mercredi 27 août 2025

On débloque

 

                                                    On débloque

                 Par Christian Fremaux avocat honoraire

Ce qu’il y a de positif avec toutes les péripéties institutionnelles depuis des années c’est que les citoyens sont devenus des spécialistes du droit constitutionnel, ce qui ne met pas du beurre dans les épinards mais permet de ne pas mourir idiot. Mais de faim pour les plus démunis. 

Nos étudiants qui se plaignent n’ont plus besoin d’aller trainer leur spleen sur les bancs de la faculté des sciences juridiques. Il leur suffit d’écouter les débats publics, d’ailleurs affligeants. Nos élites se surpassent dans l’indigence intellectuelle et la démagogie.

On sait tout et son contraire selon le parti pris des intervenants rarement objectifs et pédagogues sur la dissolution, le fonctionnement du parlement avec ses abus pour ne pas débattre, l’article vedette à savoir le 49.3, et les pouvoirs du chef de l’Etat que M. Mélenchon en jubilant voudrait destituer, pas moins. Ou que M. Macron démissionne en reconnaissant ses fautes. Et si on attendait le résultat des municipales proches ?  

S’y ajoute désormais l’article 49 mais alinéa premier puisque le premier ministre actuel va poser le 8 septembre la question de confiance. Mais uniquement sur le principe : sommes-nous d’accord ou non sur le diagnostic à savoir le grave surendettement de la France ? Ce qui ne peut durer sans agir fortement mais justement.  Pour les mesures à prendre, on verra ensuite. A entendre les réactions je crains que M. Bayrou ait pris un billet de sortie et que les réformes qu’il propose d’améliorer, amender, substituer par d’autres ce qui est démocratique, passent à la trappe. Alors que certaines sont intéressantes. Le débat focalisé sur les jours fériés est surréaliste. Des jeunes veulent travailler et être payés double. D’autres salariés veulent être rémunérés et ne rien perdre. C’est juste. On veut jeter l’eau du bain avec le maitre-nageur.  Mais on n’est pas à l’abri d’une bonne surprise, après discussions en coulisse et compromis divers. Député, c’est avoir un job. Payé pendant les jours fériés et les vacances.  

Pour le budget tout le monde partage plus ou moins la nécessité d’innover, vite.  Mais si les économies sont nécessaires elles doivent toucher les autres, pas soi. C’est humain. Sans oublier les symboles : faire payer les riches ; éradiquer le paupérisme en combattant le libéralisme ; accueillir sans conditions ceux qui sont persécutés ou dans le besoin ; ne pas avoir de relations avec les Etats agresseurs ou ne correspondant pas à la doxa morale ...Chacun a ses croyances. Est- ce possible de bâtir un budget idéal qui satisfait tout le monde ?  Certains ne veulent pas et préfèrent le chaos. Tout « bordéliser » devient une politique publique pour prétendre aboutir à une démocratie exemplaire, égalitaire, aimante, sans insécurité, dans un vivre ensemble absolu. Avec la justice fiscale et sociale, concept creux. Sans commentaire. Chacun appréciera.

 Il est inutile de se demander si tout ceci est bien raisonnable et si les Français approuvent, eux qu’on n’interroge pas notamment par référendum, disposition participative prévue par la constitution. Les conventions citoyennes sont comme le canada- dry.  Et nos parlementaires de tous bords n’ont pas la science infuse. Ils sont responsables des lois qu’ils ont votées et de leurs choix, même si l’Etat a assuré la protection des citoyens. Ce qui est simplement son rôle. Comme celui de tenir les cordons de la bourse et ne pas dire oui à tout, en ayant peur des réactions de groupes de pression sinon de communautés. La nation n’est pas l’addition des intérêts particuliers.  

  Les jeux politiciens fatiguent. Attention au coup de balai général et imprévu, le fameux « dégage ». On sait ce qu’on a, mais pas ce qui pourrait advenir. Ce qui ne veut pas dire que des réformes drastiques ne sont pas urgentes. L’immobilisme étouffe et crée des injustices et des frustations mais renverser la table n’apporte rien de concret. N’est pas Schumpeter et sa destruction créatrice, qui veut.

Le 10 septembre certains ont décidé de bloquer le pays. Des syndicats qui aiment bien la grève générale - principe constitutionnel bien connu - suivront mais on ne sait pas quel agrégat existe, qui est responsable, les objectifs, les moyens, les coupables...Il n’y aura peut-être plus de premier ministre et on repartira pour un tour d’incertitudes, de discours fleuves, de menaces, de conflits, donc d’arrêt. La gauche fracturée soutient à tort qu’elle a gagné les dernières élections : elle veut le poste de premier ministre, mais pour quelle personnalité en particulier ? Avec quel programme de redressement ? La rhétorique ne remplace pas le bon sens et le partage réfléchi en conservant non pas les droits acquis qui sont mortels, mais les efforts accomplis pendant des années.  

  M. Macron a dit qu’il ne prononcerait pas une nouvelle dissolution au vu de l’absence de clarification de celle de l’année précédente. Mais il peut changer d’avis et une nouvelle élection législative rendre le même résultat, voire pire.

La France est en train de se noyer et des âmes désintéressées lui appuient sur la tête.Je me demande si collectivement on ne débloque pas en perdant le sens des réalités.  Aucune commune, aucune entreprise ne peuvent se permettre de gouverner ainsi. Chaque famille a un budget pensé, rationalisé, contrôlé, demandant des efforts. Parfois des sacrifices et des décisions douloureuses.  

On ne bâtit pas un budget national avec des boucs émissaires, des plus privilégiés que d’autres, ou des responsables dénoncés pour leurs incompétences sinon leurs injustices. Il faut proposer de l’alternatif concret aux mesures critiquées, un remède qui n’est pas plus grave que le mal. Et en n’imposant pas les mêmes règles pour tous. C’est du masochisme de tout rejeter sans solutions faisables, ni souplesse de statut.

Il faut travailler plus, notamment les jeunes et les seniors. C’est du domaine des partenaires sociaux qui ne doivent pas faire de l’idéologie. On doit protéger les plus fragiles notamment en matière de santé. Ce qui est de la solidarité. Et ne pas punir ceux qui ont cotisé leurs vies entières et n’ont rien volé aux actifs. On doit dépenser moins. L’Etat doit commencer par lui-même et dégraisser le mammouth en fixant le cap et les objectifs à atteindre. Et veiller sans faiblesse aux fonctions régaliennes. C’est de la politique.

Le contraire de bloquer c’est desserrer, ouvrir. Les esprits en particulier. Ordo ab chao.              

2 commentaires:

  1. Bravo. Toujours "fine lame."Analyses ciselées
    présentées avec humour.
    Mais..on arrive au dernier niveau du déclin :
    la "bordelisation".
    Certaines facs s'en sont sorties d 'autres non






    ncer les dents.






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  2. qui es-tu? merci de ton approbation. Christian.

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