, mais échauffent les esprits comme s’il s’agissait d’une affaire cruciale remettant en cause notre destin  pas moins. Ainsi la tentative d’exclusion des « traîtres » -on n’a pas peur des mots-qui ont choisi de travailler et soutenir M.Macron tout en restant membre du parti  les républicains, et qui contribuent à faire voter des mesures que la droite soutient  depuis des années. Pour le militant qui est le traître ? La procédure de radiation a tourné à la pitrerie, malgré la haute qualité auto-proclamée et le souci de cohérence des dirigeants des  républicains transformés  en  juges et ne pensant pas à leurs propres intérêts, bien sûr. Quel est l’intérêt des électeurs de la droite républicaine : que les mesures  revendiquées depuis des années que les gouvernements de droite n’ont pu réaliser soient prises et que la France réussisse même si le président n’est pas  membre des républicains canal historique. Ce qui ne veut pas dire forcément approbation de tout ce que fait le chef de l’Etat qui semble avoir un vocabulaire qui ferait pâlir de dépit Nicolas Sarkozy qui a été vilipendé pour rien dans cette sémantique. Mais ce que l’on ne pardonne pas à l’un, on s’en gausse avec indulgence pour l’autre.    
Pour d’autres sujets on jette des anathèmes à la figure, on cite des noms (en faisant fi de toutes précautions, de la présomption d’innocence, et de la réalité des faits ou non). Le dénonciateur  ou la dénonciatrice ne tombons pas dans l’exclusion et respectons la parité, a bonne conscience car il ou elle  est certain de sa vérité, parce qu’il ou elle est une victime forcément sublime aurait écrit marguerite Duras,  et qu’il ou elle  se bat pour les autres. Mais les autres -moi en particulier - ne lui ont rien demandé et  ne sont intéressés que de loin souvent ou pas du tout par son malheur présumé. Autrefois on parlait de l’avant-garde du prolétariat qui éclairait le peuple tout en lui dictant sous peine de représailles des règles brutales. Aujourd’hui une poignée prétendent être les porte- paroles de l’éthique,  de l’anti racisme et de la lutte contre toutes les discriminations, en montrant  où est le bien et quelles sont  les conduites à tenir. Non merci ! comme disait Cyrano de Bergerac. Je n’ai pas besoin de nounous . J’agis selon ma conscience.
M. Bruno Le Maire  sémillant  ministre qui avait  voulu être président des républicains de droite et qui a été sèchement  battu  aux élections internes mais rattrapé au tirage par le  chef de l’Etat , est passé par convictions sans aucun doute chez M.Macron  et  vient de rétropédaler après avoir répondu qu’il ne dénonçait pas-par haine de la dénonciation qui rappelle de mauvais souvenirs - dans le milieu politique les harceleurs. Il a publié immédiatement après la bronca qu’il a suscitée une vidéo pour dire que la  dénonciation du harcèlement en politique aussi -comme félicie- s’imposait en réalité mais qu’il n’avait personne à dénoncer. Ouf ! Le politiquement correct a frappé même si la cause est juste.
Des dénonciations sont permanentes : on tape sur les élites et l’argent , bien que le niveau pour être riche descende dangereusement. Personnellement je l’avoue, ce qui devrait m’être à moitié pardonné : j’ai toujours rêvé de faire partie de l’élite et d’être riche comme un jeune footballeur brésilien ou français ou un adolescent qui a créé une start-up, ce qui m’aurait permis de ne pas payer beaucoup d’impôts voire que le trésor public m’adresse un chèque comme pour Mme Bettencourt, paix à son âme . La contribution à l’impôt est la base de la vie en société car elle permet la redistribution donc la lutte pour l’égalité. A la condition que chacun mette du sien, à son niveau, avec ses moyens. Quand c’est gratuit c’est-à-dire que l’on ne participe  pas même de façon symbolique, cela n’a plus de sens et ne responsabilise personne. Cette remarque ne plaira pas à tous puisqu’il faut faire payer les riches qu’ils le soient par leur mérite et leur travail ou non. J’assume.  Mais si je pouvais pour des raisons de droit à ne pas confondre avec la morale être exonéré d’impôts , tout en profitant de tous les services en France , de la solidarité, de la protection de l’Etat  et de mon confort, j’approuve. Personne ne paie plus que le calcul  et le montant qu’il reçoit du centre des finances publiques, il y a des limites à  la philanthropie. Je ne fais partie selon moi, que de la classe moyenne devenue supérieure parce que je suis propriétaire immobilier-merci le nouvel ISF- et j’ai toujours payé impôts et taxes sans jamais recevoir une quelconque aide publique. Je suis donc illégitime à parler justice sociale comme de n’avoir pas bénéficié d’une HLM avec un sur- loyer pourtant largement inférieur au prix du marché. Je n’ai pas su faire, et donc il est normal de me punir en me classant parmi les riches qui vont payer à leur retraite une CSG augmentée, sans bénéficier de la disparition de la taxe d’habitation.  Dura lex sed lex qu’elle soit injuste ou non.  Cela m’apprendra à avoir économisé et eu des ambitions.  M.Hollande n’aimait pas les riches c’était clair. M.Macron les adore et veut qu’ils investissent. Dans les deux cas je  suis à contre courant. Cherchez l’erreur.
Je ne suis pas non plus une élite, un grimpeur exemplaire, j’ai le vertige quand je monte trop haut y compris sur un escabeau, et je fais partie de ceux qui s’accrochent à la corde comme la corde soutient le pendu. M.Laurent Wauquiez qui est candidat à la présidence du parti les républicains est un premier de la classe, un premier de cordée dirait M.Macron qui en est un autre. Il est bardé de diplômes les plus prestigieux, appartient à l’élite intellectuelle, et se dit non héritier en politique. Il a dû oublier que c’est M.Jacques Barrot qui lui a laissé son siège de député en haute- Loire . Pourtant M.Wauquiez devant les militants de droite à  la Napoule vient de déclarer   qu’il voulait être le porte- parole  de la majorité silencieuse- ce qui nécessite une ouïe  affûtée ou un appareil  auditif  de bonne qualité - qui n’était pas entendue: « alors le peuple vote pour les extrêmes et les élites : pour faire taire le peuple on brandit l’étendard du populisme ». Mais qui sont les élites si on exclut M.Mélenchon et Mme Le Pen  et M.Wauquiez qui aime le peuple, lui ? Il a évoqué « le moule [de la pensée] forgé par les grandes écoles » (dont il est issu) .Il a dénoncé les censeurs du débat, la bien pensance de la gauche -j’ajoute de l’ultra gauche  car le parti socialiste a disparu avec ses idées d’un autre siècle -et il  a raison car les donneurs de leçons de toutes catégories  qui culpabilisent l’autre qui ne croit pas dans leurs  valeurs mais en a  des différentes, m’exaspèrent et les débats factices d’une communauté ou d’un genre me sont insupportables.  M.Wauquiez préfère la France au village global. Mais l’un n’exclut pas l’autre et on ne peut se replier sur soi en ignorant ce qui se passe ailleurs. Le brexit nous le démontre. C’est un grand tort d’avoir toujours raison comme le disait Edgar Faure. La vraie catégorie élite, celle qui éclaire sans dénoncer ou  rejeter est donc très réduite.
Il nous faut des élites entendues comme celles qui savent , réfléchissent et proposent des solutions d’intérêt général  qui ne sont pas dogmatiques. Celles autoproclamées  autour de saint -germain- des prés ou dans des pré-carrés résultant de leurs statuts sociaux  ne vivent que de leurs protections, copinages , absence de prise de risque, connaissance du système institutionnel ,renvoi d’ascenseurs, et de  l’héritage culturel. L’espoir est de proposer la même chance pour tous et de sortir par le haut. Ce n’est pas une simple question d’argent mais de moyens mis à la disposition des plus doués d’où qu’ils viennent et du bas en particulier et qui veulent s’intégrer dans la partie qui réussit, en faisant sauter les barrières d’une société codifiée et construite en silos. Le mérite comme l’effort doivent être récompensés. Et puis sortons de notre rapport conflictuel à l’argent. Le comédien Fabrice Luchini en parle au théâtre des bouffes parisiens. Il n’évoque pas les yachts, les voitures de luxe, les tableaux de maître, les propriétés improbables, les lingots…tout ce qui est vulgaire mais biens matériels détenus par les vrais riches  notamment  par des dirigeants de sociétés mondiales qui créent des fondations pour devenir mécènes.  M.Macron ne s’est pas encore attaqué à ces phénomènes de nouveaux ou anciens possédants sauf pour dénoncer la jalousie à leur encontre. Il parle d’or venant de la banque Rothschild !  M.Luchini fait parler les écrivains qui se sont exprimés sur l’argent . Il cite notamment Sacha Guitry : « si j’étais le gouvernement comme dirait ma concierge, c’est sur les signes extérieurs de feinte pauvreté que je taxerais impitoyablement les personnes qui ne dépensent par leurs revenus ». Les élites qui écrivent ont tout dit sur l’argent.
 Après Me  Raquel Garrido qui  a dû quitter son hlm alors qu’elle est une avocate pauvre selon elle  qui ne paie pas -ou ne payait  pas- ses cotisations à la caisse de retraite ou à l’ordre des avocats  tout en travaillant  chez T. Ardisson et est marié ou vit avec M.Corbière député de  la France insoumise et très proche de M.Mélenchon, une élue du même parti qui occupe légalement  une hlm de  la ville de paris de 80 m2 pour 1300 euros par mois et refuse de partir a déclaré : « je ne vais pas payer un loyer pour enrichir un propriétaire et augmenter la spéculation immobilière » (SIC) . Les étudiants ou les familles nombreuses qui louent un studio ou une chambrette pour à peu près le même prix apprécieront.  Vivement que M.Hulot qui protège les espèces rares  s’intéresse  à ces catégories de politiques qui se sentent discriminés !
Que ces polémiques démagogiques cessent et que l’on s’attaque à la réalité des dossiers. Une société apaisée doit rassembler tout le monde.  Dans une équipe de foot pour que l’avant- centre et les ailiers soient efficaces, la défense doit être solide, et les milieux de terrain remonter inlassablement la balle pour la passer dans les meilleures conditions possibles à ceux qui ont le talent de marquer les buts. C’est cela une nation.



mercredi 11 octobre 2017

« JUSTICE et ÉQUITÉ » le 10 octobre 2017

 « JUSTICE et ÉQUITÉ » (extraits d’une conférence modeste  dans un club de réflexion le 10 octobre 2017.)


 La route de la vie est longue et il ne faut ni être pressé d’atteindre le but -si celui-ci existe ? -ni renoncer au moindre obstacle . La patience est une vertu et l’ambition qui est louable doit s’accompagner d’expériences voire d’échecs pour rebondir et  toujours faire mieux On parle de justice et d’équité mais est- ce la même chose  ou l’une a -t-elle besoin de l’autre pour que le juste soit reconnu ?
La Justice est au centre de la réflexion, constamment , formellement ou implicitement car l’homme pour vivre, pour donner un sens à la vie et à la sienne en particulier doit avoir la certitude que le monde est juste ; que les rapports sociaux le sont aussi ; et que le bien triomphe toujours, même si parfois il est permis de s’interroger  quand on regarde l’actualité en France et dans le monde et que l’on constate effaré que l’homme est imaginatif pour faire le mal .La justice incarne la loi, le droit, et est prononcée par des hommes .Elle doit écarter l’injustice, c’est-à-dire ce qui est abusif, arbitraire, illégitime…( bien qu’un ancien président de la république ait  parlé de la force injuste de la loi, dans certains cas) et elle est destinée à régler les conflits entre les hommes. Elle doit être objective et parfois elle s’éloigne  des cas humains spécifiques car elle a aussi une fonction d’exemplarité…
L’équité est une vertu –comme la justice- qui tient plus de la loi naturelle, et non pas de celle des hommes  fabriquée par des parlementaires ou des magistrats avec la jurisprudence, dans l’appréciation de ce qui est dû à chacun. Victor HUGO s’exprimait  ainsi : « le monde matériel repose sur l’équilibre, le monde moral sur l’équité ». L’équité permet de prendre en considération la dimension humaine, au-delà de la place de l’individu dans la société, avec ses contradictions, sa part d’ombre, et elle permet de « compenser » ce que le droit ne retient pas comme circonstances à charge ou à décharge…
On dit que la charité et l’équité inspirent les jugements. L’équité est une garantie contre toute forme de pouvoir arbitraire ce qui permet un traitement égal des êtres humains, et souligne l’imperfection des règles de droit. On est plus dans l’éthique que dans la règle intangible et l’on parie -si je puis dire - sur la perfection de l’être humain qui doit pouvoir s’amender quitte à le pousser à le faire !
Justice et équité ne font cependant   qu’un. Quels sont les éléments qui permettent de l’affirmer ?…

1°) Le doute :
Le doute est consubstantiel  à celui qui est de bonne foi et ouvert , mais c’est un doute positif qui permet d’agir et ne fait pas reculer : Il faut assumer ses responsabilités. Ce n’est pas une sorte de principe de précaution devenu constitutionnel sous la Vème république. Le doute de l’honnête homme  se situe en amont  dans la réflexion préalable, dans la discussion qui permet d’affiner la pensée et d’en extraire les scories ou le dogmatisme même involontaire. Et  dans la pesée au trébuchet du pour et du contre, des conséquences de la décision  et de sa motivation. Rechercher la vérité est un projet quelque peu prétentieux ou présomptueux, et un exercice qui peut se rattacher à mission impossible si l’on tient pour vérité  diverses affirmations et certitudes .Mais on ne peut y renoncer ou reculer car l’homme est sur terre pour faire progresser son alter ego, et là où il le peut , avec ses modestes moyens, par l’exemple dans l’action faire avancer le plus grand nombre vers ce que l’on définit comme le progrès donc en combattant le mal et l’injuste.  Notre devoir n’est pas dicté par l’extérieur, par un pouvoir temporel ou spirituel à qui l’on obéit  ,  mais émane de nous .C’est aussi accepter que notre solution ne soit pas LA solution , mais qu’elle ait été élaborée après vérifications, soumise au débat contradictoire, énoncée de bonne foi,  et si possible  bénéfique pour d’autres…
Le doute philosophique ne conduit pas à l’incertitude ou au scepticisme ou à la renonciation : « Tout ce que je sais c’est que je ne sais rien » mais suffisamment quand même pour agir .Une fois que l’on s’est débarrassé de ses déterminismes - l’homme n’est grand que s’il domine ses peurs et préjugés ce qui n’est pas le plus facile -ou de ses réflexes idéologiques nés de divers motifs, il doit avancer vers la recherche de la vérité que personne n’a cernée définitivement et ne prononce avec certitude. C’est DESCARTES dans le discours de la méthode qui nous donne quelques clés pour nous apprendre comment faire pour s’en remettre à la raison et à faire attention à nos sens, à notre instinctivité ,à nos penchants naturels : l’homme libre tend vers la justice et la vérité qui sont des notions qu’il a en lui et qu’il  essaie de faire émerger de façon concrète après une longue méditation accentuée par les épreuves qu’il traverse et l’enseignement qu’il reçoit à tout instant. Il doit se faire un avis personnel, car s’il est un jour appelé à devenir juge, et participer  à un tribunal, il devra être éclairé c’est-à-dire distinguer la justice de l’équité, trouver une vérité et prendre ses responsabilités sans haine ni faiblesse, et en écartant ce qui pourrait l’entraver dans sa décision ou abuser de ses fonctions. Il faut rappeler la sentence de PASCAL qui réunit apparemment des contradictions : « la justice sans la force est impuissante : la force sans la justice est tyrannique ». Ce qui signifie que la justice a besoin des autres pour réussir…

Rien n’est jamais définitivement acquis .A chaque avancée il y a une contrepartie et comme l’indiquait KANT « l’usage de la raison sans critique ne conduit qu’à des assertions sans fondement », même si KANT croit à l’impératif moral. Les trois pouvoirs traditionnels l’exécutif  ; la religion surtout à notre époque où la laïcité est redevenue un combat ;  les militaires  ou la force en général, auxquels on peut ajouter les médias, doivent être relativisés dans leurs effets et leurs puissances et être exercés  sous bonne garde avec le parlement et des contre-pouvoirs divers pour en combattre tous les excès et rappeler que l’individu n’a pas que des droits personnels mais qu’il a surtout des devoirs collectifs .C'est le débat actuel entre  les moyens donnés à la lutte contre le terrorisme et la garantie des libertés individuelles. Où faut -il placer le curseur  pour que le point d’équilibre soit trouvé ?. L’Etat peut- il , doit- il avoir des pouvoirs exceptionnels  sous peine qu’il en abuse et que par la force de l’habitude et des prétextes divers, fondés ou non , tous les membres de la société doivent devenir suspects, dans l’intérêt du plus grand nombre ?. La justice doit- elle faire pencher le fléau dans des circonstances majeures pour tous ?...
L’homme attentif blanchi sous le harnois  des ans  a pris du poids (philosophique) même malgré lui, s’il a été attentif pendant toutes ces années d’apprentissage ; il a élargi son horizon (intellectuel) ; il a pris des coups de toute nature qui parfois ont remis en cause  ce qu’il croyait sur la nature humaine en particulier  dans le domaine du mal en général, et il s’est confronté avec la réalité , l’égalité, l’opinion des autres : il est devenu plus ouvert, plus tolérant . Il a compris aussi qu’il ne peut y avoir d’organisation sociale sans justice. ROUSSEAU n’a pas toujours raison surtout quand il prétend que l’homme est né bon et que la société le pervertit ; les combats de VOLTAIRE pour CALAS ou le Chevalier de la BARRE, en se transformant en avocat pour qui la vraie justice soit rendue, entrent en résonance avec notre siècle. Certes « il n’y a pas de véritable action sans volonté » ajoute ROUSSEAU .L’homme devra rendre la justice en équité, car  la loi positive des hommes peut n’être pas suffisante ni juste pour juger l’homme dans sa globalité. S’il faut de surcroît juger un autre  dont la conscience ou l’action répondent à d’autres critères plus immatériels, à des valeurs qui dépassent le concret ou celles qui sont communément admises dans le cadre de la tolérance, la responsabilité de ses juges est grande .Le juge devra faire son examen de conscience : doit-il appliquer stricto sensu la loi écrite relative et circonstancielle, ou doit -il la tempérer par ce qui n’est pas écrit, une loi naturelle qui ressortit uniquement de l’humain ?...
Le doute philosophique fera partie du jugement.
 L’homme qui a vécu et réfléchi a compris que les apparences peuvent être trompeuses, que la vérité avec un grand V, celle qui va vers la connaissance des hommes et de l’humanité a besoin d’être disséquée, confrontée, polie  .Il doit tenter et réussir, de se libérer de sa part obscure pour atteindre un objectif enthousiasmant qui le porte vers l’avant, vers le haut, et vers la sérénité. Lorsqu’il atteindra le but qu’il s’est assigné il sera revenu à son point de départ : il aura compris qui il est, et ce qu’il doit servir. Autrement dit à la prétendue fin du parcours il lui restera tout à faire.
En réalité connaitre c’est se ressouvenir. C’est ce que dit PLATON à travers la maïeutique :
« Socrate : si donc la vérité existe dans notre âme, elle doit être immortelle. Aussi faut-il quand il se trouve que l’on ne sait pas, c’est-à-dire qu’on ne se rappelle pas d’une chose, se mettre avec CONFIANCE à la chercher et s’en ressouvenir  » [.MENON] .
Mais encore faut-il que nous ayons « la  ferveur » ou le bagage humain suffisant  en nous car nous pouvons être creux ou ignorant, tout le monde ne possédant pas un niveau  intellectuel  à la hauteur des philosophes anciens ! Le chemin permet soit de redécouvrir pour les meilleurs, soit de créer pour les autres. Dans tous les cas de figure l’action paie, et on doit distribuer aux autres la monnaie de ce que l’on a récolté . Ajoutons que l’homme a une conscience qui lui donne le sentiment -voire la certitude - qu’il est responsable de ses actes. C’est le philosophe ALAIN (1868-1951) qui distinguait la morale composée d’obligations exigées par la société, aux devoirs universels que l’esprit nous impose. Par ceux-ci l’homme donne un sens à sa vie et à l’humanité…
Le doute méthodique  au service de l’action va donc permettre d’aborder la justice et l’équité avec plus d’acuité et de connaissances éprouvées.

2°) Justice et équité : les deux faces de la responsabilité :
Il faut faire préalablement remarquer qu’un individu  peut échapper à la justice s’il ne commet aucune infraction (volontaire ou non) ; s’il n’a aucun litige personnel  avec un autre ou familial ; professionnel ; ou autre contentieux (urbanisme, fiscal, social ); si aucun « ennemi » ne le poursuit pour une raison ou une autre ; si personne ne le met en cause pour une raison bonne ou non .Ce qui est déjà rare dans une vie bien remplie !
L’homme tout au long de son parcours est obligé de réfléchir à la justice soit pour lui-même soit pour les autres.On est dans l’application de la loi tout simplement et de la justice entendue comme le respect de la règle, de la norme sociale, et la volonté de réparer le préjudice d’une  ou des victimes. Les juges n’ont pas à y glisser une appréciation a priori morale. DURA LEX SED LEX…
Puis progressivement la notion de justice va se complexifier ; les fondamentaux restent mais on y ajoute l’équité qui est une notion plus volatil, d’essence naturelle, qui existe sans texte et est donc de la conscience de chacun. Dans son « petit traité des grandes vertus » le philosophe André COMTE-SPONVILLE définit ainsi cette vertu : « c’est un sommet entre deux voies, une ligne de crête entre deux abîmes ». Il définit ensuite la justice comme suit :
« être  juste au sens moral du terme c’est refuser de se mettre au-dessus des lois (comme  quoi la justice même comme vertu reste liée à la légalité)  et des autres ». Albert CAMUS aussi a défini le juste en écrivant (c’était alors la guerre d’ALGERIE)  qu’entre sa mère et la justice il préférait sa mère. La justice est donc aussi un appel à la conscience. La justice est cette vertu par laquelle chacun tend à surmonter son premier réflexe, à ne pas suivre sa tentation ou celle du plus grand nombre, en se mettant sur les hauteurs, en regardant la plaine du haut de la montagne (a dit le philosophe IBSEN) , et en sacrifiant s’il le faut ses désirs et ses intérêts. La justice peut appeler au sacrifice et nécessite souvent un effort d’humanisme pour ne pas tomber dans la facilité et le contentement de soi. La justice se tient entre les deux branches du bien et du mal , dans la mesure que symbolise sa balance  donc dans l’équilibre ou la proportion…
La justice et la loi injuste : l’équité.
Selon ARISTOTE « l’équitable tout en étant juste n’est pas le juste selon la loi, mais un correctif de la justice légale », lequel permet d’adapter la généralité de la loi à la complexité changeante des circonstances et à l’irréductible singularité des situations concrètes. C’est selon ARISTOTE « la plus parfaite des vertus ».
 L’équité est la dimension horizontale entre les hommes, à travers la tolérance acquise  car elle n’est pas forcément innée, et la fraternité  polie par les rapports humains est  parfois rugueuse .La justice c’est aussi donner à chacun ce qui lui revient. Le droit est l’art d’organiser la vie en société grâce à des règles votées démocratiquement-même si on est loin de l’agora des grecs .Il s’agit de régir les rapports sociaux pour le plus grand nombre par une règle objective, respectueuse des grands principes et des valeurs républicaines (même si certains en contestent le contenu et la portée), avec la justice (au sens de l’organisation judiciaire) pour arbitre.
L’équité est le reflet de la primauté du cas particulier sur la règle générale : elle représente une justice fondée sur l’égalité qui cherche à résoudre les litiges en dehors des règles de droit prétendues trop « raides », trop axées sur l’intérêt collectif et l’intérêt général définis par une majorité qu’une minorité n’accepte pas ou plus.
Dans son article dans l’encyclopédie intitulé « droit naturel », Denis DIDEROT écrit : « le droit est le fondement ou la raison première de la justice . Mais qu’est-ce que la justice ? Vous resterez convaincu que la justice est à l’équité comme la cause est à son effet ou que la justice ne peut être que l’équité déclarée ». Il ne faut pas confondre la justice avec la vengeance  chacun  le sait .Il faut persévérer puisque SOPHOCLE nous dit que la justice finit toujours par arriver ( ANTIGONE face au roi)…
L’homme doit combattre surtout l’INJUSTICE au nom du bon droit et de la protection des faibles . Il ne doit pas oublier l’amour ou la compréhension  -au sens de comprendre l’autre- qui transforme son combat  mais ne l’affaiblit pas : il le transfigure  pour qu’il devienne plus apaisé mais aussi déterminé. La vengeance n’apaise pas la souffrance. La justice la sublime et est inspirée aussi par un souci moral  , qui vient en « soutien » de la règle de droit, des vertus cardinales, celle de la justice est bonne absolument, surtout si elle s’appuie sur l’équité .La prudence, l’espérance et le courage ne sont des vertus qu’au service du bien ou relativement à des valeurs ( la justice) qui les dépassent ou les motivent.
La douceur et la compassion ne tiennent pas lieu de justice même à l’égard des faibles.
L’inquisition (de jadis avec les hommes de dieu) n’est pas la justice, même si notre système judiciaire actuel est inquisitoire : un juge cherche des preuves. Inspecter veut dire contrôler : toutes les règles sont –elle respectées dans l’intérêt de tous ?…
En réalité la justice et l’équité sont des frères en miroir car ce qui est juste ne peut s’exonérer de conscience, de droiture, et de responsabilité. L’homme avec le temps, et si ce n’est pas le cas c’est grave, a  réfléchi et progressé : ce sont ses actes et non ses  pensées qui le révèlent. Il a   accepté des sacrifices  en y rajoutant l’humanité ce qui fait beaucoup mais est un objectif que l’on doit qualifier d’atteignable même si l’utopie n’a pas réussi au chancelier d’Angleterre Thomas MORE. A-t-il  accompli son  devoir ? Oui peut être  mais ce n’est pas fini. A-t-il  surmonté ses  défauts et a – t-il  été indulgent avec lui même ? On l’espère  mais c’est parce que l’homme est perfectible et non parfait, que la justice doit fonctionner et l’équité l’irriguer…
3°)Le chemin est long et difficile :
L’homme dans sa grande inconscience et prétention a construit la tour de BABEL  pour parler à dieu d’égal à égal. En retombant sur terre  les diverses communautés se sont affrontées , raisons légitimes ou non  contre croyances. On sait comment cela s’est terminé. Depuis ce temps c’est le chaos .Parmi ceux qui lisent la bible ou le coran, certains prennent ces textes au pied de la lettre, et deviennent des intégristes sans aucun doute , pensant avoir la vérité révélée. L’écrivain Jean TEULE a dit qu’au début de ces textes « fondateurs » il aurait fallu y ajouter : « il était une fois ».
C’est parce qu’il était une fois que la progression vers la vérité échappe à toute révélation et certitude et qu’elle est plus proche de la raison, même si celle – ci n’est pas toujours la panacée puisque l’homme a besoin d’espérer  et de récompenses qui le motivent et lui font comprendre qu’il ne s’est pas trompé dans ses choix et ses combats.
 L’idéal est utopique, mais nécessaire . Le chemin pour tenter de trouver Sa vérité , qui on est vraiment et ce que l’on peut apporter aux autres est très difficile. Mais il faut poursuivre la route   inlassablement car le but à atteindre change ou s’éloigne – comme l’horizon qui recule au fur et à mesure que l’on s’en rapproche -tous les jours et d’une satisfaction on passe à un regret de n’avoir pas fait mieux. C’est le président KENNEDY qui disait : « ne vous demandez pas ce que le pays peut faire pour vous. Demandez -vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ». L'homme est comme Sisyphe  avec CAMUS qui situait son héros dans le cycle de l’absurde ; il doit remonter son rocher tous les jours car un jour le rocher sera au sommet et il ne redescendra plus. C’est le but ultime de l’homme, et il faut y croire même dans le contexte actuel de notre société mondialisée en proie à des soubresauts démocratiques ou parfois théocratiques ce qui ne présage rien de bon. Le chemin est plus escarpé qu’un autre car même avec un G.P.S philosophique et l’aide des autres  on n’est pas sûr d’arriver au port. C’est l’interrogation qui fixe le but. L’homme  doit remettre son ouvrage cent fois sur le métier puisque  la tâche n’est jamais achevée . C’est parfois décourageant  mais c’est aussi exaltant car sans but dans la vie , sans objectifs, on a tendance à stagner voire à renoncer. PENELOPE détricotait la nuit ce qu’elle avait tissé le jour , et ULYSSE son héros est revenu ! Il faut donc persévérer pour tendre vers le mieux. Mais pour qui et pour quoi ? Sa seule satisfaction n’est pas un but exclusivement légitime même s’il n’est pas interdit d’avoir de la considération pour soi , de connaitre ses défauts et qualités ne serait-ce que pour épargner le pire de soi à ses proches et aux autres. « Il n’y a que l’homme qui vaille » avait déclaré le général de GAULLE lors d’une conférence de presse le 25 /3/ 1959, année chahutée où l’ETAT devait faire des choix pouvant peser sur le destin individuel de certains. Il s’était certainement inspiré de JEAN BODIN (1529-1596) fondateur de la conception moderne de la souveraineté qui avait écrit dans «  les  six livres de la république-1576 » : « il n’y a richesse ni force que d’hommes ».
La justice quotidienne, prétorienne, celle qui sanctionne les infractions au pacte social appartient au domaine régalien de l’ETAT , est un signe de son autorité. LOUIS IX ( 1214-1270) ou SAINT LOUIS dit le prud’homme ( ce qui n’est pas une allusion à cette juridiction avec les réformes en 2015 et 2017 de M. MACRON) rendait la justice sous un chêne et n’avait à respecter que ses propres codes. Il incarnait la justice divine sur terre et tout se confondait : l’intérêt royal, la morale de l’époque, dieu et le droit coutumier à géométrie variable. Le justiciable, l’individu de base non encore reconnu comme citoyen, devait s’en remettre à la « sagesse » du roi ou à son arbitraire .La justice du XXI ème siècle a évolué même si notre droit est innervé par ceux des autres Etats de l’Union Européenne  avec leurs coutumes, leurs morales, les rapports de l’ETAT et de la religion ce qui donne un compromis. Pour celui qui respecte évidemment l’état de droit, la loi n’est pas malgré tout un horizon indépassable, surtout s’il considère qu’une décision, un jugement n’est pas juste. Il n’accepte la justice que si c’est un homme libre qui a comparu c’est à –dire qu’il a eu pleine conscience  de ses responsabilités individuelles et collectives. Tout au long de son parcours l’homme essaie d’apprendre ce qui ressortit à la volonté personnelle  de faire le bien, le mieux parfois, en étant libéré de chaines diverses  qui emprisonnent, consciemment ou non   l’individu. C’est un travail délicat souvent fastidieux  où il faut savoir se remettre en cause, où le principe de réalité souvent submerge celui de conviction comme  MAX WEBER l’a décrit, où le but n’est jamais vraiment atteint même si l’on est parvenu à grimper en haut de l’échelle.  On doit se souvenir constamment  de la chute d’ICARE. Car après avoir atteint un plafond qui peut être son niveau d’incompétence que devient l’homme? S’en contente-t-il ou doit- il encore progresser ?Pour moi la réponse est évidente : l’homme ne peut qu’essayer d'évoluer encore détaché de toute préoccupation de carrière ou d’ambition, car il doit aller dans le monde répandre ce qu’il a appris, compris  et mis en œuvre .Il doit aborder tous les évènements de la vie -dont la justice -, avec un supplément d’âme que la seule raison ne produit pas .L’équité est dans la justice comme « l’oeil était dans la tombe et regardait Caïn » (VICTOR HUGO, la conscience dans la légende des siècles).
On n’échappe ni  à sa conscience ni à son propre jugement qui s’est affiné  à travers les épreuves subies. « Ce n’est pas le chemin qui est difficile mais le difficile qui est le chemin » a écrit Soren KIEKEGAARD. Ce que je retiens du chemin, c’est que je l’ai emprunté librement sans savoir où il menait mais avec confiance en ayant la certitude qu’il conduisait au bien, entendu comme la connaissance de l’homme  donc de moi-même . Le travail sur soi-même permet d’identifier ce qu’il faut changer , et effacer les scories les plus criantes, les certitudes les moins étayées, les carences ( de la raison , de l’émotion , du rapport à l’autre).  La justice  et  l’équité ne sont pas des valeurs que l’homme  applique et analyse tous les jours. Mais le bien et le mal, le juste et l’injuste, le combat entre la lumière et les ténèbres, le niveau, l’équilibre et la mesure, et enfin la responsabilité , sont  ses valeurs quotidiennes  qui le renvoient à la justice et l’équité…..
L’homme doit devenir  ce qu’il est et forger sa réflexion  pour aboutir à ce qu’il pense et lui permet d’agir en toute conscience. Certains y arrivent plus vite que d’autres. Mais le temps ne fait rien à l’affaire, seul le résultat compte. Justice et équité ont conduit son cheminement.
4°) En guise de conclusion :
L’individu  a mis des années pour découvrir qui il est vraiment et en tirer toutes les conséquences. Il va continuer son chemin en mettant en pratique ce qu’il a appris, mais en cherchant à approfondir encore et toujours ses connaissances, en fréquentant ses semblables et le monde avec un œil acéré , avec un raisonnement lucide tenant compte des réalités et du contexte  sans oublier la compassion  qui permet d’avoir une approche globale des autres . Par la force de l’expérience il est devenu plus ouvert, et par le doute  il est plus fraternel et compréhensif  des exigences des hommes .L’inaccessible étoile est en vue mais elle ne se laisse pas capturer. La fin de l’histoire n’est inscrite nulle part et il faut toujours progresser, avec d’autres outils plus immatériels,  et après s’être façonné pour lui-même, être au service  des autres sans condition préalable. C’est ce que je retiens de mon parcours : analyser mes erreurs et mes insuffisances pour ne plus recommencer ce que j’ai raté; confronter mes convictions ; ne pas croire  dans un prétendu « dogme inaltérable » : par exemple une justice parfaite , qu’elle soit sociale ou autre : tirer profit des débats et discussions auxquels je participe, même en silence, et être persuadé que l’homme dans sa diversité liée à ses déterminismes peut s’améliorer pourvu qu’on lui explique les tenants et aboutissements  , qu’on lui en donne les moyens .La raison n’est pas la panacée mais elle est encore le meilleur vecteur pour aboutir. La critique doit l’irriguer en tenant compte des faiblesses ou du côté obscur de l’homme . On passe ainsi de la justice-idéal à atteindre- à l’équité qui est concrète et fait progresser, pour faire en sorte que l’égalité triomphe. C’est une approche indirecte du bonheur, ce que nous recherchons tous «  idée neuve en Europe »disait SAINT JUST avant de faire décapiter ses frères en révolution. Dans la lutte du blanc et du noir  on nous apprend que le blanc l’emporte. Si personne n’a le monopole du bien , certains incarnent le mal à coup sûr…
La justice  est de condamner ce que nos valeurs traditionnelles  républicaines réprouvent : l’équité est de donner à celui qui le mérite la possibilité de bénéficier d’une valeur non écrite mais qui est ancrée dans la croyance que l’homme peut comprendre pour se modifier, c’est-à-dire se surpasser vers le mieux. L’histoire nous l’a appris . Et s’il fallait conclure de façon plus philosophique, avec plus de hauteur, je citerai Régis DEBRAY (philosophe) et Didier LESCHI (préfet) qui ont écrit [ la laïcité au  quotidien. GUIDE PRATIQUE FOLIO GALLIMARD 2016 ]: « mon droit n’est pas concédé : il est reconnu et la tolérance est à la laïcité ce que la charité est à la justice ; s’il existe une spiritualité laïque liée à un idéal d’équité et de retenue, ce n’est pas un mantra, un point d’honneur ou un prêchi-prêcha. C’est avant tout une construction juridique fondée sur une exigence de la raison, l’égalité en droit de tous les êtres humains ».
Ce qui vaut pour la laïcité, s’applique à la justice et l’équité.




jeudi 5 octobre 2017

C’est quoi une liberté fondamentale ?

C’est quoi une liberté fondamentale ?
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Dans les ordonnances du 30 août 2017 dites Macron qui modifient le code du travail pas suffisamment pour les uns qui considèrent qu’il y a encore trop d’obligations pour l’employeur, et de trop pour les autres qui voient une casse sociale  , - ce qui prouve que les ordonnances innovent et sont équilibrées puisque personne n’est content !-, il y a des dispositions qui n’ont pas été encore  commentées car elles n’intéressent pas directement les syndicats qui défendent surtout leur pré -carré et leur influence sur le gouvernement, mais  qui  concernent le salarié qui défend ses intérêts devant le conseil de prud’homme ce qui relève de l’initiative personnelle. On ne va pas ameuter les foules pour cela. Parmi différentes mesures   Il y a une notion qui vient d’être mise en avant et par une jurisprudence récente et par les ordonnances Macron : celle de liberté fondamentale.
Un arrêt de la Cour de cassation chambre sociale en date du 21 septembre 2017 . N°16-20.270 a posé des principes sur l’existence  ou non d’une liberté fondamentale en droit du travail qui permettrait au juge d’ordonner la poursuite d’un contrat de travail. Les faits sont les suivants : un salarié qui avait été mis à la disposition d’une société par contrats d’intérim donc des CDD, a saisi le conseil de prud’homme en référé-et non au fond- pour faire juger que ses contrats doivent être requalifiés en CDI et obtenir la poursuite dudit contrat. La demande de requalification de CDD successifs en CDI avec toutes ses conséquences surtout financières est un grand classique du contentieux (article L.1251-40 du code du travail) devant le conseil de prud’homme qui les juge directement au fond, devant le bureau de jugement (article L.1251-41) sans passer par la case bureau de conciliation devenu bureau de conciliation et d’orientation (B.C.O.) depuis la nouvelle procédure (M.Macron étant ministre). Le conseil doit statuer dans le mois, ce qui en pratique dans les conseils de prud’homme très encombrés n’est pas possible matériellement parlant, ou en raison de demandes de renvoi des avocats dont le dossier n’est pas en état d’être plaidé : il faut attendre quelques mois. Et dans cette attente soit le contrat se termine par l’échéance, soit il n’est pas encore terminé, ce qui entraine des droits différents. L’article L.1251-41 alinéa deux prévoit «   que si le conseil de prud’homme fait droit à la demande du salarié il lui accorde à charge de l’entreprise utilisatrice une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire », sous réserve des règles concernant la rupture des CDI s’il y a eu ou non licenciement. Si la rupture est considérée comme étant sans cause réelle ou sérieuse ou abusive, le salarié a droit à des dommages intérêts selon son préjudice qu’il doit dorénavant prouver selon une jurisprudence récente de la cour de cassation. La réparation n’est pas automatique. Le barême des indemnisations -fort décrié par les syndicats-mis en place par les ordonnances Macron du 31 août 2017 pour les procédures à venir fixe un plancher et un plafond, ce que les employeurs approuvent.
 La  première question était de savoir si en référé le juge pouvait ordonner la poursuite du contrat et sur quel fondement juridique ?.La cour de cassation a dit oui. Le salarié peut saisir le juge des référés prud’hommal-qui est une procédure très rapide, on n’attend pas des semaines voire des mois avant d’avoir une décision-, qui statue vu l’urgence, et l’absence apparente de contestations sérieuses , en vertu de l’article R.1455-6 du code du travail qui lui donne pouvoir pour faire cesser un trouble manifestement illicite, ou un dommage imminent. Il peut d’ailleurs condamner par provision même en cas de contestation sérieuse. La cour de cassation avait affirmé le principe  par un  arrêt du 8 Mars 2017 n°15-18.560,  en s’appuyant sur les articles L.1245-2 et  R.1455-6 du code du travail  ; et sur  l’article 6-1 de la convention des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
L’article L .1121-1 du code du travail dispose : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». On est dans le domaine des libertés « fondamentales » du salarié : vie privée, familiale et personnelle ; liberté d’expression et religieuse ; liberté syndicale ; libertés publiques comme le droit de manifester, la protection des données…
La deuxième question était donc de savoir si le droit à l’emploi, avancé par le demandeur pour obtenir une requalification doit être considéré comme une liberté fondamentale ? La cour de cassation a répondu non bien que ce droit soit inscrit dans la Constitution. Elle a considéré que cette liberté n’était pas fondamentale, mais un simple droit à réparation qui se résout par des dommages-intérêts mais pas par la poursuite du contrat, car elle entre en concurrence avec d’autres droits comme celui de la liberté d’entreprendre avec laquelle elle doit se concilier. La discussion est ouverte.
 Pour savoir ce qu’est une liberté fondamentale, il va falloir se référer à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; aux préambules de la constitution de 1946 et de celle de la Vème république de 1958 ; des conventions internationales contraignantes comme la déclaration universelle de l’Onu de 1948 ; la convention européenne  des droits de l’homme de Strasbourg de 1950 ; les pactes de 1966 sur les droits économiques et sociaux ; sur la charte des droits fondamentaux de l’union européenne…
Cet arrêt du 21 septembre 2017 rejoint les nouvelles dispositions du 31 août 2017 de M.Macron.
L’article L.1235-3 nouveau du code du travail indique en effet que l’article L.1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article ».Ledit deuxième alinéa indique : «  les nullités mentionnées à l’alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à la violation d’une liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel, … à un licenciement discriminatoire… à une action en justice, en matière d’égalité professionnelle entre hommes et femmes… en cas de dénonciation de crimes et délits.. à l’exercice d’un mandat par un salarié protégé… ainsi qu’aux protections dont bénéficient certains salariés.. ».

Il est donc urgent de préciser ce que l’on entend par liberté fondamentale. En droit les libertés fondamentales ou droits fondamentaux représentent l’ensemble des droits subjectifs essentiels pour l’individu, assurés dans un état de droit et une démocratie. Il n’y a pas de définition juridique qui fait l’unanimité. C’est une notion abstraite qui peut être relative selon chaque individu. Le Conseil d’Etat défenseur des libertés publiques, et la Conseil constitutionnel ont créé une jurisprudence concrète à ce sujet. Rappelons qu’en vertu de l’article 66 de la constitution c’est l’autorité judiciaire qui est la gardienne des libertés individuelles. Notre société est devenue individualiste et consumériste. Chaque citoyen pense qu’il a surtout des droits et que la moindre de ses revendications n’est que l’application d’une liberté fondamentale, pour lui. Que les devoirs c’est pour les autres et que l’Etat est responsable du collectif et doit tout assumer. Les tribunaux, cours d’appel, cour de cassation , conseil d’Etat vont donc devoir apprécier au cas par cas et bâtir un contenu identique caractérisant une liberté fondamentale, cette notion étant revendiquée dans tous les contentieux. Mais c’est aussi cela la France qui se renforce sur des valeurs communes appuyées sur le bloc de constitutionnalité donc la volonté du peuple français. La cour de cassation vient d’ouvrir un débat de fond.

dimanche 1 octobre 2017

Insécurité dans le quartier et vandalisme dans l’immeuble : comment réagir ?

Conférence FNAIM Grand Paris  sur la copropriété: insécurité dans le quartier et vandalisme dans l’immeuble : comment réagir ?
Les principaux points de droit par Me Christian FREMAUX avocat.

Quand on parle insécurité le citoyen pense aussitôt qu’il s’agit de cambriolages, vols divers, destructions variées plus ou moins graves outre les incivilités, les tags, les graffitis, difficultés qu’il dénomme de façon générique par le terme vandalisme et il se demande comment il va être dédommagé car la question essentielle et pratique est : qui paie ? Il va de soi que s’il y a de l’insécurité dans le quartier il risque d’y en avoir dans l’immeuble et donc dans les biens des copropriétaires. Le lien est direct. Mais les difficultés peuvent aussi venir de l’intérieur de l’immeuble, des occupants soit qu’ils sont copropriétaires et se comportent mal, soit qu’ils sont locataires et ne font aucun effort pour se conformer à la sérénité générale, soit qu’ils exploitent des commerces ou des cabinets professionnels et que l’immeuble est ouvert au public. On connait les litiges liés à l’ouverture de la porte d’entrée avec l’installation d’un digicode ou d’un sas ce qui entraine un vote de l’article 26 de la loi de 1965 soit la double majorité , à l’ascenseur, au courrier, aux poubelles, au local vélo ou poussetes , aux horaires du samedi, à la transformation d’un local voué à l’habitation en autre chose que je ne qualifie pas pour éviter d’être accusé de discrimination. S’y ajoute l’incivisme des sauvageons comme l’avait dit un ancien ministre de l’intérieur, voire l’absence de courtoisie et l’égoïsme de certains,( comme l’abandon de meubles ou objets divers après être parti  vite...) ce qui entraine parfois des infractions minuscules mais qui irritent, et entrent peu ou prou dans un sentiment d’insécurité.
Examinons le droit applicable pour savoir ce qu’il est permis de faire.
La sûreté prévue à l’article deux (2) de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen,  est du domaine de la prévention ,  peut entrainer des mesures restrictives de libertés et de droit  et  relève de la responsabilité de l’Etat qui doit tout mettre en œuvre pour que la tranquillité publique soit respectée ; tandis que la sécurité est surtout  l’existence de moyens fournis aux professionnels, les gendarmes et  la police nationale selon que l’on est en zone rurale ou en ville, et même si ces deux forces sont désormais réunies sous l’autorité du ministre de l’intérieur. Mais la sécurité c’est aussi l’affaire des citoyens car l’Etat ne peut pas tout. Il appartient à chacun d’entre nous propriétaire ou locataire d’assumer ses responsabilités et de participer ainsi à la vie collective, sans s’en remettre  systématiquement dans les immeubles au syndic qui est « payé pour cela », ou au conseil syndical, donc en trouvant des prétextes pour ne rien faire. Il faut  réagir ce qui pose des problèmes de droit, et dépend des outils mis à la disposition des citoyens pour trouver une solution à leurs problèmes. 
Le vandalisme répond   à une définition précise prévue aux articles 322-1 à 322-4 du code pénal   que je résume ainsi : c’est un délit qui consiste à détruire, dégrader, détériorer volontairement le bien d’autrui. En l’espèce ce qui appartient personnellement au copropriétaire (appartement, cave, parking, jardin privatif… ) ou ce qui appartient au syndicat de copropriété (parties communes, locaux d’entrepôts, halls d’entrée, caves globalement,  parkings, espaces verts)… Selon la légèreté de l’acte (des tags ou graffitis par exemple) ou la gravité du dommage (voiture dégradée ou brûlée, destructions…) la sanction passe d’une simple amende à 2 ans d’emprisonnement, voire 10 ans pour le plus sérieux avec des dommages importants. Naturellement il faut déposer plainte pénale, il faut qu’une enquête ait lieu pour retrouver les auteurs, saisir son assurance et parfois se lancer dans une action judiciaire. Les victimes rechignent car en plus de leurs préjudices elles doivent sortir des frais d’avocat, de tribunal, répondre à des questions, parfois ne pas être crues ou être accusées de n’avoir pas pris de précautions…
1°) Tout dépend s’il y a ou non une surveillance humaine pour laquelle je plaide avec ferveur.La sécurité commence à l’entrée de l’immeuble.
Souvent il n’y a plus de gardien (les concierges ancienne formule en tant que tels ont quasi disparu) car l’assemblée générale a décrété qu’il ne servait à rien, qu’il coûtait trop cher, et qu’une entreprise extérieure suffisait, avec la pose de boîtes aux lettres. A propos de gardien et de salariés de façon générale je rappelle qu’il y a une obligation de sécurité de résultat [ article L.4121-1 du code du travail et Cour de cassation arrêt du 25 novembre 2015] qui oblige à un certain nombre de prise de décisions qui protègent les préposés dans leurs conditions de travail. Mais ce n’est pas le sujet de cette conférence. Ne pas avoir de gardien ou le supprimer est pour moi, en matière de sécurité une erreur. La présence humaine me parait indispensable car tous les outils modernes   comme la vidéosurveillance, peuvent dissuader, fournir des informations après les faits, mais ne peuvent intervenir à chaud, ou à titre préventif. Sauf à faire appel à une société de gardiennage ce qui a un coût.
Même si cela n’est pas écrit en toutes lettres dans son contrat, à mon avis le gardien doit faire respecter le règlement de copropriété, selon les instructions et la responsabilité du syndic ; il vérifie même implicitement l’utilisation normale des habitations ou l’exploitation usuelle   des commerces, et essaie d’éviter un minimum d’incivilités ou de conflits   entre les uns et les autres. Il est un facilitateur, un médiateur social. Bien sûr sa mission n’est pas de surveiller les allées et venues des uns et des autres, car la vie privée se respecte, mais il visite régulièrement les parties communes, les locaux communs, et les espaces verts s’il y en a :  mais il ne fait pas du « flicage » si je puis m’exprimer ainsi, il se contente de surveiller que tout va bien, sous l’autorité exclusive du syndic. Son contrat est régi par les articles L.7211 et R.7212-1 du code du travail . La sécurité n’est pas évoquée formellement. Mais son devoir est d’avertir le syndic de toute anomalie selon lui, qui peut aller du comportement de certains, jusqu’à l’abus de propriété ou de location, voire des infractions pénales apparentes. Le gardien facilite les rapports humains, contrôle l’intervention des prestataires extérieurs ou prétendus tels ce qui peut écarter de l’immeuble des individus indésirables, ou qui repèrent, ou qui s’apprêtent à faire de mauvaises actions. Il est en relations avec les divers services publics. Il sécurise ainsi les occupants de l’immeuble. Rappelons que pour un gardien à temps complet la suppression de son poste exige l’unanimité des copropriétaires en A.G., car il s’agit de la suppression d’un service qui modifie les conditions de jouissance des lots privatifs. Pour un gardien qui n’est pas à temps complet, sans service personnel (par exemple porter le courrier) la suppression du poste semble pouvoir se faire à la double majorité si le gardien est prévu au règlement de copropriété, et à une majorité simple dans le cas inverse.
On voit donc à travers le rôle du gardien comment la sécurité intérieure de l’immeuble   rejoint la sécurité du quartier.
2°)Rappelons quelques principes de droit qui touchent à la sécurité dans l’immeuble et qui permettent de réagir, sans évoquer la responsabilité personnelle du  syndic qui commettrait des fautes avérées dans sa gestion par exemple pour manque de conseil (il faudrait  faire tels travaux pour améliorer la sécurité) ou d’informations, ou parce qu’il exécute mal ou pas du tout les décisions prises en assemblée générale.  C’est l’article 18 de la loi de 1965 qui s’applique,  et l’article L.126--3 du code de la construction et de l’habitation qui précise : «  le fait d’occuper en réunion les espaces communs ou les toits des immeubles collectifs  d’habitation en empêchant délibérément l’accès ou la libre circulation des personnes ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté est puni de deux (2)mois d’emprisonnement et de  3. 750 euros d’amende ». Le syndic est devenu un auxiliaire de  l’Etat en matière de sécurité notamment. Il a le devoir d’agir seul s’il y a urgence.
1°) Il faut distinguer le rôle du conseil syndical s’il existe vraiment en pratique ,  qui contrôle et celui du syndic qui agit. L’A. G. décide et le syndic doit exécuter les décisions votées, tout en vérifiant que la loi ( il a un rôle de conseil par exemple sur la loi ALUR du 25 mars 2014 qui facilite le vote de travaux de sécurité avec l’article 24 ), ou le règlement de copropriété sont  bien respectés. Il lui appartient de prendre des mesures préventives en matière de sécurité et de faire voter les budgets nécessaires. Le conseil syndical  ne peut s’immiscer dans la gestion à la place du syndic. C’est l’article 31 du décret du 17 mars 1967 qui l’affirme. Le syndic est l’employeur du ou des salariés de la copropriété à qui il donne des instructions, fixe les tâches et les horaires : il embauche et licencie quitte à engager sa responsabilité s’il fait n’importe quoi, et si la sécurité est menacée , car les conséquences financières des décisions malheureuses sont à la charge des copropriétaires, à la fin. Mais ne pas prendre de décisions en matière de sécurité - (fermeture renforcée du parking, ou de la porte d’entrée avec digicode ou autre, vidéosurveillance, régulation des flux, occupations diverses) - ce qui peut entrainer des dépenses supplémentaires, n’est pas à conseiller car l’inaction engage aussi sa responsabilité ou celle du syndicat. Les tribunaux sanctionnent parfois pour défaut de réaction : l’article 14 de la loi de 1965 indique que le S.C.P. est responsable des dommages causés aux copropriétaires, par le défaut d’entretien des parties communes, sauf à démontrer  avoir pris des mesures, ou un cas de force majeure, ou en s’exonérant par suite de la propre faute de la victime [Cour d’appel de Montpellier chambre 10 section d. du mardi 16 décembre 2014 n° de RG 13/00797] : en l’espèce après un vol de motocyclette dans un parking il a été reproché au SCP la défaillance du  portail du parking et donc un défaut de surveillance. Le syndic était poursuivi également solidairement.
2°) Le syndic doit faire voter chaque année sous la majorité de l’article 25 i de la loi du 10 juillet 1965 (majorité des voix de tous les copropriétaires voire de l’article 24) l’autorisation permanente pour les gendarmes et les policiers de la  police nationale ou municipale de pénétrer dans l’immeuble. C’est fondamental en matière de sécurité .La délibération doit être transmise par le syndic ou un membre du conseil syndical, au commissariat, à la brigade ou/et à la mairie.
Cela n’a rien à voir avec l’appel d’un occupant au « 17 » en cas d’infractions flagrantes ou de danger immédiat ou d’urgence quelconque. Les forces de l’ordre, les pompiers, les services de secours… peuvent intervenir dans ce cas, sans la moindre autorisation.
3°Le bailleur est responsable de son locataire :
C’est naturellement le locataire qui est d’abord responsable de ses actes : s’il trafique ou exerce des activités illicites, ou commet des troubles anormaux de voisinage, il sera poursuivi à titre personnel. Si son bailleur dûment informé ne réagit pas car il perçoit les loyers et considère que les agissements de son locataire ne sont pas de sa responsabilité ,il se trompe. Il peut être condamné solidairement avec son locataire, voire à sa place. Ce sont les articles 3 ;4g ;6-1 et 7b de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 qui s’appliquent ainsi que l’article 1729 du code civil . Surtout s’il y a des problèmes de sécurité et des risques. Le bailleur doit donc sélectionner attentivement son locataire. Il ne peut accepter n’importe qui et n’importe quelle activité, notamment celles qui sont peu usuelles comme la constatation de réunions à tout moment, des individus qui défilent, l’entrepôt de matières dangereuses… Certes il n’est pas facile pour un propriétaire de contrôler son locataire, mais il devra être attentif (en matière de terrorisme avec la nouvelle loi en discussion au parlement il va falloir être très réactif). Si le bailleur après avoir été mis en demeure ou informé par lettre recommandée avec AR n’agit pas, en vertu de l’article 15 de la loi de 1965 le syndicat des copropriétaires peut saisir la justice, comme d’ailleurs toute personne concernée à titre individuel [Cour d’appel de Paris 31 mai 2000. Juris-Data 2000.118253]. Il y a une prescription de 10 ans selon l’article 42.1 de la loi de 1965.  Il n’est pas non plus impossible que les services de l’Etat informés par leurs canaux interviennent au nom de la sécurité de tous et s’étonnent de l’inertie du bailleur ? Par ailleurs le bailleur est responsable de plein droit de son locataire qui viole le règlement de copropriété ou les modalités de jouissance des parties privatives et communes, ou a une activité commerciale ou professionnelle irrégulière : [Cour d’appel de Paris 14 juin 2001. 15123 ; Cour d’appel de Paris 13 juin 2011. Juris-Data n°2011. 146801].
Le syndic comme le syndicat des copropriétaires doivent donc être très « éveillés », à ce sujet.
Etre bailleur ne garantit pas l’impunité et de dire je ne savais pas, ou je ne veux pas me mêler de la vie privée de mon locataire n’exonère en rien de sa mise en cause. En droit la responsabilité du propriétaire vis-à-vis de son locataire trouve son fondement dans les articles 1719,1720 (défaut d’entretien), 1721, 1725 et 1729 du code civil (obligation d’occupation raisonnable du logement). On ne peut héberger n’importe qui, faire n’importe quoi à toute heure du jour et de la nuit, transformer un local en industrie « curieuse ». La sécurité oblige tout le monde.
4°° la surveillance des parties communes est l’affaire de tous :
Se désintéresser de la gestion quotidienne est une erreur comme celle de ne pas désigner à qui de droit (le syndic par exemple, ou le gardien ou un membre du conseil syndical) ceux qui se comportent mal, squattent dans divers endroits, font des travaux sauvages en faisant entrer qui ils veulent dans l’immeuble, ou utilisent les parties communes comme si elles leur appartenaient. Il ne s’agit pas pour autant de se substituer au conseil syndical ou au syndic qui n’est pas sur place et ne peut tout savoir. La sécurité impose un minimum de collaboration entre tous, pour que l’information circule et que des décisions puissent être prises. La vidéosurveillance est règlementée strictement. L’installation et les travaux nécessaires étaient autrefois   votés à la majorité absolue de tous les copropriétaires soit la majorité plus 1 . Avec la loi ALUR du 24 mars 2014 , l’article 24 permet désormais que la majorité des présents ou représentés votent les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants…. La transmission des images à la police ou la gendarmerie (on ne peut filmer les portes d’entrée des appartements ni les locaux commerciaux) est décidée en A.G.  Par la majorité des voix de tous les copropriétaires : article 25 m). C‘est la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure dite LOPPSI 2  et son décret d’application du 27 janvier 2012 qui ont prévu les modalités. En cas de vidéosurveillance des parties communes il faut le faire savoir, l’afficher et poser un panneau d’information. Un particulier peut installer une vidéosurveillance chez lui mais il lui est interdit de filmer des parties communes ou son voisin ou la voie publique.
Il y a aussi l’article 26 (double majorité) qui concerne… : « les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles. En cas de fermeture totale de l’immeuble celle-ci doit être compatible avec l’exercice d’une activité autorisée par le règlement de copropriété.
On peut conclure de ces rappels  que :
Il est possible d’agir à titre préventif, et de réagir s’il y a une difficulté, mais que les responsabilités sont partagées. Il s’agit de co-production de sécurité.
 Le copropriétaire ou le locataire se confondent en matière de sécurité notamment, avec les droits et les devoirs du citoyen. Certes nos habitudes culturelles ne sont pas celles de citoyens d’autres pays  qui collaborent volontiers avec les pouvoirs publics. Mais information de ce qui est suspect, ou illégal, ou peu habituel n’est pas de la délation, et la sécurité collective a besoin de renseignement.
Les pouvoirs publics ont pris des initiatives :
 Il y a un référent sécurité dans chaque commissariat ou brigade : encore faut- il le joindre -par l’intermédiaire du syndic de préférence-pour qu’il agisse.Il peut venir dans l’immeuble pour  faire un audit de celui-ci et recommander par un rapport oral telles mesures de protection. C’est un service considérable et gratuit. Il y a aussi l’opération dite tranquillité -  vacances qui comme on le croit à tort n’est pas réservée qu’aux vacances. Dès l’instant que l’on s’absente plus de 48 heures à tout moment de l’année on peut demander à ce que des policiers ou gendarmes viennent vérifier que tout va bien. Il y a aussi la même opération pour les seniors sollicités par des escrocs, de faux agents de l’EDF ou du téléphone, des réparateurs peu scrupuleux… Enfin il y a sous le contrôle des maires et élus locaux l’opération voisins vigilants.org qui est devenue une participation citoyenne.
En conclusion il faut être optimisme malgré l’accablement qui survient quand on doit affronter un problème :
Il faut réagir avec l’aide des forces de l’ordre, avec la justice, avec le syndicat des copropriétaires, et /ou avec l’assurance.  L’insécurité dans le quartier et le « vandalisme » en général dans l’immeuble sont liés. Il faut être positif car l’insécurité n’est pas une fatalité . Elle peut être combattue si tout le monde en prend conscience, participe à son niveau sinon à son éradication du moins à sa diminution. Certes pour les incivilités il faut éduquer et éduquer encore. Mais l’homme étant ce qu’il est c’est difficile dans une société devenue individualiste, consumériste et parfois communautaire. Mais la morale ne suffit pas. En droit nous sommes obligés d’agir, de prendre des mesures sinon notre responsabilité peut être engagée.
Le débat de société pour savoir si les libertés sont menacées- on parle de despotisme doux ?, les magistrats renâclent devant les nouvelles dispositions légales qui concernent les terroristes mais qui dans l’avenir peuvent viser tout délinquant, des avocats ne sont pas contents, le défenseur  des droits lui même M.TOUBON critique – me parait intérêssant car il y a une part de vérité dans les objections et les grands principes de droit doivent être confortés notamment en confiant aux juges judiciaires ( et non aux préfets) la gestion de la prévention et l’appréciation de la mesure de contrainte envisagée pour qu’on ne glisse pas vers la loi des suspects comme le dit Me Henri Leclerc éminent avocat; mais en même temps on ne peut ignorer la demande de protection  collective des français, le sentiment que les délinquants ont des garanties qu’ils n’ont pas comme victimes ; le désir que les coupables avérés soient punis sévèrement après un débat contradictoire, la preuve de la culpabilité et la défense des avocats ; et leur accord pour que les libertés de quelques uns qui flirtent avec la loi ou qui s’en affranchissent soient limitées dans l’intérêt du plus grand nombre. Il faut placer le curseur au bon endroit entre libertés et ordre public qui sont compatibles. Il ne faut pas être excessif : nous sommes dans une vraie république, avec un état de droit fort , et chaque individu  d’où qu’il vienne, quoiqu’il a fait, a des droits qu’il peut réellement exercer. On a le devoir de s’inquiéter de toutes dérives dans l’avenir, mais on n’a pas le droit d’attendre le nouvel attentat ou une délinquance débridée sans réagir. Ce qui vaut pour l’insécurité dans les quartiers vaut pour l’immeuble : il faut savoir investir et agir. La sécurité du quartier conditionne la tranquillité dans l’immeuble sauf action individuelle préméditée. Nous sommes d’abord des citoyens et devons nous comporter comme tels.