jeudi 5 octobre 2017

C’est quoi une liberté fondamentale ?

C’est quoi une liberté fondamentale ?
Par Christian FREMAUX avocat honoraire et élu local.
Dans les ordonnances du 30 août 2017 dites Macron qui modifient le code du travail pas suffisamment pour les uns qui considèrent qu’il y a encore trop d’obligations pour l’employeur, et de trop pour les autres qui voient une casse sociale  , - ce qui prouve que les ordonnances innovent et sont équilibrées puisque personne n’est content !-, il y a des dispositions qui n’ont pas été encore  commentées car elles n’intéressent pas directement les syndicats qui défendent surtout leur pré -carré et leur influence sur le gouvernement, mais  qui  concernent le salarié qui défend ses intérêts devant le conseil de prud’homme ce qui relève de l’initiative personnelle. On ne va pas ameuter les foules pour cela. Parmi différentes mesures   Il y a une notion qui vient d’être mise en avant et par une jurisprudence récente et par les ordonnances Macron : celle de liberté fondamentale.
Un arrêt de la Cour de cassation chambre sociale en date du 21 septembre 2017 . N°16-20.270 a posé des principes sur l’existence  ou non d’une liberté fondamentale en droit du travail qui permettrait au juge d’ordonner la poursuite d’un contrat de travail. Les faits sont les suivants : un salarié qui avait été mis à la disposition d’une société par contrats d’intérim donc des CDD, a saisi le conseil de prud’homme en référé-et non au fond- pour faire juger que ses contrats doivent être requalifiés en CDI et obtenir la poursuite dudit contrat. La demande de requalification de CDD successifs en CDI avec toutes ses conséquences surtout financières est un grand classique du contentieux (article L.1251-40 du code du travail) devant le conseil de prud’homme qui les juge directement au fond, devant le bureau de jugement (article L.1251-41) sans passer par la case bureau de conciliation devenu bureau de conciliation et d’orientation (B.C.O.) depuis la nouvelle procédure (M.Macron étant ministre). Le conseil doit statuer dans le mois, ce qui en pratique dans les conseils de prud’homme très encombrés n’est pas possible matériellement parlant, ou en raison de demandes de renvoi des avocats dont le dossier n’est pas en état d’être plaidé : il faut attendre quelques mois. Et dans cette attente soit le contrat se termine par l’échéance, soit il n’est pas encore terminé, ce qui entraine des droits différents. L’article L.1251-41 alinéa deux prévoit «   que si le conseil de prud’homme fait droit à la demande du salarié il lui accorde à charge de l’entreprise utilisatrice une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire », sous réserve des règles concernant la rupture des CDI s’il y a eu ou non licenciement. Si la rupture est considérée comme étant sans cause réelle ou sérieuse ou abusive, le salarié a droit à des dommages intérêts selon son préjudice qu’il doit dorénavant prouver selon une jurisprudence récente de la cour de cassation. La réparation n’est pas automatique. Le barême des indemnisations -fort décrié par les syndicats-mis en place par les ordonnances Macron du 31 août 2017 pour les procédures à venir fixe un plancher et un plafond, ce que les employeurs approuvent.
 La  première question était de savoir si en référé le juge pouvait ordonner la poursuite du contrat et sur quel fondement juridique ?.La cour de cassation a dit oui. Le salarié peut saisir le juge des référés prud’hommal-qui est une procédure très rapide, on n’attend pas des semaines voire des mois avant d’avoir une décision-, qui statue vu l’urgence, et l’absence apparente de contestations sérieuses , en vertu de l’article R.1455-6 du code du travail qui lui donne pouvoir pour faire cesser un trouble manifestement illicite, ou un dommage imminent. Il peut d’ailleurs condamner par provision même en cas de contestation sérieuse. La cour de cassation avait affirmé le principe  par un  arrêt du 8 Mars 2017 n°15-18.560,  en s’appuyant sur les articles L.1245-2 et  R.1455-6 du code du travail  ; et sur  l’article 6-1 de la convention des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
L’article L .1121-1 du code du travail dispose : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». On est dans le domaine des libertés « fondamentales » du salarié : vie privée, familiale et personnelle ; liberté d’expression et religieuse ; liberté syndicale ; libertés publiques comme le droit de manifester, la protection des données…
La deuxième question était donc de savoir si le droit à l’emploi, avancé par le demandeur pour obtenir une requalification doit être considéré comme une liberté fondamentale ? La cour de cassation a répondu non bien que ce droit soit inscrit dans la Constitution. Elle a considéré que cette liberté n’était pas fondamentale, mais un simple droit à réparation qui se résout par des dommages-intérêts mais pas par la poursuite du contrat, car elle entre en concurrence avec d’autres droits comme celui de la liberté d’entreprendre avec laquelle elle doit se concilier. La discussion est ouverte.
 Pour savoir ce qu’est une liberté fondamentale, il va falloir se référer à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; aux préambules de la constitution de 1946 et de celle de la Vème république de 1958 ; des conventions internationales contraignantes comme la déclaration universelle de l’Onu de 1948 ; la convention européenne  des droits de l’homme de Strasbourg de 1950 ; les pactes de 1966 sur les droits économiques et sociaux ; sur la charte des droits fondamentaux de l’union européenne…
Cet arrêt du 21 septembre 2017 rejoint les nouvelles dispositions du 31 août 2017 de M.Macron.
L’article L.1235-3 nouveau du code du travail indique en effet que l’article L.1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article ».Ledit deuxième alinéa indique : «  les nullités mentionnées à l’alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à la violation d’une liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel, … à un licenciement discriminatoire… à une action en justice, en matière d’égalité professionnelle entre hommes et femmes… en cas de dénonciation de crimes et délits.. à l’exercice d’un mandat par un salarié protégé… ainsi qu’aux protections dont bénéficient certains salariés.. ».

Il est donc urgent de préciser ce que l’on entend par liberté fondamentale. En droit les libertés fondamentales ou droits fondamentaux représentent l’ensemble des droits subjectifs essentiels pour l’individu, assurés dans un état de droit et une démocratie. Il n’y a pas de définition juridique qui fait l’unanimité. C’est une notion abstraite qui peut être relative selon chaque individu. Le Conseil d’Etat défenseur des libertés publiques, et la Conseil constitutionnel ont créé une jurisprudence concrète à ce sujet. Rappelons qu’en vertu de l’article 66 de la constitution c’est l’autorité judiciaire qui est la gardienne des libertés individuelles. Notre société est devenue individualiste et consumériste. Chaque citoyen pense qu’il a surtout des droits et que la moindre de ses revendications n’est que l’application d’une liberté fondamentale, pour lui. Que les devoirs c’est pour les autres et que l’Etat est responsable du collectif et doit tout assumer. Les tribunaux, cours d’appel, cour de cassation , conseil d’Etat vont donc devoir apprécier au cas par cas et bâtir un contenu identique caractérisant une liberté fondamentale, cette notion étant revendiquée dans tous les contentieux. Mais c’est aussi cela la France qui se renforce sur des valeurs communes appuyées sur le bloc de constitutionnalité donc la volonté du peuple français. La cour de cassation vient d’ouvrir un débat de fond.

dimanche 1 octobre 2017

Insécurité dans le quartier et vandalisme dans l’immeuble : comment réagir ?

Conférence FNAIM Grand Paris  sur la copropriété: insécurité dans le quartier et vandalisme dans l’immeuble : comment réagir ?
Les principaux points de droit par Me Christian FREMAUX avocat.

Quand on parle insécurité le citoyen pense aussitôt qu’il s’agit de cambriolages, vols divers, destructions variées plus ou moins graves outre les incivilités, les tags, les graffitis, difficultés qu’il dénomme de façon générique par le terme vandalisme et il se demande comment il va être dédommagé car la question essentielle et pratique est : qui paie ? Il va de soi que s’il y a de l’insécurité dans le quartier il risque d’y en avoir dans l’immeuble et donc dans les biens des copropriétaires. Le lien est direct. Mais les difficultés peuvent aussi venir de l’intérieur de l’immeuble, des occupants soit qu’ils sont copropriétaires et se comportent mal, soit qu’ils sont locataires et ne font aucun effort pour se conformer à la sérénité générale, soit qu’ils exploitent des commerces ou des cabinets professionnels et que l’immeuble est ouvert au public. On connait les litiges liés à l’ouverture de la porte d’entrée avec l’installation d’un digicode ou d’un sas ce qui entraine un vote de l’article 26 de la loi de 1965 soit la double majorité , à l’ascenseur, au courrier, aux poubelles, au local vélo ou poussetes , aux horaires du samedi, à la transformation d’un local voué à l’habitation en autre chose que je ne qualifie pas pour éviter d’être accusé de discrimination. S’y ajoute l’incivisme des sauvageons comme l’avait dit un ancien ministre de l’intérieur, voire l’absence de courtoisie et l’égoïsme de certains,( comme l’abandon de meubles ou objets divers après être parti  vite...) ce qui entraine parfois des infractions minuscules mais qui irritent, et entrent peu ou prou dans un sentiment d’insécurité.
Examinons le droit applicable pour savoir ce qu’il est permis de faire.
La sûreté prévue à l’article deux (2) de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen,  est du domaine de la prévention ,  peut entrainer des mesures restrictives de libertés et de droit  et  relève de la responsabilité de l’Etat qui doit tout mettre en œuvre pour que la tranquillité publique soit respectée ; tandis que la sécurité est surtout  l’existence de moyens fournis aux professionnels, les gendarmes et  la police nationale selon que l’on est en zone rurale ou en ville, et même si ces deux forces sont désormais réunies sous l’autorité du ministre de l’intérieur. Mais la sécurité c’est aussi l’affaire des citoyens car l’Etat ne peut pas tout. Il appartient à chacun d’entre nous propriétaire ou locataire d’assumer ses responsabilités et de participer ainsi à la vie collective, sans s’en remettre  systématiquement dans les immeubles au syndic qui est « payé pour cela », ou au conseil syndical, donc en trouvant des prétextes pour ne rien faire. Il faut  réagir ce qui pose des problèmes de droit, et dépend des outils mis à la disposition des citoyens pour trouver une solution à leurs problèmes. 
Le vandalisme répond   à une définition précise prévue aux articles 322-1 à 322-4 du code pénal   que je résume ainsi : c’est un délit qui consiste à détruire, dégrader, détériorer volontairement le bien d’autrui. En l’espèce ce qui appartient personnellement au copropriétaire (appartement, cave, parking, jardin privatif… ) ou ce qui appartient au syndicat de copropriété (parties communes, locaux d’entrepôts, halls d’entrée, caves globalement,  parkings, espaces verts)… Selon la légèreté de l’acte (des tags ou graffitis par exemple) ou la gravité du dommage (voiture dégradée ou brûlée, destructions…) la sanction passe d’une simple amende à 2 ans d’emprisonnement, voire 10 ans pour le plus sérieux avec des dommages importants. Naturellement il faut déposer plainte pénale, il faut qu’une enquête ait lieu pour retrouver les auteurs, saisir son assurance et parfois se lancer dans une action judiciaire. Les victimes rechignent car en plus de leurs préjudices elles doivent sortir des frais d’avocat, de tribunal, répondre à des questions, parfois ne pas être crues ou être accusées de n’avoir pas pris de précautions…
1°) Tout dépend s’il y a ou non une surveillance humaine pour laquelle je plaide avec ferveur.La sécurité commence à l’entrée de l’immeuble.
Souvent il n’y a plus de gardien (les concierges ancienne formule en tant que tels ont quasi disparu) car l’assemblée générale a décrété qu’il ne servait à rien, qu’il coûtait trop cher, et qu’une entreprise extérieure suffisait, avec la pose de boîtes aux lettres. A propos de gardien et de salariés de façon générale je rappelle qu’il y a une obligation de sécurité de résultat [ article L.4121-1 du code du travail et Cour de cassation arrêt du 25 novembre 2015] qui oblige à un certain nombre de prise de décisions qui protègent les préposés dans leurs conditions de travail. Mais ce n’est pas le sujet de cette conférence. Ne pas avoir de gardien ou le supprimer est pour moi, en matière de sécurité une erreur. La présence humaine me parait indispensable car tous les outils modernes   comme la vidéosurveillance, peuvent dissuader, fournir des informations après les faits, mais ne peuvent intervenir à chaud, ou à titre préventif. Sauf à faire appel à une société de gardiennage ce qui a un coût.
Même si cela n’est pas écrit en toutes lettres dans son contrat, à mon avis le gardien doit faire respecter le règlement de copropriété, selon les instructions et la responsabilité du syndic ; il vérifie même implicitement l’utilisation normale des habitations ou l’exploitation usuelle   des commerces, et essaie d’éviter un minimum d’incivilités ou de conflits   entre les uns et les autres. Il est un facilitateur, un médiateur social. Bien sûr sa mission n’est pas de surveiller les allées et venues des uns et des autres, car la vie privée se respecte, mais il visite régulièrement les parties communes, les locaux communs, et les espaces verts s’il y en a :  mais il ne fait pas du « flicage » si je puis m’exprimer ainsi, il se contente de surveiller que tout va bien, sous l’autorité exclusive du syndic. Son contrat est régi par les articles L.7211 et R.7212-1 du code du travail . La sécurité n’est pas évoquée formellement. Mais son devoir est d’avertir le syndic de toute anomalie selon lui, qui peut aller du comportement de certains, jusqu’à l’abus de propriété ou de location, voire des infractions pénales apparentes. Le gardien facilite les rapports humains, contrôle l’intervention des prestataires extérieurs ou prétendus tels ce qui peut écarter de l’immeuble des individus indésirables, ou qui repèrent, ou qui s’apprêtent à faire de mauvaises actions. Il est en relations avec les divers services publics. Il sécurise ainsi les occupants de l’immeuble. Rappelons que pour un gardien à temps complet la suppression de son poste exige l’unanimité des copropriétaires en A.G., car il s’agit de la suppression d’un service qui modifie les conditions de jouissance des lots privatifs. Pour un gardien qui n’est pas à temps complet, sans service personnel (par exemple porter le courrier) la suppression du poste semble pouvoir se faire à la double majorité si le gardien est prévu au règlement de copropriété, et à une majorité simple dans le cas inverse.
On voit donc à travers le rôle du gardien comment la sécurité intérieure de l’immeuble   rejoint la sécurité du quartier.
2°)Rappelons quelques principes de droit qui touchent à la sécurité dans l’immeuble et qui permettent de réagir, sans évoquer la responsabilité personnelle du  syndic qui commettrait des fautes avérées dans sa gestion par exemple pour manque de conseil (il faudrait  faire tels travaux pour améliorer la sécurité) ou d’informations, ou parce qu’il exécute mal ou pas du tout les décisions prises en assemblée générale.  C’est l’article 18 de la loi de 1965 qui s’applique,  et l’article L.126--3 du code de la construction et de l’habitation qui précise : «  le fait d’occuper en réunion les espaces communs ou les toits des immeubles collectifs  d’habitation en empêchant délibérément l’accès ou la libre circulation des personnes ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté est puni de deux (2)mois d’emprisonnement et de  3. 750 euros d’amende ». Le syndic est devenu un auxiliaire de  l’Etat en matière de sécurité notamment. Il a le devoir d’agir seul s’il y a urgence.
1°) Il faut distinguer le rôle du conseil syndical s’il existe vraiment en pratique ,  qui contrôle et celui du syndic qui agit. L’A. G. décide et le syndic doit exécuter les décisions votées, tout en vérifiant que la loi ( il a un rôle de conseil par exemple sur la loi ALUR du 25 mars 2014 qui facilite le vote de travaux de sécurité avec l’article 24 ), ou le règlement de copropriété sont  bien respectés. Il lui appartient de prendre des mesures préventives en matière de sécurité et de faire voter les budgets nécessaires. Le conseil syndical  ne peut s’immiscer dans la gestion à la place du syndic. C’est l’article 31 du décret du 17 mars 1967 qui l’affirme. Le syndic est l’employeur du ou des salariés de la copropriété à qui il donne des instructions, fixe les tâches et les horaires : il embauche et licencie quitte à engager sa responsabilité s’il fait n’importe quoi, et si la sécurité est menacée , car les conséquences financières des décisions malheureuses sont à la charge des copropriétaires, à la fin. Mais ne pas prendre de décisions en matière de sécurité - (fermeture renforcée du parking, ou de la porte d’entrée avec digicode ou autre, vidéosurveillance, régulation des flux, occupations diverses) - ce qui peut entrainer des dépenses supplémentaires, n’est pas à conseiller car l’inaction engage aussi sa responsabilité ou celle du syndicat. Les tribunaux sanctionnent parfois pour défaut de réaction : l’article 14 de la loi de 1965 indique que le S.C.P. est responsable des dommages causés aux copropriétaires, par le défaut d’entretien des parties communes, sauf à démontrer  avoir pris des mesures, ou un cas de force majeure, ou en s’exonérant par suite de la propre faute de la victime [Cour d’appel de Montpellier chambre 10 section d. du mardi 16 décembre 2014 n° de RG 13/00797] : en l’espèce après un vol de motocyclette dans un parking il a été reproché au SCP la défaillance du  portail du parking et donc un défaut de surveillance. Le syndic était poursuivi également solidairement.
2°) Le syndic doit faire voter chaque année sous la majorité de l’article 25 i de la loi du 10 juillet 1965 (majorité des voix de tous les copropriétaires voire de l’article 24) l’autorisation permanente pour les gendarmes et les policiers de la  police nationale ou municipale de pénétrer dans l’immeuble. C’est fondamental en matière de sécurité .La délibération doit être transmise par le syndic ou un membre du conseil syndical, au commissariat, à la brigade ou/et à la mairie.
Cela n’a rien à voir avec l’appel d’un occupant au « 17 » en cas d’infractions flagrantes ou de danger immédiat ou d’urgence quelconque. Les forces de l’ordre, les pompiers, les services de secours… peuvent intervenir dans ce cas, sans la moindre autorisation.
3°Le bailleur est responsable de son locataire :
C’est naturellement le locataire qui est d’abord responsable de ses actes : s’il trafique ou exerce des activités illicites, ou commet des troubles anormaux de voisinage, il sera poursuivi à titre personnel. Si son bailleur dûment informé ne réagit pas car il perçoit les loyers et considère que les agissements de son locataire ne sont pas de sa responsabilité ,il se trompe. Il peut être condamné solidairement avec son locataire, voire à sa place. Ce sont les articles 3 ;4g ;6-1 et 7b de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 qui s’appliquent ainsi que l’article 1729 du code civil . Surtout s’il y a des problèmes de sécurité et des risques. Le bailleur doit donc sélectionner attentivement son locataire. Il ne peut accepter n’importe qui et n’importe quelle activité, notamment celles qui sont peu usuelles comme la constatation de réunions à tout moment, des individus qui défilent, l’entrepôt de matières dangereuses… Certes il n’est pas facile pour un propriétaire de contrôler son locataire, mais il devra être attentif (en matière de terrorisme avec la nouvelle loi en discussion au parlement il va falloir être très réactif). Si le bailleur après avoir été mis en demeure ou informé par lettre recommandée avec AR n’agit pas, en vertu de l’article 15 de la loi de 1965 le syndicat des copropriétaires peut saisir la justice, comme d’ailleurs toute personne concernée à titre individuel [Cour d’appel de Paris 31 mai 2000. Juris-Data 2000.118253]. Il y a une prescription de 10 ans selon l’article 42.1 de la loi de 1965.  Il n’est pas non plus impossible que les services de l’Etat informés par leurs canaux interviennent au nom de la sécurité de tous et s’étonnent de l’inertie du bailleur ? Par ailleurs le bailleur est responsable de plein droit de son locataire qui viole le règlement de copropriété ou les modalités de jouissance des parties privatives et communes, ou a une activité commerciale ou professionnelle irrégulière : [Cour d’appel de Paris 14 juin 2001. 15123 ; Cour d’appel de Paris 13 juin 2011. Juris-Data n°2011. 146801].
Le syndic comme le syndicat des copropriétaires doivent donc être très « éveillés », à ce sujet.
Etre bailleur ne garantit pas l’impunité et de dire je ne savais pas, ou je ne veux pas me mêler de la vie privée de mon locataire n’exonère en rien de sa mise en cause. En droit la responsabilité du propriétaire vis-à-vis de son locataire trouve son fondement dans les articles 1719,1720 (défaut d’entretien), 1721, 1725 et 1729 du code civil (obligation d’occupation raisonnable du logement). On ne peut héberger n’importe qui, faire n’importe quoi à toute heure du jour et de la nuit, transformer un local en industrie « curieuse ». La sécurité oblige tout le monde.
4°° la surveillance des parties communes est l’affaire de tous :
Se désintéresser de la gestion quotidienne est une erreur comme celle de ne pas désigner à qui de droit (le syndic par exemple, ou le gardien ou un membre du conseil syndical) ceux qui se comportent mal, squattent dans divers endroits, font des travaux sauvages en faisant entrer qui ils veulent dans l’immeuble, ou utilisent les parties communes comme si elles leur appartenaient. Il ne s’agit pas pour autant de se substituer au conseil syndical ou au syndic qui n’est pas sur place et ne peut tout savoir. La sécurité impose un minimum de collaboration entre tous, pour que l’information circule et que des décisions puissent être prises. La vidéosurveillance est règlementée strictement. L’installation et les travaux nécessaires étaient autrefois   votés à la majorité absolue de tous les copropriétaires soit la majorité plus 1 . Avec la loi ALUR du 24 mars 2014 , l’article 24 permet désormais que la majorité des présents ou représentés votent les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants…. La transmission des images à la police ou la gendarmerie (on ne peut filmer les portes d’entrée des appartements ni les locaux commerciaux) est décidée en A.G.  Par la majorité des voix de tous les copropriétaires : article 25 m). C‘est la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure dite LOPPSI 2  et son décret d’application du 27 janvier 2012 qui ont prévu les modalités. En cas de vidéosurveillance des parties communes il faut le faire savoir, l’afficher et poser un panneau d’information. Un particulier peut installer une vidéosurveillance chez lui mais il lui est interdit de filmer des parties communes ou son voisin ou la voie publique.
Il y a aussi l’article 26 (double majorité) qui concerne… : « les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles. En cas de fermeture totale de l’immeuble celle-ci doit être compatible avec l’exercice d’une activité autorisée par le règlement de copropriété.
On peut conclure de ces rappels  que :
Il est possible d’agir à titre préventif, et de réagir s’il y a une difficulté, mais que les responsabilités sont partagées. Il s’agit de co-production de sécurité.
 Le copropriétaire ou le locataire se confondent en matière de sécurité notamment, avec les droits et les devoirs du citoyen. Certes nos habitudes culturelles ne sont pas celles de citoyens d’autres pays  qui collaborent volontiers avec les pouvoirs publics. Mais information de ce qui est suspect, ou illégal, ou peu habituel n’est pas de la délation, et la sécurité collective a besoin de renseignement.
Les pouvoirs publics ont pris des initiatives :
 Il y a un référent sécurité dans chaque commissariat ou brigade : encore faut- il le joindre -par l’intermédiaire du syndic de préférence-pour qu’il agisse.Il peut venir dans l’immeuble pour  faire un audit de celui-ci et recommander par un rapport oral telles mesures de protection. C’est un service considérable et gratuit. Il y a aussi l’opération dite tranquillité -  vacances qui comme on le croit à tort n’est pas réservée qu’aux vacances. Dès l’instant que l’on s’absente plus de 48 heures à tout moment de l’année on peut demander à ce que des policiers ou gendarmes viennent vérifier que tout va bien. Il y a aussi la même opération pour les seniors sollicités par des escrocs, de faux agents de l’EDF ou du téléphone, des réparateurs peu scrupuleux… Enfin il y a sous le contrôle des maires et élus locaux l’opération voisins vigilants.org qui est devenue une participation citoyenne.
En conclusion il faut être optimisme malgré l’accablement qui survient quand on doit affronter un problème :
Il faut réagir avec l’aide des forces de l’ordre, avec la justice, avec le syndicat des copropriétaires, et /ou avec l’assurance.  L’insécurité dans le quartier et le « vandalisme » en général dans l’immeuble sont liés. Il faut être positif car l’insécurité n’est pas une fatalité . Elle peut être combattue si tout le monde en prend conscience, participe à son niveau sinon à son éradication du moins à sa diminution. Certes pour les incivilités il faut éduquer et éduquer encore. Mais l’homme étant ce qu’il est c’est difficile dans une société devenue individualiste, consumériste et parfois communautaire. Mais la morale ne suffit pas. En droit nous sommes obligés d’agir, de prendre des mesures sinon notre responsabilité peut être engagée.
Le débat de société pour savoir si les libertés sont menacées- on parle de despotisme doux ?, les magistrats renâclent devant les nouvelles dispositions légales qui concernent les terroristes mais qui dans l’avenir peuvent viser tout délinquant, des avocats ne sont pas contents, le défenseur  des droits lui même M.TOUBON critique – me parait intérêssant car il y a une part de vérité dans les objections et les grands principes de droit doivent être confortés notamment en confiant aux juges judiciaires ( et non aux préfets) la gestion de la prévention et l’appréciation de la mesure de contrainte envisagée pour qu’on ne glisse pas vers la loi des suspects comme le dit Me Henri Leclerc éminent avocat; mais en même temps on ne peut ignorer la demande de protection  collective des français, le sentiment que les délinquants ont des garanties qu’ils n’ont pas comme victimes ; le désir que les coupables avérés soient punis sévèrement après un débat contradictoire, la preuve de la culpabilité et la défense des avocats ; et leur accord pour que les libertés de quelques uns qui flirtent avec la loi ou qui s’en affranchissent soient limitées dans l’intérêt du plus grand nombre. Il faut placer le curseur au bon endroit entre libertés et ordre public qui sont compatibles. Il ne faut pas être excessif : nous sommes dans une vraie république, avec un état de droit fort , et chaque individu  d’où qu’il vienne, quoiqu’il a fait, a des droits qu’il peut réellement exercer. On a le devoir de s’inquiéter de toutes dérives dans l’avenir, mais on n’a pas le droit d’attendre le nouvel attentat ou une délinquance débridée sans réagir. Ce qui vaut pour l’insécurité dans les quartiers vaut pour l’immeuble : il faut savoir investir et agir. La sécurité du quartier conditionne la tranquillité dans l’immeuble sauf action individuelle préméditée. Nous sommes d’abord des citoyens et devons nous comporter comme tels.





dimanche 17 septembre 2017

Fremaux Christian Commentaires de l'actualité: C'EST LA RENTRÉE.

C’est la rentrée.
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
 Si on peut dire, la parole est au verbe. Chacun commente, disserte, suppute avec d’autant plus de certitudes qu’il  n’a pas de responsabilités et n’a à rendre de  compte à personne. On peut donc se tromper en toute impunité et c’est un sport national que de critiquer même si c’est un droit en démocratie que d’exprimer son opinion et de savoir mieux que le ministre ou un spécialiste ce qu’il faut faire. Il y a autant de président et de premier ministre que de citoyens . Pourquoi donc ne ferai-je pas pareil, je ne suis pas plus idiot qu’un autre… quoique ! Après les divines élections législatives de juin qui ont donné une majorité absolue de députés  au président de la république - on a dégagé à tout va - on a pu assister à une joyeuse pagaille due à l’inexpérience des uns et à l’incompétence des autres .Parfois les deux se confondent. On avait dit qu’être député ce n’est pas un métier , surtout  le mardi et le mercredi face à la télévision et  aux médias  salle des quatre colonnes à l’assemblée nationale .Ce serait une occupation à temps partiel  un travail d’appoint ? et les députés seraient donc des intermittents de la politique ? On en déduit que n’importe qui peut  être  député (j’ai  raté le coche) et que la loi se fabrique  en trois coups de cuillère à pot, après des discussions rapides, et un vote en masse de confiance de la majorité. Ce n’est  cependant  pas si simple que cela et il a fallu recommander à nos nouveaux députés de suivre des cours accélérés de formation , et  d’aller sur le terrain pour connaitre les électeurs qui les ont élus, car ils n’avaient pas eu le temps de faire connaissance l’étiquette étant plus importante que les qualités du candidat ! La morale a joué et quelques personnalités nommées au gouvernement ont dû démissionner en hâte-ce qui veut dire que la vieille politique a encore frappé. Mais tout est rentré dans l’ordre a priori : le président a un chien nommé Nemo comme le capitaine du sous marin nautilus  inventé par jules Vernes qui a vécu à Amiens comme M. Macron (on espère que le navire ne coulera pas et pourra remonter à la surface) ; le président s’est fait bronzer brièvement à Marseille où le bling bling est absent mais pas le bang-bang des trafiquants ; les députés ont reçu les leçons du premier ministre et les instructions du chef de l’Etat ; les affaires en cours se poursuivent et  les instructions judiciaires contre certains vont reprendre . La justice va  convoquer des députés nouveaux  qui ont mordu untel  dans un taxi,  ou joué du casque contre un ancien du même parti,  ou vendu à une agence de voyage un droit de visite à l’assemblée. Tout ceci est vrai.  Mais ce sont des pécadilles  et avec le temps  ces députés  feront beaucoup mieux car l’homme a des défauts, si  ,si, et il lui arrive de confondre droit et morale voire sa poche et celle du contribuable ; et enfin a eu lieu  la première manifestation contre les ordonnances modifiant le code du travail . Tout est donc sur rails et le nouveau monde peut commencer à se construire. Un métier cela s’apprend et ils ne pourront pas faire plus mal que leurs collègues précédents , ceux de l’ancien régime qui sont retournés à leurs études ou dans la fonction publique pour ceux qui en venaient ce qui reste un parachute doré et un avantage honteux, à la retraite pour beaucoup, après avoir échoué globalement , s’être disputés de façon honteuse et avoir rabaissé le niveau des débats et des décisions à prendre. Droite  éclatée en chapelles, sans compter ceux qui ont un flirt avec le pouvoir actuel pour être constructifs plutôt que destructeurs, et gauche ayant déposé le bilan, avec un front national qui cherche encore pourquoi la ligne suivie était mauvaise, tous unis et au coude à coude dans une opposition qui n’a pas d’idées nouvelles et qui cherche où est la sortie pour gagner plus tard, les anciennes  valeurs étant désormais démonétisées car on n’a pas su les expliquer, montrer ce qu’elles apportent de positif, en quoi elles soudent le peuple et ne le divisent pas. Dans  une société numérique où tout se sait, où la transparence devient dangereuse à force de vouloir être vertueuse et où l’intelligence artificielle remplace  l’individu, inventer de nouvelles règles, des nouveaux principes privilégiant la personne  et la protégeant contre toute forme d’intrusion est une urgence nécessaire. Va-t-on engager l’avenir sur des valeurs molles-comme les montres de Salvador Dali qui donnaient bizarrement l’heure- qui sont remplacées par de la technique  et de la technologie de pointe et des normes, des algorithmes dont on nous bassine et qui dessineraient le futur sans que l’homme ne donne son avis de mortel  avec sa conscience, sa sensibilité, ses qualités humaines imprévisibles qu’un robot le plus sophistiqué soit- il ne peut égaler  ,et que l’on ne  puisse dévier la voie tracée par des calculs froids et des machines ? On ne veut pas de cet avatar .Le poète louis Aragon avait écrit que la femme est l’avenir de l’homme. Pas la robotique .
M. Macron a réveillé le vocabulaire et  la sémantique, ce qui n’est pas la première fois quand il veut dire ce qu’il n’a pas dit, et viser ceux qui se sentent fléchés alors que ce n’est pas le cas. Il a, parait il, une pensée complexe, et  son verbe est à géométrie variable, ce qui change de la langue de bois. Le jeunisme n’est pas une politique, l’ancienneté et la rente non plus. Il faut initier du neuf ,du jamais vu, de l’inédit. Il prétend que les français n’aiment pas les réformes. Il a tort. Personnellement ce qui est à moi je le garde : mais ce qui t’appartient-on peut en discuter et le réduire ou le rénover. J’aime la réforme si elle ne me retire rien et si elle concerne l’intérêt général. Je ne suis ni de droite ni de gauche ni patron ou salarié pour les réformes. J’approuve à l’aune de mon intérêt , ce qui est le vrai problème : comment faire pour  que chaque innovation soit acceptée parce qu’elle est nécessaire pour tous et les générations futures ? Dans l’histoire de notre pays –surtout la malheureuse- des générations se sont sacrifiées pour que nous connaissions la paix, la liberté, la prospérité. Avons-nous en notre magasin moderne de grande distribution cet article à disposition ou a-t-il disparu au rayon des périmés ? Nous avons un effort collectif à fournir. M. Macron n’a que faire de la nouvelle société de M. Chaban-Delmas (c’est qui cet inconnu ?) qui ressemble à son projet ou de la société de confiance (qu’il réclame) de M. Peyrefitte (ministre du général de Gaulle ce qui ne nous rajeunit pas). Il est dans une société 2.0 qui parle notamment de l’homme augmenté dans ses capacités physiques, intellectuelles, psychologiques ; du travail redéfini dans son lien de subordination (avec plus d’indépendants et les contrats de mission) et à partir de son domicile (le télé travail) ; avec  des corps intermédiaires réduits à la portion congrue. On veut du dialogue direct, des responsabilités immédiates  , des contrôles permanents avec effet révocatoire.  M. Macron veut transformer  ce qui donne une dimension plus globale et une ambition  pour que la France redevienne une grande puissance (  le «  petit jeu »avec des missiles  à tête nucléaire du dirigeant  de  la Corée du nord obligeant à se prémunir militairement ce qui impose une économie solide) et ne plus simplement changer dans tel ou tel domaine ce  qui réduit à des sujets précis mais limités dans leurs effets globaux. Il a certainement raison. La transformation me rappelle un match de rugby : l’entraineur définit une stratégie, et l’équipe après bien des efforts en envoyant les gros costauds en première ligne,  après avoir sué et pris des coups, franchit la ligne adverse, avec le ballon ovale. Des points sont marqués. Mais pour parachever l’œuvre il faut que l’artiste, le talentueux,  le buteur, transforme l’essai  et c’est le triomphe. Que M. Macron transforme la France, il le faut.
Il a ensuite parlé «  des fainéants, des cyniques et des extrêmes »  pour les critiquer, et leur dire qu’il ne reculera pas pour mener à bien ce qu’il estime être utile au pays. Ce fut un tollé de ceux qui entrent dans l’une des catégories.  Il a un peu rétropédalé pour dire qu’il ne visait pas ceux qui s’étaient sentis concernés, qu’il s’adressait à tous ceux qui avant lui n’avaient rien fait ou avaient bloqué les initiatives…Il est exact qu’une petite partie de la population vit du système, profite d’avantages vus comme des privilèges et  veut que rien ne change. Ou qu’au contraire ce soit la chienlit  pour tout casser ce qui serait la quintessence de la réforme extrême pour que l’on fasse table rase et que l’on construise un système qui avantagera d’autres et sera aussi inégalitaire à la fin. Ce qui n’est pas équilibré ne peut fonctionner dans une démocratie où chacun est l’égal de l’autre mais où le mérite doit être récompensé. D’aucuns  sont donc toujours contre tout et son contraire. Chacun sait que le président a raison et peut citer un cas proche d’abus, qu’il connait de près sauf pour soi cela est évident et humain. Le coupable c’est toujours l’autre.
M.Macron a aussi des paroles qui auront des conséquences directes. Il a osé nommer l’ennemi de l’intérieur et de l’extérieur à abattre comme l’islamisme radical. C’est clair. Il ne s’agit pas de stigmatiser des citoyens musulmans qui vivent leur islam en paix dans le respect de notre légalité et de la laïcité. Les mesures législatives qui ont été votées et celles qui viennent ont pour vocation de nous protéger contre le terrorisme, et sont compatibles avec les libertés individuelles et publiques. Personne n’est dupe : on n’éradique pas le terrorisme seul dans son coin, en mettant des fils de fer barbelés aux frontières et en surveillant tous les citoyens, dans un quasi état d’urgence permanent même intégré dans le droit commun. Il ne s’agit pas de créer big brother et un Etat policier. Mais ne rien faire est coupable et personne n’aurait d’indulgence pour un Etat qui s’en remet à la «  providence », si j’ose m’exprimer ainsi, ou qui abandonnerait des quartiers pour ne pas faire de provocation, ou qui demanderait à sa justice d’être empathique - d’admettre toute sorte de raisons, sociale, culturelle ou autres (réelles et que l’on peut comprendre sans qu’elles soient des faits justificatifs), car les victimes elles  de toutes les violences n’ont eu aucune chance de se défendre ou de discuter avec leurs assassins ou agresseurs -   pour ne pas appliquer la loi, sévèrement s’il le faut. Tout est dans la position du curseur. Il y a suffisamment de consciences éclairées en France, de juristes, de philosophes, de sages tout simplement pour placer le signe au bon endroit.
Pour terminer je reste sans voix, car l’ouragan IRMA a frappé les Antilles et les Caraïbes. Il n’y a qu’un mot possible : solidarité, sans polémique mais avec enquête parlementaire pour vérifier le rôle de l’Etat chez nos compatriotes d’outre mer, et pour permettre une reconstruction en dur, avec des autorités permanentes, c'est-à-dire la présence de l’Etat, en en profitant pour mettre tout à plat y compris de ce qui était autrefois des avantages pour certains et qui doivent passer à la toise métropolitaine , en conservant ce qui est nécessaire et justifié. Il n’y a pas eu de rentrée pour ceux là et c’est injuste. Modérons donc nos mécontentements car rien n’est jamais parfait nous qui avons un toit, de quoi vivre même si c’est insuffisant ,et que ne s’y ajoutent pas le malheur et la désolation. Le président s’est préoccupé à juste raison dans le cadre de la lutte contre le terrorisme de l’Afrique - qu’il faut aider dans tous les domaines même si nos budgets sont serrés - en recevant notamment les présidents du Niger et du Tchad. L’ancien ministre M.J.L. Borloo voulait que l’Afrique soit électrifiée partout. Il a raison. Il faut y ajouter de l’eau pour tous  et de vrais abris. IRMA  nous y oblige. Que la rentrée soit un espoir pour le plus grand nombre. 

lundi 11 septembre 2017

VIE PRIVÉE ET SURF AU TRAVAIL : DROITS ET LIBERTÉS


Vie privée et surf au travail : droits et libertés.
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
L’Europe sert à quelque chose au moins en fixant des règles de droit qui concernent tous les Etats de l’Union européenne. Une partie de la presse s’est enthousiasmée pour un arrêt  de la grande chambre de la cour européenne des droits de l’homme qui siège à Strasbourg et dépend du conseil de l’Europe et non de l’U.E.,  en date du 5 septembre 2017 - M. BARBULESCU c / la ROUMANIE requête n°61496/08- qui s’est prononcée sur les conditions du travail dans l’entreprise et le droit  ou non de l’employeur de surveiller l’utilisation d’internet pendant le temps de travail d’ un salarié  surfant dans  son propre intérêt , et la compatibilité du contrôle du patron avec la vie privée de son salarié. Il faut cependant nuancer l’enthousiasme car l’arrêt est équilibré dans ses motivations  et n’autorise pas n’importe quoi au salarié au nom des libertés et de sa vie privée, et n’interdit pas à l’employeur d’édicter des règles restrictives et de sanctionner tout abus, ne serait ce qu’en matière de sécurité  ou d’organisation de l’entreprise ou pour parer à des virus, des chevaux de Troie, un risque dangereux… et parce que si toute peine mérite salaire, un emploi  est fait pour … travailler !
Le cas d’espèce est classique et concerne beaucoup de travailleurs y compris en France,  et permet au passage de revisiter la procédure pour saisir la cour européenne,  et les délais pour aboutir à une décision.
Un ingénieur roumain M.Barbulescu a été licencié par son entreprise  pour avoir utiliser  la messagerie professionnelle  à des fins privées, malgré l’interdiction du règlement intérieur qui prévoyait : « il est strictement interdit…d’utiliser les ordinateurs, les photocopieurs, les téléscripteurs ou les télécopieurs à des fins personnelles ». Ce document était connu de M.Barbulescu qui l’avait signé.  Le règlement intérieur ne comportait  cependant aucune mention expresse  relative à la possibilité pour l’employeur de surveiller les communications de ses employés .L’employeur avait demandé à son salarié de créer un compte yahoo messenger pour répondre aux demandes des clients, sans savoir que le salarié avait déjà créé un compte yahoo personnel, sans le signaler à son  patron.
La procédure interne commença. Par un jugement du 7 décembre 2007  le tribunal départemental de Roumanie (ce qui doit être notre conseil de prud’homme)  approuva la liberté du licenciement et son bien fondé en validant  la surveillance du compte yahoo messenger qui aurait révélé que le salarié   s’en servait à des fins personnelles pour échanger avec son frère et sa fiancée. En s’appuyant sur un arrêt Copland c/  Royaume uni (n°62717/00) M.Barbulescu estimait que les communications par téléphone ou courrier électronique qu’un employé passe depuis son poste de travail  sont couvertes par les notions de correspondance et vie privée et ne peuvent pas être surveillées ou opposées à l’utilisateur .Le tribunal de première instance lui donna tort avec la motivation principale suivante : « le droit pour l’employeur de surveiller les employés  sur le lieu de travail en ce qui concerne l’utilisation des ordinateurs de l’entreprise, relève du droit le plus large de vérifier la manière dont les salariés s’acquittent de leurs tâches professionnelles , qui est régi  par les dispositions de l’article 40 d/ du code du travail » sachant que les salariés avaient été avertis que leurs libertés  étaient  surveillées. Ainsi « l’employeur , en vertu de son droit de contrôler les activités de ses employés a pour prérogative de contrôler l’usage personnel qui est fait d’internet ». La cour d’appel de Bucarest confirma cette décision par arrêt du 17 juin 2008 en ces termes : « l’employeur qui a fait un investissement est en droit de surveiller l’utilisation d’internet sur les lieux de travail et l’employé qui transgresse les règles de l’employeur relatives à internet à des fins personnelles commet une faute disciplinaire » qui justifie donc le licenciement.
M.Barbulescu  a donc épuisé  tous les recours internes. C’est en effet la règle fondamentale  de base pour saisir la cour et à défaut la requête est déclarée irrecevable. De même il faut avoir saisi en France le conseil d’Etat ou la cour de cassation en dernière instance, puis dans les 6 mois de la dernière décision  saisir par écrit obligatoirement  Strasbourg qui n’est pas une instance supérieure ou internationale qui rejuge le procès. Les parties changent : en face du demandeur  , l’ adversaire devient la France et la juridiction européenne se prononce uniquement sur les dispositions de la Convention des droits de l’homme, ne peut que rejeter la demande, ou en cas d’acceptation condamner l’Etat  à revoir sa législation et à de faibles dommages intérêts pour préjudice moral  en général . Sur le plan pénal s’il y a condamnation de l’Etat le procès pénal  donne lieu à des dommages intérêts qui peuvent être conséquents  et/ ou peut être ré-ouvert dans des cas particuliers. Le jugement de condamnation se fonde par exemple sur le non  respect des libertés fondamentales ( pensée, conscience, religion , circuler, abus de pouvoirs d’autorités, traitements inhumains…)  énumérées dans la convention ,  pour le droit à un procès équitable le plus souvent.
M.Barbulescu a saisi la CEDH sur le fondement de l’article 8 de la convention qui proclame le droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale, et de sa correspondance, mais organise un régime de restrictions si celles-ci sont prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique. Qu’en est-il dans l’entreprise ?
 La 4ème chambre de première instance a considéré qu’il n’y avait pas violation de l’article 8. .M.Barbulescu a alors demandé le renvoi devant la Grande chambre en vertu de l’article 43 de la convention et 73 du règlement.  Dans son arrêt du 5 septembre 2017, celui qui a ravi certains et un peu assombri les autres, la grande chambre a rappelé le droit interne roumain, le droit international (normes des nations unies pour la réglementation des fichiers personnels-résolution 45/95 A.G. des N.U.)  , puis les normes du conseil de l’Europe (1981-STE n°108) ; et la charte des droits fondamentaux de l’U.E. ( 2007 C.364/01). La grande chambre a jugé : « il n’apparait pas que le requérant ait été informé de l’étendue et de la nature de la surveillance opérée par son employeur ni de la possibilité que celui-ci ait accès à la teneur même de ses communications »  . Il y avait  donc un problème de preuve matérielle  à la charge de l’employeur et le doute profite au salarié (comme en droit français la plupart du temps d’ailleurs en droit du travail). La cour précise : «  il n’est pas certain que les règles restrictives de l’employeur aient laissé au requérant une «  attente raisonnable »  en matière de vie privée. Les instructions d’un employeur ne peuvent réduire à néant l’exercice de la vie privée sociale sur le lieu du travail. ».. Elle en conclut que les communications de M.Barbulescu sur son lieu de travail étaient couvertes par les notions de vie privée et correspondance, et qu’ainsi la Roumanie avait violé l’article 8 « en ne protégeant pas-par sa législation interne- le droit de son ressortissant au respect de sa vie privée et de sa correspondance  en ne  ménageant pas un juste équilibre entre les intérêts en jeu » .M.Barbulescu a obtenu 1365 euros de dommages intérêts mais… reste licencié a priori.  La cour semble ainsi  considérer qu’une liberté fondamentale prime sur les intérêts concrets de l’entreprise sauf mise en danger de celle-ci ce qui n’a pas été évoqué ; que l’individu a droit à «  un moment opportun » à une pause, brève, raisonnable dit la cour donc sans abus ce qui serait une faute ,pour gérer ses problèmes personnels ou pour s’évader  momentanément du contexte professionnel . Mais que l’employeur en s’y prenant  loyalement et avec précisions  , dans la transparence et l’information  prouvée des salariés ,peut limiter ces libertés fondamentales sans cependant les réduire à zéro au nom de la productivité ou des salaires qu’il paie .Le salarié a le droit de respirer. Mais il doit aussi prévenir et afficher sa messagerie personnelle pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïtés   et que l’employeur ne soit pas « piégé » quand il contrôle.  
Pour les délais de procédure  constatons que M.Barbulescu a commencé son contentieux  en 2007 et qu’il  s’est terminé à Strasbourg en 2017. Il est utile de persévérer !
 Il n’y a cependant  pas de quoi crier victoire sur les toits  et penser  que le salarié a tous les droits notamment celui  de  surfer à tout va pour son compte personnel pendant les heures de travail, car la lecture attentive de l’arrêt permet de vérifier que les patrons n’ont pas été oubliés, ce qui n’est que justice.
D’abord parce que des juges concernant ce cas d’espèce ont eu une opinion dissidente qui est inscrite dans l’arrêt et ont  estimé qu’il n’y avait pas violation de l’article 8. La victoire n’est pas écrasante. Les opinions dissidentes exprimées officiellement sont  une caractéristique de la justice européenne. En France ce n’est pas le cas. On ne sait pas quels sont les juges d’accord et ceux qui ne le sont pas quand un arrêt est prononcé. Les juges européens  dissidents (7 sur 16 en l’espèce ce qui témoigne de la  discussion serrée  ) ont considéré qu’il n’y avait pas défaut du droit du requérant à sa vie privée et à sa correspondance .Mais la majorité l’a emporté et l’arrêt fera jurisprudence, sauf revirement ultérieur.
Ensuite parce que la cour  exige des rapports d’égalité et de respect mutuel,  tout en acceptant  des gardes-fous dans l’intérêt de l’entreprise et en posant des limites en rappelant que l’employeur a aussi des droits s’il respecte les textes , écrit ses règles peut être après concertation avec ses salariés, et qu’il ne doit pas y  avoir de surveillance sauvage ou d’intrusion illimitée dans les activités des salariés. Une charte informatique doit être créée si nécessaire pour éviter tout malentendu et donc contentieux.

Qu’en est-il en France ? La commission nationale informatique et  libertés (C.N.I.L.) considère que l’utilisation privée d’internet sur les lieux du travail doit se faire de façon raisonnable, et donc que tout abus peut être sanctionné, sous réserve de l’appréciation du juge, heureusement. Les références essentielles sont les suivantes : l’article 9 du code civil ; les articles L.1221-1 (exécution du contrat de travail et droits et libertés dans l’entreprise) et L.1222-3 et 4 ( information des salariés sur les moyens de contrôle comme un système de vidéosurveillance) du code du travail ; outre les articles 226-1 et suivants du code pénal  (protection de la vie privée) et 226-16 et suivants du code pénal (atteinte aux droits des personnes résultant des traitements informatiques, avec un recours possible au procureur de la république et à la CNIL). En cas d’abus manifeste la jurisprudence valide le licenciement. L’employeur peut interdire totalement l’accès à internet s’il justifie d’un but légitime de protection. Les connexions sont présumées avoir un but professionnel [Cass.soc. 9 juillet 2008 n°6.15800]. Le surf doit se faire plutôt pendant les pauses officielles et ne pas avoir un contenu  contraire à l’ordre public et  aux bonnes mœurs [rapports CNIL mars 2001 et avril 2002].  Après un arrêt du 26 janvier 2016 n°14.1536, la cour de cassation a rappelé ces règles de bonne conduite  réciproques et les conditions des vérifications dans un arrêt du 7 avril 2016 n° de pourvoi  14 .27949 non publié au bulletin :
« qu’en se déterminant ainsi sans rechercher comme elle y était  invitée si le message électronique n’était pas issu d’une boîte à lettre électronique personnelle distincte de la messagerie professionnelle  dont le salarié disposait pour les besoins de son activité et s’il n’était pas dès lors couvert par le secret de la correspondance, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».










dimanche 9 juillet 2017

UNE NOUVELLE V-éme REPUBLIQUE, AN 1.


Avertissement: cet article a été rédigé le 8 juillet 2017 pour l'Auditeur revue de l'Ana-Inhesj(voir le site) et sera publié et diffusé à partir d'octobre 2017.



Une nouvelle Vème république, an 1.
  Par Christian FREMAUX, président d’honneur de l’ANA-INHESJ.
A la suite du discours du chef de l’État  prononcé le 3 juillet 2017 devant le parlement réuni en congrès à Versailles , on s’interroge encore plus pour savoir si nous sommes toujours dans la Vème république avec   ses institutions solides simplement  à  dépoussiérer , ou si avec les nouvelles pratiques institutionnelles nous entrons dans une ère moderne de tendance 2.0 qui va permettre avec le même texte de base révisé  de trouver plus de respiration démocratique et de débats pour  renouveler les pratiques, et en fait pour  quelque peu révolutionner les mœurs et les responsabilités ? Il n’est peut être pas utile de tout jeter aux orties, de rassembler  une constituante pour choisir un nouveau mode de gouvernance sans premier ministre, ou avec un parlement omnipotent, ou faire figurer la révocation des élus par une pétition ce qui nous conduirait à une instabilité maximale, pour faire surgir une VI ème république. Je ne pense pas que les français ne rêvent qu’à cela.  L’avenir nous le dira surtout quand les textes auront été votés, car encore faut-il que les nouveaux parlementaires députés en particulier,  acceptent  et ce n’est pas limitatif des réformes annoncées, de se tirer eux –mêmes une balle dans le pied en s’auto -limitant dans la durée et en sacrifiant trente pour cent de  leur nombre par exemple ; ou votent avec enthousiasme un scrutin à la proportionnelle, même partielle alors qu’il y a avec le scrutin majoritaire à deux tours  actuellement au parlement huit groupes représentés avec une opposition déclarée aux deux extrêmes, et des marcheurs disposés à ne pas être de simples godillots à défaut de frondeurs. Mais je raisonne déjà comme un vieux, avec des schémas éculés dont les français ni de droite ni de gauche ne veulent plus, et place aux discussions positives , croyons au redressement et au succès, ce que pour ma part je souhaite sans abandonner mes valeurs puisque tel est le nouvel ordre humaniste et libéral  dans le cadre de la recomposition politique, destruction  créative de Schumpeter,  rénovation ,reconstruction , innovation . Comme le disait le poète André Chenier « sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques ». Attaquons avec enthousiasme , car le conservatisme est compatible avec la modernité (voir mon blog fremauxchristian.blogspot.fr article du 4 décembre 2016 «  to be or not to be libéral et conservateur « ?)  , la  future pratique rénovée  de la Vème république , bis ?
La présente chronique vous apparaitra certainement comme pauvre en informations , mais je ne suis qu’un spectateur engagé comme Raymond Aron et je ne retiens que ce qui existe  en matière de sécurité et justice pour les besoins de la cause de l’Auditeur. Pardonnez donc mes lacunes et mon manque d’inspiration.
L’actualité du premier semestre 2017 a été trop  occultée par les sauts et les soubresauts des  campagnes  présidentielle puis législatives  pour que je puisse faire un commentaire exhaustif de ce qui s’est passé , la politique prenant toute la place. Mais   contrairement à ce que certains ont cru la terre a continué de tourner avec ses attentats , ses vies détruites, ses divers malheurs,  tandis que nous gérions des problèmes fondamentaux pour le monde, à savoir que  M.Hamon éliminait sèchement M.Valls, pendant que les écologistes se plantaient, que les républicains soutenaient M.Fillon comme la corde soutient le pendu, que le front national paraissait avoir un vent porteur et que M.Bayrou revenait du diable vauvert et par un très beau salto arrière retombait sur ses patins qui l’ont porté jusqu’à  devenir garde des sceaux mais qui ayant continué de glisser l’ont renvoyé en sa mairie de Pau.  Au lieu d’être porté irrésistiblement  vers le pouvoir M.Fillon  a fait connaissance du parquet financier national  qui s’est saisi dans des délais  à faire rougir de plaisir tout justiciable qui dépose une plainte car il a subi un  très grave préjudice personnel, et a pu vérifier qu’entre les textes que les parlementaires votent et leur application concrète, il y a une grande marge, par exemple en matière de présomption d’innocence qui se transforme en chemin de croix médiatique pour certains. La presse pourrait aussi faire son auto-critique puisque morale et droit désormais se confondent et qu’il n’y a plus de vache sacrée même au nom du sacro saint principe de la liberté d’informer.M.Macron a appelé à un peu de réserve et de responsabilité des médias ce que l’on ne peut qu’approuver .Par ailleurs il est toujours utile pour un politique ou une personnalité quelconque qui prône l’exemple et  donne des leçons,  de connaitre les rouages de la justice, de vérifier les liens entre l’exécutif et le parquet, car il peut ainsi ressentir ce que les professionnels du droit  et surtout les usagers du service public  de la justice vivent au quotidien…
J’avais salué dans le numéro 46 de mai 2017 de l’Auditeur l’arrivée au ministère de l’intérieur de notre ami Bruno Leroux ancien auditeur de l’Inhesj , et je pensais qu’il était un ministre idoine pour essayer de régler la crise existentielle  de  la police, qui n’a d’ailleurs toujours pas été réglée dans le fond.  Mais il a été débarqué aussi vite qu’il a été nommé  et la justice enquête pour des faits quasi similaires à une partie de ceux qui sont reprochés à M.Fillon. Je crois à la présomption d’innocence et je ne doute pas que les personnes poursuivies ont le sentiment intime qu’il s’agit d’une cabale contre eux, qu’ils peuvent se regarder sereinement dans la glace et qu’ils n’ont rien fait de répréhensible, même s’ils ont profité d’opportunités ou de textes ambigus. C’est valable pour tout quidam aussi .Je  constate simplement que le vieux gag de l’arroseur arrosé fonctionne toujours. Il faut être prudent et ne pas accabler un adversaire blessé ou en difficulté. Il faut introduire un peu de compassion pour les autres surtout  envers ceux que l’on n’aime pas. La société impitoyable doit faire place à une société de convivialité et de tolérance , ce qui n’empêche ni sanction  ni mise à l’écart. Le passé nous rattrape souvent. C’est valable pour tous, dont moi.
                                              LA JUSTICE ENCORE
On a appris aussi que ce qui était légal autrefois  pouvait devenir moralement inadmissible, susceptible d’être une infraction aujourd’hui, et que l’on était jugé à son comportement ou à ses actes de jadis. C’est une nouveauté inquiétante, surtout que dans la dernière législature les délais de prescription ont été modifiés et sont plus longs désormais. Est-ce un progrès ? On a ouvert l’ère des soupçons  comme du temps de l’incorruptible Robespierre qui a trouvé cependant plus pur que lui et qui a été brusquement guillotiné. C’est lui qui avait supprimé les avocats car il considérait que le tribunal révolutionnaire savait reconnaitre les innocents et qu’un  citoyen qui n’a rien fait  n’a pas besoin d’avocat, ce qui est logique. « ô liberté que de crimes on commet en ton nom » avait déclaré Mme Roland avant de monter sur l’échafaud. Depuis quelques semaines la justice  doit faire des heures supplémentaires pour enquêter qui sur des conflits d’intérêts en Bretagne, qui sur  l’utilisation de fonds européens pour payer des assistants travaillant en France, voire s’il n’y a pas eu de favoritisme lors du déplacement de M.Macron alors ministre à Las Vegas, il y a plusieurs mois. Des excellences n’ont pas eu le temps de se réjouir d’avoir accédé au pouvoir : elles ont du démissionner, puisque Jupiter (surnom de M.Macron) a tonné et que la jurisprudence de M.Balladur qui voulait qu’un ministre mis en examen quitte ses fonctions, a été dépassée : l’affirmation  suffit surtout si elle  émane d’un média. Cessons le feu et posons des limites, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas rendre compte de ses actes.
Ce qui me permet de revendiquer une réforme essentielle que le premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 4 juillet  a annoncée : celle de la justice judiciaire pauvre en matériels, y compris pour combattre la cybercriminalité, en personnel, et en magistrats. L’indépendance à un  coût certes mais il faut savoir ce que l’on veut et on a la justice que l’on mérite. La lutte contre le terrorisme et l’état d’urgence même s’il devient plus commun, ont  besoin  d’être pourvus d’armes légales efficaces, de moyens divers pour aller vite, fournir les  solutions  et respecter les droits de la défense. La chaine pénale qui part du renseignement en passant par les forces de l’ordre sous le contrôle des juges judiciaires, puis le jugement en présence des avocats   , l’exécution réelle des peines individualisées et enfin l’enfermement -les prisons pour employer un vocabulaire que des bien  - pensants exècrent -doit être solidaire, renforcée et être une priorité. Certes elle n’arrêtera pas à elle seule les attentats ou la délinquance, mais plus on agit préventivement et fermement , moins il y a de tentations  pour ceux qui veulent défier notre démocratie et qui n’aiment pas notre république et ses valeurs, et certaines menaces pourront être anticipées. Cela  doit nous faire réfléchir sur les libertés individuelles et publiques qui sont compatibles avec une protection collective et un ordre public ferme dans un état de droit dont personne ne conteste avec sérieux le fonctionnement. Ceux qui nous attaquent ne se posent  évidemment pas ce genre de questions qui sont à notre honneur .
                                    DES REFORMES S’IMPOSENT
Mais la justice c’est aussi celle qui règle les litiges personnels, commerciaux, sociaux. Elle est engorgée on le sait : les délais entre la saisine d’un tribunal et le jugement sont très longs, et les délais de recours qui sont indispensables rajoutent du temps. Des contentieux de masse ou de très petits litiges doivent être résolus par médiation, pour ne laisser aux magistrats que les affaires  de principe ou qui posent des problèmes de droit. Le numérique doit pouvoir s’imposer et toute technologie qui  facilite  le règlement des litiges devrait  être préférée .Le contentieux public de plus en plus important (communes, environnement, hôpital, permis de construire…) qui est traité par les tribunaux administratifs, devrait être intégré  dans les compétences du TGI. , comme on l’a fait récemment pour les TAS et autre juridiction sociale. Est-il vraiment encore  opportun de maintenir deux systèmes distincts, le judiciaire et l’administratif ? Toutes les juridictions se complètent en matière de terrorisme. On le voit dans les projets du gouvernement qui veut étendre les pouvoirs du préfet sans pour autant écarter le juge judiciaire. C’est le grand écart permanent et ce n’est pas efficace. La justice est au centre de notre mode de vie et de notre démocratie. Il faut lui donner une place sans craindre le gouvernement des juges, vieux fantasme : qui peut avoir peur du droit voté démocratiquement, ou de juges qui ont une indépendance réelle ? Devons nous aller vers l’élection des juges et selon quelles modalités, ou revoir leur statut  avec quelles garanties et protections pour qu’ils ne soient pas précaires dans leurs libertés et fonctions et non soumis à l’opinion publique ?. Profitons de ce quinquennat pour mettre tout le monde autour de la table et pour avancer, en trouvant  des sous naturellement, et après avoir préparé les esprits car certains comme le disait Coluche pensent qu’il est préférable de connaitre le juge plutôt que le droit !
La justice évolue cependant .Elle devient prédictive et est en marche pour expérimentation dans certaines cours d’appel, pour un horizon plus ou moins lointain. Depuis la loi république numérique du 7 octobre 2016 de Mme Axelle Lemaire, toutes les décisions y compris de première instance de tous  les tribunaux de France et de Navarre  devront être en ligne. L’open data judiciaire permettra de connaitre la jurisprudence  de chaque tribunal sur un contentieux donné (immobilier, contrat, responsabilité, expertise…) donc de calculer son risque, celui de gagner ou non, avec les conseils avisés d’un avocat je le recommande ! Des start-up se sont déjà lancées sur ce créneau  qui pose cependant des interrogations. Pourra - t on choisir son juge, c'est-à-dire la juridiction qui parait la plus favorable ? Quelle sera la liberté d’appréciation du juge, son adaptation au cas particulier, le rôle de l’avocat et sa plaidoirie ? Une machine à l’intelligence artificielle pourrait-elle  être plus performante que l’homme, ce qui s’est d’ailleurs vu dans des parties d’échec ou autre. Ce serait pour le moins novateur.
Le candidat Emmanuel Macron  avait proposé dans sa campagne électorale de recruter 10 .000 policiers et gendarmes ; d’adopter une loi quinquennale pour mettre à niveau les moyens de la justice  et améliorer la justice civile (ce que le premier ministre E.Philippe a confirmé) ; de construire 15.000 places de prison ; de réorganiser les juridictions sur une base départementale ; que les peines prononcées soient effectivement appliquées … (déclaration de Dominique Perben ancien garde des sceaux) .  Que le nouveau chef de l’État soit exaucé ! Et que le gouvernement transforme les souhaits en actes.
                                 COUPER LE LIEN AVEC L’EXÉCUTIF
L’exécutif  va devoir  s’attaquer à un serpent de mer, animal redoutable car torve et naviguant en eaux profondes à savoir au rôle du parquet sachant que la cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg estime que nos procureurs ne peuvent être considérés comme des magistrats au sens strict du terme compte tenu de leur mode de nomination par le pouvoir exécutif et qu’ils ne font pas  vraiment partie de l’autorité judiciaire , ce qui est un affront pour ces magistrats.  Justement  la conférence nationale desdits procureurs a  publié également le 4 juillet  le «  livre noir du ministère public », ce qui n’est pas un bon signe. Personne ne conteste le fait que la politique pénale  du gouvernement représenté par son garde des sceaux qui est un politique d’abord,  a besoin d’être appliquée  également  sur tout le territoire pour qu’il n’y ait pas  des distorsions d’appréciation de la gravité des faits ou des infractions à poursuivre  ou d’interprétations personnelles qui ne correspondent pas au mandat reçu lors des élections, et soit physiquement  incarnée par un bras armé : c’est le métier des procureurs. Mais le livre noir cherche à démontrer qu’une justice (pénale) de qualité ne peut plus être rendue, ce qui est grave en raison des menaces terroristes, décourage les victimes  et crée un climat de défiance  envers une institution fondamentale. L’activité pénale explose depuis des années et surtout en raison de l’état d’urgence .Il n’y a pratiquement pas un texte nouveau qui ne s’accompagne de sanctions pénales dans tous les domaines. Les interdictions fleurissent et la punition est la norme  y compris dans des occupations plutôt frivoles   bien qu’indispensables pour certains à savoir le racolage qui conduit à  la consommation de sexe ! ou avec la loi Savary du 22 mars 2016 sur la sécurité dans les transports. L’État  est le juge en droit et moral  de tout, des comportements, des incivilités,  des petites fraudes,  outre les délits et les crimes , mais parfois passe à côté de l’essentiel ou de ce qui tracasse les citoyens.  On évoque toujours l’épaisseur du code du travail, à raison. Mais le code pénal en  2017 –qui vise le terrorisme-contient plus de 3000 pages, et celui du code de procédure pénale- celui qui contient  les directives et détaille les procédures pour incriminer les terroristes,  qui fournit des garanties à la défense en général  et protège les libertés individuelles en obligeant à respecter des procédures pointues sous peine d’annulation des poursuites, totalise près de 2800 pages, qui rebutent et ne facilitent  pas les enquêtes et le travail des policiers et des gendarmes. Quatre (4) dossiers plombent l’institution  [le figaro du 5 juillet 2017 page 10] : le logiciel Cassiopée  qui doit donner aux magistrats  une vision complète d’un dossier  a des bugs fréquents, et les «  trames » de procès verbaux  ne suivent pas l’évolution du droit, ce qu’en revanche les avocats connaissent et peuvent en tirer profit pour leurs clients, ce qui n’est pas critiquable ; les procureurs sont surchargés par divers contentieux de masse (exemple les mineurs migrants non accompagnés et le droit des étrangers) ; les extractions judiciaires y compris pour des délinquants graves de droit commun ne peuvent se faire dans les délais , le personnel pénitentiaire n’étant pas assez nombreux  ; et enfin une inflation de circulaires, de textes divers avec un manque cruel d’effectifs quatre fois moins de procureurs que la moyenne européenne, comme il y a d’ailleurs beaucoup moins de juges civils que dans les autres pays par 100.000 habitants . Les juges d’instruction sont débordés, et la section antiterroriste a atteint ses limites humaines .D’où des infractions graves qui ne font pas l’objet d’enquêtes, ou sont prescrites, ou sont classées faute de réunir les preuves indispensables .M.Marc Cimamonti procureur à Lyon et président de la conférence nationale des procureurs de la république attend une réforme en profondeur : « ..sinon la situation s’aggravera et il y aura un abaissement de l’autorité judiciaire. Nous serons obligés de toujours plus prioriser  les tâches : la prévisibilité et la qualité du traitement judiciaire seront remises en cause et l’Etat sera tenté de recourir à d’autres instances non judiciaires pour certaines problématiques comme nous l’avons vu pour la sortie de l’état d’urgence ». L’appel est lancé et tout le monde est d’accord  pour une réforme d’envergure et non un replâtrage : ministère de la justice (M.Urvoas ancien garde des sceaux s’était attelé à ouvrir ce chantier mais il a été battu aux législatives de juin) et policiers et gendarmes qui veulent voir leur métier se valoriser et être encore plus performants ; professionnels du droit : magistrats du siège comme du parquet , avocats  et tous les auxiliaires de justice ; et surtout justiciables, sans oublier l’administration pénitentiaire qui joue un rôle fondamental, en particulier  par l’apport entre ses murs d’une population dite radicalisée ou de catégories  hors norme ,délinquants d’habitude basculant  dans le terrorisme, individuel ou en réseau  qui menacent notre société et que l’on ne peut traiter qu’avec l’unique répression. Souvent il faut agir sur les idées, les valeurs, l’explication si possible pour convaincre et pallier l’acte criminel ou en limiter les conséquences, sans compter en amont le renseignement et l’anticipation. Bien sûr cette réforme a besoin de réflexion et de concertation, d’un délai –par trop long sinon elle n’aboutira pas-, de moyens budgétaires  sur des années, et d’un courage politique. L’autorité judiciaire doit elle devenir un pouvoir ? Fait on confiance aux juges (nommés ou élus et par qui ?) sachant qu’une infime minorité est politisée-comme tout corps où chacun a le droit d’avoir des convictions-  et que les grandes utopies sur l’homme, la prison, le sens de la justice sont passées de mode et n’aboutissent qu’à cliver alors qu’il faut tendre vers le consensus .L’indépendance des magistrats doit elle s’accompagner de pouvoir mettre en cause leur responsabilité personnelle, sous conditions restrictives ? Le débat est ouvert. Ce que veut le citoyen à mon humble avis de praticien ,(avez-vous remarqué que tout  homme ou femme politique parle au nom du peuple français et semble savoir ce que veut chacun des 66 millions de citoyens, et ainsi s’autorise à affirmer…) c’est une justice de proximité, rapide, compréhensible, arbitrée  par des juges neutres  et sur lesquels il ne peut y avoir de soupçon  qui tranchent en droit et en toute objectivité  les conflits et les thèses contraires tout aussi légitimes et sans vouloir remplacer le politique , en appliquant la loi votée à l’assemblée nationale, que l’on connait, qui est stable pendant des années, avec une jurisprudence qui n’est pas orientée ou fluctuante, ou qui rajoute des conditions, et une justice qui ne coûte rien ou peu ; faudra t il faire payer certains contentieux et sanctionner les plaideurs abusifs, tout service ayant un prix. ?  Justice abordable même si les avocats doivent recevoir des honoraires et être payés de leurs responsabilités et formations permanentes , outre pour  leurs talents pour les meilleurs .Ceux qui discutent avec moi ont conscience que les magistrats ont passé un concours difficile, qu’ils se forment, qu’ils ont un rôle essentiel de régulateur de la société, qu’ils doivent être mieux payés et avoir des assistants et secrétaires outre la possibilité élémentaire  de faire des photocopies, envoyer un courriel ou un fax, et disposer d’un téléphone, avec des possibilités  de  visio- conférence,  que la construction de juridictions modernes a un prix ; que la technologie la plus performante est nécessaire pour combattre à armes au moins égales avec ceux qui disposent de moyens colossaux,  au delà des frontières pour sévir .La justice  qui est le symbole de l’état de droit est le phare d’une démocratie moderne. Elle doit éclairer les rapports humains, les pacifier, punir ceux qui dévient  ou contreviennent dans leur individualisme  à la règle –sinon à quoi cela sert-il d’être honnête, moral, tout simplement normal,  et de jouer collectif ?- et ainsi être un élément de la cohésion sociale.
Une justice forte, autorité dans la ville et la campagne,  respectée et efficace est le gage d’une nation qui réussit. Espérons donc dans les prochains mois.
                                     UN PEU D’EUROPE
Pendant les mois d’âpres débats électoraux sur des sujets souvent peu reluisants qui concernaient des hommes (avec  leurs pratiques professionnelles outre leurs accoutrements) et leur carrière ce qui n’est pas  d’un intérêt majeur,  et sur ceux qui conditionnent notre avenir qui ont été esquissés à l’occasion de débats, nous avons entendu des propositions, je n’écris pas des promesses car plus personne n’y croit,  qu’il va falloir désormais transformer en espèces sonnantes et trébuchantes. On a fini de se payer de mots : le citoyen veut des résultats, du concret. Mais   la fureur du monde  et les excités de toutes tendances n’ont pas désarmés. Les menaces sont prégnantes, les guerres se poursuivent, les réfugiés affluent  et des problèmes continuent à se poser à Calais ou à la porte de la chapelle. L’Europe que M.Macron avait exalté à juste titre selon moi à condition d’en corriger les excès et d’appliquer vraiment le principe  de subsidiarité prévu à l’article 5 du traité de Maastrich doit jouer un rôle actif en matière de sécurité  notamment, de protection de nos frontières extérieures, et aider l’Italie à faire face aux flots  de réfugiés ou de migrants pour des raisons (bonnes selon eux) diverses qui inondent ses rivages .Le Brexit est un peu facile et on va voir comment nos amis britanniques vont s’en sortir.Le frexit -que l’on nous a suggéré pour retrouver notre souveraineté qui  nécessite aussi des mesures  réformatrices internes et une diplomatie à 360 degrés tout azimut comme disait le général de Gaulle dont tout le monde se revendique !, personne ne devant être exclu par principe de la table des discussions - n’avait pas grand grande pertinence ni sur le plan économique ni pour notre sécurité (devons nous tout seul rendre nos frontières étanches et repousser ceux qui veulent entrer à toute force ?), ni en matière de justice, notre droit n’étant pas universel et les juridictions européennes créant des règles et de la jurisprudence qui guident nos entreprises et s’imposent socialement  ce qui  aurait donc eu  plus d’inconvénients que d’avantages. Les français avec leur bon sens l’ont exclu. Le repli sur soi n’a jamais fait de personne  un gagnant surtout dans la compétition actuelle.  On peut repousser l’homme en péril -mais la misère matérielle ou morale entraine toutes les audaces et celui qui n’a rien à perdre se déplace quoiqu’il arrive-  au prétexte que l’on veut conserver nos acquis, et que le gâteau chez nous se réduit. «  En même temps » selon la formule du chef de l’État, et comme l’avait dit Michel Rocard on ne peut accueillir toute la misère du monde. La solution ne peut qu’être collective en Europe, et les pays «  émetteurs » de malheur, de  pauvreté, de guerre, de barbarie doivent participer aussi à trouver ladite solution (sauf Daech et consorts qu’il faut éliminer), quitte à ce qu’on les aide à se développer, à bâtir des démocraties stables  qui ne sont pas forcément dans leurs habitudes, et qu’on leur donne des moyens, tant matériels qu’institutionnels ou de bonnes pratiques.
                                       LES LIBERTÉS TOUJOURS
 En attendant nous devons nous protéger, et le débat entre l’abandon immédiat de l’état d’urgence qui ne servirait  à rien vu le peu de poursuites et condamnations  et serait  liberticide, ou sa continuation voire son renforcement me parait surréaliste :   il est toujours regrettable d’avoir moins de libertés mais qui prône de les limiter au point que le français ou l’étranger  qui est laïc ou pratique sa religion sur notre sol,  soit traqué, épié, suspecté permanent ? Personne. Qui regrette  , ne serait ce qu’en vertu du principe de précaution étendu au delà de son champ constitutionnel ou de la simple prudence,  qu’on n’essaie pas d’anticiper les risques ?. Personne  a priori. Qui conteste à l’autorité judiciaire protectrice des libertés individuelles le pouvoir de contrôler des mesures exceptionnelles dans le  cadre d’un état d’urgence qui va être abandonné au profit de dispositions d’ordre administratif (perquisitions, assignations à résidence dont le conseil d’État a  déjà connues) qui vont entrer dans le champ commun , avec des gardes-fous  judiciaires précis ? Qui n’a pas confiance dans nos parlementaires même les peu expérimentés  qui vont voter les lois idoines ? C’est une insulte au suffrage universel que M.Mélenchon , haut-parleur tonituant comme les indiens apaches l’auraient surnommé avec respect,  dénoncerait sans cravate pour ne pas s’étrangler de fureur. Le terrorisme ne justifie-t-il pas que nous innovions et que le droit ne soit pas en retard d’un attentat ? Je veux bien être taxé de liberticide à cette aune là.
                                          LE TERRORISME,HÉLAS.
Le président de la république à peine élu  a respecté ses engagements de campagne , les attentats en France, à  Londres et Manchester ayant prouvé la nécessité d’être réactif.On ne peut se contenter de déplorer et d’agir après coup. Il a donc créé une « task-force anti daech » qui n’est pas une superstructure s’empilant sur ce qui existait. Il s’agit de coordonner les services (DGSE , DGSI,DSM)  déjà engagés dans la lutte contre le terrorisme. Le temps du renseignement et de son exploitation va s’accélérer avec un accès direct au chef de l’État,  une information en temps réel, une mutualisation des données et une réponse dans un délai bref record. Le président Macron prend en mains directement  la décision  et définira la riposte : on saura  donc qui a ordonné quoi et pourquoi. C’est un progrès considérable et une quasi «  révolution » dans les services. M. l’ambassadeur B.Bajolet directeur de la DGSE qui vient de quitter ses fonctions, avait réussi à restructurer l’agence du renseignement et à y mettre de l’ordre y compris sur le plan interne ; des conseils de discipline ont été tenus à l’encontre de personnels défaillants. Efficacité, coopération et réserve en matière d’expression ont permis d’avoir des résultats. « Pourvu que ça dure » comme le disait la mère de Napoléon ! C’est le préfet M.Pierre De Bousquet De Florian  ancien directeur de la DST de 2002 à 2007 donc  expérimenté ,avec une réputation flatteuse  qui a été nommé à ce qu’on appelle le centre national du contre terrorisme qui  est installé au sein de la coordination nationale du renseignement  et qui est composé de plusieurs dizaines de fonctionnaires surtout analystes triés sur le volet, présents à l’Elysée 24 heures sur 24 , centre rendant compte toutes les semaines au conseil de défense ,  et fonctionnaires aptes à agir dans la demie heure. En espérant bien sûr qu’ils auront le moins de missions possibles, on peut rêver !
Dans le numéro 46 de Mai 2017  page 26 et suivantes de l’Auditeur, notre ami Gilbert Flam (vice-procureur de métier, magistrat réserviste auprès  de la procureure de Bobigny, chargé des politiques de prévention de la délinquance) a écrit un article passionnant sur les 30 ans de la justice anti-terroriste en France en décrivant les grandes mesures : la première loi est du 9 septembre 1986 et les dernières du 21 juillet 2016 et  du 30 décembre 2016. Tous les gouvernements ont légiféré pour s’adapter aux menaces.
Le président Macron a chargé son ministre de l’intérieur M.Gérard Collomb de pallier ce qui manquait pour avoir encore plus de résultats c’est-à -dire de rassurer en les protégeant les français qui s’inquiètent, sachant que la sécurité est la première des libertés. Une commission d’enquête parlementaire présidée par M.Fenech- battu aux dernières élections législatives de juin- avait défini de nouvelles stratégies et l’urgence de mettre en cohérence les interventions des services de renseignement et celles  d’enquêtes judiciaires. C’est désormais fait. Le ministre de l’intérieur a rédigé un projet de loi « renforçant la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité intérieure » et l’a présenté et fait valider au conseil des ministres du 21 juin. M.Collomb a posé le principe : « la sécurité optimale mais pas au prix de nos libertés ».Les mesures principales sont les suivantes :
A ) l’instauration de périmètres de protection lorsque un lieu  public est soumis à un risque d’actes de terrorisme ;
-le préfet pourra autoriser des palpations de sécurité et l’inspection visuelle de bagages en ayant recours à des agents de sécurité privée sous le contrôle de policiers et de gendarmes ;
-les forces de sécurité pourront procéder à des fouilles de véhicule avec le consentement du conducteur ;
B )les préfets pourront décider de la fermeture de lieux de culte qui prêchent l’islamisme radical ou incitent à la commission d’actes de terrorisme ;le juge des référés administratifs sera compétent en cas de contentieux ;
C) après information du procureur de la république de paris, des mesures individuelles (  par exemple assignation à résidence selon un périmètre  délimité…) pourront être prises par le ministre de l’intérieur. Un dispositif de surveillance électronique mobile sera possible ;
D) le préfet pourra ordonner des perquisitions administratives après autorisation préalable du juge judiciaire, le juge des libertés et de la détention ;
E) le PNR ( passenger name record) sera inscrit dans la loi et les écoutes hertziennes auront un cadre juridique redéfini ;…
Naturellement il appartiendra au parlement d’amender , de modifier, de compléter ce projet qui conjugue le respect des libertés individuelles avec le juge judiciaire qui contrôle, et la nécessité de préserver les libertés publiques  avec une action efficace des préfets sous l’œil vigilant du Conseil d’État en dernier ressort. Le ministre de l’intérieur a précisé : « il ne s’agit pas d’un état d’urgence permanent. Il s’agit de dispositions de droit commun assorties systématiquement de garanties protégeant les libertés individuelles ». Les habituels opposants politiques hurleront. La majorité des français approuvera.
Le premier ministre M.E.Philippe  s’est aussi interrogé sur la détention d’armes  et la procédure de  délivrance d’autorisations à un individu fiché S (à la suite de l’attentat sur les Champs-Elysées).Il va falloir trancher le débat entre les impératifs de sécurité publique dans un état de droit, et les libertés, comme si il y avait des juristes partisans de l’unique force  et de la surveillance généralisée, ennemis de l’individu et de la liberté !Certes quelques dizaines ou centaines d’individus  n’ont pas à être sacrifiés  sur l’autel de la prévention mais certains, qui ne craignent rien de la justice sauf celle qui est immanente,  doivent balayer devant leur porte et adopter un comportement respectueux des règles de la république et du vivre ensemble. Personne n’oblige quiconque à fréquenter des  supposés terroristes, ou à se connecter à des sites de propagande qui appellent au meurtre ! Le but des lois est d’obtenir le moins possible d’attentats et de violence quelqu’en soit la (bonne ou mauvaise) raison . La fin ne justifie jamais les moyens pour l’État non plus. Mais faisons confiance en nos magistrats pour créer une jurisprudence innovante et un état de droit renouvelé et utile. Les défenseurs à juste titre des libertés  ne doivent être ni naïfs ni obsédés textuels  ni des sectaires des principes. La liberté et la sécurité valent qu’on aborde les principes avec modération, et avec un esprit de finesse et de géométrie, sachant que les menaces sont protéiformes, que l’on est souvent en retard d’une action meurtrière, et que le terrorisme de l’extérieur comme de l’intérieur  a changé de nature en passant par la case délinquance. [lire notre ami Alain Bauer. Le figaro du 31 janvier 2017 page 18 : « les citoyens peuvent résister au terrorisme » ; et Hugues Moutouh, préfet et actuellement avocat. Le figaro du 5 juin 2017 page 14 : « les défis de l’uber terrorisme »).
                                              SUR LA TRANSPARENCE
Avant de renoncer pour des faits semblables  à ceux qu’il dénonçait avec vigueur pour d’autres, M.Bayrou a eu le temps de présenter son projet de loi sur la moralisation intitulé plus prudemment « pour restaurer la confiance des citoyens dans l’action publique ». Je ne suis pas convaincu que les citoyens qui  veulent naturellement avoir des élus probes et exemplaires, attendaient une moralisation .La morale c’est l’ensemble des règles et des normes de comportement relatives au bien et au mal, au juste et à l’injuste, en usage dans un groupe humain. C’est donc éminemment relatif pour chacun d’entre nous car nul n’est parfait même s’il faut tendre à la perfection , et qui n’a rien à se reprocher même des vétilles ? Seul celui qui n’a jamais rien fait, n’a pris aucun risque, n’a exercé aucune responsabilité l’obligeant à choisir entre deux maux, ou n’a pas profité d’une opportunité , peut lever le doigt. Ou encore celui qui est célibataire sans enfants, pauvre, n’ayant rien bâti, ne représentant que lui, et encore ! Mais est-ce un idéal  que de n’avoir aucun défaut ? .Il va de soi que le citoyen ne supporte plus les privilèges des autres  ,surtout de ceux qui vivent avec l’argent public. Mais la loi qui est indispensable pour cadrer ce qui est autorisé ou non,   ne tarira pas toutes les astuces, les petits avantages , les arrangements entre amis, collègues de promotion ou autres.
Les citoyens attendent plutôt des  résultats concrets dans leur vie quotidienne car ils savent que l’homme est ce qu’il est et qu’il faut sans cesse remonter le rocher de Sisyphe. Friedrich Nietzsche employait le terme de moraline  pour désigner un produit imaginaire permettant de donner le moral : la loi aura-t-elle cette fonction ? Et à propos de bienpensance  Anne-laure Bloch a écrit :« … la justice, cette forte vertu  seule à même de nous sauver de la moraline bisounours sans nous transformer en sans-cœur ».[l’éthique à l’épreuve des bisounours : Journal la croix page 16 du 30 août 2016] .Soyons donc réalistes demandons le maximum car selon la formule classique,  ils ne savaient pas que c’était impossible et ils l’ont fait.
Signalons que le célèbre  juge (président) anti terroriste   Jean-Louis  Bruguière –qui a reçu le prix Akropolis de l’Ana-Inhesj le 8 juin dernier pour son ouvrage «  les voies de la terreur » chez Fayard - a été  nommé  par le bureau de l’assemblée parlementaire du conseil de l’Europe à Strasbourg membre (sur trois)  d’un groupe d’enquête indépendant chargé d’examiner les allégations de corruption. Il a déclaré : « la tolérance des français est quasiment une tolérance zéro à l’égard des entorses à la morale chez nos élus ». De la lutte contre le terrorisme  à la vérification de la morale le juge suit le chemin du bien. Qu’il atteigne ses buts. 
Enfin je ne peux terminer ce couplet sur la transparence qu’il faut établir avec des mains tremblantes comme l’élaboration de la loi ou la modification de la Constitution,  sans citer les propos flamboyants et oniriques de Mme Anne-Sophie Lefac, ancienne élève de l’école normale supérieure qui a écrit « éloge de l’ombre à l’âge de la transparence »[le figaro du 4 juillet 2017 page14 ] pour oser tenir tête à l’injonction du suffrage universel  tyrannique et dangereux selon elle : « nous proclamons la fin de l’ombre et du secret, traqués dans les moindres recoins par les halogènes de la morale publique, par les ampoules de l’inconscience collective concernant la sécurité des données et par les feux de Bengale du désir d’exposition de soi-même ». Fermez le ban.
                        DE L’ESPOIR, ENCORE DE L’ESPOIR, TOUJOURS DE L’ESPOIR
Le philosophe Marcel  Gauchet a expliqué sur Europe 1 mercredi 28 juin 2017 à 19h30 que les français étaient fatigués d’être déprimés  et que s’ils avaient dégagés les sortants- dont certains avaient bien accompli leur mandat avec conscience et sérieux ce qui n’est pas juste comme disent les enfants- c’était pour les remplacer par de l’espoir , par la croyance que les nouveaux gouvernants  ne pourraient faire que mieux. Croyons le et retroussons nos manches en reprenant la formule de John Kennedy : « ne vous demandez  pas ce que votre pays peut faire pour vous : demandez vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ».
Il  va donc falloir que les comportements  politiques ( et autres d’ailleurs) changent. Il  y avait  eu une chanson célèbre de Rika  Zaraï « sans chemise et sans pantalon  » qui avait été un hit mais n’avait pas perturbé les neurones. M .Mélenchon a affiché son côté rebelle en faisant venir les députés de la France insoumise au parlement sans cravate ni veste. Bon. Tant pis pour le respect dû à ses électeurs et à la nation, mais on ne mourra pas d’une question accessoire. En revanche il a refusé de répondre à l’invitation du chef de l’Etat pour le congrès car dit –il, il n’obéit pas à de la communication politique-sauf la sienne ce qui va de soi- du «  monarque républicain » qu’il aurait été avec encore plus de morgue s’il avait été élu ! Quelle audace : à ce sujet  il devrait relire les propos très anciens du professeur de droit  constitutionnel Maurice Duverger. Et étudier  la réforme constitutionnelle de 2008 de Nicolas Sarkozy qui a limité l’arbitraire  présidentiel. Sa forme d’opposition est datée et n’apporte rien aux débats publics. Il n’est pourtant pas sorti comme Athena toute armée de la cuisse de Jupiter .M.Mélenchon détient seulement sa vérité partielle et partiale  ce qui est son droit , et il veut casser tous les codes  sauf celui du travail.  C’est un retour vers le futur dont on n’a pas besoin .L’autorité républicaine du président est nécessaire pour que l’on avance dans tous les domaines. Certes la roche tarpéienne est toujours proche du capitole, et les contre-pouvoirs doivent jouer leur rôle .Mais il faut agir sinon la déception sera immense .
Parmi les annonces du chef de l’État devant le parlement réuni en congrès le 3 juillet, j’ai retenu ce qui concerne la sécurité et la justice , mesures qui entrainent ou  non  une modification de la constitution :
-Le juge judiciaire sera préféré au juge administratif pour que les libertés soient préservées et que la lutte contre le terrorisme qui nécessite des mesures exceptionnelles n’occulte pas la préservation des  grands principes qui fondent notre état de droit ;
-il y aura une réelle séparation entre l’exécutif et les membres du parquet, pour que ceux-ci aient un statut comme les juges du siège. Le conseil de la magistrature sera réformé ; 
-les médias devront respecter la présomption d’innocence et avoir plus de retenue pour les « affaires » en respectant le secret de l’instruction (à la justice d’y veiller)  et en obligeant tous les acteurs concernés à ne plus le prendre pour un secret de polichinelle que l’on peut violer impunément,  et la vie privée. Selon moi effectivement  le droit d’informer n’est pas une liberté illimitée sans responsabilité ;
-la cour de justice de la république sera supprimée. Les ministres seront des justiciables comme le citoyen moyen.
Pour le reste à savoir ce qui est essentiel aussi, la lutte contre le chômage, la croissance avec l’entreprise, les dépenses publiques à arbitrer pour les réduire, l’éducation, la défense et toutes les missions régaliennes, le périmètre de l’État, les menaces de toute nature…, enfin dans tous les domaines où il faut réformer, je ne me prononce pas  car ce n’est pas le sens de cette chronique et surtout sans avoir les textes, les chiffrages  et les études d’impact. Il faut tout refonder dans un monde incertain , en préservant nos acquis à savoir la place prépondérante de l’individu, sans plier face à l’individualisme ou au communautarisme, et sans céder d’un iota à ceux qui nous défient et qui voudraient que nous renonçions à nos valeurs. M.François-Xavier Bellamy philosophe  et élu,  considère  que « l’individu ne trouve sa liberté et sa sécurité que dans les liens qui le rattachent aux autres, et que c’est en protégeant ces liens dans la famille, l’éducation , la santé, la solidarité que nous pourrons reconstruire une société plus apaisée et plus utile ».[les deshérités. Ou l’urgence de transmettre. Ed.J’ai lu].
Il faut désormais entrer dans le dur, dans la réalité et les décisions qui vont changer la vie des citoyens. En espérant que d’autres enquêtes judiciaires qui trainent ou commencent ne vont pas atteindre certaines personnalités ministérielles ? La justice à qui on a reproché de se mêler de politique et d’avoir faussé le scrutin présidentiel, en poursuivant un candidat,  ne peut encore être accusée de troubler la vie gouvernementale : s’il n’y avait pas de faits avérés il n’y aurait pas d’enquête. Il ne faut pas tirer sur le pianiste ou renverser la charge de la preuve, ou la hiérarchie des normes comme le disait l’excellent  démocrate M.Martinez de la CGT pour la loi travail  de Mme El Khomri, battue aux législatives de juin.
Reconstruisons notre projet politique avec la sécurité et la justice en priorité. La France attend. Et je termine, puisque c’est l’été lorsque j’écris ces lignes que vous lirez à l’automne, par une note futile. Jacques Brel  chantait : « tu as voulu voir Vesoul  et tu as vu Vesoul. (Puis) tu as voulu voir Vierzon et tu as vu Vierzon… ». Les français ont voulu voir le bout du tunnel, et l’horizon  s’éclaircir. Ils ont voté en conséquence. Espérons qu’ils verront du soleil et participons chacun à notre place avec nos moyens, à la réussite collective.