lundi 2 mai 2016

UN 1-ER MAI A OUBLIER

                         UN 1ER MAI  A OUBLIER

Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local .
Les défilés du 1er mai cette année, surtout à PARIS, ont engendré des violences. Pour être la fête ce fut la fête mais pas celle que l’on souhaitait, le muguet ayant poussé tardivement  et n’étant pas non plus en plein épanouissement .C’est vrai qu’il n’y avait pas de quoi être surpris le climat-social- étant dégradé depuis des mois, et les manifestations contre la loi dite travail  –ou plutôt anti-emploi selon moi- portée  ou « ramassée » par Mme EL KHOMRI (que je plains à titre personnel) ne cessent pas. On peut à ce propos s’étonner que certains députés de la majorité (socialiste) au parlement attendent le texte de pied ferme pour le torpiller et faire plaisir à la rue, alors qu’ils sont censés  soutenir un gouvernement de gauche,  tandis que l’opposition (de droite) est plus ouverte et pragmatique , respectueuse des principes républicains  et des intérêts contradictoires des salariés et du patronat .Notre parlement n’a pas besoin de cela  pour être critiqué ouvertement sans que, naturellement ,on propose une alternative aussi démocratique et légitime. Qui doit faire la loi ? Des agités dans la rue qui ont la vérité révélée ou les parlementaires élus et qui représentent le peuple ?, même s’ils ne sont pas parfaits-mais qui l’est ?- et doivent se réinventer dans leur pouvoir  pour ouvrir un dialogue  plus constructif. Il ne suffit pas de vouloir tout changer : il faut dire par quoi, comment et avec qui.
La journée du 1er Mai 2016 n’a pas été exemplaire et est inquiétante pour l’avenir, car la violence sociale s’aggrave et l’on ne voit pas à court terme d’union sur les objectifs, d’accord sur les moyens à mettre en place, et de réconciliation entre les divers groupes d’intérêts .Avec le terrorisme récurrent qui crée un climat anxiogène malgré les efforts  et les déclarations du 1er ministre et de son ministre de l’intérieur ; avec les difficultés de toute nature qui sapent l’optimisme même si la France va mieux en macro-économie ,donc globalement mais ce qui n’a pas encore atteint l’individu ;avec la nouvelle querelle religieuse avec l’islam radical qui entraîne des répercussions dans certaines de nos villes, voire dans nos villages ; avec une sorte de burn-out généralisé et une exaspération  qui monte par capillarité, l’avenir n’est pas réjouissant. Et on gâche la fête  qui aurait du être un moment de fraternité et de solidarité.
Les rues de PARIS notamment appartenaient aux salariés (plus ou moins nombreux selon les chiffres de la préfecture ou ceux des organisateurs) au sens large le 1er mai. Désormais ce sont tous ceux qui protestent  pour n’importe quel motif même éloigné du droit du travail !, qui marchent. Naturellement les patrons  notamment petits et moyens pas ceux du CAC 40 qui travaillent autant que leurs salariés, la responsabilité de l’entreprise et le devoir de maintenir ou de créer de l’emploi en plus, sont absents voire écartés des cortèges, car ils sont par définition  des « exploiteurs » : MARX tendance Karl et non Groucho, n’est pas mort. Les syndicats qui représentent environ 8% des salariés avec une grosse majorité dans la fonction publique, tiennent le haut du pavé   comme si le pouvoir leur appartenait et qu’ils avaient la légitimité pour représenter le peuple tout entier, y compris la majorité silencieuse qui exècre  les excès, le désordre, les revendications démagogiques, et qui fait tout pour s’en sortir en respectant les lois,  et les autres. En ce 1er mai les slogans furent divers mais très dirigés et vindicatifs-rien ne va et c’est la faute  aux  méchants(chacun mettant qui il veut dans cette catégorie), et souvent outranciers en dénonçant les « violences policières »-faudrait-il que policiers et gendarmes  fraternisent avec les casseurs ou les manifestants ?-  Le tract de la CGT accusant la police républicaine  d’être des provocateurs et de faire des victimes est particulièrement odieux. Il y a eu de nombreux policiers et gendarmes blessés parfois grièvement  pour avoir  obéi  aux ordres de leur ministre et avoir fait leur travail, avec discernement et responsabilité , faut-il le préciser ? Imagine – t- on que le gouvernement décide de ne pas encadrer les manifestations pour ne pas intervenir s’il y a des débordements, qu’il n’y ait ni CRS ni gendarmes pour protéger les biens et les personnes ? Pour que ceux qui défilent ne crient pas à la provocation dans leurs rangs ? Qu’ainsi les casseurs puissent agir librement ? Que n’entendrait-on comme critiques ou comme cri « où est la police » face aux dégâts matériels et physiques ! Cette police que l’on a décriée le 1er mai, alors qu’on l’avait acclamée et embrassée après les attentats de CHARLIE HEBDO début 2015, puis remerciée après les attentats du 13 novembre 2015.Esprit versatile et mauvaise foi, quand tu nous tiens !
En 1970 à propos du printemps de PRAGUE, Jean FERRAT chantait : « c’est un joli nom camarade, c’est un joli nom tu sais ; qui marie cerise et grenades aux cents fleurs du mois de Mai ». Le poète devait penser aux fruits, et non aux grenades lacrymogènes qui ont été lancées pour repousser les casseurs, très agressifs, et faire évacuer la place de la NATION.
La NATION c’est aussi un  joli nom camarades syndiqués, lycéens impatients d’affronter le monde du travail, étudiants prolongés qui s’inquiètent avant –pour quelques uns –de faire carrière en … politique, et citoyens qui rêvent d’un autre monde (comme jadis le groupe TELEPHONE le chantait ); ou particuliers de bonne foi qui croient que l’utopie changera tout (son inventeur en 1516  le chancelier d’Angleterre THOMAS MORE «  l’utopie ou le traité de la meilleure forme  de gouvernement »  a mal fini).La nation soude tous les citoyens au sein d’un communauté qui partage le même destin, qui est au-delà des contingences partisanes, et qui a permis au peuple de se surpasser dans des crises majeures qui menaçaient son existence .Beaucoup sont morts pour la nation,  comme les soldats –citoyens de VALMY. Transformer la place de la nation en un affrontement franco-français est un contresens historique et une honte.
D’autant plus que les arpenteurs du bitume venaient de la place de la République où le mouvement  NUIT DEBOUT auto-inorganisé, très sectaire puisque n’admettant pas d’autre opinion que ceux qui y squattent et anarchique,  fournit des troupes, là où l’autorité de l’ETAT ne s’exerce plus, au nom de la liberté d’expression et du droit de manifester. « Ô liberté que de crimes on commet en ton nom » s’écriait Mme ROLAND  , femme des lumières, âme du pari girondin avant d’être décapitée .Mais il y des limites à tout, les tribunaux le rappellent, et quand on sait qu’après le couvre-feu les casseurs envahissent la place de la république, on essaie d’anticiper et d’agir. La République, res-publica la chose de tous, ne peut tolérer qu’on la provoque, qu’on la bafoue, que l’on teste sa résistance. La république c’est certes le droit de s’exprimer, de ne pas être d’accord et de le faire savoir, mais c’est aussi le devoir de respecter les autres, et la loi votée démocratiquement dans le cadre de l’état de droit (d’ailleurs accentué par l’état d’urgence actuel), et d’acquérir une éventuelle légitimité par l’élection et non par une auto-proclamation   en niant toute valeur aux institutions ou aux représentants légaux. Le nihilisme conduit à l’impasse  et pour la révolution, on a déjà donné, surtout avec les exemples  contemporains qui devraient nous faire réfléchir .Ainsi  le mouvement PODEMOS en Espagne qui a eu des députés , barre la route à la droite qui a quelque peu redressé l’économie de pays, mais refuse de participer à une coalition de gauche ou à un pouvoir quelconque,  et l’Espagne ne peut trouver un gouvernement. Peut-on dire que tout ceci est responsable ? Mais ce terme doit être étranger à nos revendiquants. Les indignés n’ont pas de débouchés. Le peuple n’est pas bien parti !
Nation, République,  ces mots furent dévoyés ce 1er Mai. Les casseurs ont cassé la fête. Soyons francs, on le pressentait. A force de ne pas dénoncer clairement et fermement la violence quelque soit la raison ( prétendue bonne ou non)-sauf quelques politiques  courageux-à force de comprendre l’exaspération  grandissante justifiée ou non,  de critiquer élus et responsables divers,  et d’appeler à un quasi grand soir, certains y ont cru. La faiblesse  engendre toujours des tentatives, même s’il faut un dialogue et qu’il ne s’agit pas  d’interdire au profit d’un ordre qui n’aurait aucun sens. Certes tout ne va pas bien, et il faut réfléchir pour créer une société de confiance plus juste et plus égalitaire. Mais pour réformer encore faut-il l’appui d’une majorité, un consensus des citoyens et un pouvoir qui propose , met en place,  et réussit. Espérons que pour la future élection présidentielle, des programmes  qui rassemblent, cohérents, réalistes, chiffrés et détaillés permettront d’élire un président qui pourra agir avec une majorité qui le soutient.
Le soir de ce 1er Mai j’ai regardé BFM TV.J’y ai vu et entendu M.BESANCENOT celui qui est un révolutionnaire permanent mais qui a choisi d’être postier car la poste c’est stable,  qui revenait du défilé, se refuser à désavouer les violences, dénoncer la provocation policière,  et s’offusquer que le gouvernement n’écoute pas la rue en maintenant sa loi dite travail. Bien sûr il n’a prononcé aucune parole de réconfort à l’égard des policiers et gendarmes blessés dans l’accomplissement de leur mission. Quand on en est  à ce niveau  de déclaration, on reste confondu. Heureusement BFM m’a arraché un sourire en rappelant que M.J.M. LE PEN avait fêté JEANNE D’ARC avec une poignée de fidèles place des pyramides (qui sont des tombeaux)  sans sa fille, tandis que celle-ci célébrait la même JEANNE avec ses partisans place SAINT-AUGUSTIN ( l’un des pères de l’église des 4ème et 5ème siècle qui eut une jeunesse agitée avant de trouver un sens à sa vie avec DIEU). Un FN ça va, mais deux bonjour les dégâts si je puis me permettre cette formule,  en respectant ceux qui choisissent cette voie, déçus par les autres.
Oublions ce 1er Mai 2016 et espérons en des jours meilleurs.


jeudi 21 avril 2016

DÉFICIT DÉMOCRATIQUE OU DÉMOCRATIE A RÉNOVER ?

Déficit démocratique ou démocratie  à rénover ?
Par Christian FREMAUX, avocat honoraire et élu local.
Les mots ont un sens .Après l’annonce de la faillite de la justice par le ministre, qui rejoint celle plus large de l’Etat-tous les observateurs et institutions de contrôle tirent la sonnette d’alarme, mais selon le Président la France va mieux !- on parle désormais de déficit, mais démocratique c’est-à-dire que les français n’auraient pas suffisamment la parole ou ne sont pas écoutés ou que le pouvoir  n’obéît pas immédiatement à chaque demande de  groupuscule minoritaire, sans aucune légitimité, avec des membres cooptés qui partagent le même avis :rien ne va .Fi des élections qui ont porté au pouvoir des élus  politiques nationaux ou locaux : fi des élections professionnelles avec  des représentants de syndicats ; fi tous les corps intermédiaires ou institutions qui réfléchissent aux problèmes inédits de société ; fi contre tous ceux qui détiennent une légitimité même petite. On remet tout en cause. On veut du direct comme à ATHENES jadis sur l’agora, avec le peuple ou plutôt quelques individus qui s’expriment, pétitionnent contre tout, exigent par exemple un salaire pour tous à vie, dénoncent pêle-mêle les méchants selon eux , les riches, le capitalisme, la police, un philosophe, la politique nucléaire, la loi travail, la sélection à l’université, la mondialisation… et la liste n’est pas exhaustive. Et on les prend au sérieux : les médias ne cessent de les interroger,  et diverses élites dont certains politiques qui ont du participer à MAI 68 avant de devenir députés, sénateurs, ou ministres (on ne cite aucun nom mais on peut les reconnaitre), ou des nostalgiques du CHE ou de FIDEL, enfin de héros « modernes »qui ont échoué et plongé leur pays dans la misère,  d’anciens adeptes d’idéologies qui ont conduit à des massacres de masse et l’anéantissement de l’être humain,  pensent que tout ceci est rafraichissant et qu’il faut que la parole se libère  sans trop savoir ce qu’on va en faire des belles paroles, des slogans  creux et des injonctions irresponsables. Au passage lesdits politiques se tirent une balle dans le pied car si on en est à un tel rejet, ce sont eux qui sont visés au premier rang car ils sont au pouvoir depuis des décennies. Notre démocratie se caractérise par  un état de droit certes perfectible mais l’un des meilleurs au monde avec une liberté d’expression que beaucoup de pays  mêmes démocrates nous envient, des alternances sans drame, des élections libres pratiquement tous les ans pour les divers échelons  de notre administration locale ; un parlement où l’on discute ferme et où toutes les tendances et groupes de pression  s’invectivent plutôt que dialoguer ; où le pouvoir exécutif  essaie de faire voter des réformes et est surtout paralysé par sa propre majorité !Et où le président de la république à peine élu par une majorité est décrié (parfois à juste titre),contesté  dans ses choix et décisions, avec des sondages sur sa popularité au jour le jour. On connait donc l’avis du peuple ou de ceux qui prétendent parler à sa place sans en avoir reçu mandat. On entend évidemment pas la majorité silencieuse, celle qui travaille  ou est utile dans une activité quelconque, sans profiter d’aides diverses, qui va voter, respecte le choix des autres,  se conforme à la loi même quand elle est injuste pour elle, ne commet pas d’infractions ou de violences, enfin est  composée  de citoyens ordinaires, apaisés même s’ils n’en pensent pas moins.
Il n’y a donc pas de déficit démocratique même si on peut et l’on doit améliorer le fonctionnement des institutions de la V ème république créée en 1958 pour le général de Gaulle. On ne veut plus d’un chef qui dirige tout, selon son instinct et sa grandeur ou la haute idée qu’il a de ses qualités, (malgré les référendums et les fameuses conférences de presse du général) avec une majorité qui ne discute rien et dont les députés  se contentent d’être des godillots  pour pouvoir se faire réélire ; avec un premier ministre suiveur ou sans personnalité voire simple collaborateur… Ce temps est révolu car le temps s’est accéléré, les problèmes sont devenus complexes et inédits (il faut inventer des solutions nouvelles les anciennes recettes comme pour tenter d’éradiquer  le chômage ne marchent plus) ; la mondialisation à ses effets positifs et aussi des conséquences négatives ; les menaces au-delà du terrorisme qui ne vient plus que de l’extérieur sont multiples et anxiogènes, et il est difficile de communiquer  à leur propos sans provoquer une inquiétude encore plus forte. On discute de tout , dans tous les domaines, et le passant lambda , celui qui n’a aucune compétence particulière, aucun avis motivé mais est de bonne foi et semble honnête , répond aux journalistes à propos de n’importe quel sujet fût-il fondamental :faut-il faire la guerre au sol en Syrie ? Faut-il remplacer le nucléaire par autre chose ? Comment résoudre le chômage ? faut-il taxer les riches et augmenter les impôts( pour les 50% de français qui en paient) ?Doit-on passer aux 32 heures  et augmenter les charges des patrons qui ont reçu un « cadeau » du gouvernement pourtant de gauche ?  L’islam est –il compatible avec la laïcité ? (quand le questionné sait définir la laïcité ce qui n’est pas évident) . La crise de la démocratie ne peut-elle se résoudre par la simple parité et l’interdiction du cumul des mandats ? Et les fonctionnaires : doivent-ils garder leur statut à vie ? (si on interroge un chômeur du privé, on connait la réponse) !:Et encore dans le plus léger, quoique !: M.MACRON est-il de droite ou de gauche : ferait-il un bon président de la république ; Karim BENZEMA doit-il revenir en équipe de France ?.L ‘I.S.F. est-il un impôt qui fait fuir les élites (si on pose la question à un SDF on devine sa réaction !)… Cela devient ridicule. On n’est plus dans le déficit démocratique mais dans le trop-plein car on ne gouverne pas  avec des sondages et pour faire plaisir à l’opinion qui est versatile par nature, changeante au gré de ses propres intérêts ce qui est naturel , et qui est soumise au présent de l’émotion avec une vision courte .En revanche  il va de soi  que tous ceux qui contestent un projet  quelconque, peuvent avoir raison et qu’un élu  n’a pas la science infuse, sortirait-il d’HEC et de l’ENA réunis, voire de maternelle supérieure puisque pour être élu il n’est pas nécessaire d’avoir fait des études et d ’avoir de grands diplômes (contrairement à un métier manuel où le brevet professionnel est obligatoire) : mais cette remarque est une boutade, quoique ! et je m’applique la remarque à moi-même puisque je suis un très ancien élu local. Il faut toujours commencer par balayer devant sa porte. Le problème est qu’actuellement rien n’est prévu pour revenir dans la sérénité sur une décision qui apparait mauvaise, sauf manifestations, violences, destructions et désespoirs. Il y a là un déficit de lieu de rencontres et de discussions raisonnables .Le  citoyen se sent méprisé alors que celui qui a pris souvent collectivement la décision  est sûr de son bon droit,  et de l’argent qu’il va dépenser grâce aux contribuables.
Cela veut dire que l’on ne peut pas continuer comme cela. On n’est pas couchés comme dirait L.RUQUIER avec le mouvement NUIT DEBOUT qui campe sur la place de la république qui n’est pas la place MAIDAN ou celle de TIAN AN MEN (aucune révolution ne prendra son essor en France en 2016 ou 17 à partir de la place de la république  PARIS 11- ème arrondissement, espérons le, et soyons modestes) et veut enlever les dalles fraichement posées à la suite de travaux pour des centaines de milliers voire millions d’euros, pour y faire pousser des carottes et des radis. Sans commentaire, sauf que quand les casseurs s’en mêlent tout est ravagé alentour (commerces divers, banques ,mobilier urbain ), avec des forces de l’ordre blessées ce qui est honteux, et on ne poursuit pas pénalement alors que les marcheurs défendant la famille il y a quelques mois se sont vus envoyer par la mairie de PARIS la facture des réparations de la pelouse… foulée aux pieds. Deux poids et deux mesures qui semblent n’offusquer personne : on est là dans le déficit de justice, mais au nom d’une politique orientée qui ne veut pas déplaire à son électorat. Pour moi, les débats de NUIT DEBOUT sont confondants de naïveté et de bonne conscience-sauf quand ils s’en prennent à un académicien dont on peut ne pas partager son opinion sans lui cracher dessus !- et ne peuvent conduire à rien de concret. Ils sont cependant révélateurs : les français veulent participer à la prise de décision en amont car l’application les concerne dans leur avenir, et si la loi ou la décision prise devient un échec, c’est eux qui subiront et paieront les pots cassés. La loi générale et faite pour «  l’éternité » sous l’appréciation et l’interprétation des tribunaux, n’est plus forcément la bonne solution même si on a besoin de sécurité juridique donc de stabilité de la réglementation. Il faut donc inventer un nouveau style  de régime représentatif-même si les députés ou les sénateurs, et encore plus les élus locaux sont à l’écoute de leurs électeurs et font remonter les attentes  et parfois des idées de bon sens- pour que la loi soit la plus consensuelle possible, que le dialogue avec les spécialistes et les usagers ou consommateurs (les français de base) ait eut lieu avant l’écriture des textes et leur vote ; qu’il soit prévu une période d’essai et une date de « revoyure » pour corriger ce qui ne donne rien ou accentuer ce qui est efficace ; que l’on simplifie les textes…et s’ils sont mauvais qu’on les abroge. Que l’on se dispense des effets d’annonce et que l’on explique et explique encore les tenants et aboutissants de telle ou telle mesure.
Faut-il aussi rédiger une nouvelle Constitution que certains réclament sans en donner le contenu en détail sauf à réclamer un pouvoir plus réduit pour le président de la république (que tous les français choisissent) ; avec un nombre de députés et de sénateurs diminué et qui ne feront que la loi (est-il bon de les couper d’un territoire et de leurs électeurs ?; avec la suppression du conseil économique et social (vieille idée de vouloir se priver des avis des forces vives du pays même s’il y a parfois des désignations de « copinage » bien que les conseillers soient compétents pour la plupart) ; quel doit être le rôle des juges qui disent le droit et protègent les libertés individuelles et doivent avoir une place centrale  pour arbitrer et participer à l’équilibre des pouvoirs (comme MONTESQUIEU le préconisait) ?...La Constitution actuelle a permis de franchir toutes les crises majeures depuis 1958 notamment la grave crise financière qui perdure depuis 2008 , et faire face au terrorisme qui va durer, malheureusement. Il faut donc y toucher d’une main tremblante car elle a fait ses preuves et on ne sait pas ce qui peut advenir en se lançant dans l’inconnu. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire. Nous sommes entrés dans la précampagne  présidentielle qui va s’accélérer et se crisper dans tous les camps. Nous allons osciller de la démagogie à la surenchère   je le crains, et certains vont essayer de flatter leur clientèle électorale habituelle, plutôt que de penser à l’intérêt général et à la France. Les candidats sérieux, ceux qui sont responsables, auront un vrai programme, courageux, novateur, chiffré  et applicable au plus vite ,  et devront annoncer ce qu’ils vont faire, comment et avec quoi et qui. En renouvelant les genres, avec l’enthousiasme d’une nouvelle génération celle du numérique et l’expérience des anciens .C’est parce qu’ un candidat n’a pas prévenu de ce qu’il allait faire –ou ne le savait pas d’avance et a été pris par les circonstances- et a suivi une politique qui était parfois le contraire de ce qu’il avait dit, mais en le faisant mal car il ne pouvait aller au bout, hué par son propre camp, que l’on parle actuellement de déficit démocratique. En réalité  c’est une politique de gribouille, improvisée, arbitrée pour ne déplaire à personne de son camp, qui ne peut que conduire à la déception de tous. Ce n’est jamais assez pour personne, mais toujours de trop pour les autres, et tout le monde est mécontent.
La démocratie de PERICLES, le pire des régimes à l’exception de tous les autres selon Sir W.CHURCHILL, est à réinventer dans un monde nouveau et une société où les valeurs et les espoirs ont profondément changé ,pour que le citoyen se sente concerné en permanence : il ne lui suffit plus de voter (voir le niveau très élevé d’abstention pour toutes les élections y compris communales pourtant  de proximité) et d’attendre des résultats jusqu’à la prochaine élection. Il veut pouvoir influer à tout moment s’il considère que l’élu n’a rien fait, ou mal fait, ou est finalement incapable tout le monde atteignant son niveau d’incompétence à un moment donné, selon la courbe de PETER. Il faut donc lui donner les moyens juridiques et réels (pétition ? référendum local ? réclamation officielle  quelconque ?)… pour lui permettre de manifester son désaccord et demander un changement de direction.  Naturellement il ne s’agit pas d’accepter n’importe quoi, des demandes saugrenues et qu’une petite minorité –autoproclamée sachante-remette tout en cause à tout moment. Pour réussir il faut de la stabilité donc de la durée. Mais il faut inventer des respirations, des remises à plat, des rediscussions. C’est avant tout vers  une modification des comportements, que la loi doit encadrer donc préciser,  des responsables élus et des citoyens, à laquelle il faut tendre. La démocratie mérite que l’on réfléchisse à son avenir. Elle le vaut bien, et cela nous économisera des querelles inutiles et des propositions débiles qui nous font perdre du temp

jeudi 7 avril 2016

T'AS PAS CENT BALLES

« T’as pas cent balles( ou 1 euro) : chronique de la faillite  de la  Justice ».
Par Christian FREMAUX, avocat honoraire, conseiller prud’homme et élu local.
M.URVOAS nouveau garde des sceaux, ministre de la justice , après avoir audité diverses juridictions et entendu des responsables et des praticiens de la justice  vient d’ énoncer une vérité simple, incontestable et dramatique : ladite justice est en faillite : il n’y a plus de thunes comme disent certains jeunes, pour la faire fonctionner correctement  et pour qu’elle remplisse ses missions qui ressortissent au domaine régalien de l’Etat comme la sécurité, la défense  ou la monnaie. C’est grave docteur ! mais le diagnostic est exact. Les juridictions et donc les magistrats saisis de litiges de toute nature, plus ou moins importants, n’ont plus de sous ne serait-ce que pour acheter du papier, des stylos ou des gommes, téléphoner , photocopier, imprimer les jugements ,envoyer des télécopies ou des courriels, et manquent de personnel pour les aider et rendre les décisions rendues légales et exécutoires. Ils ne peuvent plus non plus payer les experts qu’ils ont missionné et comme ceux-ci ne sont pas des bénévoles des dossiers vont rester en plan. Le service public de la justice a coulé . Ce sera comme d’habitude la faute de personne car la lente agonie a commencé il y a des années. Quand c’est un artisan, un commerçant ou un chef d’entreprise qui fait faillite, quelque soit la raison, on le liquide, ou il y a un repreneur,  et on le poursuit souvent en l’envoyant devant…. Le tribunal compétent. En matière de comptes publics et de gestion politique  il y a des «  responsables qui ne sont pas coupables » selon la célèbre formule de Mme DUFOIX quand elle était ministre de la santé pendant le scandale du sang contaminé, et l’échec étant collectif c’est l’irresponsabilité générale : sauf cas extrême un politique n’est pas poursuivi  pour gestion calamiteuse ou insuffisante voire nocive: il quitte le gouvernement, retrouve d’autres fonctions, et parfois se fait réélire.
La justice est pourtant une institution essentielle dans notre société contemporaine où le droit (« fabriqué » par nos excellents parlementaires qui réagissent souvent en fonction de l’émotion) est partout et doit fixer des limites en régulant les comportements ; où la mondialisation oblige à garantir des règles pour tous sauf à devenir la loi de la jungle ; où l’ubérisation de pratiquement tous les domaines d’activité  tire tous les prix vers le bas ( ce qui en ma qualité de consommateur  me réjouit mais me désespère comme professionnel), entraîne une certaine insécurité juridique (car trop d’informations générales  émanant de sites  émis par les start-up peut tuer l’information spécifique du professionnel ayant pignon sur rue et expérience, et adaptée au cas concret) et où le besoin d’arbitres impartiaux est impératif ; où le contribuable exige que ses litiges personnels (familiaux : de propriété ;de voisinage ; de consommation , d’achats et de ventes divers; de travail ; de ses rapports avec sa commune ou les services publics…) soient tranchés au plus vite voire l’urgence pour lui qui doit passer en priorité et si possible, au moindre coût ; où le citoyen s’indigne si le délinquant qui pourrit sa vie, ou le criminel qui lui fait peur et enfin le terroriste qu’il exècre, n’est pas « pendu »sur l’heure et si de surcroît il considère que la justice pénale est laxiste avec ceux qui dévient de la vie normale. C’est humain comme réaction , sauf que tout ceci a forcément un coût. Ceux qui ne paient pas d’impôts ou très peu (soit environ 50% des français), ne se posent pas la question du financement de la justice qui selon eux doit être gratuite, ce qui est d’ailleurs le cas outre les honoraires d’avocat (qui ne défendent pas gratis)  ou les tarifs des huissiers ou notaires (collecteurs de frais pour l’Etat) ou experts qui doivent vivre de leur métier et faire fonctionner leurs entreprises, sauf à tomber en faillite !
Chaque avocat a du s’expliquer devant ses clients de la lenteur de la justice pour rendre son jugement ; des renvois d’audience qui parfois profitent aux justiciables de mauvaise foi ; de péripéties judiciaires que l’on a pas pu anticiper…Il y a souvent deux mécontents quand le jugement ou l’arrêt de la cour d’appel est rendu : celui qui gagne mais jamais assez d’autant plus qu’il a du payer son avocat ; et  celui qui perd, ce qui est pour lui injuste et qu’il a du aussi payer son avocat et les frais !
Le citoyen s’intéresse surtout à la justice pénale, celle qui condamne à de la prison, de l’inéligibilité, à des amendes. Chaque citoyen est un juge en puissance devant sa télévision , au café du commerce ou en lisant son journal. Les procureurs d’occasion  dans leurs canapés qui ne connaissent rien du dossier au fond, mais ont la vérité partielle voire partiale des médias, sont légion et d’autant plus exigeants que le fonctionnement de la justice leur échappe sauf s’ils y  ont comparu pour un accident de la circulation, une conduite en état d’ivresse, des coups, des injures , un peu de shit pour les plus jeunes… On veut croire que les puissants sont traités comme les misérables, même s’il y a un léger doute à ce sujet. On a du mal à distinguer le rôle des juges dit du siège (qui sont indépendants ,inamovibles, et souverains dans leurs appréciations) , des membres du parquet (procureurs et substituts) dont on sait qu’ils sont nommés par la chancellerie c'est-à-dire le ministre de la justice donc le pouvoir exécutif. On subodore que ces juges sont à la « botte »  du politique, ce qui est injurieux à leur égard et globalement faux, sauf quelques cas individuels qui ne les honorent pas.  A ce sujet il y a un grand débat de fond : alors qu’ils sont tous formés dans la même école de la magistrature à BORDEAUX, faut-il séparer les juges du siège, magistrats sans contestation, des membres du parquet dont la COUR EUROPÉENNE des droits de l’homme de STRASBOURG considère qu’ils ne doivent pas être qualifiés de magistrats, et interdire de passer d’un statut à l’autre. Vaste débat aurait dit le général de GAULLE qui rappelons le, est  à l’origine du malaise actuel, avec l’évolution du droit international et  la volonté nouvelle  des citoyens. C’est lui qui dans la Constitution de la Vème république en 1958 pour asseoir son emprise sur la gouvernance, a créé une simple autorité judiciaire, et non un pouvoir : le général considérait que seul le pouvoir exécutif était légitime, et que les juges en  particulier n’avaient qu’à se cantonner à dire le droit en appliquant ou interprétant la loi votée par les parlementaires : et surtout de ne pas être un contre pouvoir ou devenir un « gouvernement des juges », comme dans d’autres pays anglo-saxons.
Mais la justice pénale a des besoins criants de fonds pour augmenter le nombre de magistrats ou démultiplier les audiences avec un juge unique : elle a besoin de greffiers et de personnel administratif pour préparer les dossiers et faciliter la tâche du juge englué  dans des contentieux qui pourraient être confiés à d’autres structures (médiation ?) ,dans des missions  chronophages de gestion , de statistiques, de gestion de  locaux, de matériels divers ; de représentants pour l’exécution des peines ou de moyens de substitution à l’enfermement ; et pour les cas les plus graves de places de prison sachant qu’il y a 68000 détenus pour environ 57000 places disponibles, et encore sans les conditions de dignité élémentaires. Je ne parle évidemment pas de prison dites trois étoiles car j’ai conscience que la victime par exemple ou le citoyen honnête, ne comprennent pas cette prétendue sollicitude pour le coupable avéré .Ils choisissent à juste titre le camp des victimes. La sanction est nécessaire et elle doit être exemplaire, la punition n’est pas un gros mot. Mais notre société n’obéît pas aux jeux du cirque où CESAR baissait le pouce pour le gladiateur qui avait succombé. Nous nous glorifions de notre état de droit et de nos valeurs républicaines que nous voulons universelles . Il faut donc être logique, et construire des prisons  modernes (peu de maires en acceptent sur leur territoire et on comprend pourquoi) – ce qui coûte cher, et il y a des priorités ailleurs, peut être en privatisant certains services ?, ne serait –ce que pour protéger les surveillants de prison exposés tous les jours à l’agressivité de certains détenus, et aussi pour organiser la libération –qui viendra un jour- des détenus et ainsi tenter de limiter la récidive .Ce qui indigne le citoyen , c’est l’erreur d’un magistrat qui fait libérer un détenu ou un éventuel coupable parce qu’un délai a été oublié ou qu’il n’y avait plus de papier pour la télécopie voire  parce qu’il a estimé à tort que la personne concernée ne présentait plus de danger. Mais ces fautes individuelles -on peut réfléchir pour ces cas extrêmes et rares à la mise en cause individuelle de la responsabilité du magistrat, comme un salarié que l’on licencie pour faute grave ou lourde ?, tout en préservant l’ indépendance de jugement des juges sinon on ouvre la boite de PANDORE- ne doivent pas cacher l’ensemble  des magistrats qui font leur métier en appliquant la loi (si celle –ci est mauvaise il faut la reprocher aux parlementaires) en accomplissant leur devoir avec rectitude, honnêteté intellectuelle ( même si comme citoyens ils ont le droit d’avoir des opinions partisanes et défendre leurs intérêts avec des syndicats, sans pour autant construire le mur des cons).
Mais la justice pénale représente un très petit pourcentage du fonctionnement  global de la justice qui s’intéresse  surtout aux affaires civiles, commerciales, sociales,  donc à notre vie de tous les jours. Tout justiciable se plaint des délais très longs (avec la loi TRAVAIL présentée par Mme EL KHOMRI on s’est rappelé au fonctionnement du conseil de prud’homme qui « terrorise »tout employeur surtout petit ou moyen ):s’y ajoute la complexité de la procédure contradictoire qui est pourtant une garantie fondamentale ; on dénonce son incertitude avec une jurisprudence fluctuante qui est source d’insécurité juridique ; on déplore la difficulté pour faire exécuter les décisions et récupérer ses sous ou son bien  notamment en matière de loyers impayés dans les logements : ( en matière pénale il y a des dizaines  de milliers de jugements ordonnant la prison , non appliqués ou transformés en des sanctions plus souples, ce que la loi permet) ;on estime ainsi que la justice est devenue une sorte de loterie judiciaire, ce qui n’est pas acceptable…
Le ministre de la justice a donc eu raison de dénoncer la réalité. Le budget alloué à la justice est ridicule alors qu’elle a un rôle central dans la chaîne de la sécurité : à quoi ça sert que la police et la gendarmerie, et nos services de renseignement se «  décarcassent », si les présumés innocents selon la loi, mais virtuels coupables sont jugés des années après ; ou n’accomplissent pas la peine prononcée au nom du peuple français ? Le citoyen ne le supporte pas.
De même, et toute personne qui a eu à saisir la  justice le sait, il est indispensable que nos litiges divers grands comme petits, ou plus personnels  par exemple pour les divorces, les gardes d’enfants, les pensions alimentaires….soient jugés au plus vite, car on a besoin d’être fixés et s’organiser en conséquence quitte à maudire le juge qui ne nous a pas compris dans « sa tour d’ivoire ».
Mais tout ceci a un coût. Même en doublant le budget actuel de la justice, on part de si bas que cela sera toujours insuffisant. Il faut le faire bien sûr et donner à nos 9000 magistrats environ (sur 66 millions de sujets français et autant de sujets de mécontentement comme le disait HENRI ROCHEFORT du journal LA LANTERNE au 19 ème siècle) les moyens de travailler vite et bien. Mais cela nécessite un préalable et de trouver un consensus sur la réponse aux questions suivantes ; que demandons nous à nos juges ? Quelle doit être la place de la justice dans nos institutions : voulons nous ou non un pouvoir judiciaire, avec des garanties et la responsabilité des juges ? Devons nous les élire et/ou nommer un Super Procureur de la nation ou de la république qui soit totalement indépendant des autres pouvoirs et nous diriger vers un système accusatoire ? quid du juge d’instruction ?Devons nous revoir la philosophie du code pénal de 1810 de NAPOLÉON, même si elle a été révisée et corrigée au fil des années et des événements ,en fonction de l’évolution de la société , de nos besoins, de l’ordre public que nous désirons avec la protection des libertés individuelles et publiques , ce qui est compatible .Quelle place avec droits et devoirs pour nos mineurs dont certains sont plus dangereux que des « grands » de 18 ans et plus  ? Et nos aînés comment les aider ? Devons nous revoir notre modèle social issu de la Libération et nos grands principes sont –ils gravés dans le marbre à vie ? En un mot est-il possible de réformer sans drame en France y compris la Justice ? Donc payer la reconstruction.
Chacun a soif de justice mais il veut que ce soit l’autre qui fasse l’effort. Nous n’échapperons pas à une évolution drastique et certainement pénible pour nos habitudes. Il faut juger plus rapidement avec  les mêmes garanties de rigueur et de recours, mais en dépensant moins ou plus efficacement. On doit donc résoudre la quadrature du cercle. Il n’est pas scandaleux de réfléchir à des partenariats public- privé ; on peut imaginer que des contentieux de masse soient confiés à d’autres que les magistrats qui ne conserveraient que l’essentiel et ce qui concerne les intérêts vitaux du pays par la fixation des grands principes de droit .Pourquoi ne pas reprendre l’idée  de faire payer, de façon symbolique, l’accès à la justice. ? Personne de bonne foi ne peut croire que la justice n’a pas un prix de revient et des frais fixes. On paie bien une prime aux assurances de protection juridique ! Naturellement les conditions de l’aide juridictionnelle doivent être complètement revues : un avocat ne peut être efficace  en étant payé au minimum, même s’il est consciencieux et compétent : il a un cabinet à faire tourner. Et le client doit être certain qu’il sera bien défendu quelque soit sa situation financière. Si les parlementaires, voulant bien faire, votaient des lois obligeant juges comme avocats, à être prêts dans des délais courts, il faudrait s’y faire, à condition que les conditions matérielles suivent.
Nous n’avons donc pas le choix. La justice est un monument en péril et faute de confortement, elle va se déliter progressivement  et s’effondrer sur elle-même, droite dans ses bottes… Il y a déjà sur la marché des propositions, ou l’existence de justice « privée », d’arbitrage , de lieux -souvent payants - de règlement des litiges. Seuls ceux qui ont les moyens financiers peuvent se permettre de les saisir. C’est… injuste et inégalitaire. Nous devons donc tous, quelques soient nos choix partisans, militer pour trouver un consensus sur les mesures à prendre, les budgéter, et faire l’effort financier, ce qui ne plaira à personne. Il faut associer à la réflexion tous les professionnels concernés et les potentiels justiciables pour ne pas parler de consommateurs de justice ce que l’on peut être un jour ou l’autre dans notre vie qui s’allonge.
Avant d’être une organisation matérielle qui rend des jugements, et départage des parties ou sanctionne au nom de l’intérêt général, la Justice est une valeur, comme la liberté, l’égalité et la fraternité .Le citoyen a besoin de croire en ce qui le dépasse pour se surpasser aux côtés des considérations matérielles, qui  sont fondamentales. Le vivre- ensemble –dont je ne comprends pas exactement le contenu et la portée  quand certains s’en éloignent volontairement voire le combattent de façon violente- se nourrit de symboles qui grandissent. Remettons la justice sur son socle pour qu’elle domine notre société. C’est un élément d’apaisement dans notre société qui en a besoin. Si le progrès selon certains (par exemple les lycéens et étudiants contre la loi travail)  consiste dans le conservatisme alors notre société reculera. Et on aura la justice que l’on méritera : inexistante ou discréditée et inaudible.



samedi 12 mars 2016

LA LIBERTÉ DU JUGE PRUD'HOMAL

La liberté du juge prud’homal
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et juge prud’homal
A propos  des manifestations contre le projet de loi réformant le droit du travail, même pas encore examiné officiellement  au conseil des ministres ,et qui sera soumis -s’il n’est pas retiré  par prudence pour ne pas déplaire aux uns et aux autres - aux parlementaires qui pourront le modifier (c’est ce que l’on appelle la démocratie et le respect  des pouvoirs du parlement mais cela semble n’intéresser personne puisqu'on préfère écouter le bruit de la rue et les réseaux sociaux qui n’ont aucune légitimité)- on entend n’importe quels arguments plus ou moins farfelus et surtout on comprend que faire une réforme en France relève du parcours d’obstacles et que finalement les français sont globalement conservateurs et étatistes : l’ETAT doit tout leur garantir, y compris l’échec, et faire payer les autres et pas soi sachant que plus d’un français sur deux ne paient pas l’impôt. Nos voisins sont interloqués, par exemple l’Italie après la réforme de M.RENZI , voire les allemands -peuple sûr de soi et dominateur en Europe -pour paraphraser le général de GAULLE si je peux me le permettre !! qui ont une autre conception des rapports dans l’entreprise. Je ne rappelle  que pour information –car la mondialisation existe même si on la déplore – l’exemple de ce qui se passe dans les pays anglo-saxons avec des règles « souples », qui ne sont pas une référence pour nous gaulois, en matière de marché du travail. Et je suis d’accord : essayons de choisir le mieux disant. Enfin on assiste à un débat politiquement surréaliste : le gouvernement P.S est conspué par ses propres troupes qui défilent la rose à la main, tandis que l’opposition se tait et n’ose pas approuver la réforme de peur qu’elle soit torpillée, tandis que le MEDEF ou la CGPME  nuancent…Pour ceux qui comme moi avaient 20 ans en mai 68- mais n’étaient pas révolutionnaires car il fallait avoir son diplôme et quitter le giron familial pour trouver un travail quel qu’il soit, même précaire , au plus vite- il est rafraîchissant d’entendre de nouveau M.COHN-BENDIT s’insurger ,lui qui a fait une très belle carrière de donneur de leçons et de député européen, comme quoi la révolution mène à tout à condition d’évoluer, et de constater que la jeunesse se croit maîtresse de la rue  avec quelques bataillons de l’UNEF (qui représentent un très petit pourcentage d’étudiants et qui a du mal à gérer sa propre structure) et qui continue à être l’antichambre du parti socialiste, qui transforme ensuite les apparatchiks en  élus locaux, puis  députés voire ministres des années plus tard.  Mais on ne leur propose pas un vrai métier ! Sous le soleil rien de nouveau, sauf que sous les pavés il n’y a plus la plage.
On voit aussi les lycéens –les 15-18 ans – être reçus par le premier ministre (toutes mes félicitations à M.VALLS pour son  ouverture et volonté de dialogue) pour exiger des emplois garantis-alors que la plupart ne savent pas encore, et c’est normal, quel métier ils vont choisir- le maintien des 35 heures qui seraient un acquis social ? et pas de licenciements (c’est une vieille idée de ..M.Bernard TAPIE ) ou alors avec des indemnités très importantes outre des indemnisations chômage conséquentes. Le patron ne compte pas, il est forcément exploiteur et est surtout un tiroir caisse. «  Les jeunes » ne se demandent pas qui va payer puisque l’impôt leur est encore inconnu et heureusement. Curieusement on n’entend pas lesdits jeunes  affirmer qu’ils vont créer des entreprises donc de l’emploi, sauf les fameuses start-up qui sont  le symbole  du risque extrême.
On a fait depuis des décennies de la France une terre conservatrice et frileuse, le principe de précaution inscrit dans la Constitution , s’appliquant à toutes les activités de la société. On encourage ni  l’innovation ni l’audace : on n’accepte pas l’échec créateur  qui permet de rebondir, en étant aidé. La loi dite EL KHOMRI porte de nombreuses dispositions pour faire évoluer le marché du travail, favoriser les accords dans l’entreprise les salariés sachant ce qu’ils veulent et ce qu’ils refusent , sans pour autant écarter les syndicats qui sont nécessaires, et en valorisant les acquis de la jurisprudence pour donner un cadre juridique plus certain aux salariés et aux patrons qui connaitront la règle du jeu avant tout conflit. C’est responsabiliser tout le monde.
Essayons de comprendre  par un point précis du projet ,qui embrasse  cependant de multiples sujets.
Prenons le cas des licenciements qui cristallisent la discussion : les syndicats hurlent contre le plafonnement des indemnités en cas de licenciement individuel pour faute. Peut-on admettre que parfois un salarié fait mal son travail ou commet une faute qui oblige le patron à le licencier ? . Si la réponse est non par principe il est inutile de discuter. Mais de mon expérience de conseiller prud’homme , je sais que cela existe aussi. Le débat porte sur la liberté d’appréciation du juge qui la perdrait en étant obligé de respecter un barème ,et que donc tous les préjudices du salarié qui est victime d’un licenciement abusif ou sans cause réelle et sérieuse ne seraient pas indemnisés. C’est un faux débat. Le juge prud’homal(qui est  par devoir et déontologie objectif ,qu’il soit du collège employeur ou salarié) qui connait l’entreprise sait évaluer les préjudices qu’il doit distinguer et motiver dans son jugement. Sinon il sera désavoué par les magistrats professionnels de la cour d’appel, sachant que la plupart des décisions rendues par les conseils de prud’homme sont confirmées par les cours d’appel .Le barème avait déjà été prévu dans la loi MACRON de 2015 sans que personne ne s’offusque. Le conseil constitutionnel avait retoqué ce point précis car il y avait  un défaut d’égalité entre les salariés  qui travaillaient dans une entreprise de plus de 11 salariés avec deux ans d’ancienneté au moins , et ceux qui travaillaient dans une entreprise de moins de 11 salariés. Désormais seule l’ancienneté comptera : c’est un  progrès. Le juge prud’homal est  dans l’état des textes existants aussi tenu parfois d’accorder au moins 6 mois de salaire à titre d’indemnité alors même qu’il aurait voulu accorder moins. Mais DURA LEX SED LEX. Bien sûr personne ne s’indigne qu’il n’y ait pas de plafond d’indemnisation sauf les petits patrons qui redoutent une condamnation et donc ont peur pour l’avenir de leur entreprise.
Le projet du gouvernement essaie de revenir sur ces injustices -théoriques ou réelles- ou sur ces  incohérences , des deux côtés car dans l’entreprise  si les droits des salariés doivent être protégés, ceux des employeurs existent aussi. C’est eux qui créent de l’emploi et il ne faut pas s’en méfier par principe .Il faut sortir de l’affrontement permanent du 19 ème siècle et aborder le 21 ème siècle avec des idées neuves. L’employeur se détermine en fonction de son carnet de commandes : il embauche dans le besoin  et il ne licencie pas un salarié pour le plaisir -car les relations humaines  et le sens des responsabilités et la portée de ses actes cela existe encore –surtout pour ensuite affronter le conseil de prud’homme. On ne licenciera donc pas plus facilement avec la loi EL KHOMRI : on n’a pas touché à la procédure  très stricte ; l’employeur devra toujours motiver le licenciement. Il paiera les indemnités tirées de la convention collective. Et les juges prud’homaux arbitreront pour indemniser en plus, ou non.
Mais pourquoi critiquer un plafonnement des éventuelles indemnisations que devra respecter le juge ? En matière pénale  , délits et crimes  ,donc ce qui nuit à la société en général et à des victimes en particulier, le juge a un «  plancher  » : il peut relaxer ou acquitter et un « plafond » ,des «  barèmes » en matière de sanctions financières, de peines de prison…outre sa jurisprudence ou celle de la cour de cassation. Le juge est libre et conserve son plein pouvoir d’appréciation. On ne comprend pas pourquoi il n’en serait pas de même pour le juge prud’homal qui statue en droit ET en équité .II faut lui faire confiance. Espérons que nous n’aurons pas à dire :  le nouveau code du travail - malgré les principes posés par les éminents professeurs BADINTER et LYON-CAEN a priori peu suspects de partialité-est foutu, car les jeunes ne l’ont pas lu tout en défilant dans la rue, et les syndicats l’ont mal interprété, ce qui n’est pas étonnant quand on sait que la ministre de l’éducation nationale que je caricature, considère que l’orthographe -qui est la base de la lecture- ne compte plus et que peut -être dans l’avenir on passera le baccalauréat, s’il n’est pas donné d’office, en rédigeant des tweets. En attendant  si ce projet de modification du code du travail n’est pas voté, les salariés subiront la situation actuelle, qui n’est guère encourageante. Soyons réalistes demandons l’impossible lisait on sur les barricades du quartier latin. Mais le progrès n’est pas forcément lié à la défense de principes éculés et dire non , c’est aussi régresser.


jeudi 25 février 2016

LA JUSTICE PÉNALE FAIT-ELLE L'ELECTION ?

La justice pénale fait-elle l’élection ?
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
On dit que les juges excèdent leurs missions et se mêlent de politique quand c’est un ami qui est concerné ou le candidat que l’on soutient qui est mis en cause. Est-ce vrai ? On dénonce alors un gouvernement des juges dont la légitimité est contestée et on fait prévaloir la supériorité du suffrage universel : est-ce bien raisonnable ? On est à quelques mois de l’élection présidentielle de 2017 et tout semble s’accélérer en particulier les mises en examen soit d’une  personnalité de premier plan soit de collaborateurs proches de certains candidats ; certains bénéficient du statut de témoin assisté (notion de procédure pénale  qui permet d’avoir accès au dossier et un avocat) ce qui ne veut pas dire innocence comme on peut le penser, et s’en revendiquer à tort. Tout ceci sous l’œil impitoyable des médias qui cherchent le scoop, insistent sur la mine déconfite des intéressés même si tous estiment être sereins, n’avoir rien fait de reprochable et avoir pleine confiance dans la justice de leur pays, en la maudissant in petto.
Chacun connait pourtant le principe de la présomption d’innocence à savoir que tant qu’un tribunal n’a pas prononcé définitivement la culpabilité d’une personne poursuivie,  on doit être considéré comme innocent c’est-à-dire de n’avoir pas commis d’acte délictueux. On revendique ce principe pour soi, pour son camp, mais on l’ignore pour l’adversaire, pire on le bafoue allégrement et le tribunal des incompétents, ceux qui ne connaissent pas le dossier mais qui ont glané des rumeurs, des bouts d’enquête,  celui de l’opinion,  se transforme en juge  d’un jour et prononce par avance le  verdict qu’il souhaite. Ces manipulations influencent-elles l’électeur, celui qui voit le spectacle et va se déterminer bien sûr selon ses convictions et les programmes proposés, mais aussi sur la personnalité des candidats ? La morale domine-t-elle l’éventuelle décision des juges ?Aucun membre des partis principaux (P.S ;Les républicains ; le front national ) n’est à l’abri d’une « affaire » passée ou à venir. Il est donc contre-productif et par ailleurs inexact de dénoncer un « gouvernement des juges » car pour que le procureur de la république ouvre une enquête préliminaire ou que des juges d’instruction instruisent à charge et à décharge (le non-lieu existe et certains en ont déjà bénéficié) , encore faut-il qu’il y ait une plainte, et des victimes, ou que des éléments matériels avérés laissent présumer qu’il peut y avoir infraction.
Le temps judiciaire est long et se heurte au temps politique qui est court, génère des temps forts, de l’émotion, de la polémique, de la concurrence, et est enfermé dans des échéances impératives et des délais légaux ( la précampagne et la campagne avec ses meetings et ses débats ; le financement ; les sondages) qui se terminent par le vote.
Des soupçonneux s’étonnent que l’on semble s’acharner sur tel ou tel et que les juges d’instruction redoublent d’ardeur au fur et à mesure que la compétition électorale avance. Ce sont des méchantes langues car on ne peut pas s’imaginer -sinon on n’est plus dans un état de droit - que des juges membres de l’autorité judiciaire veulent s’immiscer dans le choix qui conduit à exercer le pouvoir exécutif ! Certes les quelques magistrats qui ont construit-pour rire selon eux et à titre privé-le mur des cons ne peuvent être taxés d’objectivité à toute épreuve, mais ils sont une minorité. On ne peut pas, on ne doit pas, tout en n’étant pas naïf, suspecter les juges en général : ce serait attenter aux institutions qui ont confié à la magistrature la protection des libertés individuelles. Les juges ont le droit d’avoir des convictions y compris partisanes, ils sont aussi citoyens. Ce qui leur est demandé est d’appliquer la loi, votée par les parlementaires, de façon équitable, objective et de mesurer les conséquences de leurs décisions. Je ne doute pas que c’est le cas. Ce n’est pas de leur faute si des infractions sont commises, si des plaintes sont déposées, si des soupçons pèsent sur des puissants, d’ailleurs conseillés par des avocats compétents et de talent. Dans le duel judiciaire l’accusation peut mordre la poussière, on l’a vu et c’est tant mieux : c’est la caractéristique d’une démocratie  et d’une justice indépendante. Quand son champion est blanchi, on adore brusquement les juges !
Personne n’aime devoir passer à la question, être suspecté et ne pas être cru sur parole. Surtout si l’on exerce ou on a exercé des fonctions très importantes. Des médias aiment bien les jeux du cirque et ont besoin d’aveu en direct ou de filmer les affres de l’individu que l’on présente comme quasi coupable, c’est plus vendeur. Le journaliste professionnel et digne de ce nom, recoupe ses sources et les faits, ne s’en tient pas à l’apparence  et prend des précautions dans son information, a de la retenue dans ses propos  et attend la décision finale des juges pour conclure. Il doit agir sous le prisme de la responsabilité. Souvent ce qui est écrit dans le journal ou diffusé à la télévision est pris pour argent comptant, comme la vérité. Mais ce n’est souvent que celle du moment, partielle voire partiale. Personne n’est au-dessus des lois, ni au-dessous d’ailleurs. Les juges non plus qui ne demandent rien sauf de pouvoir exercer leurs difficiles fonctions en toute sérénité et avec les moyens que le budget actuel de la justice - scandaleusement trop bas - leur donne. Si les juges devenaient un pouvoir judiciaire il faudrait s’interroger sur leur légitimité et leurs responsabilités. C’est un autre débat .Et relativisons. On a vu des élus condamnés reprendre leurs activités et se faire réélire : laissons le citoyen décider entre morale et politique.
Il faudra bien qu’un jour, sans passion, nous débattions de la place de la justice en général dans notre société ; du caractère inquisitoire (avec juge d’instruction) ou accusatoire (comme dans les pays anglo-saxons où le procureur doit faire la preuve de ses accusations) de notre justice pénale. En attendant suivons les péripéties qui concernent le monde politique et réfléchissons par nous mêmes.

Comme l’hirondelle  la justice ne fera pas le printemps en mai 2017. Mais elle peut couvrir d’un manteau d’hiver divers postulants à la présidence de la république, ce qui les entravera dans leurs envolées pour nous convaincre.

mardi 23 février 2016

ALLÔ 49-3 URGENCE TRAVAIL?

                               Allô 49-3 urgence travail ?
Par Christian FREMAUX, avocat honoraire ; conseiller prud’homme ; et élu local.
Qu’il me soit pardonné de traiter sur un mode léger ce qui est le problème central de notre société ; le manque de travail , le chômage qui détruit l’homme et sa famille, et l’incapacité des gouvernants de toutes tendances à améliorer la situation , même s’il y a des milliers de pages de rapports pour analyser les causes  et proposer des mesures, que les blocages sont connus  et les solutions diverses. Mais on a l’impression vu de l’extérieur , que certes la bonne volonté des uns et des autres n’est pas en question, mais que chacun campe sur des positions idéologiques, les droits acquis pour les uns, la libération des énergies et la baisse des charges pour les autres , ce qui toutes choses n’étant pas comparables rappelle une lutte des classes sans le dire , mais réelle. Les partenaires sociaux n’arrivent jamais à trouver un consensus ou à la marge. Les mêmes syndicats ne signent jamais aucun  accord. Lorsqu’un référendum dans l’entreprise permet une avancée (exemple le travail le dimanche dans les zones touristiques), des syndicats s’y opposent et la loi pourtant âprement discutée au parlement ne sert à rien….Le gouvernement de M.VALLS a  avec raison décidé de s’affronter à la réforme du code du travail à la suite du rapport de M.BADINTER et d’un groupe de travail présidé par un conseiller d’Etat. Le projet doit être gagnant-gagnant. Mais avant même que le texte soit  exposé et disséqué, certains qui n’ont encore rien lu  des propositions sont … contre et menacent (de grèves selon nos bonnes vieilles habitudes ?) C’est ce comportement que je dénonce. Le président de la République s’est engagé à ne pas se représenter si « la courbe du chômage ne s’inversait pas ».Attendons pour voir ce qui est un autre problème : faut- il croire ceux qui promettent ?...
C’est la prétendue starlette NABILLA  des « anges de la téléréalité » ( SIC)  qui a connu son heure de gloire en prononçant cette apostrophe célèbre : « allô, non mais allô quoi.. » qui a fait le buzz en dépassant de très loin la formule « casse-toi pauv’ con », ce qui prouve le niveau de délabrement moral et intellectuel  où nous en sommes arrivés. Il y avait eu aussi le film à succès de J.J. BEINEIX « 37,2 le matin » avec Jean -Hugues  ANGLADE et Béatrice DALLE qui racontait un road movie qui se terminait mal.La société évolue  et les élites ou prétendues telles sont dépassées : on se préoccupe aussi d’autres sujets, plus anodins.
Les symboles peuvent se traduire par des chiffres ou des formules. Pour le projet du gouvernement actuel en matière de réforme du droit du travail, on a aussitôt évoqué l’article 49-3 de la Constitution de 1958, cette constitution dont on a discuté pendant des semaines pour savoir s’il fallait y inclure la déchéance de nationalité pour les terroristes. Comme si ceux ci- avaient des scrupules quand ils massacraient des innocents ! Mais c’est un autre débat  en cours : on verra si le congrès est saisi, ou non.
Mme EL KHOMRI, celle qui a hésité à la question du journaliste de RMC ,M.BOURDIN sur le nombre possible de renouvellement d’un CDD-mais n’accablons pas la ministre  car même des spécialistes du droit du travail ne savent pas tout en la matière, -et c’est toujours plus facile quand on a la réponse sous les yeux comme Julien LEPERS pourtant licencié comme un malpropre du jeu « questions pour un champion »- a la charge de faire voter le projet de loi qui comprend actuellement 131 pages et des articles nombreux sur des points fondamentaux qui vont permettre de donner une nouvelle vie aux relations salariés-employeurs. Tout le monde devrait être d’accord sur une telle réforme, mais les cris d’orfraie ont déjà été poussés et les épithètes négatives fleurissent ce qui augure bien du débat parlementaire qui va avoir lieu !La ministre a aussitôt dégainé en disant que s’il n’y avait pas d’accord (dans la majorité ce qui est un comble) et si l’opposition faisait obstacle, le gouvernement prendrait ses responsabilités. La presse a immédiatement traduit en disant que le gouvernement utiliserait l’article 49-3 de la Constitution qui dispose : « le premier ministre peut, après délibération du conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l’assemblée nationale  … pour un projet ou une proposition de loi, par  session ».Le  projet est adopté sauf si une motion de censure est déposée dans les 24 heures et votée. Nous n’en sommes pas là même si M.VALLS qui a déjà utilisé cet article considère qu’il s‘agit non pas d’un acte d’autorité mais d’un acte d’efficacité, quand la discussion a été suffisamment longue et contradictoire. Vulgairement on dit que l’article 49-3 permet de «  passer en force » et faire adopter une loi malgré des oppositions, voire une pétition qui circule signée par quelques centaines de milliers de personne. La démocratie s’exprime légalement au parlement  qui entend la voix des citoyens et en tient évidemment compte, d’autant plus que le président de la république avait borné la réforme en demandant à ce que l’on ne touche ni aux 35h., ni au CDI,  ni aux heures supplémentaires qui doivent être payées. Mais ce projet   revoit  les rigidités ; la cause réelle et sérieuse avec la limitation des indemnités aux prud’hommes ; la définition  du périmètre et des causes du licenciement économique ; les accords d’entreprise  et les référendums permettant aux salariés de s’exprimer sans pour autant ne pas méconnaitre le rôle des syndicats ;  la formation  tout le long de la carrière ;   les droits maintenus avec de nouvelles clauses dans le contrat des salariés selon  que la conjoncture économique est bonne ou moins bonne. Tout ceci est fait pour permettre de libérer le marché du travail, donc de faciliter l’emploi, permettre à ceux qui travaillent déjà de se maintenir et d’évoluer, et à ceux qui veulent entrer –les jeunes et les plus de 50 ans- d’accéder au graal.C’est aussi de rendre plus souple et décadenasser des règles peu flexibles, une jurisprudence plus favorable aux salariés soyons francs,  et lever une incertitude juridique pour les uns et les autres. On ne touche pas aux droits acquis, le totem du monde des travailleurs et on essaie de faire entrer l’entreprise dans le monde du 21ème siècle, l’ère des technologies et du numérique, de repenser la notion de salarié et du lien de subordination, du contrat de travail qui doit apporter protection au salarié mais aussi souplesse pour l’entreprise. Le CDD doit aussi être revu pour qu’il ne soit pas considéré comme une situation précaire et la variable d’ajustement pour tout le monde. L’apprentissage doit être revalorisé et ouvrir les portes. Le salarié doit pouvoir se former en permanence et avoir des droits (au chômage) rechargeables… Bref la discussion parlementaire doit permettre d’aboutir à des solutions consensuelles et le peuple de gauche doit s’unir au peuple de droite pour réussir, c’est -à-dire permettre au peuple tout court de retrouver sa fierté, sa dignité par le travail, dans une société mondialisée que l’on accepte ou non, ouverte à la concurrence et qui mourra –certes debout- si elle s’appuie sur les principes qui ont fait leur temps. Soyons pragmatique plutôt qu’idéologique :l’ entreprise n’embauche que si elle a un vrai carnet de commande pour un délai lointain, ce qui lui permet d’investir (ne jetons pas la pierre aux actionnaires) pour se développer, conquérir ou maintenir des marchés et donc donner du travail. Bannissons la méfiance réciproque du salarié qui croit que le patron s’enrichit sur son dos et est favorisé par les pouvoirs publics, et du patron qui considère que les salaires sont toujours trop élevés et que les charges sont insupportables (ce qui est objectivement vrai).Seule la compréhension des désirs des uns et des autres peut conduire à des résultats profitables à tous, sans que chacun ne perde la face.
Le gouvernement a été prudent : il n’a pas mis en cause le régime des intermittents du spectacle déficitaire de façon récurrente, et n’a pas demandé à certains fonctionnaires qui ont l’emploi à vie et qui ne paient donc pas de cotisations chômage,  de régler une cotisation de «  solidarité » ce qui aurait permis de réduire la différence entre les salariés du privé et ceux du public. M. MACRON , ministre ,avait souligné lui-même qu’en dehors des postes régaliens (armée, justice, police… ) la notion d’emploi garanti à vie plus la retraite calculée sur les 6 derniers mois du traitement, n’avait plus de vraie justification. Cela se discute comme l’aurait dit feu le sympathique et talentueux Jean-luc DELARUE.J’espère donc qu’il ne sera pas nécessaire d’utiliser le fameux article 49-3 mais il faudra le faire si les résistances paralysent la réforme. Le conservatisme se trouve aussi, parfois, parmi les forces dites de progrès. Le parlement s’honorerait et remonterait dans les esprits en votant une réforme consensuelle. Comme aurait pu l’écrire ALAIN SOUCHON « allô maman bobo, comment tu m’as fait, je ne suis pas beau.. », on doit chanter : « allô responsables de toute nature, faites nous un nouveau code du travail moderne, efficace,  qui permettra de créer du travail,  de lui redonner un caractère stimulant, enthousiasmant, et qui ne sera pas une course de haies  où l’on renonce à prendre le départ, salarié comme employeur, en raison d’obstacles infranchissables ».
Le travail  fourni par des entrepreneurs qui risquent leurs biens et osent, est d’abord ce qui permet de gagner sa vie, de faire vivre sa famille, d’être utile à la société ce qui est une valeur qui dépasse l’individu et le fait grandir. Entrons dans l’avenir avec des idées neuves comme disait SAINT-JUST à propos du bonheur, et créons une société de la confiance.

mercredi 10 février 2016

L A Q.P.C.: QU'ES AQUO ?

La Q.P.C. : qu’es aquò ?
Par Christian FREMAUX avocat et élu local
M.Jérôme CAHUZAC ancien ministre est poursuivi devant le tribunal correctionnel de Paris pour son compte caché en SUISSE. Il est accusé d’avoir fraudé le fisc alors qu’il était ministre du budget,ce qui est un oxymore !Chacun se rappelle ses déclarations publiques où il niait toute dissimulation,  avant finalement de reconnaitre les faits,   et de quitter le gouvernement précipitamment.
Respectant la présomption d’innocence  et ne le connaissant pas au-delà de ce que la presse en a dit, je n’ai pas à me prononcer sur le fond de ce dossier pénal, sachant que par ailleurs M.CAHUZAC a payé très cher sa fraude. Ses avocats ont déposé au début de l’audience une question prioritaire de constitutionnalité tendant à faire admettre que l’on ne peut être condamné deux fois pour le même délit : sur le plan administratif ( les amendes et pénalités ) et sur le plan pénal où des condamnations concernant les libertés individuelles (diverses interdictions même si M.CAHUZAC a déclaré qu’il était en retraite) peuvent être prononcées. Le procureur s’est indigné à l’audience de «  l’impudence «  de M.CAHUZAC  qui n’avait pas les mêmes scrupules quand il était ministre et tirait à boulets rouges sur les présumés fraudeurs et qui pour les besoins de sa cause «  ose « » retarder les débats de fond  par une question de procédure .Le parquet a tort : chaque  prévenu a le droit d’utiliser le droit pour se défendre, qu’il soit puissant ou misérable et l’audience publique n’est pas une mise à mort publique, un jeu du cirque où CESAR lève ou abaisse son pouce, pour servir d’exemple .La justice doit juger dans la sérénité  même si ses jugements doivent être exemplaires, et si comme en l’espèce  la personnalité du prévenu,et sa qualité d’ancien ministre, éclairent les débats d’un lumière crue pour montrer quel est le bon chemin , et combien il est nécessaire de donner l’exemple quand on assure de hautes responsabilités publiques. C’est ce qui redonne confiance aux citoyens envers ceux qui nous dirigent et ont sollicité nos suffrages.  Le tribunal a fait droit à l’argumentation de M.CAHUZAC, ce qui est tout à fait normal puisque le tribunal pénal doit statuer en droit et non en fonction de la morale,  et a renvoyé le dossier devant la cour de cassation qui décidera de saisir, ou non, le conseil constitutionnel.J’avais écrit il y a plusieurs mois à propos de la société UBER et des taxis  -débat toujours d’actualité -  un article pour expliquer ce qu’est une question prioritaire de constitutionnalité (Q.P.C.) Vous lirez ci-dessous mes commentaires. Le procès de M.CAHUZAC a été renvoyé au 5 septembre 2016. Le tribunal jugera en fonction de la décision du conseil constitutionnel, M.Laurent FABIUS étant son président car il vient d’y être nommé par le président de la République.

Chacun se souvient de l’épisode peu glorieux, violent, mené par quelques casseurs  qui défendaient leur outil de travail, qui a opposé il y a quelques  semaines les chauffeurs de taxis et les « travailleurs » de la société UBER qui veut « libéraliser » le secteur des transports, au profit des clients, naturellement, c’est du moins la thèse officielle : on ne parle pas de profits dans ce domaine  cela va de soi ! Dans la mondialisation  qui a eu l’audace de s’installer aussi dans notre vieux pays,  avec ses us et coutumes comme le fait de payer très cher une licence de taxi, le conservatisme-à tort ou raison- pour ne pas bousculer les habitudes, même mauvaises  et les fameux  droits acquis qui sont le socle de l’action des syndicats de salariés, résistent dans tous les domaines (voir la loi MACRON et les dernières déclarations du sémillant ministre de l’économie sur les fonctionnaires dont le simple fait d’en parler a suscité un tollé : le débat d’idées a du mal à décoller et des sujets restent tabous !).On comprend bien sûr celui qui a beaucoup investi pour avoir le droit de travailler, s’est endetté pendant des années, paie taxes et impôts, qui exerce une activité dure, et qui voit arriver ce qu’il appelle une concurrence déloyale. Mais le client lui, l’usager, le consommateur, ne voit il pas d’un bon œil  cette offre de service nouvelle ? C’est un autre débat .La Justice a du départager les deux camps  qui représentent  deux légitimités.
Le Conseil Constitutionnel a rendu une décision n°2015-484 du 22 septembre 2015 et a jugé que l’article L.3124-13 du code des transports était conforme à la Constitution. Les organisations de taxis ont crié victoire, qui espérons le pour elles, n’est pas une victoire à la PYRRHUS .La loi THEVENOUD  (celle de l’excellent député qui avait une phobie envers les impôts mais les a finalement payés selon lui), qui interdit le service UBERPOP  ,a donc été validée. Le débat portait sur l’article L.3124-13 qui dispose : « est puni de deux ans  d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende le fait d’organiser un système de mise en relation de clients avec des personnes qui se livrent aux activités  de l’article L.3120-1  » c’est – à- dire, le transport routier. La décision du conseil Constitutionnel s’appuie sur les articles 8 et 9 de la déclaration de 1789 ; sur le code des transports ; sur l’article 61-1 de la Constitution de 1958 ; et sur le principe de la présomption d’innocence. Mais comment ledit conseil a-t-il été saisi et par qui ?
Il a été saisi le 23 juin 2015 par la chambre commerciale de la Cour de Cassation, à Paris, par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité (Q.P.C.), posée par les sociétés UBER France SAS et UBER BV   ,relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit au premier alinéa de l’article L.3124-13 du code des transports .Dans le litige il y avait en défense l’UNION NATIONALE DES TAXIS ,et diverses sociétés de transport. Le débat portait sur l’incrimination de la mise en relation de clients avec des conducteurs non professionnels, débat de nature PENALE sur la liberté d’entreprendre, le principe d’égalité et celui de la nécessité des délits et des peines et la présomption d’innocence. Que de grandes causes, donc. La Cour de cassation devait se prononcer sur ces points de droit pas encore tranchés ( Cour de cassation chambre commerciale-mardi 23 juin 2015-n° de pourvoi 15-40012 ; n° d’arrêt 699) .La Q.P.C. permet au Conseil Constitutionnel de vérifier si une loi n’est pas inconstitutionnelle en ce qu’elle porterait «  atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution  de 1958 ». Elle a été introduite en droit français  à l’occasion de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, initiée par le Président Nicolas SARKOZY qui a crée un art.61-1. qui stipule : « lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit ,le Conseil Constitutionnel peut être saisi de cette question, sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la cour de Cassation, qui se prononce dans un délai déterminé ».

Cette Q.P.C. est une avancée majeure dans notre état de droit, et une possibilité très concrète pour le justiciable pour faire admettre son argumentation.(lire Cour de cassation service de documentation).Le conseil constitutionnel actuellement présidé par M.jean-louis DEBRE nommé par la Président CHIRAC, est composé de 9 membres outre les anciens chefs de l’Etat membres de droit. Il y aura un renouvellement au début de l’année 2016 : 3 juges seront nommés par le Président de la République et celui de l’assemblée nationale et du Sénat .   La politique s’efface au profit des compétences, de l’expérience, de la neutralité, et de l’indépendance même envers celui qui a nommé, au profit du droit. La jurisprudence renforce  notre démocratie qui a besoin de grands principes clairs et réaffirmés .Les membres y sont nommés en raison de leurs qualités exceptionnelles, aucun soupçon ne pouvant les affecter, et ils participent à la régulation de notre société  ,et à la protection de l’individu face aux empiétements parfois de l’Etat qui a ses propres raisons. La Q.P.C.permet d’obtenir Justice, et c’est l’essentiel.

dimanche 7 février 2016

DES MOTS POUR LE DIRE

Des mots pour le dire

Par Christian FREMAUX avocat et élu local.


Mme  VALLAUD -BELKACEM ministre de l’éducation nationale vient d’annoncer une réforme de l’orthographe qui dormait dans les cartons depuis des années et qui va concerner  environ 2400 mots. Pourquoi  sortir de la naphtaline (ou naftaline ?) cette réforme en pleine discussion sur la déchéance de nationalité concernant les terroristes, c’est un mystère ou une diversion, même si la ministre parle de l’intérêt des enfants .La polémique a aussitôt éclaté entre les partisans de ceux  qui sont les tenants de l’orthographe classique, et du français tel qu’il résulte de l’ordonnance  de 1539  de VILLERS-COTTERETS du bon roi François 1e r(qui n’est pas le chef de l’Etat actuel)  et ceux qui font le constat que malgré 80% de bacheliers dans une classe d’âge les fautes sont encore très nombreuses et qu’il convient donc d’abaisser le niveau général pour se mettre à la portée de tous et notamment de ceux qui n’ont pas à la maison les moyens culturels leur permettant de progresser,  ce qui leur permettra d’avoir des diplômes et donc de trouver du travail. Ce raisonnement est un leurre car chacun sait que la sélection arrive un jour ou l’autre et qu’un employeur veut  compter sur des compétences et connaissances réelles, et non par sur un parchemin qui les présume. C’est Bertold BRECHT en critiquant le régime politique de la R.D.A  qui a écrit que lorsque le peuple n’est pas d’accord avec le gouvernement, c’est le peuple que l’on devrait  dissoudre ! Puisque l’orthographe pénalise il faudrait donc permettre à l’élève de ne pas en tenir compte voire supprimer les notes et l’évaluation, c’est plus simple. Je laisse les académiciens français et tous ceux qui aiment les belles lettres se prononcer sur ce débat entre les anciens et les modernes, car je n’ai aucune légitimité en la matière, sauf pour affirmer qu’à force  de traquer l’élitisme ou simplement la connaissance, on tire tout le monde vers le bas.
Cette annonce de simplification de l’orthographe coïncide avec l’emploi d’un mot ou d’une formule que depuis des semaines on dissèque, analyse, décortique pour leur faire dire ce que l’on souhaite : celui de déchéance complété par de nationalité pour les français  dit de souche (ALAIN MINC parle de souche avec un S)  ou binationaux qui sont si j’ai bien retenu le nombre, plusieurs millions. Il va de soi que globalement ils ne sont pas visés, qu’ils sont français-un point c’est tout- et que personne n’a l’intention de les discriminer. Cela va mieux en l’affirmant.
Nous sommes dans le cadre exclusif de la lutte contre le terrorisme -et ceux qui craignent l’extension à d’autres cas prennent, selon moi ,leurs peurs pour une réalité qui ne peut survenir quelque soit le pouvoir en place, y compris celui que certains craignent car notre république est fondée sur un état de droit, des juges, et des parlementaires qui s’opposeraient à toute déviation -et on parle d’une sanction  et sur l’opportunité de la graver dans la marbre de notre Constitution de 1958.Sur ce sujet  je suis réservé car une loi peut faire l’affaire et notre texte suprême ne doit pas être modifié ou complété à chaque événement grave. Si  les parlementaires acceptent cette modification  ils devront le faire en âme et conscience, sans se soumettre à un vote partisan ou pour faire plaisir à tel leader politique qui peut avoir, imaginons le, des arrière-pensées plus subalternes.
Il va de soi que tout le monde est d’accord sur un point :la déchéance de nationalité promise à un terroriste qui va se faire exploser après avoir commis son forfait, n’a aucune efficacité préventive et ne l’arrêtera pas dans son élan maléfique . S’il est pris vivant, ce sera une peine infamante qui s’ajoute à la prison à perpétuité pour celui qui, après procès selon nos règles immuables avec droit à un avocat, a tué volontairement  dans le cadre d’une action revendiquée comme terroriste.
On parle  de symbole ce qui est un mot très fort. Est-ce le cas ? Le symbole est la représentation d’une chose, d’une idée, d’une figure, par un caractère imagé. Par exemple la colombe symbolise la paix. La nationalité est plus qu’un symbole. Elle exprime une identité et les valeurs qui vont avec, comme le respect de l’autre et de la vie, la tolérance, la nation et la république et ses principes, un mode de vie, la démocratie qui permet de faire connaitre ses choix, et les libertés publiques comme individuelles. Perdre sa nationalité , ce qui est déjà prévu dans le code civil aux articles 23-7 et 25 ,c’est donc être privé d’un honneur et de droits, ainsi que de pouvoir vivre parmi nos semblables, nos égaux .Les terroristes nient ces valeurs, et les priver de nationalité n’a ni importance ni sens pour eux puisqu’ils ont choisi de s’identifier à un pouvoir théocratique, nihiliste, mais surtout totalitaire qui rejette l’homme en tant que tel , en ce qu’il est et représente, en sa dignité  et existence terrestre. Celui qui tue, qui efface l’identité de sa victime, ne peut avoir le droit de conserver la sienne qui est un privilège .La déchéance de nationalité n’est pas un symbole : c’est une simple mesure de justice. Aussi discuter sans fin , en coupant les cheveux en quatre voire en seize, avoir des scrupules qui nous honorent -tout en imaginant que les affidés de DAECH, d’AL QAIDA, ou autre groupuscule terroriste, sans compter les candidats individuels au djihad qui viennent de nos beaux territoires et qui ont été élevés au lait des droits de l’homme, ricanent -me parait un peu extravagant et une perte de temps, alors que nos autres problèmes économiques, sociaux et  de société  méritent que l’on s’y attarde pour trouver des solutions consensuelles pour que, quand  la croissance reviendra,  que l’on soit prêt  en ayant accompli les réformes structurelles et sans tabou (car les blocages ne sont l’apanage d’aucun camp) qui s’imposent, en ne nous contentant pas d’apposer  des rustines sur ce qui fuit de partout. Si les français sont sensibles aux débats moraux, ils se posent moins de questions que les élites  parlementaires ou  philosophiques qui veulent montrer un chemin «  lumineux et juridiquement exemplaire » sur le sort des terroristes et les conséquences pour les citoyens français, et préféreraient que l’on s’occupe d’eux et des emplois, ce qui est une ambition très humaine, aussi.
Ce n’est pas déchoir que d’être d’accord avec la peine infamante de la déchéance de nationalité pour les terroristes, même s’il y en a qu’un ; ce n’est pas déchoir que de demander à ce que l’on touche à la Constitution que d’une main tremblante et que si le fonctionnement des institutions l’exige ; ce n’est pas déchoir  que d’essayer d’obtenir une majorité au congrès des 3/5 ème  droite et gauche confondues sans pour autant donner un satisfecit général à celui qui gouverne. Et ce n’est pas déchoir que tenter d’éviter que nos ennemis se félicitent de nos discussions qui  sont le reflet de notre humanisme et de notre grandeur .Réformons donc l’orthographe mais surtout changeons les esprits pour qu’ils soient  plus pragmatiques et ouverts. Nous avons des priorités à résoudre de façon concrète  qui sont vitales pour notre avenir ;   la sécurité qui est la première des libertés conditionne toutes les autres. On comprend que nos dirigeants s’y consacrent à fond. Les explications des uns et des autres qui écrivent des livres pour nous dire pourquoi ils n’ont pas agi, ce qu’ils regrettent, qu’ils ont changé, nous éclairent certes et sont intéressants, mais les citoyens ont compris que les promesses n’engagent que ceux qui y croient .Concluons donc au plus vite sur la déchéance de nationalité, inscrite ou non dans la Constitution et passons à autre chose. Il y a un mot pour dire que les polémiques politiciennes suffisent ; «  basta »   en italien et en bon français : il suffit.







lundi 18 janvier 2016

Plaidoyer pour le juge judiciaire
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local
18 janvier 2016
La vie politique en France offre toujours des sujets d’étonnement sans compter les sujets de mécontentement .On nous a habitué depuis des décennies à penser sous la dictature médiatique  des nouveaux philosophes ou apparentés, jadis plutôt classés à gauche sauf exception notable , qui décernaient les brevets du bien, choisissaient ceux qui devaient être entendus et ceux qui devaient se taire et être voués aux gémonies, adoraient tel ou tel régime ou homme politique du style Fidel CASTRO ou les khmers rouges pour les plus exaltés d’entre eux,  et la vie politique  était le reflet de ces donneurs de leçons. La justice avait été déclarée par la Constitution de la 5 ème république  en 1958 autorité judiciaire : les juges judiciaires étaient ainsi cantonnés à un rôle secondaire dans les institutions. Il fallut Mai 1968 pour que le syndicat de la magistrature  se crée et qu’apparaissent les juges dits rouges qui avaient choisi le faible théorique contre les puissants qu’ils définissaient eux-mêmes. Progressivement le juge d’instruction –que déjà NAPOLEON  nommait l’homme le plus puissant de France- s’imposa et de plus en plus de scandales touchant ceux qui dirigeaient furent mis à jour. Personne ne se plaindra que la justice soit égale pour tous. Puis l’histoire passa : on déboulonna les anciennes idoles à l’EST en particulier, en s’apercevant que l’utopie révolutionnaire avait  créé des goulags et des victimes en grand nombre ; le mur de BERLIN tomba ; l’économie globalisante apparut avec son cortège de difficultés économiques ; les printemps arabes conduisirent plus au chaos qu’à la démocratie à la française ; le terrorisme toucha tous les camps et oblige  à une révision radicale des schémas de pensée. Nos intellectuels se firent de plus en plus discrets ne sachant où était l’ennemi extérieur, et furent découragés  par la gauche de M.HOLLANDE, au point de l’attaquer à boulets rouges, à front renversé : il n’y a pire adversaire que l’ami déçu .Fin 2015 et début 2016 on ne sait plus qui est qui, quels intellectuels -qui dénoncent leurs  collègues et leur attribuent des adjectifs  disqualifiants  comme le fait d’être de droite ou de faire le lit d’une formation  politique honnie mais qui est légale et a des millions d’électeurs- représentent  le camp du bien et celui de la  pensance acceptable cataloguée comme telle.
Il a fallu les attentats de janvier 2015-que tous les français n’ont pas dénoncé d’ailleurs ce qui est significatif- puis ceux du 13 novembre 2015 où les yeux se sont dessillés  et que tout le monde comprenne  que nous étions en guerre puisque nous avions été attaqués chez nous, sur nos valeurs républicaines, sur notre mode de vie, pour que citoyens et dirigeants acceptent de prendre des mesures drastiques et on l’espère, efficaces.
Le gouvernement malgré des discussions internes très vives et des désaccords entre ministres,  avec sa majorité hésitante sur telle ou telle proposition, a décidé d’agir très fortement. M.Manuel VALLS  Premier ministre n’a pas l’intention de céder ou de renoncer à quoi que ce soit en matière de sécurité, tout en préservant les libertés publiques et individuelles même s’ il faut savoir trouver l’équilibre et faire accepter aux français –qui y sont prêts selon les sondages- à restreindre un peu de leurs droits dans cette période très troublée. Il faut en effet savoir ce que l’on veut : de la protection et donc des moyens accrus donnés à nos forces de l’ordre et services de renseignement, ou rester tel quel avec peu de devoirs collectifs et nos avantages de vie y compris juridiques, conformément notamment à la déclaration des droits (et des devoirs) de l’homme et du citoyen ?Notons au passage que M.VALLS doit rendre à CESAR-je veux dire à M.SARKOZY- ce qui lui appartient à savoir des mesures qu’il avait proposées pendant son quinquennat et que la gauche de l’époque a refusé obstinément de voter criant aux lois liberticides et au racisme et à la discrimination ou au fascisme(ce terme étant particulièrement inadapté et insultant). Comme quoi il faut toujours être prudent et responsable quand on est dans l’opposition et que l’on veut accéder ou revenir aux affaires…Le gouvernement de M.VALLS soutient avec raison, des mesures que la droite n’aurait pas même osé suggérer ? Cela rend soit en rage soit muets nos donneurs de leçons habituels qui ne savent plus ce que le mot gauche veut dire quelles en sont les valeurs intangibles et ce sur quoi ils ne peuvent pas céder ou faire semblant d’être d’accord. Ils se querellent … entre eux ce qui n’est ni amusant ni utile au débat.
La justice essaie de faire entendre sa voix : je parle des magistrats et pas de Mme TAUBIRA Garde des sceaux qui a ses propres convictions, semble avaler beaucoup de couleuvres et tente de justifier sa place au gouvernement. Personne ne peut soupçonner M.VALLS de vouloir attenter à notre démocratie  ou à nos valeurs universelles. Il l’a redit dans l’émission de M.RUQUIER « on n’est pas couché ».Effectivement il s’agit de ne pas de se coucher devant ceux qui dans le débat interne ,crient au scandale sur la déchéance de nationalité , mesure symbolique  et non discriminatoire sans  avoir besoin d’analyser les raisons et donc commencer à « justifier »  même pour les besoins du raisonnement et de la compréhension, ceux qui tuent d’autres français ;ou estiment que la part est trop belle pour la sécurité et donc l’armée ou les forces de l’ordre, en oubliant de rappeler   que  toutes deux sont éminemment républicaines. Il convient d’envoyer un signal fort et faire comprendre  que tous les moyens notamment de droit-qui est aussi une arme légale et morale qui s’oppose à la kalachnikov et à la barbarie-seront employés pour nous défendre .Et quand on parle de défense l’avocat que je suis pense aux droits de la défense et aux juges.
Après la loi sur le renseignement d’il y a quelques mois et l’état d’urgence qui a été décrété, le gouvernement de M.HOLLANDE pour lutter contre le terrorisme (et non pas dans tous les domaines) veut modifier la Constitution ce qu’il faut faire d’une main tremblante, même si depuis 1958 il y a eu de nombreuses modifications, et  certaines dispositions de procédure pénale. « Le malheur » comme le disait  jadis mon illustre confrère René FLORIOT ,  est que l’exception prise pour les besoins de la cause peut devenir la règle définitive .Il appartiendra aux rédacteurs des textes de préciser que les modifications ne concernent que le terrorisme, dans un état d’urgence  et qu’en dehors de ce cadre les textes d’exception ne s’appliquent pas ?Mais comme je crains que le combat contre le terrorisme dure longtemps, le juge judiciaire doit  avoir un rôle très important puisqu’il est par la Constitution le garant des libertés individuelles .Et les avocats pourront  exercer leur métier : le barreau de Paris  notamment qui approuve globalement les mesures de protection de la population  ce qui est la mission régalienne de l’Etat, a pointé  cependant quelques dérives de l’état d’urgence, et plaide pour que les droits des citoyens soient préservés .Mais le gouvernement semble avoir choisi le juge administratif pour des contrôles a posteriori ?, et les préfets  qui seront au centre du dispositif .Personne ne conteste la compétence du CONSEIL d’ETAT en matière de droit et libertés publiques, et de préservation des pouvoirs des autorités publiques, ni la haute conscience et le professionnalisme du Corps préfectoral qui gère l’intérêt général et l’ordre public. Mais il me semble que le JUGE JUDICIAIRE est le mieux placé et le plus légitime pour apprécier et autoriser en temps réel les atteintes aux libertés individuelles ou leurs limitations temporaires, le barreau comme auxiliaire de justice veillant aussi  de près. Une  société sans juges judiciaires indépendants qui doivent être au centre des débats et de l’action ,  me parait être  un recul démocratique, que le terrorisme ne justifie pas. Au contraire : puisque les terroristes ne respectent rien ni le droit bien sûr, ni la vie d’innocents et s’attaquent à nos valeurs , il faut montrer que  nous sanctuarisons nos principes et que malgré l’horreur et la tentation de « la vengeance » nous ne nous écartons pas de ce qui est pour nous, le bien .A défaut les juges auront le sentiment que l’on veut les écarter-à tort ou raison- de la lutte contre le terrorisme, ce qui n’est pas fait pour les valoriser, et  viendra ainsi renforcer l’appréciation« mitigée »  qui existe de la justice. Je suis pour une justice forte qui joue pleinement son rôle dans la filière pénale ,qui renforce l’action des forces de l’ordre qui sont sur le terrain et prennent des risques y compris physiques ; qui ont besoin d’une sécurité juridique dans leurs interventions (ex. le débat sur la légitime défense) ; et qui sanctionne après un débat contradictoire  au vu de la loi, ceux qui méritent de l’être .La lutte contre le terrorisme  qui est l’affaire de tous se joue à tous les niveaux et en premier lieu naturellement, chez le citoyen qui y participe avec ses moyens. Lors de la rentrée de la Cour de Cassation début 2016, le 1er président M .Bertrand LOUVEL et le Procureur général  M.jean-claude MARIN-nommé par  le pouvoir exécutif- ont dénoncé le fait que l’Etat ne choisisse pas l’autorité judiciaire pour défendre ses intérêts  supérieurs, mais préfère  la police administrative placée sous l’autorité du gouvernement , à travers le ministère de l’intérieur, ce qui sera un changement  de paradigme pour la procédure pénale, voire pour les libertés ?Les deux plus hauts magistrats exprimaient le sentiment de tous les juges. M.MARIN a souhaité la création d’un procureur général de la nation ou de la république pour garantir son indépendance et pour répondre, on le suppose, aux critiques de la Cour Européenne des droits de l’homme à STRASBOURG sur la nature de notre « parquet » à savoir l’indépendance des procureurs qui n’est pas celle des magistrats du siège. Le gouvernement a  cependant entendu le cri des magistrats puisqu’il veut profiter de la révision constitutionnelle pour faire adopter la réforme du conseil supérieur de la magistrature. Attendons le texte définitif des propositions soumises aux parlementaires lors du prochain congrès (où l’on vote à une majorité des 3 /5 ème donc majorité et opposition  se renforçant mutuellement) en espérant que la justice quotidienne, celle que l’on peut maudire quand elle nous donne tort mais que l’on ne doit pas suspecter a priori, sortira confortée, avec plus de pouvoirs, des comptes à rendre car personne n’échappe à ses responsabilités   , et une image rénovée. Le débat sur  le fait qu’il faut bâtir ou non un pouvoir judiciaire selon ce que préconisait MONTESQUIEU , n’est pas à l’ordre du jour.