Violence verbale versus violence
physique.
Par Christian Fremaux avocat
honoraire.
Des gentils jeunes militants s’auto- déclarant
pacifistes, anti-fa et anti -racistes détestant M. Zemmour ce qui n’est pas
encore interdit, se sont invités à son meeting de Villepinte pour le perturber.
Une bagarre a éclaté avec ceux qui étaient venus pour écouter le candidat qu’ils
le soutiennent ou veulent s’informer et voir la vedette des médias et de la
littérature en chair et en os. Il y a eu de la casse et des blessés
légers. La justice est saisie et la
polémique enfle. Le Ministre de la justice devant le Sénat a eu cette parole historique
familiale et touchante : « ma grand-mère me disait de commencer par ranger
ma chambre avant de ranger la rue ». Autrement dit M. Zemmour est victime
de n’avoir pas fait le ménage et de n’avoir pas assuré sa propre sécurité
puisqu’il a été agressé et que les spectateurs innocents aussi. On n’a pas
entendu des tonnerres d’indignations pour condamner cette attaque en règle à la
liberté d’expression. On verra ce que diront nos excellences si le toujours président
de la République mais en même temps candidat voit ses meetings chahutés ce que
je ne souhaite pas.
On en déduit
que le ministre met sur le même plan violence verbale et violence physique et
que les propos tenus s’ils sont considérés comme inacceptables et provocateurs
sont une excuse absolutoire pour ceux qui agissent. C’est une réflexion de
droit et morale que je ne partage pas. Chacun a sa conception subjective de ce qui
est mal ou non. La liberté de se rassembler en paix est fondamentale et protégée
dans une démocratie car on ne trie pas ce qui est acceptable et ce qui ne l’est
pas. Au nom de quelle légitimité pourrait-on séparer le bon grain de l’ivraie ?
Les citoyens sont assez avertis et responsables pour aller où ils veulent
et entendre tels propos plutôt que d’autres. Ils ne sont pas dupes et n’ont pas
besoin que des exaltés de tout bord souvent sans aucune expérience humaine,
professionnelle ou politique les guident et leur désignent où est le bonheur
avec la lumière qui l’incarne, en rejetant dans les ténèbres ceux qui ne
répondent pas à leur profil.
Notre
société est violente c’est un fait que le ministre a rappelé. Dont acte après
sa déclaration sur le sentiment d’insécurité. L’exercice du pouvoir est salutaire.
La violence est aussi dans les esprits. Les
prétendus éveillés ne veulent pas que certaines personnalités politiques, philosophes
ou penseurs voire penseuses interviennent dans des colloques, des conférences,
à l’université ou à Sciences-po. pourtant censés former intellectuellement et
civiquement ceux et celles qui prétendent vouloir diriger le pays dans
l’avenir. C’est consternant. Le débat
d’idées est rabougri et strictement encadré et délimité à ce que des minorités pensent
en éliminant tout ce qui les gêne, et contre lequel ils sont les muets du sérail
faute d’arguments motivés et objectifs. Ainsi au nom de leur liberté d’être
activiste, ils interdisent aux autres d’exister par le coup de poing s’il le
faut.
On
entretient la confusion pour savoir qui est l’agresseur -qui a pris des baffes
et des coups tout en en donnant pour se défendre selon lui - et l’agressé dont
on a troublé le meeting et ses militants qui ont le droit de se défendre. Seules
les âmes bien nées et charitables tendent l’autre joue quand elles prennent un
coup sur l’autre. Pour faire plaisir aux manifestants-par exemple des blacks
blocks sinon des brebis sur le sentier du bien- faudrait-il les accueillir avec
des roses en les laissant accomplir dans la joie et l’immobilisme leur mission
préméditée et organisée : détruire celui ou celle qu’ils n’aiment pas ?
On a connu
la violence de la lutte des classes, celle de l’Etat, l’exigence de se
lever contre le tyran, la résistance à des totalitarismes ou des
génocidaires. Mais notre démocratie
française ne mérite pas cette violence et que l’on place sur un pied d’égalité
comme semble le suggérer le ministre, la violence verbale -réelle ou
supposée- et la violence physique inacceptable quels qu’en soient les motifs. Un
ministre qui a naturellement le droit d’avoir ses opinions et de combattre tel ou
tel adversaire politique a le devoir de ne pas jeter de l’huile sur le feu, d’être
plus prudent dans ses remarques ou bons mots et « ne devrait pas dire ça », car sans le vouloir il encourage
les moins démocrates à agir et à passer à l’acte pensant qu’ils
seront compris sinon excusés car ils œuvrent pour le Bien. Avec les idées au
bout des doigts et par la force, cela peut déraper.
Comme avocat
de la gendarmerie j’étais partie civile devant la cour d’assises anti-terroriste
suite à l’assassinat du Préfet Erignac par le commando corse dont M.Yvan
Colonna. Celui-ci était assisté notamment par Eric Dupond-Moretti avocat. L’avocat-ministre
sait donc que l’on peut passer rapidement du monde des idées à la violence extrême
jusqu’à tuer.
Cette modeste
réflexion concerne tous les candidats celui ou celle pour qui on va voter et
ceux qu’on ne veut pas. La démocratie est la confrontation verbale par la raison,
sans utiliser les méthodes parfois de nervis ou d’haineux que l’on dénonce. Dans
un état de droit il faut savoir balayer devant sa porte me disaient mon
père et grand -père par ailleurs policiers de profession ceci expliquant peut-
être cela. Avant de donner des leçons réfléchissons et choisissons la tolérance
qui permet d’entendre tout y compris ce
que l’on rejette, même s’il n’y a pas de libertés pour les ennemis de la
liberté comme disaient certainement en Mai 68 les parents des militants pacifistes
d’aujourd’hui.