vendredi 28 février 2025

Le droit et les barbelés

 

                                                Le droit et les barbelés

                 Par Christian Fremaux avocat honoraire

Que les vrais spécialistes des conflits armés et des relations internationales ainsi que les professeurs de droit mes maitres me pardonnent. Je ne suis qu’un civil et surtout un avocat honoraire qui s’est battu devant les tribunaux ce qui est un front peu risqué pour les droits de la Défense. Et ceux des victimes ainsi que pour l’Etat dans les dossiers anti-terroristes ; ou pour des militaires quand le tribunal aux forces armées existait. Sans oublier les policiers et les gendarmes quand je me préoccupais de sécurité intérieure dont la dégradation m’inquiète. A l’ère du néant intellectuel on donne son avis et chacun, surtout s’il n’a ni responsabilité ni mandat, se croit important. J’en fais partie. Le philosophe Coluche disait : « de tous ceux qui n’ont rien à dire les plus agréables sont ceux qui se taisent ». On ne l’a pas écouté car la désinformation tous azimuts fait rage. 

Dans ma campagne picarde où j’ai été élu on me pose des questions qui franchissent les bornes. On discute de la pluie et du beau temps qui déterminent le cours mondial du blé, du sucre, des produits venant de contrées lointaines difficiles à fixer sur un globe. Ou de régions sous le feu ennemi ou interne. Ce qui fait parler de guerres en cours. Je suis le modeste correspondant défense de la commune. A ma surprise on m’a demandé de m’exprimer sur le sujet suivant : qui ment ?  Qui a le droit de faire ou le devoir de s’abstenir ? Qui est l’arbitre ?  c’est quoi le droit international public dont on parle partout ? Est-il efficient et utile?

Je n’ai pas osé répondre que pour être pertinent ce sont des années très longues d’études, des conférences, des séjours à l’ONU à New York notamment, avec des ONG ou dans des juridictions ou institutions internationales. Des voyages et comparaisons. La reconnaissance de ses pairs. Des discussions sans fin pour une virgule. Ou un m2. Ou l’épaisseur de la ligne d’une séparation. Donc des compromis. Des définitions à trancher : qui est l’agresseur et qui est l’agressé ? C’est quoi un Etat et un groupuscule terroriste ?  Enfin d’avoir la maitrise des diplomates ou de combattre sur le terrain. Le droit public international concerne la vie ou la mort de groupes d’êtres humains ou de peuples entiers. La paix surtout. Le monde rural conduit parfois loin. Et il s’intéresse aux individus dans leurs essences. J’ai restitué le peu que j’avais appris.

—On sait que le droit international public entendu comme celui de la guerre ou humanitaire est malmené. Les Etats font- ils ce qu’ils veulent ?  Les frontières et les murs sont transpercés. Il y a des camps avec des barbelés, des tunnels et des planques cachés dans les déserts et les villes sous les hôpitaux ; des massacres y compris dans le même peuple, des génocides pour les uns, des résistances pour les autres. Des crimes contre l’humanité de tous les côtés. Les atrocités des guerres, sales par nature.  Les innocents sacrifiés comme des bébés otages notamment. Et tout ce qu’on devine confusément avec les réfugiés.  S’il suffisait de siffler la fin du match pour que tout s’arrête on le saurait. Chaque jour des éminentes personnalités en bombant le torse et au nom de leurs vérités exigent un cessez -le -feu immédiat. Et comme rien n’intervient on continue. Comme les résolutions enflammées aux Nations Unies avec les 5 membres permanents les puissances nucléaires dont la France avec leur droit de veto ou les appels à la paix des plus hautes autorités politiques comme morales et religieuses.

Le droit international public régit les relations entre Etats. Sa fonction première est d’établir un ordre. Ce qui implique que les Etats valident sa légitimité et respectent les règles contraignantes qu’il établit. Il n’y a pas une police ou une armée qui fait la loi de force et impose la paix. La Cour Internationale de Justice qui dépend de l’ONU siège à La Haye et poursuit des Etats ou juge des contentieux interétatiques. Elle ne condamne pas le chef de l’Etat ou de gouvernement pour sa politique y compris militaire.   

Et s’il s’agit non pas d’un Etat mais d’une organisation terroriste, la difficulté s’aggrave. Comment appréhender une nébuleuse fantôme mais barbare ?  

La Cour Pénale Internationale créée à Rome en 1998 et siégeant aussi à La Haye peut poursuivre des dirigeants politiques, des militaires et chefs de guerre, des génocidaires présumés ou avérés et d’autres catégories de criminels du même acabit à titre individuel, émettre des mandats d’arrêt et envoyer les coupables en prison.  

Les domaines du droit international public sont multiples : droits de l’homme ; désarmement ; criminalité transnationale ; conduite de la guerre ; mer et espace...Les sources applicables du droit sont la coutume ; les principes généraux du droit, les Chartes et Conventions ; les Traités que chaque partie doit faire ratifier sur le plan interne et qui sont supérieurs à notre Constitution pour notre cas ; les accords bilatéraux ou plus larges qui engagent les Etats. Il n’y a pas un code écrit pénal ou civil mondial avec une jurisprudence générale exploitable en pratique. 

Le droit international humanitaire a pour but de limiter les conflits armés dans leurs conséquences matérielles et physiques. Les principes d’humanité, neutralité impartialité et indépendance dominent. Le droit de la guerre vise la proportionnalité, les souffrances inutiles (blessés et prisonniers de guerre) et l’honneur. Il faut protéger les faibles et limiter les moyens de la guerre. Comme LA bombe. 

Les conventions de Genève qui sont dans l’actualité fixent aussi les limites à la barbarie et le respect des populations civiles. Israël et la Palestine sont signataires. La Russie est membre du conseil de sécurité. Chacun peut apprécier l’efficacité !

—on m’a objecté : « s’il n’y a aucun vainqueur sur le terrain y -a- t-il des tirs au but [ou obus] pour savoir qui a gagné ? ». J’ai botté en touche car il y a de la triche au plus haut niveau. Et des retournements d’alliances inattendus. Le devoir fondamental d’un Etat est de protéger ses ressortissants et prendre ses responsabilités quitte à déplaire. Un Etat n’a pas d’amis mais des intérêts. Le droit international public est fait pour des objectifs universels.

—Le droit et la raison humaine peuvent-ils l’emporter sur l’idéologie et l’émotion ?

Mes interlocuteurs ont rejoint leurs foyers un peu dubitatifs. La paix est un long combat.     

     

jeudi 20 février 2025

Le degré zéro de la politique : justice et démission.

 

                         Le degré zéro de la politique :  justice et démission.

                      Par Christian Fremaux avocat honoraire

Dès qu’il y a un débat délicat et une défense hésitante ou une affaire qui est sordide, ou un soupçon qu’un politique ou l’Etat n’a pas agi à temps, on entend d’abord des cris indignés avec les mots plaintes et procès ce qui veut dire justice hâtive. Comme si les juges devaient remplacer les citoyens qui comprennent et sanctionner en urgence. Sans savoir précisément. Alors qu’ils usent de la lenteur pour des raisons diverses. Puis immédiatement après on réclame le départ sur le champ. Honteusement.   

La plupart du temps ceux qui hurlent à mort en baissant le pouce agissent avec des fonds publics car ils sont subventionnés. Ils attaquent l’Etat ou telle personnalité publique qui les a nourris. Je ne suis pas d’accord qu’avec l’argent de mes impôts certains fassent n’importe quoi en fonction de leurs convictions particulières. Ils se donnent bonne conscience croyant sauver la planète. Et implanter un vivre-ensemble heureux. Ou laver plus blanc ou moins noir soyons prudents sur les termes. Ils ne doivent pas regarder les faits divers en France et ce qui se passe dans le monde. Ils se rangent dans le camp du bien. C’est confortable sans sortir ses sous. Et sans risques.  

 N’oublions pas le débat sur l’état de droit qui nous empêcherait selon les défaitistes de tenter quoique ce soit. M. Macron a promis un référendum mais on ne sait pas sur quel sujet. Les questions ne manquent pas. Il parait que nous serions ligotés juridiquement par nos engagements internationaux ; les droits de l’homme ; les dispositions des instances européennes ; le droit humanitaire international ... Les autres nations ont elles les mêmes scrupules ? Notre constitution peut être revue. Des politiques refusent.  

 Si la jurisprudence change constamment grâce aux juges français, nos parlementaires peuvent défaire une loi et en voter une autre. Ce n’est pas interdit. Et après M. Fabius socialiste revendiqué, le nouveau président du conseil constitutionnel M. Richard Ferrand validé à une voix près bien que très proche du chef de l’Etat, peut nous étonner en devenant véritablement indépendant de toutes influences dont son avis personnel et en entendant sans filtre la voix du peuple qui est celle de son unique maitre. On n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise et de l’honneur d’un homme. Bien que non juriste, mais ancien président de l’Assemblée nationale avec de l’expérience.   

 On pourrait trouver des économies en revoyant les critères d’attribution des recettes qui permettent les actions d’associations ou structures opaques. Il n’y a aucun droit acquis à ses faiseurs de contentieux. Ni à des profiteurs étatiques d’énormes fonds publics sans contrepartie. La générosité et le respect du droit ne vont que dans un sens contre la nation française. Le constater ce n’est pas du populisme mais du simple bon sens. Des Etats à qui l’on donne des centaines de millions pour leurs développements nous maudissent comme l’Algérie ou sont plus riches que nous comme la Chine. La réduction des dépenses publiques commence par assécher des filets d’eau qui se regroupent et forment des fleuves qui débordent. 

 Les plus auto -intelligents estiment qu’il faut trouver beaucoup de dépenses à supprimer et prendre l’argent où il est : chez les riches en général y compris les retraités. Ou les profiteurs. Mais sans s’attaquer aux déficits structurels, comment fait-on ? Si tout est inutile alors ne faisons jamais rien. 

Et ensuite on parle censure pour tout et rien. 

C’est le retour vers la IVème république alors que M. Mélenchon réclame une VIème république avec un parlement élu à la proportionnelle et omniscient. Le président de la République irait pêcher des moules et des frites au Touquet. On supprimerait le premier ministre qui ne sert à rien et coûte cher au profit de quelques citoyens tirés au sort qui gouverneraient l’administration. Avec un DRH et un DAF. Et c’est le chef de la majorité composite qui coordonnerait. Naturellement je caricature mais un peu seulement. La démocratie doit évoluer ! Tous les problèmes seraient réglés car comme on le sait seuls les extrémistes ont la vérité.

 M. Bayrou avait anticipé. Il est resté maire de Pau. Et la justice le rattrape, ce qui se traduit par l’injonction : démission.   

Même si elle est très ancienne autant que M. Bayrou dans la vie publique l’affaire de l’école catholique Bétharram est grave. Il y a des victimes qui souffrent et exigent que les coupables paient. Les tribunaux ne sont pas faits pour rendre des services à un parti politique. Serait-il le défenseur de la laïcité ce qui se discute vu son positionnement actuel. Les juridictions émettent des jugements en appliquant le droit dans le contexte de l’époque qui n’excuse rien et ses répercussions d’aujourd’hui. Les juges ne donnent pas de leçons et ne se prononcent pas sur des pratiques prétendument religieuses sauf celles qui sont contraires à la loi. Ils examinent aussi le comportement des hommes politiques. Mais pas leurs paroles dans l’hémicycle sauf infractions avérées. La démission du 1er ministre acte politique de sa seule conscience ou par censure ne servirait à rien sinon il faudrait l’actionner tous les jours sur ordres de procureurs occasionnels avec effet boomerang pour eux. Laissons la justice faire son travail.

 Nos parlementaires n’ont- ils pas mieux à faire qu’hurler avec les loups ? En attendant que l’affaire se décante et que la présomption d’innocence soit une valeur réelle dans l’intérêt de tous. Sans oublier le principe cardinal de la prescription dont des personnalités puissantes ou proches des pouvoirs ont bénéficié. Outre le respect du débat contradictoire. Et le fait que malgré la tendance actuelle une parole, un ressenti, une émotion ou une certitude personnelle ne remplacent pas des accusations vérifiées et débattues objectivement. Les victimes n’ont pas besoin de récupération politique et de la démission du premier ministre qui aurait menti à l’Assemblée. M. Bayrou n’est pas M. Clinton à propos de Monica. Il va se défendre peut -être en bottant en touche, dans le marigot ?  

N'abusons pas de la justice et de la démission. Personne n’est en état de faire la morale.    

 

samedi 8 février 2025

La justice a deux fléaux

 

                                        La justice a deux fléaux

                   Par Christian Fremaux avocat honoraire

Quasiment tous les jours on s’indigne en entendant des décisions de justice. On les trouve laxistes ou partiales ou déconnectées de la réalité.  Les tribunaux règlent les litiges individuels sur le plan civil, avec le tribunal de commerce et les conseils de prud’hommes pour le social, et pour les contentieux liés à la personne avec le droit de la famille. Dans des délais malheureusement très longs et avec des décisions aléatoires la jurisprudence étant flottante et peu prédictive. Les citoyens pensent que les juges n’ont pas à se prononcer au nom de la France telle qu’ils la rêvent. Au pénal on aime l’hallali sur les puissants mais on déplore la miséricorde pour les criminels et les mineurs délinquants. Des places de prison manquent, soyons imaginatifs trouvons d’autres lieux. Et des contraintes.

S’ajoutent maintenant les procédures qui touchent directement la collectivité que les préfets ou l’Etat engagent dans l’intérêt de l’ordre public, de la sécurité et de la lutte pour que la France reste telle qu’on l’aime. Tout en intégrant ceux qui se reconnaissent dans les valeurs républicaines et lui apportent du bien ou leurs talents et travail.

 La tragicomédie de l’influenceur algérien Doualemn mis dans l’avion et revenu aussitôt par un autre ridiculise la France. Le gouvernement algérien qui nous tape dessus en permanence au nom d’une créance imprescriptible venant de la colonisation, aurait pu en profiter pour mettre dans l’aéronef de retour l’écrivain français Boualem Sansal, toujours détenu. C’est le tribunal administratif de Melun qui a ordonné que l’influenceur quitte le centre de rétention malgré son passé chargé et les actes graves qu’il appelait à commettre sur notre territoire. Et que le préfet revoit le dossier. Et le pauvre innocent recevra 1200,00 euros, je suppose pour lui rembourser ses frais de procédure !

 Les Français avalent mal la pilule. Ce n’est pas un camouflet pour le ministre qui a appliqué les textes avec courage mais pour le peuple qui s’étonne qu’un juge puisse décider en son nom, ainsi. Les droits de l’homme de 1789 doivent être compris et interprétés à l’aune de 2025 avec ses menaces et les déviations de certains. C’est une victoire à la Pyrrhus car le ministre persiste en faisant appel. Le charmant prêcheur donnera peut- être des leçons d’humanisme à son gouvernement de cœur en vivant  à Alger-la -blanche dans un pays de libertés.

 La sûreté et la violence légitime font partie des droits de l’homme. La justice a deux fléaux : le glaive et la balance. Les juges savent faire évoluer les règles prétoriennes. La jurisprudence et le droit ne sont pas immuables.

On a appris aussi que la cour administrative de Bordeaux enjoignait à la mairie de Biarritz de débaptiser le quartier dit de « la négresse » depuis des lustres. On devine que c’est pour encourager le combat antiraciste ? Le changement va -t -il dissuader ceux qui sont visés ou les conforter ? La démocratie oblige à entendre tous les avis.

Les citoyens découvrent ainsi qu’il y a un tribunal spécifique qui s’occupe de dossiers dits fondamentaux tels que l’installation à Noël de crèches surtout pas sur un lieu public ; ou de calvaires et de statues qui sont implantés depuis des temps immémoriaux sur des endroits non privés ce qui choque désormais quelques individus ou minorités qui préfèrent d’autres symboles. Ou de dénominations et références à des personnalités du passé qui n’ont pas l’heur de plaire à certains. Comme si l’effacement d’un sujet le faisait disparaitre !  On se réjouit que les juges du tribunal administratif submergés par des dossiers très lourds de conséquences aient le temps de faire respecter les libertés publiques et par exemple au nom de la laïcité fassent savoir aux habitants que leurs habitudes sont illégales, leurs paysages à restructurer et qu’ils doivent se conformer à une culture nouvelle. Vive la justice qui façonne les territoires et dit aux citoyens ce qu’il faut accepter ou non, là où ils vivent. La loi peut conduire à des aberrations. L’enfer est pavé de bons sentiments.  

Les tribunaux administratifs sont formés de hauts fonctionnaires indépendants qui jugent sans robe noire. Le Conseil d’Etat est la juridiction suprême. La procédure est surtout écrite et longue sauf s’il y a urgence et une menace sur une liberté. Le citoyen peut s’attaquer notamment aux décisions de l’Etat, des établissements publics ou des collectivités locales. Le droit des étrangers est aussi de sa compétence.

Naturellement je ne méconnais pas le fait que le tribunal répond en droit à des requêtes et des demandes qui lui sont posées par des justiciables de bonne foi défendant sans aucun mandat officiel l’intérêt général et pas du tout orientés ! Ou par des associations sans responsabilités qui vivent de subventions publiques et qui s’échinent à démolir les valeurs traditionnelles. Au nom de leurs croyances et de leurs vérités appuyées sur les droits de l’homme, les grands principes humanitaires et du vivre-ensemble ; de la lutte contre toutes les discriminations et de la certitude que les gens s’aimeront spontanément surtout si on leur force un peu la main. Ceux qui ne croient pas à ce prétendu progrès étant des extrémistes voire des odieux conservateurs sectaires.

 Nos impôts servent donc à combattre ce qui a fait la France. Les juges qui ont un pouvoir d’appréciation pourraient admettre que l’intérêt général c’est aussi ou d’abord la protection de la collectivité tant physiquement que matériellement et spirituellement, ou l’art de vivre dans des paysages choisis et sculptés par nos prédécesseurs. Avec de l’autorité.  L’avocat que je suis se réjouit qu’on défende les libertés individuelles et que les pouvoirs publics soient contrôlés et ne deviennent pas Léviathan. Mais dans le contexte actuel le citoyen que j’incarne prône la préférence pour le collectif. Il va falloir bouger le curseur et trouver un nouvel équilibre entre l’individu et les citoyens.

Il faut être sans pitié judiciaire pour ceux et celles qui prêchent la haine sinon l’élimination physique sur notre territoire ; qui sont des agents de l ’étranger et nous minent ; qui veulent transformer la France à leurs profits. Tout le monde doit s’y mettre : les tribunaux et les média aussi. L’Etat doit être ferme avec l’aide des parlementaires qui doivent voter des armes légales plus adaptées. Et suivre le peuple qui est le souverain. Sinon on périra de nos principes. L’état de droit n’est pas un état de faiblesse et de tolérance illimitée.    

samedi 1 février 2025

Sentiment ou sentimentalisme

 

                                     Sentiment ou sentimentalisme

                     Par Christian Fremaux avocat honoraire

Que demande le peuple aux politiques ?

D’avoir un gros cœur, de préférer l’émotion, de ne pas voir ce que même un non -voyant perçoit et de ne pas prendre les décisions qui s’imposent au -delà des tactiques électorales ?  Le peuple ne vit-il que d’empathie et de fraternité en plus de ses besoins matériels ?

Ou d’agir, la raison en tête avec l’autorité et de la bienveillance ferme tous azimuts.

Le sentimentalisme est une approche philosophique selon laquelle nos états affectifs jouent un rôle décisif dans nos jugements de valeur. En politique contemporaine on réagit d’abord, on anathème puis on réfléchit mais on ne change pas d’avis pour ne pas paraitre être des girouettes. Et réserver l’avenir en changeant de discours.

On parle désormais de la formule employée par le premier ministre qui a dit qu’il avait le sentiment qu’on approchait d’une « submersion migratoire. » Immédiatement les grands généreux, les donneurs de leçons ou les intéressés pour les élections futures surjouent le drame et l’indignité. Mais pour qui ? A priori pas pour tous les citoyens qui ont aussi une âme. Et sont inquiets. C’est humain.  

Mme Tondelier souvent excessive pour EELV néanmoins minoritaire a sommé M. Bayrou de s’excuser et de retirer sa formule. Sinon il y aura censure. La menace émane d’irresponsables et elle est scandaleuse. Car ce sont les contribuables qui paient les errements et les gesticulations de leurs élus. La censure de M. Barnier a coûté plusieurs milliards aux français. En vain. Et il faudrait recommencer ? Halte à la démagogie et au chantage. On attend un budget conforme aux nécessités, juste et efficace. Sans coupables présumés. Ni perdants par état.   

On en est toujours à craindre de nommer les choses, ce qui n’est pas nouveau. Le philosophe J.J. Rousseau écartait les faits qui ne collaient pas avec ses réflexions. Robespierre coupait les têtes. Dans certains pays les dirigeants vous font disparaitre. Si on ne parle de rien, si on nie les faits de société ou divers on sera dans le mur encore plus rapidement que prévu. On a le droit de défendre nos intérêts et de vouloir rester qui nous sommes. Avec nos valeurs républicaines.  Ce qui n’exclut pas l’ouverture mais celle qu’on choisit. C’est de la souveraineté.   

M. Bayrou a évoqué un « sentiment » ce qui est une formule édulcorée pour décrire la situation dans laquelle vivent des électeurs (de gauche aussi) dans certains quartiers. C’est un fait il suffit de suivre l’actualité, de comparer, et de savoir que toutes les nations dans le monde sont confrontées aux mêmes défis. On diverge sur les solutions. Un sentiment n’est pas une action. Il permet de vérifier la réalité et l’étendue du problème et d’imaginer avec quels moyens y faire face. Ce n’est en rien la trahison des grandes valeurs de notre civilisation. A défaut de poser la question et d’en discuter arguments contre arguments on n’avance pas.  

Et si M. Macron tenait sa promesse de saisir les citoyens sur un ou des sujets qui défraient la chronique et créent un climat délétère ? La ou les questions est le support technique pour se mettre d’accord sur les causes et trouver des solutions consensuelles pour les effets. On appelle cela de la démocratie et non de la politique politicienne ou un plébiscite même si l’auteur de l’interrogation est la cible. 

On avait déjà le débat sur le sentiment ou non d’insécurité. On a un peu évolué car les statistiques sont formelles, les sondages confirmatifs et les drames sont vécus quasiment en direct. Naturellement on évoque un minimum les victimes survivantes pour s’intéresser surtout au sort des coupables et de leurs détentions dites inhumaines.

Personnellement j’ai plus que le sentiment que la violence est débridée et qu’il faut sévir fortement ce qui n’est pas incompatible avec de l’humanisme. Qu’il faut revoir le statut judiciaire des mineurs et leurs réinsertions outre la punition pour ceux qui sont « récupérables ». Que selon des théories qui n’ont plus cours la prison est l’exception même pour des délinquants avérés. Que les responsables des trafics ne craignent pas grand-chose car ils sont organisés à l’extérieur et ont de gros moyens avec une main d’œuvre jeune à bas coût. J’attends de voir l’effet concret des annonces que j’approuve des ministres de l’intérieur et de la justice aidés par la diplomatie, chacun étant dans son couloir avec ses contraintes, mais se rejoignant sur les objectifs.

M. Faure et Mme écologiste ont demandé au premier ministre « Rodrigue as-tu du cœur ? ». M. Bayrou, François de son prénom, qui ne manque pas de lettres mais n’a pas les yeux de Chimène pour la secrétaire nationale des verts et négocie avec le social -démocrate allié à LFI, pourrait répondre en rétropédalant que « le cœur a ses raisons que la raison ne connait pas ». Mais surtout de la raison. Il est préférable d’être pragmatique car les problèmes ne sont pas du sentiment : ils sont têtus, très concrets.

M. Bayrou doit persister et signer car selon ce que j’ai entendu les binationaux ne sont pas en cause. Ils sont des citoyens égaux aux autres. Les réfugiés ne sont pas concernés, nos principes demeurent. Ceux qui travaillent et paient impôts et taxes ne sont pas visés. Ils ont vocation à être régularisés après examen de leurs cas personnels d’autant plus que des patrons ont besoin d’eux. J’ai l’impression diffuse que la gauche qui se vante d’avoir obtenu des reculades contre une non-censure -ce qui ne règle pas à terme nos déficits et notre dette abyssale- craint que les partenaires sociaux trouvent une solution pour les retraites. Ce qui déconsidérerait un peu plus la classe politique. Il faut un contre feu !

A la place de submersion parlons de débordements ou d’inondations mais pas de même nature que celles que vivent malheureusement actuellement des désespérés.  Ou naufrage annoncé puisque sur le bateau France il y a des passagers clandestins. En nombre croissant. Sans billets ni identités. Avec un capitaine qui hésite sur le cap à suivre.  

Est-ce être extrémiste que de constater que le sentiment ne remplace pas les actes et les preuves d’amour. Et que le sentimentalisme politique conduit à une impasse ?

mercredi 22 janvier 2025

Pour l’empirisme et le cumul des mandats

 

                 Pour l’empirisme et le cumul des mandats

                      Par Christian Fremaux avocat honoraire

Notre ancien Haut – commissaire au plan devenu premier ministre vient de déclarer à propos de l’élection de M. Trump et de ses discours tonitruants : « si on ne fait rien on va être dominés, écrasés ». L’éléphant républicain américain va aplatir comme une crêpe -spécialité bretonne -la colombe tricolore française et l’Europe en passant. Il va y avoir un effet de souffle mais je ne sais pas dans quel sens va siffler le vent. M. Bayrou a naturellement raison et il faudrait sortir au plus vite de nos blocages idéologiques et lancer des projets concrets car personne ne détient la vérité. Et n’a la solution miracle ou le monopole du progrès surtout pour les conditions de vie.

 On promet tout, des agriculteurs aux écologistes, des salariés aux patrons, des citoyens aux maires, mais rien n’avance. La solution facile de taxer à tout va sans réduire ce qui est inutile et improductif est illusoire. La classe moyenne qui subit est dans le viseur. Une entreprise a besoin d’actionnaires pour vivre, embaucher et investir. Ce qui ne veut pas dire que l’on sacrifie les travailleurs qui produisent aussi de la richesse, les pauvres et les nécessiteux victimes de la vie. Ni la violence institutionnelle, ni la taille à la serpette ou à la tronçonneuse ne sont à juste titre admis chez nous. Ni la brutalité ou l’imagination sans limites ni morale. Comme celle de M. Musk qui a réussi dans son domaine, soyons franc. On aurait besoin de telles personnalités en France. Mais on déteste les riches et notre culture, nos valeurs, nos habitudes ne lui faciliteraient pas la vie surtout sans majorité politique. Et sans un président mirobolant qui délivre les décrets à la chaine.   

La fin ne justifie pas tous les moyens. Mais il faut commencer à agir vigoureusement au-delà de nos tabous. Et des ambitions de certains et certaines, qui nous fatiguent.  Ce serait aussi bien que l’on sorte de la sinistrose et que l’on ait un peu de joie.

 Puisque on a échoué depuis des décennies et qu’on est guetté en devenant le mauvais élève de la classe, il faut changer de méthode. Ce sont peut- être les rodomontades de M. Trump dont on va attendre les résultats qui vont nous encourager ?  Seul le pragmatisme vaut en ce moment et pour l’avenir il fait donner des perspectives à ceux qui travaillent et vont assumer le poids de la dette par moins de dépenses publiques et plus de travail. Ce qui permet la redistribution et la solidarité par l’action de l’Etat qui trouve l’argent au fond des poches de ceux qui ne sont responsables de rien, les retraités dits aisés notamment. Sauf d’avoir l’insolence de vivre en ayant beaucoup cotisé pour leurs anciens. Le philosophe André Comte- Sponville âgé de 72 ans vient de dire : « Si, quand j’avais 20 ans on m’avait dit que 50 ans plus tard le principal problème des français serait l’âge de la retraite, cela m’aurait affligé ». On a besoin d’espoirs et d’enthousiasme. Et de valeurs pas seulement matérielles qui grandissent et rassurent.

En attendant de bonnes surprises engageons la réforme de l’Etat et revenons à ce qui marchait et qui ne coûte pas cher. Le progrès c’est aussi de fixer le futur de reconnaissance et de respect  des autres par le dialogue permanent. 

Je me réjouis que le premier ministre soit resté maire de Pau. Il cumule ainsi deux fonctions à plein temps, en ignorant la loi sur la durée maximale du travail. Il est au forfait jour comme on dit chez les cadres. C’est vrai qu’il n’a qu’un CDD d’usage et que celui-ci peut être interrompu du jour au lendemain. Sans préavis. Sur le terrain il rencontre les gens et leur parle : il doit donc savoir ce qu’ils veulent. Il n’y a plus qu’à faire.

Je suis pour le cumul des mandats. Avec réalisme car je l’ai vécu comme élu municipal.  

Un député qui s’amuse avec la censure comme actuellement à l’Assemblée nationale devrait avoir obligatoirement un mandat local et vivre là où il est élu. A bas les parachutages. Il verrait les conséquences directes des lois qu’il fabrique ou de leurs inconséquences. Les sénateurs sont choisis par les élus locaux eux- mêmes au contact des administrés. Ils sont informés. Que le Sénat reste l’assemblée des sages.

On a créé des grandes régions dont on ne connait pas bien les compétences ni en quoi elles bénéficient au citoyen. On a voulu éviter l’édification de baronnies à l’ancienne mais on a construit d’immenses agglomérations et des métropoles ce qui est pareil. Le citoyen ne contrôle rien.  On a supprimé le conseiller général du canton qui vivait parmi les citoyens devenus connaissances amicales, pour regrouper plusieurs territoires. Le canton est devenu XXL. L’élu court mais ne s’arrête plus. Pourtant le département avec le préfet qui incarne le pouvoir central est un échelon pertinent si on lui donne les moyens et si l’Etat ne se décharge pas sur lui de fonctions qu’il devrait exercer. On jure depuis des années de réformer le millefeuille administratif : chiche. On veut de la proximité et on éloigne tous les services du quidam. Notre haute administration seule maintient la nation puisque les politiques se querellent et plombent le pays.     

Le domaine privé doit prendre sa part des réformes. Public ou non ce que veut le citoyen c’est un service. Et de l’écoute.  Il n’est pas interdit de confier à des entreprises sinon à des associations structurées des missions de service public et je ne suis pas sûr que le maintien d’une fonction publique à vie et pléthorique parfois, dans les collectivités locales aussi, soit la meilleure solution. Sauf pour les exigences régaliennes cela va de soi. M. Claude Allègre qui vient de décéder voulait dégraisser le mammouth. C’est lui qui a été vidé de sa substance. Et de son poste. Rien n’est facile surtout de modifier les acquis !

Nicolas Sarkozy avait inventé le conseiller territorial. M. Hollande l’a effacé. Et le référendum d’initiative partagée n’est pas utilisé. Le maire attend fébrilement la dotation d’Etat pour bâtir son budget. A défaut il ne peut rien faire. Notre décentralisation est un leurre. 

Au lieu de tirer au sort de prétendus sachants utilisons les moyens prévus par la Constitution. A condition que le président du conseil constitutionnel ne dise pas par avance qu’un référendum sur tel sujet est irrecevable. C’est au peuple de décider. 

En un mot multiplions les actions avec empirisme. L’immobilisme fait reculer.      

 

lundi 13 janvier 2025

Désolation

 

                                                                Désolation

                                   Par Christian Fremaux avocat honoraire

Je ne méprise personne même ceux qui ne m’aiment pas ou mes adversaires et concurrents. Je ne parle pas d’ennemis internes dans une démocratie. J’essaie de convaincre en défendant fermement mes opinions. Je crois en la république qui débat et en ses valeurs. Pas en la violence ou à la pression de la rue, ou aux coups de gueule et aux ricanements morbides d’individus qui prêchent la haine de l’autre.   

Je ne suis rien et ne représente que moi, mais je m’exprime comme tous les inconnus qui ont festoyé place de la République à Paris et ailleurs à l’annonce de la mort de JM. LE PEN pour qui je n’ai jamais voté. Ils ont tourné un remake de danse avec les loups sauf que Kevin Costner avait un message de paix. Il est effectivement plus facile et sans risque de s’attaquer à un individu qui ne peut plus se défendre. Quel héroïsme de la part des échevelés mentaux notamment de ceux et celles qui sont étudiants de grandes écoles et veulent prendre le pouvoir et gouverner. Le pape François devrait leur dire : « père pardonne leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ». JM. LE PEN n’était que le père de Marine ce qui ramène le propos à de justes proportions. Mais comme ils sont contre les religions sauf celle qu’ils considèrent comme stigmatisée sur notre sol et en dehors ils se contentent d’un feu de joie intellectuelle. Ils m’inquiètent car si l’avenir est fait d’intolérance, de liberté d’expression orientée et d’anathèmes, où se situera l’union des citoyens indispensable pour que la société s’apaise et progresse ?  

Après presque 50 ans de barreau, d’élu local et autres responsabilités publiques, j’ai une petite expérience de la nature humaine. Je ne partage pas l’optimisme de JJ. Rousseau. Je préfère Voltaire. Et comme l’a dit Socrate je sais que je ne sais rien. J’ai évidemment été jeune et confronté au principe de réalité tout en conservant mes convictions. Comme avocat j’ai perdu autant ou un peu moins soyons prétentieux de jugements que j’en aie gagné. J’en ai voulu aux juges et aux confrères adverses mais pas au point de les nier ou vouloir leurs disparitions. J’aurai dû être meilleur. En politique j’ai souvent choisi le mauvais cheval. Certains que j’ai soutenu font face aux juges correctionnels actuellement. Mais ils sont innocents ! Je me suis trompé et j’ai commis des erreurs que je me suis efforcé de réparer au plus vite.  C’est la vie et c’est pourquoi il ne faut pas être excessif. On doit avoir l’esprit ouvert.

 Les danseurs de ballet anti -le mort honni ont pris le roman noir de Boris Vian « j’irai cracher sur vos tombes » au pied de la lettre. Ils ont été indignes. Même pas méchants à la manière satirique de Charlie Hebdo martyrisé. Ils ont montré un visage sarcastique inadmissible qui fait douter de l’homme et d’une minorité sans foi ni loi.  Ils ont déshonoré leurs causes et j’espère qu’il y aura un effet contre -productif. Ils n’ont plus de diable vivant qui les faisait exister. Peut-être vont- ils trouver un Dieu du bien sélectif selon leurs critères ? 

Ce n’est pas pour autant que l’on approuve ce que JM. LE PEN a dit ou écrit comme ses saillies inacceptables et des prises de position révoltantes. Il était son propre défenseur provocateur avec talent oral et culture. Et abus odieux dans le cynisme et l’interprétation de l’histoire. Les tribunaux ont tranché. Mais l’homme est rarement tout blanc ou tout noir. M.LE PEN n’a jamais gouverné. On ne peut donc lui reprocher des décisions concrètes qui auraient nui à tel ou tel et créé un régime autoritaire sinon dictatorial. M. François Mitterrand avant d’être lui -même président avec les communistes comme alliés, avait dénoncé le coup d’Etat permanent du Général de Gaulle. Était -ce juste ?  

Il ne faut pas avoir la mémoire sélective. Si à juste titre on dénonce les nazis et la collaboration de Pétain, il ne faut pas oublier Trotski et Staline- et leurs compagnons de route français- avec les millions de mort plus les goulags. Ni Mao Tse- Toung ou Pol Pot.  Pour l’Algérie on doit dénoncer ce que M. LE PEN a ou aurait fait de mal, dans le contexte de la guerre avec les atrocités des fellaghas, le sort des harkis et des pieds noirs, puis dans les années 1990 la guerre civile interne dont l’écrivain Boualem Sansal est actuellement victime. Outre le terrorisme. Et une rancune inextinguible contre la France.

Il faut réfléchir avant de faire la fête. D’autant plus qu’au -delà des hommes les idées restent et peuvent s’aggraver si on les exagère. Ou changer de camp. Ainsi en matière d’antisémitisme l’extrême gauche n’est pas avare.

Sur les champs de bataille, on enterre les morts et parfois on leur rend hommage.  C’est simplement de l’humanité.  L’écrivain BHL a écrit « un grand cadavre à la renverse » pour constater la quasi-disparition du parti socialiste donc de forces républicaines sociales démocrates qui essaient aujourd’hui de survivre. On n’a pas piétiné le moribond.

Ne faisons pas un martyr d’un simple homme politique. Il fut patriote on dirait souverainiste aujourd’hui. Comme un nombre croissant de citoyens de gauche comme de droite. Est-ce une tare ? Faut-il pour autant s’essuyer les pieds sur ce corps électoral sincère ou lui donner du cannabis pour qu’il rêve de chimères ? Ce serait petit, mesquin et vain. L’outrance n’efface rien. Les faits sont têtus. Les préoccupations de M. LE PEN sont au centre des débats contemporains.  

La tolérance des tangotistes est égale à zéro. Ils ignorent ce que veut dire débat démocratique, opinions dissidentes et pourtant ils fréquentent ceux qui mettent le bazar à l’assemblée en contestant tout et son contraire. La fraternité leur est un mot inconnu. Ils pensent détenir la vérité quitte à l’imposer de force et à éliminer ceux qui résistent. Ou poser des cibles.  Je les plains. Ils ne sont pas l’avant- garde éclairée de quoi que ce soit. Ils ont fermé les lumières en révélant leurs vrais caractères.

Ils nuisent à la France qui veut rester ce qu’elle est : protectrice de l’humanisme et des valeurs universelles et modèle de rapprochement entre les individus et les peuples. Mais pas avec eux car on doit tendre vers la grandeur. Que les vivants fassent au mieux.  

Pierre Desproges a déclaré : " quand Brassens est mort j’ai pleuré comme un môme. Avec [la mort de] Tino Rossi j’ai repris deux fois des nouilles… ". Est-on autorisé encore à rire ? Et blâmer ceux qui n’ont aucune limite dans l’abjection.    

mercredi 8 janvier 2025

On continue comme avant

 

                                      On continue comme avant

                Par Christian Fremaux avocat honoraire

Ce qui est curieux c’est que l’on ne tire jamais de leçons de ce qui s’est passé. On ne change pas une équipe qui perd ou a été désavouée. On emploie toujours les mêmes slogans ou ficelles. On reste figé sur ses positions et certitudes. L’immobilisme a de l’avenir.

L’année 2025 promet d’être de toute beauté dans tous les domaines où rien ne fonctionne on le sait et on le dénonce. Sans changer de ligne. On coule mais fièrement.  En matière de Justice on persiste. C’est un monument en péril unanimement considéré comme tel tant dans les moyens matériels qu’humains et je ne parle pas de son éventuelle dépendance au pouvoir exécutif. Sinon idéologique.  Mais on s’acharne à la saisir et à lui demander de régler tous les conflits, de faire de la morale en décidant du bien et du mal, et de jouer à monsieur-ou madame je fais attention à la parité- propre. Les vieilles affaires qui viennent à l’audience pénale permettent de relancer la machine à buzz et détourner le regard des citoyens de la triste réalité politique. On les invite au spectacle.

La société veut du sang notamment pour toutes celles et ceux qui sont des personnalités de la vie publique en général. Au nom de l’égalité et de ce qui est juste. Il n’y a pas de plus égaux que d’autres quelles que soient les illustres fonctions qu’ils ont occupées. On ne supporte plus les comportements du passé, ce qui est normal. La société est devenue intolérante sinon puritaine ou sectaire dans le domaine privé et par assimilation à l’expression d’opinions divergentes. On ne rit plus de tout. Il ne fait pas bon de n’être pas d’accord avec une minorité agissante dite progressiste. Comme si un camp avait le monopole du progrès qui ne peut intervenir que si on est en paix avec le passé dont on a compris les succès comme les échecs. Le récalcitrant devient alors forcément d’extrême droite -notion fourre -tout non définie mais menaçante par principe-ce qui permet d’évacuer le fond du débat et d’exclure des millions de citoyens qui ont mal voté et devraient être rééduqués.

 On veut désormais quasiment interdire, déconstruire, invisibiliser ce qui ne va pas dans le bon sens. Mais on ne sait pas qui est légitime pour choisir le bon sens. Je ne connais modestement pour ma part que les débats publics qui offrent des solutions puis des choix validés par le suffrage des électeurs.  Et qui ne doivent pas être remis en cause dès le lendemain par ceux qui ont été battus. La stabilité est nécessaire. Cela fait partie de la sécurité personnelle et d’apaisement pour les années à suivre. On ne peut constamment changer de chemin ou revenir à d’autres méthodes. C’est anxiogène. 

La rentrée 2025 s’annonce alléchante. Je ne parle pas des jeux du cirque qui ont lieu à l’Assemblée nationale. Tel parti avec des alliés improbables baisse le pouce et le César premier ministre pour un instant part en exil. Comme le chantait Jacques Brel : « au suivant ». Je n ’évoque pas non plus M. Sarkozy qui avec son bracelet électronique-mais lui échappe à toute OQTF-va devoir s’expliquer sur de prétendues turpitudes Libyennes avec ses amis anciens ministres. Que de beau monde au tribunal d’infâmie !  Comme si le dictateur Kadhafi décédé et ses complices en fuite devaient être crus sur paroles !  Des journalistes qui n’ont jamais lu le dossier ont déjà conclu que M. Sarkozy ne pouvait qu’être coupable ! Mais les procureurs qui soutiennent l’accusation devront d’abord faire la preuve des infractions et personne ne connait les moyens de droit et de fait de la défense. Rappelons qu’il ne s’agit pas de condamner ou de relaxer un individu pour ce qu’il représente et parce qu’on le déteste ou qu’on l’admire. Mais de décider sur éléments matériels et intentionnels s’il est coupable ou innocent. La justice ne fait pas la morale, ne délimite pas le bien et le mal et ne choisit pas un comportement idéal selon des critères qui lui appartiendraient. Elle applique la loi existante. Le feuilleton judiciaire de M. Sarkozy se prolonge. A guichets fermés. Contre son gré. 

L’ancien ministre de la Justice M. Dupond-Moretti a choisi volontairement de refaire du théâtre. C’est honnête et franc, certains considérant que l’avocat brillant a été un Garde des Sceaux controversé ne faisant pas l’unanimité. Mais qui peut se vanter de la faire dans la conjoncture ?  L’acteur va expliquer sa vérité et pourquoi « j’ai dit oui » à M.  Macron. On est impatient de savoir ce qui est confidentiel voire secret et ce qui pousse une personnalité reconnue et talentueuse à sortir de sa zone de confort pour affronter un milieu qui n’est pas le sien. Et répondre aux critiques de l’opinion publique qui, on le sait, ne doit jamais pénétrer dans un prétoire. Mais dans la politique, oui ! Les planches vont brûler. La médiatisation aussi.  

Ce n’est pas aux médias de décider qui est exemplaire et victime en construisant des symboles ou des icônes planétaires.  Notamment quand il s’agit de faits avérés, douloureux, scandaleux mais qui ne concernent pas toute une population masculine. On ne généralise pas le mal. Par ailleurs en minimisant d’autres faits tout aussi dramatiques et exceptionnels, en trouvant des excuses culturelles, sociales ou autres pour ne pas faire d’amalgames.  Un crime reste un crime avec des victimes à vie. Certaines le font savoir à la terre entière, d’autres subissent leurs douleurs dans le silence et la discrétion. Tous sont dignes d’éloges et de compassion. Aucune souffrance est plus remarquable qu’une autre. Quelle que soit la cause juste qui la motive. 

La Justice ne doit pas être instrumentalisée. Il y a un déficit de confiance avec les juges soit qu’on les trouve laxistes avec les voyous mineurs ou adultes ou au contraire excessifs avec certains qui ont commis une fois une erreur.  Soit parce qu’on doute de leurs indépendances notamment pour les juges syndiqués et parce que les délais de jugement sont trop longs et que les magistrats n’ont pas les moyens d’absorber les contentieux de masse ou les litiges personnels ce qui exaspère le citoyen. Mais on a le résultat de son vote.  Les juges se débrouillent avec les armes légales que les parlementaires votent et avec les moyens que leur budget leur permet.

Dans un état de droit les juges sont fondamentaux. Qu’on les laisse libres de trancher les litiges y compris pour les politiques qui auront ensuite à se confronter au verdict de leurs électeurs. Continuons donc le combat pour le droit et l’équité dans les rapports humains et faisons mentir La Fontaine qui affirmait que « selon que vous serez puissant ou misérable les jugements de cour vous rendront blanc ou noir ».