On veut comprendre les politiques.
Par Christian Fremaux avocat
honoraire
N’est-ce pas
le nœud gordien à trancher pour que les choix soient positifs, que l’abstention
s’abstienne, et que le-la futur.e élu.e présidentiel.le
le soit sans ambiguïté ? Car on
s’aperçoit qu’à peine proclamé dans l’enthousiasme de ceux qui ont voté pour
lui le président est contesté, et ce qu’il devait réformer n’est plus
accepté voire vivement combattu dans la rue ! Y a-t-il eu
maldonne ? Qui n’a pas été clair : le candidat qui est resté flou en
faisant le grand écart pour plaire au plus grand nombre ? Ou les citoyens
qui n’ont retenu que ce qui les arrangeait et n’ont pas tout compris des déclarations
pompeuses ou des promesses subtiles ? Surtout quand il y a des crises
violentes, sanitaire, économique et sociale ou autre avec des menaces qui ont
tout bouleversé, des changements de valeurs, des exigences de droits nouveaux,
et que la stabilité du fameux slogan fourre-tout du vivre-ensemble est un
souvenir du passé. Le progrès est mis à toutes les sauces et le cuisinier en chef
ne sait plus quelles recettes choisir.
Il y a
manifestement un problème d’audition et de compréhension de nos hommes-femmes
politiques qui sont très nombreux à vouloir faire notre bonheur. Ceux et celles
qui seront rescapé.es des primaires, congrès, désignation ad hoc ou autre
système de sélection par quelques milliers de militants, devront expliquer
leurs programmes fruits de négociations,
de compromis, d’abandons divers, d’incohérences globales dissimulées en projets
progressistes ,mélangeant la croissance et la déconstruction, l’amour de tous
en désignant des méchants, des profiteurs qui s’enrichissent sur le dos des
pauvres …On s’y attend mais on commence à être fatigués des anathèmes et injures ou exclusions dans
notre bel état de droit et sa liberté d’expression à géométrie variable. On
voudrait que les promesses se concrétisent rapidement en actes, que l’on fasse moins
de diagnostics discutables, et que l’on dise comment on va faire, avec qui,
selon quels coûts car on ne rase pas gratis, et comment on va souder la Nation
dans sa diversité et ses croyances parfois antinomiques en lui donnant un
destin, des objectifs et des valeurs communes. La République ne peut tout
régler. On veut comprendre et ne pas être déçus. Encore faut-il parler de la
même chose.
J’illustre
mon propos par des exemples concrets de l’actualité pour montrer qu’on n’arrive
même pas à se mettre d’accord sur le vocabulaire et sur les faits. Ainsi dans un
débat télévisé avec le vieux briscard politique professionnel J.L. Mélenchon celui-ci
a admis s’être souvent trompé, mais a déclaré qu’il avait changé donc on
pouvait le suivre désormais. Il est pour la créolisation de la société au sens
du poète Edouard Glissant qui la définit comme la mise en contact de
plusieurs éléments de culture sur un même endroit ce qui permet la cohésion
sociale. Je ne sais pas si un poète peut trouver sa place dans le débat en
cours mais la poésie ne nuit jamais. J’ai appris ce qu’était la créolisation,
merci. C’est un fait. M. Mélenchon se dit optimiste. Son contradicteur était M.
Zemmour vrai -faux candidat à la présidence de la république, avec ses références
(parfois datées : qui connait bien Jacques Bainville ? je suis allé le
lire, merci), confirmant fortement ce qu’on nomme comme des obsessions surtout
sur l’identité qu’il ne confond pas avec la créolisation, et ses certitudes sur
le déclin et un avenir incertain qui sont peut- être fondées ? M.Zemmour pense
ne pas être pessimiste mais réaliste. Les mots sont donc essentiels.
Il y avait en direct par des journalistes un
contrôle des chiffres avancés par l’un et l’autre et vérifications
d’éventuelles fake-news. Comment l’électeur peut- il s’y
retrouver ? Il aurait été plus
rapide d’injecter aux débatteurs un sérum de vérité avant l’émission et comme
je suis ancien cela m’a rappelé ce que disait M. Georges Marchais illustre secrétaire
général du parti communiste au journaliste qui l’interviewait : « ce
n’est peut- être pas votre question mais c’est ma réponse » ! On avait
ri, mais jaune pour beaucoup d’électeurs.
Le débat
continua sur la déclaration des droits de l’homme base de notre état de droit
et de nos valeurs républicaines que l’on croit toujours universalistes, que
chacun revendique pour en tirer des conséquences contraires. M. Mélenchon se
dit républicain de 1789 et que les droits de l’homme s’adaptent en 2021-22 à
tout, que l’on peut les appliquer en les étendant quasiment à l’infini. C’est
un fait. M. Zemmour qui ne s’estime pas moins républicain pense que les
droits de l’homme-sans les devoirs- ne peuvent pas tout résoudre. Il dénonce le
gouvernement des juges qui s’immiscent dans le pouvoir exécutif ou pour les
européens dans notre souveraineté, et que l’identité nationale ne permet pas de
donner des droits à n’importe qui. C’est le même fait. On part du même texte.
Même
réflexion avec le sentiment d’insécurité ou l’existence de violences réelles et
dangers ou trafics divers ; et la justice laxiste ou non… Chacun a ses
exemples et interprète les faits.
J’espère que
nous allons sortir de la confusion et de l’ambigüité. Les candidats devront
parler vrai, et s’appuyer sur des faits avérés et non expliqués par l’idéologie
ou vus par des lunettes déformantes pour faire plaisir à telle ou
telle partie de l’électorat.
« Ce
qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent
aisément » a écrit Boileau. Si l’on veut
éviter encore plus de maux que ceux qui seront vilipendés dans la campagne présidentielle,
il faut que nos présumés très intelligents politiques à qui on reproche d’être
loin du terrain se mettent à la portée de leurs électeurs pour certes élever le
débat mais surtout pour que les citoyens comprennent les enjeux, et décident en
toute connaissance de cause. Car si on choisit le mauvais candidat on en prend
au moins pour 5 ans ce qui est long surtout quand on est innocent. C’est plus facile à écrire qu’à faire car une
campagne politique est souvent réductrice, quelque peu éthérée dans les
positions, et parfois de qualité médiocre sinon démagogique. Le peuple
n’est responsable de rien, il subit et suit les chemins qu’on lui demande
d’emprunter mais qui parfois mènent à une impasse.
Les citoyens
veulent comprendre les candidats. Ceux-ci veulent être compris des électeurs. Ces
derniers trouveront d’autant plus facilement l’urne pour voter qu’ils seront
certains de faire le bon choix en ayant approuvé par raison ce qu’on leur
proposait clairement sans émotion sur-jouée qui recouvre tout. La confiance doit donc être réciproque.