samedi 15 février 2020

de la transparence exigée à la vertu obligatoire


De la transparence exigée à la vertu obligatoire.
Par Christian Fremaux avocat honoraire .
M.Griveaux jeune par l’âge donc vigoureux, ancien ministre désigné par le parti du président de la république pour accéder à la mairie de paris a choisi le vendredi 14 février jour de la saint- valentin et fête de l’amour pour annoncer qu’il n’était plus candidat à l’élection en raison d’un désordre amoureux inapproprié. C’est paradoxal. Il semble qu’une vidéo volée de 2018 circule où il apparait dans une posture sexuelle et prouve qu’il entretient des relations avec une femme sauf que ce n’est pas la sienne. Faut-il en faire un drame pour ce qui appartient à sa vie personnelle ?  Le futur maire de paris doit- il être abstinent pour tout ? On ne s’est pas vraiment interrogé sur celui (un russe au passé trouble) qui est à l’origine de la publication et on ne connait pas ses motivations et son intérêt dans cette mise au tapis d’un homme politique proche de M.Macron qui n’avait pas besoin d’une péripétie ridicule négative de plus.  Le nouveau monde renvoie à l’ancien.  
 Et ce serait le scandale en France la patrie du libertinage, du romantisme et de la beauté des femmes ? « Couvrez ce sein que je ne saurais voir » a déjà écrit dans Tartuffe (1664) Molière qui doit bien rire d’où il est. La fille ainée de l’église (de quelle obédience désormais ?) qu’est resté notre pays est devenue bien prude et elle exige beaucoup des hommes et des femmes politiques, surtout dans leur vie privée.  M.Griveaux veut défendre surtout sa famille qui est très malmenée et injuriée depuis sa candidature : il a raison. S’y ajoute la pratique actuelle de notre démocratie dont il faut parler. Car les grands gagnants de la campagne électorale sont pour l’instant la rumeur malveillante, la haine, l’injure, la violence et tout ce qui rabaisse l’homme. M.Griveaux s’est auto-puni alors que personne ne lui demandait rien. C’est de plus en plus fort mais inquiétant.
Comme pour M.Fillon  M.Griveaux chute pour un accident de parcours qui n’a rien à voir directement avec la politique. La différence est que M.Fillon  qui a été mis en examen en vitesse supersonique comparait en correctionnelle bientôt, tandis que M.Griveaux victime de délits sera partie civile dans un futur procès si on retrouve les auteurs de la diffusion de la vidéo dérobée et s’ils sont jugés, rien n’étant certain. Si tel est le cas j’espère que la justice sera très sévère car il y a des textes répressifs qui s’appliquent et même si M.Griveaux s’est piégé tout seul.  Ce n’est pas la première fois que le sexe ou autre habitude joue un rôle dans la vie politique ou publique. La liste serait trop longue mais citons des cas.  On se rappelle le bon président Félix Faure qui est mort dans les bras de sa maitresse à l’Elysée. Et le Cardinal Daniélou qui est monté au ciel en pleine épectase. D.S.K - dont M.Griveaux a été le collaborateur  - a perdu toutes ses chances de devenir président après ses péripéties à New-York et à l’hôtel Carlton de Lille. Tandis que Winston Churchill buvait beaucoup, fumait de gros cigares et avait de graves dépressions.
L’exemple de M.Griveaux pose un problème de principe : que peut -on exiger moralement  d’un homme ou d’une femme politique ? La démocratie est- elle l’ascèse et le renoncement à ce que l’on est ?
Bientôt ne pourrait se présenter à une élection significative qu’un célibataire ( homme ou femme),  blanc mais pas forcément , aux tendances et pratiques sexuelles classiques et connues, sans amis,  ne fumant même pas du cannabis, buvant de l’eau, étant évidemment pauvre, n’ayant  eu aucun mauvais point ou colle de la maternelle à l’université, n’ayant reçu aucun avertissement dans le monde du travail ni commis la moindre infraction punie d’une contravention, totalement transparent pour toute chose et naturellement incarnant la vertu. Son programme politique public devra correspondre à sa vie privée et inversement.   
L’opinion publique ou plus précisément ceux qui la manipulent en toute impunité sur les réseaux sociaux notamment ce qui prouve qu’il faut légiférer pour réguler et interdire les débordements avec des donneurs de leçons adeptes des ligues de vertu, exigerait que l’on soit conforme à ce que l’on prêche, demanderait que l’on lave toujours plus blanc et qu’il ne puisse y avoir ni doute ni soupçon dans la vie publique ce que j’approuve , et aussi  dans la vie privée et là je m’insurge. On en fait beaucoup dire à l’opinion publique ! Le voyeurisme ne passera pas.
On ne peut pas imposer à un responsable politique d’avoir une vie privée sans ses goûts et ses couleurs, avec ses défauts et qualités, comme elle serait définie par on ne sait qui à partir de critères et valeurs subjectives. Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre. Qui peut prétendre être parfait ? Les dénonciateurs qui se prennent pour des justiciers sont-ils de bonne foi ? Connaissent-ils la parabole de la paille et de la poutre ?
L’homme ou la femme politique ne sont que des humains avec leurs faiblesses et ce qui compte ce sont leurs engagements publics, leurs promesses, qu’ils disent leur vérité, et qu’ils accomplissent le programme sur lequel ils se sont fait élire, en écoutant la voix du peuple surtout s’il se plaint ou renâcle. La vie publique c’est de mettre le plus possible ses actes en conformité avec ses paroles, s’expliquer sur ses intentions, d’être honnête dans tous les sens du terme, et de faire le maximum pour l’ensemble de la nation en la tirant vers le haut et en la protégeant dans un rassemblement y compris de ses emportements. 
Un homme ou une femme politique doit être exemplaire dans ses décisions publiques et les valeurs républicaines mais on ne lui demande pas d’étaler sa vie privée et de nous dire si elle est conforme, d’ailleurs à quoi ? Comme le disaient les inconnus jouant les journalistes dans un sketch : « [… on divulgue ce qui est confidentiel…] mais cela ne nous regarde pas ! ».  M.Griveaux vient de mettre à mal sa carrière : je lui souhaite d’être heureux dans sa famille et de prendre les plaisirs qu’il souhaite car on ne tape pas sur un homme à genoux. D’autant plus que je n’aurai pas voté pour lui puisque je suis électeur dans ma petite commune de l’Oise où je termine mon mandat après 37 ans de fonctions d’élu.  
L’ancien ministre a donc décidé de se retirer -si je puis m’exprimer ainsi sans ambiguïté- de la course à la mairie. Dont acte. Comme la nature politique a aussi horreur du vide on va lui trouver vite un ou une remplaçante. M.Griveaux avait placé sa campagne sous les signes de la sécurité et de la propreté. Qu’il soit entendu dans toutes les significations des mots en y accolant le respect et la dignité outre un programme pour la ville-capitale qui convienne aux citoyens au-delà des parisiens.     
Je crains un monde de transparence imposée tous azimuts d’abord pour les politiques puis ensuite pour tout le monde.  On sait que cela conduit à l’arbitraire et à l’autoritaire. L’information ne justifie pas tout. La liberté d’expression ne doit pas nuire et franchir la porte de l’alcôve ou du domicile en faisant du mal à femme et enfants. La politique n’est pas le tir à vue : elle est faite pour être positive. Le citoyen mérite le mieux. Je détesterai la norme élaborée par une minorité haineuse, et la vertu obligatoire. Que la jurisprudence Griveaux serve au moins à rétablir la confiance et la fraternité entre nous.    

jeudi 13 février 2020

Attaquer l'Etat est -ce bien raisonnable?


Attaquer l’Etat en justice est-ce bien raisonnable ?
               Par Christian Fremaux avocat honoraire.
Dans les Misérables Victor Hugo fait dire à Gavroche qui se meurt : « je suis tombé par terre c’est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau c’est la faute à Rousseau ». Désormais tout est de la faute lourde de l’Etat et plus personne ne veut en outre assumer les conséquences de ses actes. On n’a que des droits pas des devoirs, et il fait trouver un responsable, pas forcément un bouc-émissaire quoique c’est plus facile, mais celui ou celle dont l’erreur, l’action ou l’inaction ont conduit à un désastre avéré ou prévisible. Attaquer l’Etat est la dernière tendance furieuse d’autant plus qu’avec lui on ne risque rien, ce n’est pas lui qui va déposer plainte en dénonciation calomnieuse ou demander des dommages -intérêts si la procédure est abusive. Et les médias aiment bien que l’on assigne le plus puissant bien qu’anonyme de la société.
L’impunité ou l’impuissance ne sont  plus tolérées qu’il s’agisse de faits graves dans les guerres par exemple (nos militaires sont aussi dans le collimateur) ou dans les affrontements sociaux ( on dénonce les violences policières pas celles des manifestants)  ou que l’on critique les conséquences de situations qui ne sont pas gérées avec des résultats (la violence) ou insuffisamment (le climat), ou de décisions qui n’ont pas un effet immédiat (la transition écologique) , ou de manquements individuels quelles que soient les bonnes ou mauvaises raisons invoquées. La justice est sommée de se prononcer entre des injonctions contradictoires. On demande aux juges de trancher toutes les difficultés de la société alors que la justice est très controversée par ailleurs : comprenne qui pourra.
 La formule ancienne de « responsable mais pas coupable » est haïe car il faut forcément que quelqu’un ou le représentant d’un symbole assume, vienne demander pardon ou fasse acte de repentance, et à défaut l’Etat reste l’interlocuteur tout désigné. Le silence ou l’inertie de tout dirigeant sont pires qu’un crime c’est une faute. On exige la transparence et on veut décréter un monde de vertu, ce qui historiquement parlant peut conduire à des dérives autoritaires on le sait. On veut créer avec l’aide involontaire ou orientée des réseaux sociaux, des tribunaux et de la morale ambiante une société parfaite donc ouverte, sans racisme, sans discrimination, sans genre, sans passé colonial ou autre, sans méchanceté institutionnelle ou personnelle, où tout le monde doit être beau et bon, gentil et fraternel, aimer la nature et les animaux, ce qui relève de l’utopie mais c’est l’air du temps. On n’hésite plus à saisir la justice quand on estime unilatéralement que rien n’avance ou que c’est lent : l’Etat est l’ultime adversaire.
La faute lourde ou grave ou inexcusable on la connait en droit du travail : les conseils de prud’homme notamment en jugent quotidiennement. On peut trainer l’Etat devant la justice administrative pour divers motifs de droit. La jurisprudence est établie depuis longtemps. Ce contentieux est très important dans tous les domaines et les particuliers n’hésitent plus à contester telle décision du maire et de la commune et des élus en général, du préfet, du président de département ou de région, de l’Etat, de l’hôpital, du professeur qui brimerait l’enfant, de l’école où se passent des évènements graves, dans la fonction publique… et de tous les services publics. Car nous sommes un peuple formidable et sûr de lui : chacun d’entre nous sait ce qu’il faut faire, ce que les responsables doivent prendre comme décisions, et s’ils ne le font pas en négligeant la vox populi ils sont responsables. Si de surcroit ils répondent non à une demande individuelle c’est le procès assuré car l’individu ne peut qu’avoir raison : le doute, celui qui prouverait qu’il a tort ne l’effleure même pas.
 Pour s’en prendre à l’Etat directement on peut aller aussi devant les tribunaux judiciaires mais uniquement en cas de faute lourde.
L’actualité va illustrer mes propos par quelques exemples que j’ai choisis arbitrairement et qui ne sont pas exhaustifs car il y en a beaucoup pour tous sujets secondaires comme importants certains étant dramatiques ce qui ne se discute pas et on partage la douleur de ceux qui subissent. 
Examinons encore le tribunal administratif où l’on juge la faute de service et la faute personnelle détachable du service.  Quatre ONG-dont une est dirigée par Mme Duflos l’ancienne excellente dirigeante et ministre des verts- ont saisi la justice administrative d’un recours contre l’Etat en matière de réchauffement climatique pour dénoncer son manque de réactivité malgré les engagements internationaux pris, peu important le coût social et financier. Cette procédure est dénommée modestement « l’affaire du siècle » comme si c’était la seule priorité et qu’il fallait tout abandonner pour se consacrer au climat et faire droit à ce que pensent des militants.
Dans le cas récent de la petite fille prénommée Vanille placée dans une famille, tuée par sa mère qui était en proie à des troubles psychiatriques sévères et qui néanmoins a bénéficié du droit de prendre librement sa fille deux jours, qui va-t-on incriminer, quel service public défaillant?  
Examinons ensuite le tribunal judiciaire l’ex-TGi depuis le 1er janvier 2020. Selon le code de l’organisation judiciaire le déni de justice (par exemple des délais trop longs pour juger) avec la faute lourde sont les deux cas d’ouverture d’une action en responsabilité contre l’Etat. La cour de cassation a précisé la notion de faute lourde par arrêt du 23 février 2001 : « c’est toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ». La définition est extensive la justice proprement dite n’étant pas seule en cause, tous les services de l’Etat étant concernés.  L’Etat qui a un avocat est défendu et représenté par l’agent du trésor car la procédure se termine généralement par une éventuelle condamnation à des dommages -intérêts. Donnons des exemples : la sœur d’une victime de féminicide a attaqué l’Etat pour faute lourde.  Elle estime que la police saisie n’est pas intervenue assez vite et que le contrôle judiciaire imposé par un juge à l’assassin n’était pas assez sévère. On a aussi Mediapart qui a assigné l’Etat pour faute lourde après la tentative de perquisition dans ses locaux. On a parfois les contrôles d’identité discriminatoires et systématiques de jeunes par des policiers…Les juges apprécient au cas par cas s’il y a faute lourde ou non.
L’Etat peut aussi être poursuivi par une juridiction internationale. La cour européenne des droits de l’homme qui dépend du conseil de l’Europe et siège à Strasbourg vient d’accepter la requête de parents qui ont vu leur jeune fille partir en Syrie, y avoir des enfants, être blessée, être retenue au Kurdistan et contestent le fait que l’Etat français refuse de les rapatrier notamment celle que l’Etat considère être une djihadiste. Le Conseil d’Etat en 2019 a jugé que c’était une prérogative diplomatique de la France de dire oui ou non et pas une obligation de juridiction. On en discute y compris au sein du gouvernement.
On voit donc que l’Etat est le responsable de tout et son contraire en dernier ressort, et que la responsabilité personnelle de l’individu ne compte plus. Or l’Etat c’est nous c’est l’ensemble des citoyens qui paient leurs impôts, votent, sont pacifiques et tolérants, ont besoin de travail, de sécurité et de calme, avec le renforcement de leurs valeurs républicaines et qui font ce qu’ils peuvent pour résoudre collectivement les problèmes qui sont posés à la société. On entend les cris de rage et de désespoir mais à vouloir faire condamner l’Etat -sauf préjudices avérés et fautes incontestables- c’est se tirer une balle dans le pied. La justice existe pour réguler la vie en société, pas pour moraliser et faire que l’émotion et la bonne conscience dirigent la raison.

vendredi 7 février 2020

l'émotion glisse, la raison convainc.


                         L’émotion glisse, la raison convainc.
                                    Par Christian Fremaux avocat honoraire.
Les scandales d’ordre sexuel en mélangeant viols et agressions voire tentatives ou dragues poussées se succèdent dans tous les milieux professionnels du cinéma bien sûr qui a donné le coup d’envoi -si je peux m’exprimer ainsi- en passant par la littérature, le sport individuel ou collectif, les professions libérales où il y a des collaboratrices (le barreau n’est malheureusement pas exempt) et tous les domaines qui vont se révéler à la stupeur générale bientôt du moins je le crains.  Il y a un flot ininterrompu de polémiques, on accuse  ouvertement et par tribunes publiques mais le citoyen de base n’est pas plus informé et a du mal à se faire une opinion claire. Trop de scandale tue la réalité objective et à force de s’indigner on fatigue. L’émotion ne dure que le temps de l’effet d’annonce et des discussions des prétendus experts qui donnent leurs avis personnels sans connaître d’ailleurs le fond du dossier et si les faits dénoncés sont avérés.
Peu importe puisqu’il est demandé de faire une confiance aveugle à la victime qui s’estime comme telle sinon on apparait comme sans cœur et on est accusé de soutenir le bourreau désigné. La vague de dégagisme qui inonde le monde politique s’étend à tout et à tous. Ainsi la ministre des sports somme le président de la fédération des sports de glace de démissionner à la suite des révélations de la célèbre patineuse Sarah Abitbol et il doit s’exécuter sur l’instant. On s’étonne que ledit présumé coupable ose résister, dire qu’il a commis des erreurs et pas des fautes- affirmation unilatérale qui doit être vérifiée- qu’il y a aussi la responsabilité de la tutelle donc le ministère et le ministre de l’époque qui peut être n’ont pas été parfaits et réactifs -à voir - mais rien n’y fait. Le président de la fédération est forcément un salaud qui savait et qui doit être écarté en urgence par décence, pour la morale, pour répondre à l’émotion de la victime et de l’opinion publique, en attendant que l’enquête qui débute désigne le ou les vrais coupables. Le coupable certain c’est évidemment l’entraineur celui qui a abusé d’une jeune fille de 15 ans grâce à son emprise sur une sportive qui voulait gagner et « acceptait » tous les sacrifices y compris intimes grâce au fait qu’il se sentait tout puissant et avait le destin d’une enfant entre ses mains, et qui a profité de sa position dominante sans que l’entourage de sa protégée parents ou autorités osent s’immiscer et interdire ce qui n’aurait jamais dû arriver.
 Mais si le sort judiciaire du prédateur est réglé à terme (il a admis des relations « inappropriées ») à la condition que la prescription en droit ne joue pas, son avenir intéresse moins semble- t- il : ce que l’on veut avec raison c’est démonter le système de copinage, de cooptation, de protections, de silence organisé et la toute-puissance des élus d’une fédération dont le président est le symbole et qui peut se permettre de dire zut à la ministre.  Je ne défends évidemment pas ce président que je ne connais pas, qui est assez grand pour le faire par lui- même : il doit savoir manœuvrer, se rattraper, connaitre les figures imposées et le programme libre du patinage artistique qui est un sport de glisse. Je ne sais pas si ce président résistera à la pression qui va peut- être aussi venir en interne, de ses amis et affidés de la fédération, les grands élus des clubs qui l’ont porté au pouvoir et qui ne doivent pas aimer cette publicité malencontreuse et dommageable avec une image dégradée de leur sport, ni un conflit ouvert avec la ministre. Mais le destin de ce président est secondaire sauf pour lui. Ce qui m’intéresse ou m’intrigue dans cet épisode odieux c’est la dénonciation des dizaines d’années plus tard d’une victime qui n’a plus supporté de se taire : je la plains et il est normal qu’elle règle ses comptes avec celui qui lui a gâché sa vie. Le droit ne sera peut- être pas en phase avec ce qu’elle recherche, mais le scandale qu’elle a déclenché lui donnera au moins consolation et réhabilitation pour elle- même. Cependant la justice ne se rend pas au nom de l’émotion et il faut faire attention à ne pas tout confondre. On le voit avec le film « j’accuse » de Roman Polanski : son film est formidable tant sur le plan technique, que par l’angle d’approche de Dreyfus, et le jeu des acteurs mérite d’être récompensé. Ces derniers doivent -ils être les victimes collatérales de la mauvaise réputation réelle ou supposée personnelle que traine le metteur en scène ? C’est mon illustre confrère Me Moro- Giafferi qui a eu cette exclamation célèbre alors qu’il plaidait devant la cour d’assises : « chassez l’opinion publique du prétoire, cette trainée qui tire le juge par la manche ».
Dans la volonté de vouloir expliquer, et de flatter le public ou toute victime j’ai même entendu et vu à la télévision (sur BFM le soir tard sauf erreur) une psychologue professionnelle dire que « la France avait des tendances pédophiles » : Yves Calvi le journaliste qui animait le débat en est resté estomaqué. Moi aussi. L’auto- flagellation ne rime à rien.
Il faut garder la mesure dans les dossiers qui mettent en cause des individus connus ou non et même si on veut en faire des affaires de principe, pour modifier les comportements, les rendre plus vertueux et donner l’exemple. Puisque nous sommes dans un état de droit - bien que certains qui n’ont pas peur d’exagérer ou de délirer soutiennent que notre démocratie actuelle serait arbitraire voir dictatoriale (qu’ils aillent voir ailleurs comment cela se passe) - rappelons que la présomption d’innocence est un principe intangible et qu’il ne faut pas condamner avant le jugement, quand les juges ont examiné publiquement tous les faits et les preuves après un débat contradictoire. Ce qui vaut pour n’importe quel justiciable vaut aussi pour un prétendu puissant !
 Le tribunal médiatique n’a aucune légitimité, et pour ceux qui ont de la mémoire ou qui connaissent l’histoire rappelons-nous du tribunal révolutionnaire en 1792-1794 sous la terreur où les avocats n’étaient pas admis et où les juges devaient choisir-sans preuves- en quelques minutes entre l’acquittement-très rare- et la mort par la guillotine- prononcée de façon massive. Ou encore les tribunaux populaires pendant le maoïsme (avec l’auto-critique) et le communisme, sans compter les périodes de guerre et les exécutions sans procès en raison de la race.  On m’objectera à juste titre que mon argument est excessif et que ce n’est plus l’époque : mais à petite échelle on s’en rapproche en désignant à la vindicte populaire tel ou tel pour des faits non établis formellement et on peut démolir la réputation de quiconque en un clin d’œil ne serait- ce que par les réseaux sociaux où l’on peut tout dire avec impunité.
  Voyez comme on flotte avec le cas d’une jeune fille de 16 ans Mila qui a exprimé de façon excessive et vulgaire sa vision de l’islam (mais son cas serait- il différent si elle avait critiqué l’islam avec élégance et retenue ?) et qui est menacée de mort, interdite d’école, cas qui entraine des prises de position contradictoires de nos grandes âmes rapides à s’indigner en général, et un silence prudent de nos féministes patentées. Et pourtant c’est extrêmement grave : comment en France en 2020 dans une république laïque qui se veut un modèle peut-on craindre pour sa vie pour s’être exprimé sur une religion ? Et la tolérance bordel !
 Enfin souvenons- nous de la parole de 1991 devenue collector au moment de la très grave affaire collective dite du sang contaminé (1980-1990) de Mme Georgina Dufoix ministre : « je suis responsable mais pas coupable ». La cour de justice de la république en 2006 l’a déclarée coupable, mais dispensée de peine. Sic transit gloria mundi. Si l’on veut qu’un scandale provisoire par nature soit utile, il faut que la raison l’emporte pour que l’on puisse tirer les leçons qui  s’imposent. A défaut la subjectivité brouillera le message, et il ne me parait pas nécessaire d’en rajouter à ce qui est douloureux.  

mardi 21 janvier 2020

Une fête en larmes


                    Une fête en larmes (titre de jean d’Ormesson)
           Par Christian Fremaux avocat honoraire, élu local et citoyen qui ne se gondole pas.
Les violences de toute nature qui tous les jours désolent ceux qui croient à la raison et à la tolérance ne donnent pas envie de rire quoique certains en pensent ou relativisent.  Elles font plutôt douter du genre humain même si défendre ses intérêts est légitime à la condition que l’on n’y sacrifie pas l’intérêt général et que l’on ne dresse pas les uns contre les autres.  Le théâtre est la fête de la culture, des connaissances et de la réflexion sur les rapports humains, du talent des auteurs et des comédiens. On assiste à une représentation pour se grandir et se perfectionner soi-même. On laisse les polémiques à l’entrée.
 Le prétendu journaliste -car il semble qu’il n’ait pas de carte de presse mais il est certain qu’il est militant de la France insoumise - qui  se trouvait par un hasard étrange (comment a-t-il su que M.Macron venait au spectacle ?) - trois rangées derrière le président de la république au théâtre des bouffes du nord  et qui a  d’abord tweeté pour demander s’il devait balancer sa basket à la tête du président puis a fait savoir que la soirée serait mouvementée - ce qui a été le cas puisque des militants en fureur sont entrés de force dans le théâtre en débordant le service de protection, a naturellement minimisé son geste en prétendant qu’il s’agissait d’une plaisanterie et qu’il n’avait pas demandé à ce que l’on agresse le président. Quelle bonne blague ! Je me marre comme disait Coluche !  Des parlementaires (qui sont élus pour faire la loi et la faire respecter quelques soient leurs opinions politiques et pas pour excuser n’importe quoi) ou autres intellectuels et sociologues l’ont immédiatement soutenu en disant qu’il n’y avait eu que quelques militants qui avaient conspué le président, que rien de grave ne s’était passé et qu’on pouvait en sourire vu la futilité de l’acte et même s’il y a eu des heurts à l’extérieur et qu’il a fallu exfiltrer le chef de l’Etat et son épouse.
 Ces mêmes personnalités ont ajouté qu’il était normal et pas grave que l’on bouscule verbalement voire qu’on insulte le président qui préférait venir au théâtre de surcroît dans un quartier populaire alors qu’il y avait un rejet de son projet de réforme des retraites. Doit-il se claquemurer dans les sous -sols de l’Elysée en buvant de l’eau et en mangeant des topinambours (humour !) en attendant que la Cgt obtienne le retrait du projet ? Autrement dit le 10ème arrondissement métro La chapelle est réservé à ceux qui n’aiment pas M. Macron (et Madame hidalgo ?) et sont de conditions modestes et pas des bobos. Il y avait les territoires perdus de la république. Des quartiers de Paris entrent dans la liste.
Mais bien qu’habitant Neuilly-sur-seine, travaillant dans le 16 ème arrondissement et étant élu dans une commune rurale de 600 habitants, le président me représente et dénigrer la fonction au-delà de l’homme me touche comme citoyen. Certes je connais la théorie politique et le livre d’Ernst Kantorowicz des deux corps du roi mais je me demande si les agresseurs aveuglés de mépris et bornés y ont pensé ce qui serait les prendre pour plus intelligents qu’ils le sont, car ils sont au premier degré à les entendre ?   
 Je ne partage pas l’opinion de ceux qui gloussent car si déjà pour divers motifs l’autorité légitime fout le camp ce que je déplore, le respect des institutions et de celui qui l’incarne est le minimum vital que l’on ait voté ou non pour lui et que l’on approuve ou non ses réformes. Je crains qu’il y ait désormais une pagaille latente continue jusque la prochaine élection présidentielle une sorte de  guérilla larvée ne serait- ce que pour créer un vrai drame avec les forces de l’ordre pour dénoncer ensuite des violences dites  volontaires sans avoir à  s’interroger sur la responsabilité de ceux qui cassent et provoquent .Les élections intermédiaires ne calmeront personne et pas les insurgés en peau de lapin à titre individuel   mais déstabilisateurs par l’effet de groupe surtout si les urnes ne donnent pas satisfaction aux extrémistes. Mais quelle élection peut satisfaire des révolutionnaires qui profitent de la société de consommation ?   L’électeur de mars prochain a une forte responsabilité pour devoir aller aux urnes, et voter sérieux et citoyen. Il ne faut pas s’abstenir ou voter blanc. Ce n’est plus de la rigolade, la fête est finie.
Aux prochaines élections municipales tous ceux qui sont contre tout et/ou de tendances communautaires vont essayer d’entrer dans les conseils municipaux pour tenter de remédier localement à la politique nationale ce qui va perturber les efforts locaux voire les déstabiliser ce dont on n’a pas besoin. Et ils vont entretenir le désordre jusque 2022 car ceux d’horizons divers qui ont été battus en 2017 et n’acceptent pas le résultat des urnes, veulent imposer leur vérité. Ils vont huer le président où qu’il soit quoiqu’il dise et saboter tout projet de réforme.  C’est trop. On ne rit plus.
  Nous sommes désormais entrés dans l’ère où tout et tous doivent dégager ou être remis en permanence en cause. C’est dangereux pour une démocratie.  Il faut se ressaisir collectivement et que la majorité silencieuse dise basta si elle veut bien s’exprimer ou faire savoir qu’elle ne supporte plus la situation. Un peu de défilés d’accord, mais trop d’occupations de rues avec violence non. Ce n’est pas drôle. Voir des excités tous les jours à la télévision cela fatigue et agace. Et devient contreproductif : on n’écoute même plus ceux qui tentent d’argumenter sérieusement.   
Revenons à l’échauffourée du théâtre dont il ne faut pas faire quand même une tragédie (comme l’incendie de la préfecture au Puy- en- Velay) mais qui est significative : ce ne fut pas un opéra-bouffe.   Après une brève garde à vue la justice a entendu l’avocat du concerné et lui a conféré le simple statut de témoin assisté qui se situe entre celui de témoin et celui de mis en examen. Le « héros » de l’information a levé les bras au ciel et s’est pavané : il est resté libre comme si un juge allait incarcérer un prévenu pour ce genre d’affaire !
La sécurité du président devrait être renforcée car comment est-il possible que n’importe qui dans un lieu public puisse être à un jet de pierre, ou de coup de couteau ou d’autre possibilité de blessure ou de mort du président ?  Là on ne sourit plus ce n’est pas une farce pour enfants. On n’a pas oublié le coup de fusil dirigé contre le président Chirac alors que dans sa voiture découverte il remontait les Champs-Elysées le 14 juillet 2002. Ce fut sans conséquence sauf pour le tireur arrêté (Maxime Brunerie). Il avait déclaré aux policiers qui le tenait :« pourquoi vous me tenez si fort, ce n’est pas si grave que cela » (sic). Cela ne vous rappelle rien ?  Il fut condamné à dix ans de réclusion criminelle en 2004. Il a été libéré en 2009.
Mais ce fait divers me rappelle un souvenir personnel. Comme avocat j’avais été désigné pour assister les gendarmes pris en otage avec confiscation de leurs armes qui ont servi quelques mois plus tard à tuer, derrière la famille Erignac devant la cour d’assises spécialement composée à Paris en matière de terrorisme. Un commando corse animé par Yvan Colonna a assassiné le Préfet Claude Erignac le 6 février 1998 alors que celui-ci, sans gardes du corps et sans armes, rejoignait à pied sa femme au théâtre d’Ajaccio pour assister à une représentation. Il fut assassiné de dos. Les auteurs disaient qu’ils n’avaient pas voulu supprimer l’homme mais le représentant de l’Etat, le préfet. Les multiples procès furent longs et âpres. On entendit plusieurs justifications mais la mort était réelle.  Les condamnations sévères furent à la hauteur du geste et de sa portée symbolique. On s’en souvient encore car la fête de l’esprit (le théâtre) où allait sereinement M.Erignac s’est transformée en un tombereau de larmes.
Bien sûr selon la formule consacrée toute ressemblance avec des faits réels n’est que pure coïncidence et il ne faut rien exagérer et extrapoler même si une situation peut dégénérer sans le vouloir.
On rigole toujours ? La démocratie mérite mieux : je pleure qu’elle ne soit plus préservée des excès et de ceux qui ricanent de tout.    


mercredi 15 janvier 2020

la justice sur tous les fronts


                         La justice sur tous les fronts.
              Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local. 

On dira que je relie des faits et des évènements qui n’ont aucun rapport entre eux et que tout ceci n’a ni queue ni tête. C’est possible mais moi je vois des liens entre les faits que je vais relater en écoutant simplement les nouvelles du jour (mercredi 15 janvier) avec la justice.
 A notre époque où parait-il tout se vaut et que les informations se succèdent sans recul ni hiérarchie entre le  médiocre ou le ridicule, l’important et l’essentiel ,où l’on accuse en direct à la télévision  ou sur les réseaux sociaux sous couvert de l’anonymat  n’importe qui pour n’importe quoi, sans avoir un début de preuve quelconque, où la morale et l’émotion se substituent à la réflexion et à la raison, où ce qui était porté aux nues puis toléré jadis devient du dernier scandale porté par les mêmes qui ont une attitude à géométrie variable (Edgar Faure disait  que ce ne sont pas les girouettes qui tournent mais le vent),  je me marre comme le disait l’inénarrable Coluche qui aurait du mal aujourd’hui  à s’en sortir sans être accuser entre autres de racisme , de discrimination, d’ennemi du genre féminin, de mépris des syndicats et des politiques et qui devrait sûrement affronter la justice sur plainte de tous ceux qui s’estiment victimes et n’ont pas d’humour, de ceux qui sont prompts à donner des leçons, des autres qui veulent imposer leur vérité, et de tous ceux qui  ne sont jamais contents de rien et qui jalousent tout et son contraire. Autres temps autres moeurs.
On le sait il semble que l’on n’aime pas les juges que l’on accuse d’être partiaux rouges de préférence. On leur reproche de façon souvent contradictoire d’interférer dans le débat politique (exemple les poursuites contre M. Fillon  pendant la campagne présidentielle de 2017 ou une différence de sanction entre M .Cahuzac et M .Balkany) ; de n’être pas assez sévère contre les voyous et laxistes en relâchant des djihadistes ;  de privilégier ceux qui sont toujours « déséquilibrés » en leur épargnant un procès ; mais de protéger les forces de l’ordre en condamnant sévèrement des gilets jaunes ;  d’être plus pour les salariés que pour les petits patrons en matière de droit du travail ; de rendre des décisions personnelles en matière de famille structurellement nouvelles et  d’éthique et de bio-éthique ou d’écologie ; et en un mot de se mêler de ce qui ne les regarde pas eux qui n’ont pas la légitimité du suffrage universel .
Néanmoins personne ne discute qu’il faut une justice pénale ou civile pour trancher les litiges dans l’intérêt général et fixer les bornes de la vie en société, ou pour résoudre des difficultés personnelles ou pour innover en respectant les grands principes et les valeurs républicaines quand la loi n’a rien prévu et que l’évolution de la vie génère des questions imprévues.  
Il faut aussi savoir ce que l’on veut. A la moindre difficulté on saisit le procureur de la république et on demande aux juges d’enquêter et de faire la lumière. On veut que les puissants s’expliquent comme le justiciable de base et   ne puissent plus se retrancher derrière l’usage ou le suffrage universel.  Si une interpellation par des policiers ou des gendarmes se termine mal, on exige la vérité, on fait immédiatement une marche blanche, et on veut la condamnation au plus vite des présumés coupables, sans même savoir si la victime n’a pas une part de responsabilité, ce qui n’enlève rien à celle des autorités si elles n’ont pas respecté la loi ou leur déontologie. Le ministre de l’intérieur a eu une belle formule : « on ne fait pas de croche-pied à l’éthique » et il a raison sur l’exemplarité nécessaire. Ce qui entraine pour les professionnels soumis aux ordres de la hiérarchie et à la provocation de ceux qui bousculent l’ordre public, d’avoir des nerfs d’acier et du sang-froid et ce qui me rappelle ce que disait Alphonse Karr (1808-1890) : « je suis contre la peine de mort mais que MM. les assassins commencent ».
Le conseil de prud’homme-dont je fais partie comme président d’audience à Paris- est à l’honneur.
M. Carlos Ghosn a annoncé qu’il avait saisi celui de Boulogne (92) compétent pour juger l’entreprise Renault, pour avoir paiement de diverses indemnités dont des droits à la retraite. Je me réjouis que M. Ghosn fasse plus confiance au conseil de Boulogne qu’à la justice japonaise ! L’addition demandée va être lourde car le salaire mensuel de M. Ghosn qui estime ne pas avoir démissionné et je ne sais pas s’il a été licencié, était pour le moins conséquent. Dans cet ordre d’idées on sait que M. Kerviel avait réclamé à la société générale près de 5 milliards d’euros devant le conseil de prud’homme de Paris.  Finalement la cour d’appel n’a pas fait droit à sa demande. Les conseillers prud’homme bénévoles membres d’une juridiction paritaire composée de deux juges représentant les employeurs et de deux juges représentant les salariés savent prendre leurs responsabilités en appliquant le droit après avoir examiné les faits. Ce sont des juges impartiaux qui rendent des arrêts et non des services comme le disait au 19ème siècle M. Séguier premier président de la cour d’appel.  
Le conseil de prud’homme est souvent saisi de procédures pour apprécier si le licenciement est abusif ou non avec des demandeurs aux appointements plus ordinaires. Ainsi a-t-on appris qu’un salarié en habit de lumière jaune ou orange d’une entreprise de propreté travaillant pour la ville de Paris, s’était allongé dans la rue ou à l’abri dans l’entrée d’un immeuble pour faire une sieste. Il a été filmé à son insu par une contribuable en colère qui a diffusé la photo sur les réseaux sociaux avec un commentaire du style suivant : « voilà où passent nos impôts et pourquoi Paris est sale ». Son Drh l’a immédiatement licencié pour faute grave, mais peut être que ce salarié qui avait droit contractuellement semble- t -il à une pause, avait déjà quelques manquements à son passif ? Les conseillers trancheront notamment cette question : une photo volée est- elle une preuve recevable en justice ?
Personne ne doute de l’utilité de la justice prud’homale, unique dans le monde sur ce modèle, sauf quand on est condamné à payer ou que l’on a gagné mais pas assez.
J’évoquais le bénévolat des juges prud’homaux qui reçoivent quelques euros par heure comme défraiement, en passant beaucoup de temps à préparer les audiences, à entendre les parties puis examiner les pièces versées aux débats et examinées contradictoirement, et à discuter entre eux pour délibérer c’est- à -dire rendre un jugement.
 En matière de bénévolat le cas de Mme Ségolène Royal a été mis sur le tapis et surtout entre les mains blanches et expertes du parquet national financier (le même que pour M. Fillon qui comparait prochainement devant le tribunal correctionnel pour l’emploi fictif ou non de Pénélope son épouse). La justice pénale va enquêter.
Madame Royal crie à la victime, qu’on veut l’empêcher de s’exprimer politiquement et qu’elle a bien exercé gratuitement ses fonctions d’ambassadrice auprès des pôles nord et sud. Dans cette mission il ne faut pas perdre ses sens ni le devoir de réserve. Madame Royal aussi était bénévole mais avec un tarif qui n’est pas celui des conseillers prud’homme en percevant quelques milliers d’euros par an comme frais, et travaillait avec l’aide de trois collaborateurs. Tout le monde recevant de l’argent public. C’est donc le contribuable qui paie et il me parait normal qu’elle justifie des fonds qu’elle a reçus. Madame Royal va devoir s’expliquer comme tout quidam, comme un pingouin de base, ce qui pour un haut fonctionnaire peut être retraitée ?  députée, ministre, présidente de région, vedette des médias et appelée selon elle aux plus hautes fonctions, lui fait un choc.  La justice appréciera pour l’instant la présomption d’innocence s’impose.  
Ce qui me frappe mais je le savais, c’est que conformément aux usages immémoriaux de la république, l’exécutif   puisse nommer comme ambassadeur ou préfet ou à toute autre fonction prestigieuse publique qui il veut, amis ou ceux qu’il faut recaser voire apprivoiser ou contenir.  Je l’annonce je suis disponible. Mais puisqu’on veut tout réformer et instaurer l’égalité surtout du mérite, que l’on supprime cette anomalie d’ancien régime qui est un privilège pour ceux qui en bénéficie.
La justice est sur tous les fronts. Qu’elle continue. Comme quoi on peut relier ce qui apparait disparate.

samedi 11 janvier 2020

Dis moi d'où tu viens je te dirai si tu as raison

    Dis moi d’où tu viens je te dirai si tu as raison.
Par Christian Fremaux avocat honoraire, élu local, et citoyen saturé.


Au commencement était le verbe on le sait en tous les cas pour ceux qui connaissent l’origine chrétienne de la fille ainée de l’église, mais pas que car certains ne croient à rien et la religion quelle qu’elle soit n’est pas leur boussole. J’aime les débats et j’ai choisi d’être avocat car l’expression des idées ou arguments est pour moi fondamentale et elle permet d’expliquer et de trouver des solutions apaisantes souvent ? Mais trop c’est trop. Trop de discussions et de polémiques tue la réflexion et on ne sait plus où on en est à force d’entendre sur les médias en continu autant de versions et d’avis qu’il y a de personnes interrogées qui se piquent d’être des experts, auto-proclamés bien sûr. 
Je dois être un citoyen à part car personnellement aucun institut de sondage ne m’a jamais demandé mon avis même sur le prix de la carotte ou les 90 kms à heure, ou l’usage du plastique. Sur des sujets fondamentaux comme la démocratie, la justice sociale, la violence, la légitimité de M.Macron ou de M.Martinez ou sur les valeurs républicaines qui incluent les devoirs et le respect des autres, encore moins. On ne m’a pas interrogé non plus sur le projet de réforme de retraite universelle avec lequel je suis pour en corrigeant l’âge pivot pour le rendre plus acceptable bien qu’il soit indispensable, mais contre le fait que l’on touche à mon régime de caisse créditrice autonome du barreau dont je profite : c’est humain.
C’est le règne de l’à peu près et /ou des affirmations péremptoires qui se veulent être indépassables et définitives. Le doute a disparu des esprits et chacun estime détenir la vérité qu’il veut imposer à l’autre. Le principe est de passer en force comme on l’entend souvent c’est-à-dire de maintenir des avantages ou de légiférer avec l’aide d’une majorité docile, inféodée à je ne sais qui et quoi et ainsi contraindre le petit peuple qui ploie sous le joug. On serait presque selon des excités dans une dictature molle qui ne dit pas son nom ! Tout ce qui est excessif est insignifiant disait le prince de Talleyrand-Périgord.
 En réalité on est cru ou non selon le camp dans lequel les autres nous rangent et surtout caricaturent. Le camp du bien est défini par ceux qui s’opposent à tout ou proposent des solutions qui décoiffent ou veulent choquer le bourgeois et qui se proclament progressistes comme si le progrès était de tout bouleverser, de dire oui à toutes minorités, de ne pas mettre de limites, de ne pas être réalistes, et de renvoyer la responsabilité sur les autres. Le camp du mal qui est honni est composé de gens raisonnables qui réfléchissent au -delà de leurs intérêts personnels, ceux qui paient, assument des responsabilités diverses, respectent le verdict des élections même si le résultat ne leur convient pas, sont pour des valeurs traditionnelles qui assurent la cohésion sociale et récusent la force ou la menace dans les rapports sociaux.   
La parole des uns est ainsi sacralisée, présumée être la vérité révélée, et celle des autres est discréditée et suspectée d’arrières pensées et de mille maux. Les médias aiment les bons clients ceux qui gueulent, sont vindicatifs, ne « lâchent rien ou iront jusqu’au bout », ont découvert leurs vocations de contestataires professionnels, ne proposent rien de concret sauf la mort du capitalisme ou de l’ultra libéralisme pour faire court et démagogique mais ils croient « défendre le peuple » : pas moi par parenthèse je n’ai pas besoin d’avocat.
Celui qui a le malheur-car il est moderne de dire que les « élites » ne représentent rien et qu’on n’a pas fait d’études car on n’en avait pas les moyens ce qui est parfois vrai d’ailleurs- d’avoir des diplômes après avoir un peu sacrifier de sa jeunesse, d’exercer une profession reconnue  avec des horaires improbables, qui ont des revenus conséquents (comme ceux de M.Martinez bien payé et on s’en réjouit) qui excédent la moyenne de ceux  de la majorité des travailleurs, n’a à être ni entendu ni écouté car il défendrait son intérêt de classe ce qui est suspect.  On n’évoque jamais le terme intérêt général, on préfère statuts qui datent de Mathusalem, ou régimes avec des spécificités qui justifient des privilèges. Bientôt chaque métier aura une pénibilité revendiquée ne serait- ce que celle de devoir travailler. Et on se moque ou on passe aux pertes ceux qui sont restés sur le carreau puisqu’il ne faudrait rien changer. Bonjour la solidarité avec les plus faibles.
  Le philosophe Michel Onfray que je lis et que j’admire généralement car il réfléchit librement sur la société et distribue ses coups à droite comme à gauche, dans son dernier livre « grandeur du petit peuple » s’est laissé aller à illustrer cette tendance d’être partial. Il rappelle que ses parents ont été ouvrier agricole et femme de ménage et que sa famille actuelle exerce des métiers de base pour faire l’éloge des gilets jaunes qui pensent -ce dont personne ne doute- et dont quelques-uns ont défendu le symbole de l’arc de triomphe et de la stèle du maréchal Juin- ce dont on les félicite. Il y a des gens biens dans tous les camps.
 En revanche il ne se gêne pas pour critiquer les bobos parisiens et on partage partiellement son analyse car ces derniers ne sont pas coupables de tout et je ne les fréquente pas. Le quidam individualiste a aussi des exigences qu’il faut satisfaire.  M.Onfray fait sincèrement l’éloge du peuple et critique vertement les élites dont il fait d’ailleurs partie : il est un exemple du mérite républicain puisque vivant en province dans un milieu défavorisé il a réussi à devenir docteur d’Etat en philosophie, à animer une université populaire, à être une grande vedette des médias, et à vendre des centaines de milliers de livres brillants. Il est lui -même un contre- exemple de ce qu’il dénonce. Comme quoi être binaire et vouloir trop démontrer ne sert à rien. Il faut la base sur laquelle s’appuie ceux qui doivent prendre les décisions pour faire grandir tout le monde.
Michel Onfray écrit : «… car les révolutions ne sont jamais que des girations(mouvements circulaires) qui reconduisent les plus modestes à leur point de départ. Une fois qu’elles ont eu lieu (les révolutions) elles remplacent une tyrannie par une autre. Elles abolissent le dictateur pour faire place à son semblable : il porte juste d’autres vêtements ».  Michel Onfray a raison et qu’on en prenne de la graine, ou du grain à moudre comme on dit en matière de conflits sociaux.
On peut cependant faire la synthèse. J’habite souvent à la campagne dans une commune rurale de 600 habitants qui est le berceau de ma famille où je suis élu ; et je vis aussi à Paris où j’exerce ma profession d’avocat et diverses activités (bénévoles). Je suis donc un rat (ou plutôt un souriceau) des champs et de ville. Comment donc me classer et comment apprécier ce que j’écris ou me critiquer en fonction de là d’où je viens.
Le mieux est donc d’écouter dans le calme et sans s’invectiver ceux qui s’expriment avec modération et raison en posant comme principe qu’ils sont de bonne foi.  Et en confrontant les arguments pour retenir ceux qui sont fondés ou peuvent s’améliorer et ceux qui sont toujours négatifs quoiqu’on dise. Ceux qui viennent aux négociations pour dire qu’il n’y a rien à négocier et qu’il faut retirer tout projet ont une conception sectaire du débat, social notamment car celui-ci ne peut qu’être le fruit de compromis. Les défilés et les blocages n’honorent pas notre pays.  Je ne dois pas être le seul à être fatigué par les dialogues de sourds. Nous devons tendre vers la tolérance, le rassemblement, la concession même si nous ne pouvons tous être d’accord. C’est de cette démocratie là que je viens.    

mardi 7 janvier 2020

de la relativité des soucis


                              De la relativité des soucis.
                        Par Christian fremaux avocat honoraire et élu local.
 A propos de la réforme des retraites à vocation universelle en discussion ou plutôt en dispersion façon puzzle en raison des multiples dérogations, loin de moi de nier le mécontentement d’une partie de la population  mais je n’aime pas la haine qui est inadmissible envers M.Macron  régulièrement élu et qui avait annoncé cette réforme dans son  programme, le rejet de  son gouvernement et de  ceux qu’on  appelle les « riches » pour faire court  injure que l’on accole  aux privilégiés de toute nature par exemple pour ceux qui ont une fonction à vie, ou les cadres sans oublier les patrons. On crée la jalousie et la comparaison entre classes sociales, c’est une régression. On peut ne pas être d’accord sur un changement ou une réforme, faire connaitre ses critiques de façon virile mais bloquer le pays, se servir de la violence pour faire pression et vouloir avoir absolument raison est inadmissible alors que les syndicats ne représentent qu’un infime pourcentage de ceux qui travaillent qu’ils soient salariés ou fonctionnaires ou assimilés avec la sécurité de l’emploi ce qui est un avantage considérable. Et en oubliant les commerçants, artisans, professions libérales ou autres catégories qui n’ont pas les mêmes intérêts - ou ont des régimes autonomes bénéficiaires - que les adhérents de la cgt ou des syndicats vindicatifs et en méprisant les agriculteurs, les femmes, ceux et celles  qui ont eu des carrières hâchées, ceux qui ont changé de métiers plusieurs fois et les catégories qui ne bénéficient d’aucun régime spécial. Enfin en ignorant ceux qui n’ont pas bénéficié de la mondialisation ou qui en sont protégés par un statut et qui travaillent en n’ayant aucun avantage avec des perspectives inexistantes pour leur retraite et pour qui la réforme est positive.  
Je ne dis pas que le gouvernement  a forcément la science infuse sur tout et s’y est bien pris :  pour moi il a mal vendu son projet car après plus de 18 mois de rencontre de M.Delevoye avec toutes sortes de français et de représentants syndicaux , avec en plus l’itinérance du président lui-même dans toute la France pour le grand dialogue national,  il est grave que l’exécutif  n’ait pas pu  comprendre que  la théorie du système universel était parfaite sur le papier, dans un monde non conflictuel où chacun  serait gagnant et où l’Etat ferait des économies. Il n’a pas anticipé la réalité du terrain et les intérêts individuels car personne n’a envie de se sacrifier pour les autres on s’en aperçoit dans tous les domaines.  C’est une tendance du moment qui répond à l’individualisme et le tout pour soi. Il fallait laisser tranquilles les spécificités justifiées tout en leur demandant éventuellement un peu plus de solidarité nationale, maintenir le régime des professions qui ne coûtent rien aux contribuables, et simplement corriger les inégalités de ceux qui sont en galère et méritent que la société les aide. En intégrant aussi au cas par cas la pénibilité qui permet de rétablir la justice voire l’équité. 
Bien sûr les régimes spéciaux n’ont plus de justification mais il fallait programmer leur disparition dans un temps pas trop éloigné et le rétablissement du financement-qui peut être discuté à part- mettant durablement fin aux déficits pouvait être conçu moins brutalement peut être en permettant aussi aux seniors qui ont l’expérience de rester en activité s’ils le veulent. Ce qui donne des cotisations. Car il faut bien que les déficits cessent maintenant ou un peu plus tard. On ne peut vivre dans le déni et croire que ce sont toujours les autres qui paient.  Que l’on responsabilise les partenaires sociaux et qu’on leur confie le soin de trouver des solutions financières pour éviter la faillite. Et on ne parlera plus de l’âge « pivot ou d’équilibre » qui cristallise les oppositions.  Les conseilleurs deviendront ceux qui ont choisi les payeurs. On n’est plus à quelques semaines près. C’est ce qui va peut -être advenir avec le compromis réclamé par le président de la république. Il ne faut ni gagnant ni perdant dans un tel conflit, la satisfaction de son égo et d’avoir eu le dernier mot ne rimant à rien.  Il n’y a aucune honte pour les uns à reconnaitre que l’on a imaginé un projet qui a été mal étudié, que des critiques sont positives, et admettre pour les autres qu’il y a une partie de bon dans ce qui est proposé et qu’il faut savoir abandonner ce qui est désormais reconnu comme des privilèges.  Il faut un match nul : entre les syndicats la cgt notamment qui dit non et surtout les autres syndicats qui réfléchissent avec le gouvernement ,chacun aura marqué un but. Balle au centre. Mais je crains que la facture finale soit lourde et que les économies recherchées tardent à venir.
Pour moi ce débat sur les retraites est le rejet de la valeur travail qui affranchit l’homme. Parmi les opposants au projet il y a des lycéens qui font encore leurs études et des étudiants qui n’ont pas commencé à travailler. Je m’étonne qu’à 16,18,20 ou 22 ans on songe déjà à la retraite ce qui voudrait dire que la vie idéale est celle où l’on ne fait plus rien, que l’on ne participe plus activement aux besoins de la société et à la croissance pour tous, et que le monde de la pétanque ou celui de « buller » en se repliant sur soi et ses proches est l’objectif ultime ? Je n’insiste pas chacun répondra à cette interrogation et en tirera les conclusions qui s’imposent.
L’Europe nous donne des exemples. L’âge pivot est plus proche de 65 ou 67 ans voire plus que celui proposé par le gouvernement ou les 60 ans réclamés par la cgt. Les citoyens de ces pays sont -ils plus maltraités socialement et leurs démocraties sont- elles inférieures aux autres et en particulier à la France ? Quel pays a réussi à résoudre la quadrature du cercle et à trouver des systèmes de gouvernance ou de répartition dont celui des retraites qui plaisent à tous ?  Nous n’avons pas besoin de l’exemple de la Suède ou autre. La France a longtemps été le phare de l’Europe voire du monde par sa démocratie et son système de redistribution, ses philosophes, ses droits de l’homme. A nous d’inventer notre modèle moderne dans cette nouvelle décennie. Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques.  
 Nous devons retrouver la paix intérieure et trouver une solution consensuelle qui nous fasse honneur et n’appelle pas à une guerre larvée de revanches.  Elle ne plaira pas à tout le monde mais il faut passer à d’autres sujets, comme la transition écologique et  la fin du mois et non celle du monde comme le signalent les gilets jaunes qui apparaissent plus réalistes que la cgt : c’est un comble on aura tout vu et entendu !Il faut aussi se concentrer sur le terrorisme (on a encore vécu des drames par des attentats individuels) ; la croissance ( les grèves et les manifestations coûtent des milliards que le contribuable va devoir combler  un jour ou l’autre) et le partage des richesses ; l’équilibre du monde, le niveau de vie de nos voisins notamment africains ,notre protection (nos militaires sont tués au sahel) ; la réparation des dégâts naturels liés aux inondations ou autres phénomènes : les victimes ont besoin de notre solidarité et de notre compassion ; la laïcité car le communautarisme démolit sournoisement les valeurs de la république ; nos réflexions en matière d’éthique et de bio-éthique qui vont changer l’approche de l’humain… Nous avons des choix collectifs à faire qui doivent ensuite s’imposer à ceux -les minorités - qui ne sont pas d’accord, car en démocratie c’est la majorité issue de l’élection qui est le souverain et pas les groupuscules dans la rue qui pensent détenir la vérité.   Les élections municipales de Mars 2020 ne doivent pas être polluées par ces conflits. Il nous faut des élus compétents sur le terrain, pas idéologues mais dévoués pour bâtir dans les 6 ans dans l’intérêt général et non pas en fonction de statuts ou privilèges. La république commence et finit là où les citoyens habitent. 
Mais il faut relativiser ce qui se passe. Pendant que nous sommes dans une quasi guerre de tranchée dans l’hexagone, le monde se détruit et parfois les populations survivent. La guerre est partout avec son cortège de morts et de destructions. L’escalade entre les USA et l’Iran peut conduire par le jeu des alliances et des provocations réciproques à des conséquences dramatiques. La Turquie poursuit son hégémonie. Les groupes terroristes n’ont presque plus de territoires en Orient mais ils ont conservé leur capacité de nuisance et essaient de se rétablir au sahel ou en Lybie c’est à dire à nos portes.
Les soucis doivent donc s’atténuer. Soyons responsables et devenons des adultes. La raison doit l’emporter. Tout le reste est polémiques qui ne nous grandissent pas.        

vendredi 3 janvier 2020

Billet d’humeur : « prenons le train en marche si possible ?



Billet d’humeur : « prenons le train en marche si possible ?
Par Christian Fremaux  avocat honoraire, élu local et usager à pied.
Pour une fois je ne vais pas faire un commentaire juridique ou judiciaire voire sur la sécurité et la justice ou les institutions. Je vais me risquer dans une analyse succincte du conflit social en cours car comme n’importe qui j’ai mon idée et je ne raconterai pas plus de bêtises – pas moins non plus d’ailleurs- que celles que l’on entend à longueur de déclarations. Prenons donc le train en marche ce qui n’est qu’une image et critiquons la cgt car j’aime plutôt les syndicats réformistes.   
Il est cocasse de voir dans les étranges lucarnes s’exprimer des moins ou à peine plus de trente ans membres de la cgt qui sont extrêmement virulents comme si la guerre civile était aujourd’hui déclarée pour ce qui a vocation à s’appliquer dans des années lointaines, et qui réclament le retrait du projet de réforme de retraite universelle avec des arguments pour les moins spéciaux comme les régimes de la Sncf ou de la ratp, ou historiquement curieux car tout ne se compare pas.  Ces militants ont la certitude de ce qu’ils ne connaissent pas et débitent de façon impavide les éléments de langage qui leur ont été communiqués. C’est la bonne langue de bois qui nous revient comme du temps des soviets que certains considéraient comme étant l’avant-garde du prolétariat donc des salariés selon le vocable actuel.  J’ai entendu par exemple que la cgt refusait même le simple principe d’une discussion -bonjour les démocrates- car le gouvernement ne respectait pas les principes définis par le conseil national de la résistance. On ne sait pas lesquels mais ce serait avéré ?
C’est Jean Moulin -un héros torturé et tué sauvagement- qui a fondé à la demande du général de gaulle le conseil national de la résistance mi 1943. On ne parlait pas de retraite ! sauf celle des nazis. Son programme adopté le 15 mars 1944 comportait pour après la libération du territoire une liste de réformes sociales et économiques et suivait des principes d’obédience communiste (économie planifiée notamment) avec le rétablissement du suffrage universel, les nationalisations (énergie, assurances, banques) et la création de la sécurité sociale. La constitution de 1958 marquant le retour au pouvoir du général de gaulle, a intégré dans ses préambules les grands principes de la constitution de 1946 inspirés par le conseil national de la résistance. Nous sommes donc en 2020 sous le régime constitutionnel qui respecte encore les grands principes de 1944.
Il faut donc avoir des lunettes rouge foncé ou obstruées pour ne pas lire que la réforme de retraite universelle présentée par le gouvernement du jeune Macron mais qui connait l’histoire, tournerait le dos aux principes de solidarité, redistribution, rôle incitatif et garantie de l’Etat. La cgt a peur que l’Etat joue avec la valeur du point chaque année pour la baisser et ainsi diminuer les pensions des retraités ce que l’Etat dément en proposant une mesure législative qui interdirait cette manœuvre. Tout le monde s’accorde pour relever que la réforme proposée est plutôt très sociale (je ne dis pas de gauche car celle- ci est absente du débat), qu’elle installe plus de justice et d’équité, qu’elle va favoriser des catégories sociales oubliées et méprisées comme les agriculteurs, les femmes, les travailleurs aux carrières hâchées ou qui sont au chômage  et qu’elle va pénaliser surtout les cadres et les mieux payés. Rien n’y fait la cgt considère sans rire mais avec des contradictions néanmoins que le régime actuel est le meilleur du monde - tant pis donc pour ceux qui n’en profitent pas- et que les privilèges des régimes spéciaux (dont les déficits sont pris en charge par le contribuable) doivent être maintenus, en réclamant subsidiairement la clause du grand-père c’est- à- dire le renvoi de la réforme aux calendes grecques : nos petits- enfants nous voueront aux gémonies si on fait droit à cette absurdité. La cgt campe cependant sur son refus qui devient une prise de position politique.
C’est là où le bât blesse.
Maurice Thorez puissant secrétaire général du parti communiste disait qu’il faut savoir terminer une grève. Nous étions le 11 juin 1936 avec les accords dits de Matignon du temps du front populaire. A l’époque les conditions de travail n’étaient pas comparables avec celles de 2020 et la retraite était l’objet de débats. Le conseil de la résistance n’a pas gravé dans le marbre qu’il ne pouvait y avoir pour la vie éternelle qu’un régime de répartition. D’ailleurs au fil du temps les régimes complémentaires par capitalisation ont fleuri comme Agirc-arrco pour le privé et la Préfon par exemple pour la fonction publique que gèrent les partenaires sociaux.  Des régimes autonomes qui ne coûtent pas un centime au contribuable ont été créés comme celui du barreau dont je profite.
M.Martinez dit n’avoir pas aimé Margaret Thatcher, son libéralisme ( et  surtout sa mise aux pas des syndicats britanniques ). Il confond volontairement défense légitime  de ses adhérents et des travailleurs - mais pas de tous les travailleurs ni des citoyens - et  suffrage universel qui ne le concerne pas dans le cadre d’une république aux institutions existantes pour vouloir changer de régime politique et  établir ce qui lui fait plaisir, et qui ressemble peu ou prou  à ce que M.Mélenchon propose  en encourageant à la grève générale : faire payer les riches, abattre le capitalisme ou le libéralisme ;  pouvoir à tout instant obtenir la  révocation des élus notamment le président de la république  qui ne plaisent plus ; ériger  une démocratie directe car chaque citoyen est le souverain , le peuple  qui crée les richesses-pas les patrons -dans la rue détenant la vérité .Je ne caricature même pas. J’ai entendu pire dans la bouche de grévistes ou de gilets jaunes. On a compris que la cgt voulait son record du monde : faire encore plus long qu’en 1986 ou 1995. Quelle ambition moderne ! c’est lamentable. Mais on ne peut céder à la violence ou au chantage. Que veut dire « on ira jusqu’ au bout puisqu’après un mois de grève on n’a plus rien à perdre » ? Que fera la cgt si le projet initial est adopté avec des amendements puis voté par le parlement ?  Je vis à paris : je vais avec ma famille m’acheter une nouvelle paire de chaussures très solides ce qui fera plaisir aux commerçants. 
On n’est pas obligé d’approuver aveuglément tout ce que l’exécutif imagine. Mais quel serait l’intérêt de tout gouvernement de mentir, de trafiquer et de faire perdre des droits aux français en réduisant leurs revenus pour enrichir des fonds de pension ? Politiquement ce serait un enterrement de première classe avec la fuite à Varennes et une incitation à la révolution. Mais peut être suis-je naïf. Je suis pour le débat d’idées, projet de société contre projet de société : j’entends qu’il soit tranché dans les urnes et pas par la force c’est -à- dire le blocage du pays par l’infime minorité de ceux qui ont la sécurité de l’emploi et le pouvoir de nuisance et sans responsabilité ni en droit ni électorale.  La démocratie est fragile, ne pas respecter ses règles est irresponsable et peut ouvrir la voie à toutes sortes d’aventure autoritaire en particulier. Le général de gaulle dénonçait la chienlit. Nous y sommes.  
Nous devons nous reprendre collectivement, sortir des postures, retourner à la table des négociations avec un esprit ouvert bien que ferme contre la démagogie, faire des compromis qui ne sont pas des compromissions au cas par cas, financer (le fameux âge pivot ou d’équilibre qui peut être moins drastique semble t- il) ce qui doit l’être pour que ceux qui cotiseront plus ou travailleront plus, aient leur avenir de « vieux » assuré dans la justice. C’est cela l’esprit de la résistance : vaincre collectivement sans humilier personne, et bâtir une société où tout le monde est gagnant. Encore faut-il que le train arrive à quai.       

jeudi 5 décembre 2019

je dirai malgré tout que 2020 sera une bonne année.


Je dirai malgré tout que 2020 sera une bonne année.
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Jean d’Ormesson reste vivant puisque je me suis inspiré de son œuvre pour le plagier dans mon titre  et essayer de rester optimiste malgré l’état guerrier du monde, les menaces qui pèsent sur notre pays et qui devraient nous inciter à être moins exigeant même si défendre ses intérêts est légitime,   avec le climat  qui se réchauffe en entrainant des  affrontements  entre les sceptiques et ceux qui hurlent à la fin des temps ce qui est anxiogène, et les catastrophes naturelles qui font des victimes avec le désespoir de certains qui ont besoin de la solidarité nationale. Il me semble que le débat public devrait baisser de plusieurs tons, car la vindicte n’apporte rien, les leçons de morale non plus, et lorsque on exclut ou on interdit en particulier des porteurs d’opinions même détestables ou désagréables en demandant aux tribunaux de sanctionner on ne se grandit pas. Il faut des intellectuels qui émettent des idées, qui analysent les valeurs, et qui guident la pensée qui doit être libre. Les responsables politiques perdent parfois l’occasion de se taire en voulant être opportunistes pour se rapprocher du pouvoir ou le conquérir. Une société moderne doit être tolérante, ouverte aux débats y compris sur des sujets sensibles car il ne peut y avoir de tabous ou de non-dits ce qui est la porte ouverte sinon à l’explosion. On progresse collectivement quand on décide après avoir pesé le pour et le contre d’arguments objectifs et vérifiés, entendu tous les contradicteurs et que l’on a choisi d’agir car marcher vers l’immobilisme ne fait pas faire un pas en avant si je puis m’exprimer ainsi. On a besoin de plus de compréhension et de sérénité puisque personne ne détient la vérité. On ne fait rien de sérieux sous la pression, la force.
L’actualité qui concerne la sécurité et la justice c’est d’abord la mort de héros, de militaires qui bataillent  au Mali, qui combattent pour la démocratie la nôtre et celle des africains, pour aider les peuples du sahel  qui vivent ou survivent  pétrifiés de peur , pour  nos libertés aussi  et que l’on puisse parler  en s’écharpant par exemple … de nos retraites  et s’il faut ou non appliquer la clause dite du grand-père, ce qui devient dérisoire au vu des problèmes de civilisation qui sont posés . C’est aussi la mort des serviteurs de la sécurité civile qui se battent contre les éléments naturels pour sauver des vies. On en parle quelques heures et puis on passe à autre chose comme le climat social.
Ce sont ensuite  les diverses protestations  et les défilés dans la rue avec ce qui va de pair -binôme étonnant -  l’ordre public lié aux violences de toute nature, mais aussi celles qui concernent les pompiers et les médecins : qu’ont fait ces derniers pour être attaqués ? pour être des cibles que l’on attire dans des guets apens comme les forces de l’ordre qui ne font que leur devoir et obéissent aux ordres de leur hiérarchie et celle-ci à son  ministre donc au gouvernement responsable de la stratégie et du choix des armes . La justice a jugé de nombreux gilets jaunes qui avaient confondu colères et exactions et fait des enquêtes en cas de bavures supposées ou d’interventions brutales et disproportionnées des policiers ou gendarmes, eux qui sont accusés d’être à l’origine des heurts et de faire de la provocation par leur simple présence ! La justice ne protège personne ce n’est pas son rôle quoiqu’on en pense hâtivement.
C’est aussi l’appel à la vigilance du président de la république après l’attentat à la préfecture de police. On a bien compris car on ne l’aurait pas accepté qu’il ne s’agissait pas d’aller vers une société de délation, de soupçon, de dénonciation comme on a pu la connaitre dans l’histoire récente ou pendant la terreur du grand « démocrate » Robespierre qui en a perdu la tête.  Il ne s’agit pas d’édifier une république de la méfiance, de l’exclusion, du bouc-émissaire. Nous sommes dans un état de droit avec des libertés publiques très enracinées. On ne va pas changer de mode de vie et de réflexes qui consistent à protéger les droits personnels. Chacun connait bien la formule consacrée selon laquelle la sécurité est l’affaire de tous. En matière de terrorisme, de radicalisation qui y conduit, de comportements déviants qui peuvent y mener, tout le monde s’accorde pour être attentif et faire savoir aux autorités le risque que l’on pressent. Je vais plus loin en rattachant le souhait du président à la notion de devoirs que l’on a tendance à esquiver, car sans obligations le citoyen ne l’est pas pleinement. Ce qui n’enlève aucun droit à personne, droits individuels dont les demandes exponentielles y compris pour satisfaire des caprices peuvent fracturer l’ensemble et parfois créer des tensions, ce qui pourrait être un trouble à l’ordre public ?
L’actualité c’est d’assurer le continuum du fonctionnement des institutions, des services publics qui n’appartiennent pas à ceux qui y travaillent et défendent des intérêts corporatistes, avec la justice sociale dont le contenu est à géométrie variable, et la justice tout court qui est indispensable dans un état de droit qui se respecte avec des juges qui appliquent les lois que les parlementaires qui représentent le peuple discutent et votent. La justice participe pleinement à la sécurité qui selon un autre principe vérifié en pratique est la première des libertés. J’espère au passage que les condamnations concernant les black blocks qui défient l’Etat donc nous les humbles citoyens payeurs que nos excellents services de renseignement vont retrouver, seront exemplaires. 
L’actualité c’est aussi la préparation du scrutin de mars 2020 pour les élections municipales puisque nous avons la chance de pouvoir choisir librement nos élus, ce qui nous distingue d’une grande partie des pays du monde. Que tous ceux qui critiquent ne se privent pas d’aller voter ou d’être candidats pour montrer ce qu’ils savent faire.  L’élection n’est un piège à cons que pour ceux qui ne participent pas.   La sécurité se joue aussi au quotidien et surtout peut être dans les détails je veux dire dans la plus petite des quasi 36000 communes de France souvent rurales car dans les villes et certaines banlieues (ex. Chanteloup-les- vignes récemment) les problématiques sont différentes.
 L’exécutif vient de s’apercevoir que les élus locaux servaient à quelque chose tant dans la gestion des territoires que pour le maintien de la cohésion des populations sans distinguer le citoyen des villes et celui des champs : on s’en réjouit. Mais il ne faut pas qu’il les aime comme la corde soutient le pendu. Il faut leur donner les moyens pérennes d’agir, de la considération, les protéger dans leurs fonctions, les assurer au sens propre du terme contre les velléités de certains habitants plus prompts à engager judiciairement des responsabilités que d’aller voter ou de se dévouer pour l’intérêt communal, et ne pas les cajoler uniquement jusqu’au jour des élections. Ils ont besoin aussi de stabilité et de sécurité puisqu’on leur confie le soin de protéger et de rassurer leurs concitoyens chaque jour. Des politiques vont changer d’étiquette pour suivre le vent en espérant avoir la réussite opportuniste. Mais les citoyens déjà désabusés et qui se sont habitués au dégagisme ne seront pas dupes. Pour les élections locales on vote pour le terroir, pour celui qui parait le plus disponible et le plus compétent. On veut des bâtisseurs pas des carriéristes ; des batteurs de terrain et pas des bateleurs ; des personnalités ouvertes et pas des idéologues. La gestion communale exclut la démagogie ou le communautarisme qui est l’antithèse de la république qui défend l’intérêt général et non une portion égoïste de la nation et qui se fonde sur les libertés,  l’égalité des citoyens d’où qu’ils viennent et quel que soit ce qu’ils pensent ou croient .La fraternité doit être de plus en plus renforcée autant que faire se peut sans inventer toujours des excuses sociologiques et psychologiques qui n’ont plus de fin et sans crier au racisme et à la discrimination pour tout et rien sans pour autant nier ce qui est inacceptable et que la justice doit punir fermement car on n’est pas naïf .  L’émotion ne fait pas une politique mais elle n’y est pas absente surtout en matière de violences contre les femmes et les enfants en particulier. Sujets malheureusement d’actualité.
L’actualité c’est donc d’être ferme sur les principes et valeurs républicains ; de ne pas céder aux pressions et aux sentiments et de prendre des mesures qui conduisent au progrès collectif. La sécurité avec la justice qui malmène les puissants ou se croyant tels réduits à l’état de justiciable lambda et incarcéré parfois on le voit, et on le verra peut-être encore plus bientôt, sont fondamentales. Faut- il rappeler que l’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers.
Je parie que l’année 2020 sera belle malgré les difficultés en cours. Bonne fin d’année 2019.
   

mardi 19 novembre 2019

la violence destructrice du pacte social


              La violence destructrice du pacte social.
         Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local
Je n’arrive pas à m’habituer à la violence de toute nature ni à ceux qui estiment que seule la force est légitime et efficace pour obtenir des résultats et permet de faire céder les gouvernements c’est-à-dire moi puisque le pouvoir exécutif résulte d’élections libres donc de la volonté des citoyens. Je conçois la démocratie non dans la fureur mais dans le dialogue même âpre. Le pacte social résulte de compromis et de la certitude qu’il y a un destin commun, des devoirs qui s’imposent aux droits, et la nécessité d’accepter des contraintes collectives qui permettent d’exercer ses libertés. Les minorités doivent se fondre dans le contrat républicain et adopter ses valeurs. 
 Si des réformes sont proposées c’est parce qu’elles sont utiles sinon indispensables dans l’intérêt de tous pour éviter la faillite ou la paralysie du pays. Si tout allait bien, s’il n’y avait pas de privilégiés, pas d’injustices, que l’harmonie régnait entre les uns et les autres quelques soient leurs modes de vie, leurs croyances, leurs besoins, dans un cadre champêtre sans pollution ni menaces - ce qu’on appelle l’utopie - l’immobilisme serait justifié (bien que critiqué avec hargne) et il n’y aurait pas de violences pour s’opposer à tout et son contraire. Que l’on me désigne le pays qui réunit tous ces critères dans un monde parfait.
 Je fatigue d’entendre tous les jours ceux qui ont été battus aux élections mais qui donnent des leçons virulentes et de gouvernance et de morale, qui monopolisent les médias et qui savent ce qu’il aurait fallu faire pour obtenir un pays apaisé et prospère. Que n’y ont-ils pensé plus tôt quand ils étaient aux affaires pour les plus démocrates, et pour les plus radicaux aux idées simples voire simplistes de gauche ou de droite qu’ils se fassent élire par les urnes et pas par la rue pour que l’on voit ce qu’ils sont capables de conclure dans un consensus et le calme.   
La violence s’entend principalement d’exactions physiques ce qui est le plus spectaculaire et surtout de destructions, mais elle s’exerce aussi dans l’expression orale brutale avec le rejet de l’autre, la suspicion envers telle catégorie sociale ou la dénonciation par ceux qui croient détenir la vérité.  Chacun a pu remarquer qu’au mépris de  toute certitude il suffit de s’attaquer à un individu et de l’accuser sans preuve concrète sur des intentions supposées ou pour des faits d’il y a parfois des dizaines d’années prescrits ou non, pour qu’aussitôt la personne visée soit considérée comme coupable et mise au ban de son métier, de sa famille et proches et doive se défendre sans même connaitre précisément ce dont on l’accuse .La justice s’auto- saisit vite de peur qu’on l’accuse de couvrir telles turpitudes ou infractions !  C’est du terrorisme intellectuel, le règne de la colère ou de la réaction sensible, et on ne prend pas la peine d’attendre un peu que les éléments matériels soient avérés : on cloue d’abord au pilori et on avise ensuite. C’est aussi de la violence à l’état pur. Il ne s’agit pas d’excuser des faits graves ou de soutenir une personnalité qui a mal agi ou s’est rendue coupable d’actes inqualifiables puisqu’on n’en sait rien. On n’est pas obligé de croire sur parole tous ceux et celles qui s’estiment victimes. Je dénonce l’émotion, l’à peu près, le non -respect de la présomption d’innocence, l’absence de tout débat contradictoire et le lynchage médiatique. Quand une société se laisse aller à ce genre d’emportements c’est grave et la porte ouverte au pire, à une ère du soupçon, du règlement de compte, et à une justice expéditive. Nous vivons une approche subjective de la violence qui serait justifiée par des considérations aussi multiples qu’irrationnelles.
 Nous sommes à fronts renversés. Il y a le camp des bons ceux qui luttent, ceux qui détruisent pour imposer leurs idées, ceux qui prétendent se battre pour les autres la majorité silencieuse, ceux qui cassent pour tenter de bâtir un autre monde ou simplement parce qu’ils ne supportent aucun ordre fût -il public, ni aucune autorité à part la leur et sont contre l’Etat et ses représentants forcément racistes, discriminatoires et injustes.  Et il y a le camp des méchants auto- qualifiés par ses adversaires ceux qui sont responsables, attachés aux principes républicains et à notre art de vie, qui prônent la raison même si certaines décisions leur sont défavorables et qui soutiennent l’Etat qui est le garant des libertés et du fonctionnement des institutions, en croyant aux élections qui  ne sont des pièges à cons que  pour ceux qui  ne participent pas ou qui ne peuvent se faire élire. 
A ce sujet je suis toujours stupéfait d’entendre des députés nationaux ou européens qui sont des élus de la France entière au-delà de leurs positions partisanes, appeler à manifester et soutenir certains qui méprisent la France et veulent la faire céder, ou inciter à de la désobeïssance civile et civique, voire s’associer aux grèves qui paralysent le pays, et contester les lois qui ont été votées au parlement dont ils sont membres.  C’est de la violence parlementaire qui va bien au -delà de la légitime critique et lutte politique pour conquérir le pouvoir.
Après les dernières violences du 16 novembre 2019 et la destruction notamment de la stèle du maréchal Juin héros de la bataille d’Italie, j’ai entendu des personnalités ou journalistes dirent que les black blocks étaient acculturés (la conjuration des imbéciles comme on l’a dit pour les violences de Chanteloup-les-vignes) et qu’ils n’avaient voulu que se procurer des projectiles en marbre. Je réfute cette analyse. Je pense que les black blocks qui sont quelques centaines agissant sous les caméras des médias et quasiment à visage découvert devraient pouvoir être retrouvés par nos excellents services de renseignement et jugés car ce sont des professionnels de la violence. Je crois qu’ils sont plus intelligents qu’on le dit, qu’ils ont une idéologie au moins anti- capitaliste ou anti -libérale, qu’ils veulent abattre un Etat dit bourgeois, n’ont pas de revendications sociales précises, détestent l’ordre ou l’autorité, et qu’ils veulent instaurer un chaos sans pour autant aboutir à une démocratie participative ou rénovée.
On verra lors de la grande manifestation prévue pour le 5 décembre comment réagissent les syndicats qui devraient avoir un service d’ordre musclé empêchant les black blocs de leur voler leur grève, sinon ce serait une complicité passive car l’Etat avec ses forces de l’ordre ne peut tout faire d’autant plus que toute prétendue ou avérée bavure est vilipendée et fait scandale  .La violence est aussi  de fermer les yeux ou de s’estimer non responsable  des conséquences  de la liberté de manifester. C’est trop facile. Il faut arrêter l’escalade de la violence qui menace notre unité. Tout le monde doit s’y mettre à son niveau. On a le droit d’être mécontent, de se sentir victime, de vouloir plus, d’être considéré.  Mais on ne peut accepter que la violence l’emporte.