vendredi 9 novembre 2018

Atmosphère ! Atmosphère ! est ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?


Atmosphère ! Atmosphère ! est ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.

L’atmosphère est chargée d’électricité. Dans son voyage entre les tombes le président n’a pas entendu que le silence assourdissant des morts au champ d’honneur. La polémique née de l’affirmation  du président Macron parfaitement exacte sur le fond et non provocatrice car l’histoire ne se divise pas, m’a paru inopportune car elle concerne un débat sans conclusion sur la double personnalité du maréchal Pétain  soldat héros des poilus en 1917, puis plus de 20 ans plus tard politique honni et d’ailleurs condamné pour sa politique collaborationniste et antisémite , parole  qui  a été  peut être maladroite  dans sa formulation  pour ceux qui cherchent à tout prix à en découdre sur tout sujet surtout s’il est sensible .Nous sommes dans le recueillement  et la glorification de ceux qui se sont sacrifiés en 14-18 pour que nous puissions dans la paix  vivre libres et capables d’exprimer toute opinion y compris des avis divergents sur les hommes et les évènements passés  et je m’étonne que l’on ne puisse le faire objectivement sans être taxés de je ne sais quoi mais  forcément négatif ou de défendre l’indéfendable.   Tout le monde n’a pas la vérité révélée et le dogme qui satisfait à l’unanimité! Il est permis de douter, pas de tout  bien sûr et surtout pas de ce qui avéré comme tragique, et  de nuancer tout en  respectant  ceux qui ont été victimes ou qui sont des héritiers de victimes,   d’avoir des propos ou des pensées  qui ne sont pas ceux de la bien pensance ou  issus de la langue de bois. Soyons adultes surtout face aux plus jeunes qui  connaissent le terrorisme mais  qui  n’ont connu aucune guerre , même dans leur famille,  qui  se demandent -sauf les élites  étudiantes ou qui ont des parents qui témoignent et éduquent quelques soient leurs origines et confessions soit dit en passant car il s’agit du roman national  qui doit toucher tous ceux qui vivent en France - qui a été Pétain 1 et  Pétain 2 , presque qui a été De Gaulle le héros de la résistance  en 1945, celui bousculé  de la décolonisation,  et le chef de L’État qui a renoncé au pouvoir en 1969 après avoir perdu un  référendum. Soyons modestes et ne mettons pas de l’huile sur le feu qui couve toujours : discutons  des faits et des hommes de l’histoire que l’on ne peut supprimer comme les communistes jadis effaçaient  des photographies officielles  les dirigeants qui ne convenaient plus à l’air du temps et qui avaient en réalité été des bourreaux.  Envisageons un avenir plus apaisé  pour les générations dites «  bof  » ou « j’ai le droit » qui sont là et vont prendre les commandes dans la future Europe. Souvenons nous que les hommes  et les femmes  et les jeunes d’y il y a cent ans ont souffert et le mot est faible, et tirons en les enseignements.  L’itinérance mémorielle du président  doit être approuvée et il ne faut pas se tromper d’objectifs. Certes la hausse du carburant tombe mal et l’on ne peut y souscrire même si on souhaite la transition énergétique.  Si le président payait de sa poche le diesel utilisé par la flotte de véhicules qui le suit, il serait certainement plus conscient que le train de vie des retraités qui l’interpellent et des autres français actifs baisse, et qu’un ( trop )plein… de taxes ne permet plus d’aller très loin ! Rien ne vaut  le terrain et le dialogue parfois abrupt avec les gens pour mieux appréhender ce qui les préoccupe et actuellement  ce sont les revenus et les charges, le chômage et les fermetures d’usine voire l’insécurité et les migrations  qui  l’emportent sur la mémoire.L'itinérance était faite pour parler surtout des hommes, et des femmes d'hier  des gueules cassées, des foyers détruits,  des séquelles psychologiques innommables en un mot de la boucherie de 14-18 sans accabler personne et sans désigner encore des coupables ,mais sans rien oublier pour que cela n’arrive plus . Donc pour  évoquer  la guerre et  la paix ,les relations internationales, les motifs sérieux ou non qui déclenchent les conflits et leurs conséquences, le coté obscur de l'homme, le mal qu'il sert , pour qu’on en soit conscient en 2018, qu'on dissèque  la force  qui tue et toute idéologie  qui arme, de la nécessaire coopération des démocraties... L’ordinaire des problèmes à résoudre en urgence  va reprendre ses droits rapidement et les querelles classiques  vont  resurgir dès la fin des cérémonies du 11 novembre  ce qui est normal car on attend des résultats et le passé doit céder sa place au présent. . . 
Le rappel de Pétain m’a remis en mémoire un mot de la célèbre actrice  Arletty - d’où le titre de cet article - qui disait que  son coté face où battait son cœur était français, mais que son coté pile en bas du dos était international : elle avait été poursuivie à la libération pour avoir fréquenté un ou des  allemands. C’est l’anecdote pour détendre l’atmosphère car je vais encore la plomber en parlant de populisme, ou de «  lèpre  » nationaliste selon une autre sortie du président Macron adepte des formules chocs.
Le terme populiste qui devient un vilain défaut ne veut pas dire grand chose  sauf pour dénigrer  les dirigeants polonais , hongrois ou autres dont le nombre augmente ce qui est un message , ceux qui ne veulent pas respecter ce qu’ils considèrent comme des diktats de l’union européenne.  Ils estiment avoir été  élus régulièrement  dans des démocraties , exprimer l’avis de leurs concitoyens et avoir le droit  de contrôler plus ou moins les médias ce qui serait compatible avec la liberté d’expression , de se méfier des juges qu’ils veulent nommer selon leur bon vouloir pour éviter un gouvernement desdits juges, de refuser les migrants  sauf ceux qu’ils veulent  choisir dans le respect de leurs frontières et ne pas partager la pensée mondialiste qui prône l’ouverture en général et  le multilatéralisme et qui ne correspondrait pas à leurs coutumes et usages outre leur manière de vivre. L’Europe n’est donc pas leur tasse de thé, comme les anglais qui ont choisi le brexit. Mais les pays  populistes veulent rester au sein de l’Europe car ils aiment  les aides européennes.
 Le populisme serait donc le mal pour ceux qui se définissent comme progressistes  ce qui n’est pas plus précis que populistes car le progrès pour l’un ne l’est pas pour l’autre, c’est-à-dire ceux  qui sont partisans de plus d’Europe sans aller vers un vrai fédéralisme ; qui croient en la réalité de  la mondialisation et de  la nécessité de faire face ; qui voient l’obligation pour les européens de faire masse et  bloc face aux hégémonies de la Chine, des USA, voire de la Russie et de l’Inde ; qui pensent que les menaces de toutes natures qu’elles soient terroristes, économiques, migratoires, environnementales obligent à se protéger mutuellement et avoir des politiques  communes et concertées aussi  en matière de sécurité et défense, propriétés intellectuelles, services,  droit social  pour tous les travailleurs y compris détachés, fiscalité, justice…  Contrairement aux populistes les progressistes sont convaincus   que le repli sur soi est néfaste, ne peut conduire à des progrès  matériels et humanistes pour tous dans la spécificité de chacun, et qu’il faut plus d’Europe même s’ils sont lucides que celle-ci doit se réformer, que la technostructure à Bruxelles  doit être reprise en main, qu’il appartient aux dirigeants élus de faire entendre la voix et les désirs de leurs peuples, et que la politique doit commander, sans se laisser imposer des décisions futiles qui indisposent la grande majorité des citoyens européens. Les progressistes pensent que toute innovation est un bien , et que toute demande de droits supplémentaires pour une minorité est positive. Cela se discute car à force de créer des droits individuels on peut fracturer l’ensemble qui se contente de devoirs. Les conservateurs sont plus circonspects : ils préfèrent un progressisme à petit pas, qui ne pose pas des questions métaphysiques et qui est compréhensible  puisqu’il s’appuie sur ce qui a été, vérifié, expérimenté.  Ils aiment aussi le respect des devoirs collectifs, la nation , la patrie et ce qui a fait la grandeur de la France. Ils ne trient pas les héros à l’aune des temps modernes.
Comme le chantait Jean Ferrat « c’est un joli nom camarade…» avant qu’il ne se rende compte de la réalité du régime soviétique, ou cubain , ou chinois, et s’il était vivant vénézuelien  ou des dictatures diverses dont celles qui sont religieuses ,qui se disent représenter le peuple et vouloir  son bonheur en le décrétant . Attention danger. La liste de ce qu’il faut ne pas faire n’est pas exhaustive...  Le mot populiste devrait être positif puisqu’il veut dire ce qui vient du peuple. Sauf à être un grand naïf et oublier les leçons de l’histoire ,et sauf exception d’un dirigeant atypique on ne connait pas un peuple même celui  de l’extravagant  dirigeant de la  Corée du nord ! qui voudrait officiellement  du mal  à son voisin, et qui n’approuve pas tout ce qui lui est bénéfique. Les droits de l’homme sont revendiqués par tous bien que non appliqués la plupart du temps. C’est donc en théorie un joli nom populiste sauf qu’il est assimilé  à l’ennemi des libertés publiques, au rejet de l’étranger, et à un formidable égoïsme adepte des solutions apparemment faciles, de la répression s’il la faut et de l’ordre , de la fermeture d’esprit, et refusant presque  toutes les avancées de l’humanisme en général pour l’homme  et la femme,  et les minorités quel-qu’elles soient. Comme on dit dans les cérémonies militaires ce qui est d’actualité, fermez le ban. Chacun d’entre nous connait pourtant un populiste déclaré ou qui s’ignore et qui est un bon citoyen payant ses impôts et taxes en maudissant le gouvernement, n’ayant pas de procès car il respecte la loi, votant régulièrement , ne détestant personne sauf celui qui lui pique sa place ou qui a des privilèges,  qui est soucieux des libertés y compris de celles qui ne lui conviennent pas, et qui fait son devoir en toutes circonstances. Il n’aime pas vraiment  l’Europe telle qu’elle est car elle ne lui apporte rien , ne le protège pas et est lointaine. C’est cependant un citoyen qui se respecte et il en faudra qui ira voter lors des élections européennes de 2019. Il nous faudra des populistes pour garder les pieds sur terre et en même temps des progressistes qui  feront avancer l’harmonisation et qui remettront de l’ordre en proposant des solutions concrètes et proches du peuple.
 Qu’est ce qu’elle a ma gueule de populiste, regarde la tienne  espèce de conservateur ou de progressiste utopique.
   
En réalité le débat aura lieu entre les nationalistes que l’on dit belliqueux et d’extrême droite ce qui rappelle de mauvais souvenirs  et qui sont des populistes « aggravés » ou "dévoyés"et supposés  dangereux  qui haïssent l’Europe,  et les progressistes alliés aux conservateurs ouverts . Depuis Renan on sait ce qu’est la nation : c’est une âme, un principe spirituel avec la possession en commun d’un riche legs de souvenirs, le désir de vivre ensemble et la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis . On a le droit et le devoir d’aimer la nation. Mais elle n’est pas faite pour s’en servir comme repoussoir et donc la diviser ou l’opposer à ce qui n’est  pas comme nous.  La commémoration de 14-18 a montré que nos soldats s’étaient battus  comme des lions, qu’ils soient venus de nos campagnes et villes métropolitaines, ou de l’extérieur comme les tirailleurs sénégalais composés en pratique de combattants de multiples origines. Il se sont sacrifiés pour le drapeau français et ses valeurs,  et sont enterrés ou ont disparu à des milliers de kilomètres de leurs villages, de leurs lieux de naissance.  La nation doit intégrer avec des conditions s’il le faut et ne pas rejeter par principe.  Il est  prouvé que l’on peut actuellement avoir un destin commun tout en gardant ses qualités originelles. Mais ceux que l’on qualifie péjorativement de nationalistes veulent rester entre eux, éliminer ce qu’ils ne tolèrent pas, se barricader derrière des murs ou des barbelés, ne vouloir rien partager  même pas les miettes. Ils s’opposent à l’Europe tout en demandant à ce qu’ils aient des députés européens car la "soupe" est  bonne , et veulent saboter de l’intérieur ce qu’il leur parait néfaste pour la France. Ils émettent parfois des idées justes mais leurs solutions sont soient irréalistes soit contraires  aux valeurs que la France soutient dans sa vocation universelle et sa volonté de rassembler. Car le danger est de faire se confronter les communautés alors que le but est pour chacun de s’efforcer  de renforcer la cohésion nationale dans le cadre de la laïcité ,concept et pratique  mal connus et mal  ressentis  par ignorance et malentendus d’ailleurs chez nous, et  encore plus dans les autres pays de l’Europe  .
Dans cette atmosphère il va falloir convaincre ceux qui votent pour les nationalistes que leur politique est une impasse,  et encourager les électeurs  par des arguments solides, innovants, sonnants et trébuchants si l’on peut dire, à ne pas leur donner leurs votes. Je ne sais pas si le nationalisme tel que M.Macron le pense est une lèpre. Mais on a déjà donné et on connait les ravages du mépris des autres, de la volonté de revanche ou de puissance avec la certitude qu’une minorité a raison. L’histoire doit nous éviter de renouveler les erreurs du passé. On a raté la paix en 1919 et il a fallu attendre la fin de la deuxième guerre mondiale pour se décider à construire la paix. En Europe c’est le traité de Rome de 1957 qui a posé les bases de la réconciliation franco-allemande, et qui a permis une coopération réelle entre les nations. Le nationalisme ne soude pas. Il faut s’en rappeler pour préserver un espace de paix  et de libertés au profit de centaines de millions de citoyens, même si tout n’est pas parfait on le sait.
Il n’y a pas un ancien monde qui a  échoué et qui est à jeter avec l’eau du bain, et un nouveau monde avec un président jeune et magicien devant lequel on devrait être béat d’admiration en attendant que le succès arrive… ou non ! Un  président qui vient d’apparaitre de nulle part, entouré de quadragénaires qui ont des connaissances livresques mais peu d’expérience de terrain. Le jeunisme n’est pas une politique en soi. On en a vu d’autres et les promesses n’engagent que ceux qui y croient.  Personne  ne détient  la vérité, et il arrive comme on l’a vu avec l’affaire Benalla  protégé du prince,  que parfois on commet des erreurs de bonne foi, à l’insu de son plein gré.  Il y a  le monde dans lequel on vit , avant de se projeter dans les années lumière qu’il convient naturellement de préparer. Cela ne sert à rien de mourir guéri.  Un progressiste n’est pas le contraire d’un conservateur qui aime ce qui a fait ses preuves, qui peut vérifier ce qu’on lui propose  et ce qui correspond  à sa philosophie et à  ce qu’il souhaite. On aura besoin et des progressistes et  des conservateurs  voire des populistes éclairés pour que l’ Europe  trouve un équilibre efficace et ne soit plus un bateau à la dérive ,qu’elle retrouve ses fondamentaux quitte à avoir un premier cercle de pays de même niveau et qui partage les mêmes valeurs, dans un cadre démocratique certain. L’Europe qui a une compétence subsidiaire doit s’incliner devant la volonté des États qui n’ont de compte à rendre qu’à leurs peuples.
 Ainsi aurons -nous une gueule d’européen convaincu et l’atmosphère sera-t-elle meilleure.