vendredi 10 décembre 2021

Violence verbale versus violence physique.

 

                      Violence verbale versus violence physique.

                    Par Christian Fremaux avocat honoraire.

 Des gentils jeunes militants s’auto- déclarant pacifistes, anti-fa et anti -racistes détestant M. Zemmour ce qui n’est pas encore interdit, se sont invités à son meeting de Villepinte pour le perturber. Une bagarre a éclaté avec ceux qui étaient venus pour écouter le candidat qu’ils le soutiennent ou veulent s’informer et voir la vedette des médias et de la littérature en chair et en os. Il y a eu de la casse et des blessés légers.  La justice est saisie et la polémique enfle. Le Ministre de la justice devant le Sénat a eu cette parole historique familiale et touchante : « ma grand-mère me disait de commencer par ranger ma chambre avant de ranger la rue ». Autrement dit M. Zemmour est victime de n’avoir pas fait le ménage et de n’avoir pas assuré sa propre sécurité puisqu’il a été agressé et que les spectateurs innocents aussi. On n’a pas entendu des tonnerres d’indignations pour condamner cette attaque en règle à la liberté d’expression. On verra ce que diront nos excellences si le toujours président de la République mais en même temps candidat voit ses meetings chahutés ce que je ne souhaite pas.

On en déduit que le ministre met sur le même plan violence verbale et violence physique et que les propos tenus s’ils sont considérés comme inacceptables et provocateurs sont une excuse absolutoire pour ceux qui agissent. C’est une réflexion de droit et morale que je ne partage pas. Chacun a sa conception subjective de ce qui est mal ou non. La liberté de se rassembler en paix est fondamentale et protégée dans une démocratie car on ne trie pas ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. Au nom de quelle légitimité pourrait-on séparer le bon grain de l’ivraie ? Les citoyens sont assez avertis et responsables pour aller où ils veulent et entendre tels propos plutôt que d’autres. Ils ne sont pas dupes et n’ont pas besoin que des exaltés de tout bord souvent sans aucune expérience humaine, professionnelle ou politique les guident et leur désignent où est le bonheur avec la lumière qui l’incarne, en rejetant dans les ténèbres ceux qui ne répondent pas à leur profil.

Notre société est violente c’est un fait que le ministre a rappelé. Dont acte après sa déclaration sur le sentiment d’insécurité. L’exercice du pouvoir est salutaire.  La violence est aussi dans les esprits. Les prétendus éveillés ne veulent pas que certaines personnalités politiques, philosophes ou penseurs voire penseuses interviennent dans des colloques, des conférences, à l’université ou à Sciences-po. pourtant censés former intellectuellement et civiquement ceux et celles qui prétendent vouloir diriger le pays dans l’avenir.  C’est consternant. Le débat d’idées est rabougri et strictement encadré et délimité à ce que des minorités pensent en éliminant tout ce qui les gêne, et contre lequel ils sont les muets du sérail faute d’arguments motivés et objectifs. Ainsi au nom de leur liberté d’être activiste, ils interdisent aux autres d’exister par le coup de poing s’il le faut.

On entretient la confusion pour savoir qui est l’agresseur -qui a pris des baffes et des coups tout en en donnant pour se défendre selon lui - et l’agressé dont on a troublé le meeting et ses militants qui ont le droit de se défendre. Seules les âmes bien nées et charitables tendent l’autre joue quand elles prennent un coup sur l’autre. Pour faire plaisir aux manifestants-par exemple des blacks blocks sinon des brebis sur le sentier du bien- faudrait-il les accueillir avec des roses en les laissant accomplir dans la joie et l’immobilisme leur mission préméditée et organisée : détruire celui ou celle qu’ils n’aiment pas ?

On a connu la violence de la lutte des classes, celle de l’Etat, l’exigence de se lever contre le tyran, la résistance à des totalitarismes ou des génocidaires.  Mais notre démocratie française ne mérite pas cette violence et que l’on place sur un pied d’égalité comme semble le suggérer le ministre, la violence verbale -réelle ou supposée- et la violence physique inacceptable quels qu’en soient les motifs. Un ministre qui a naturellement le droit d’avoir ses opinions et de combattre tel ou tel adversaire politique a le devoir de ne pas jeter de l’huile sur le feu, d’être plus prudent dans ses remarques ou bons mots et « ne devrait pas dire  ça », car sans le vouloir il encourage les moins démocrates à agir et à passer à l’acte pensant qu’ils seront compris sinon excusés car ils œuvrent pour le Bien. Avec les idées au bout des doigts et par la force, cela peut déraper.

Comme avocat de la gendarmerie j’étais partie civile devant la cour d’assises anti-terroriste suite à l’assassinat du Préfet Erignac par le commando corse dont M.Yvan Colonna. Celui-ci était assisté notamment par Eric Dupond-Moretti avocat. L’avocat-ministre sait donc que l’on peut passer rapidement du monde des idées à la violence extrême jusqu’à tuer.

Cette modeste réflexion concerne tous les candidats celui ou celle pour qui on va voter et ceux qu’on ne veut pas. La démocratie est la confrontation verbale par la raison, sans utiliser les méthodes parfois de nervis ou d’haineux que l’on dénonce. Dans un état de droit il faut savoir balayer devant sa porte me disaient mon père et grand -père par ailleurs policiers de profession ceci expliquant peut- être cela. Avant de donner des leçons réfléchissons et choisissons la tolérance  qui permet d’entendre tout y compris ce que l’on rejette, même s’il n’y a pas de libertés pour les ennemis de la liberté comme disaient certainement en Mai 68 les parents des militants pacifistes d’aujourd’hui.  

      

mardi 7 décembre 2021

Bonne fête Paulette

 

                        Bonne fête Paulette.

                       Par Christian Fremaux avocat honoraire.

On est dans une telle grisaille pas seulement climatique avec la plupart des gens énervés, indignés et en proie à l’émotion nouveau paradigme pour tout qui prend une ampleur démesurée, sans recul, sans indulgence, sans humour ni respect, que l’on se demande si ce n’est pas notre fête permanente, avant d’aborder celles de fin d’année et du 1er janvier 2022 dont on espère beaucoup parfois pour des raisons opposées. Comme si la terre allait cesser de tourner quel que soit le ou la candidate élu (e) à notre présidentielle. Il faudra bien continuer à faire des efforts collectifs et le virus ne disparaitra pas en étant mort de joie. La situation me rappelle le sketch de Guy Bedos qui souhaite une bonne fête à sa femme Paulette qu’il déteste. Peut-on rire ou sourire de tout ce qui est excessif ?

On peut tout désirer ainsi que son contraire. A 13 ans Victor Hugo déclarait vouloir être Chateaubriand ou rien. Malgré ses contorsions politiques le poète - écrivain a réussi.  L’âne de Buridan regardait à distance égale un seau d’eau et un seau d’avoine. Pétrifié il ne savait que choisir : il est mort de soif et de faim. Le en même temps peut conduire à l’immobilisme voire au vide surtout si l’opposition ne propose rien de percutant pouvant rendre confiance aux électeurs. Des personnalités ont la répartie féroce mais en 2021 on use plus de violence et d’outrance verbales que d’esprit. G. Clémenceau qui assistait aux obsèques de Félix Faure (décédé avec « sa connaissance ») a dit à propos de l’ancien président : « il est retourné au néant, il a dû se sentir chez lui ». On aimerait rire par nos temps plutôt que de se désoler et de ne voir que le verre à moitié vide. Comparons-nous avec la majorité des Etats et des peuples dans le monde à feu et à sang.   

Chacun imagine qu’il détient la vérité et que l’autre est un ennemi qui va l’empêcher d’exercer ses droits, avec ses libertés individuelles et faire ce qu’il veut peu important le collectif. On n’évoque jamais la Nation et pour les plus courageux la France avec les devoirs sauf pour dénoncer le voisin qui ne les respecte pas. Il faut de temps en temps se regarder dans le miroir et s’interroger : fais-je bien dans mon intérêt certes mais aussi dans l’intérêt général ? Gavroche chantait « je suis tombé par terre c’est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau c’est la faute à Rousseau ». Voltaire nous manque pour nous apprendre la tolérance. J.J. Rousseau qui écartait les faits pour raisonner dans l’absolu et a abandonné ses enfants a écrit l’Emile ou de l’éducation (morale). L’école doit transmettre des connaissances et la famille se charger de l’éducation, républicaine bien sûr. Tout est possible.

 Malgré les mesures prises pour lutter contre les inégalités, la société est devenue une lutte d’égoïsmes, d’egos surdimensionnés, de discriminés réels ou supposés et de victimes y compris les héritiers de ceux qui ont souffert dans un autre temps avec d’autres valeurs. On ne bâtit pas un avenir commun en regardant sans arrêt dans le rétroviseur. Une opinion est parfois un délit et la justice est saisie pour départager les avis, et fixer les limites de la liberté d’expression. On se plaint des juges mais on leur demande de régler ce que la loi n’a pas prévu, et d’être le souverain de paix des soubresauts de la société ou d’être laxistes pour les uns et trop sévères pour les autres, nos amis. Il faut savoir ce que l’on veut et le citoyen est souvent versatile et contradictoire avec lui-même. Le vaccin de l’objectivité et de la raison devrait être obligatoire. On demande des interdictions de paraitre ou des censures au nom de sa liberté de protester, de son activisme naturellement de bonne foi décrétée par soi-même et de son pacifisme dans le camp du bien auto-défini. Ce qui permet de perturber celui ou ceux que l’on n’aime pas et qui feraient peur aux électeurs qui vont s’abstenir.  Mais les citoyens ne sont pas dupes, ont l’expérience de la politique et savent ce qu’ils veulent. Les faux prophètes ne les émeuvent pas. Ce raisonnement s’applique à tous et chacun a un choix préférentiel et partisan. Ce n’est pas un argument qui permet avec violence active ou passive de tenter d’éliminer l’autre ce qui est d’ailleurs contreproductif. Ne fait pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse (Confucius). C’est le minimum syndical de la démocratie. On ne sait plus qui est l’agresseur et qui est l’agressé. Comme il ne faut pas prendre position pour ne froisser personne comme d’habitude on renvoie tous les intéressés devant le tribunal qui arbitrera.  

Le genre humain est le nouveau vocable à la mode. Autrefois il y avait dans le débat politique ou non les ennemis présumés de classe et du genre humain, les méchants. Ils reviennent et n’auraient pas souvenir de ce qui s’est passé le siècle précédent et les horreurs actuelles. Seule l’élite des éveillés en a conscience ! Paul Valery voyait dans les ennemis du genre humain la tradition et le progrès. Je n’aborde pas la théorie du genre pour ne me fâcher avec personne !  

A vouloir tout concilier et joindre les deux bouts de l’omelette selon l’image culinaire de nos dirigeants de tout horizon, on risque le grand écart et une élongation. L’ancien ministre UDR Alexandre Sanguinetti disait pour critiquer Edgar Faure qu’à force d’avoir un pied dans la majorité et un autre dans l’opposition on allait manquer de pieds.

Remercions les militants violents à leur insu de leur plein gré de démontrer que la république n’a pas besoin des extrêmes et des radicalisés, qu’elle doit être rassemblée, et que la tolérance ne concerne pas les intolérants croyant détenir des certitudes, intolérants qui sont d’après eux ceux qui ne pensent pas bien, et qui ne croient pas comme eux. C’est une confusion totale de réflexion. La République est toujours un compromis qui s’appuie sur des valeurs avérées et des principes notamment celui de la laïcité par ces temps à vocation transcendantale pour certains.

Les Charlots chantaient « merci patron » en dénonçant les pratiques managériales de certains chefs d’entreprise. On a progressé en matière de ressources humaines. Il nous reste à faire mieux dans le débat public qui doit être plus libre, sans tabous, plus apaisé et avec plus de hauteur tout en étant sérieux pour proposer des solutions aux citoyens. Mes citations sont anciennes mais sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques comme l’a écrit le poète André Chenier avant de perdre la tête sous la guillotine. 

Bonne fête de Noël s’il est encore possible de citer Noël sans choquer des libres penseurs ou des adeptes d’autres croyances et sinon pour tous, joyeux 1er de l’an qui est neutre et républicain.   

 

jeudi 2 décembre 2021

Voltaire est -il devenu ringard ?

 

                      Voltaire est -il devenu ringard ?

                    Par Christian Fremaux avocat honoraire

La pré- campagne présidentielle est pathétique pour certains clans qui ne sont pas sûrs d’être dans la course ou qui n’arrivent pas à régler leurs affaires internes et plutôt insipide pour tous. Les arguments que l’on entend ne sont pas à la hauteur des enjeux. On en reste à l’indignation et à l’émotion sans rien expliquer de façon rationnelle sans fournir la moindre solution et on se perd dans des détails qui n’ont pas d’importance au lieu de hausser le niveau et aborder ce qui intéresse l’avenir des français et du pays. Personnellement j’ai des convictions, j’ai déjà éliminé tous ceux qui sont des extrêmes de tout bord rouge, brun ou vert et tout radicalisé dans le discours ou les croyances, car comme le prince de Talleyrand-Périgord je pense que tout ce qui est excessif est insignifiant. Je m’applique le principe de précaution. Je me déterminerai au 1er tour pour un(e) candidat(e) quand les programmes seront connus, les possibilités concrètes d’amélioration ou de réformes développées, en tenant compte du contexte européen que l’on ne peut écarter d’un revers de main tout en voulant être souverain dans notre droit et par notre constitution avec nos valeurs républicaines et notre art de vivre humaniste. Vaste programme qui dépend aussi de la conjoncture internationale, et n’oublie pas la fin du mois dans une planète plus préservée sans l’idéologie punitive et dé- constructrice d’exaltés. Un libéralisme politique avec des contrepouvoirs puissants mâtiné d’Etat indispensable me ferait plaisir. Je crains que mon profil idéal soit une utopie et je voterai pour celui ou celle qui s’en rapprochera le plus.  L’écume des vantardises ne me touche pas.

                                           Un candidat et la tolérance.

Bien qu’avocat je ne défends aucun candidat. D’ailleurs personne ne me demande rien c’est vexant ! D’habitude en matière d’élections grâce aux procédures spéciales d’urgence la justice intervient pour départager des candidats à propos de ce qu’ils disent, ce qu’ils ont affiché ou diffusé, sur leurs critiques réciproques, leurs vies privées…voire des illégalités. Attendons donc pour voir en se souvenant du parquet national financier et de M. Fillon.

Puisque M. Zemmour candidat officiel et non plus journaliste -polémiste semble pour l’instant attirer la lumière et qu’on veut le renvoyer dans l’ombre sinon à l’ombre, parlons de sa déclaration de candidature que je n’ai pas vue : cela me donne la légitimité pour en parler comme le font plusieurs intéressés à en rajouter ou désintéressés au point de mettre de l’huile sur le feu. Je ne suis ni pour ni contre lui, au contraire aurait dit Pierre Dac.

Paul Claudel disait que pour la tolérance il y avait des maisons. Mais ceux qui sont hargneux sur les réseaux sociaux ne savent plus où ils habitent et se vantent de leur impunité donc de leur absence de responsabilités. Leur bile est contreproductive et donnera un mal de foi[e] d’ici peu.

                                     Deux poids deux mesures ?  

A la fin de son beau discours pour la panthéonisation de Mme Joséphine Baker le président Macron a terminé par un vibrant Vive la République, Vive la France avant que la Marseillaise ne retentisse. On était ému. M. Zemmour dans un décor crépusculaire qui n’annonce rien de bon au micro de sa radio -vidéo. isée a achevé sa candidature par les mots : Vive La République et surtout Vive la France. C’est l’adverbe surtout qui veut dire avant tout ou plus particulièrement qui a déclenché la polémique.  Des exégètes zélés et naturellement neutres se sont aussitôt écriés que M. Zemmour voulait mettre à bas « la gueuse » comme les monarchistes l’appelaient, pour établir une sorte de régime de Vichy Pétainisé contre tous les étrangers dont les juifs et évidemment les migrants avec le privilège blanc et je passe d’autres considérations. Je ne me risque pas à interpréter la pensée de M. Zemmour. Il est assez grand pour le faire lui-même ;

                       La France est- elle la République et réciproquement ?

 Mais ce qui ne m’a pas plu c’est de considérer que la France était simplement et uniquement la République et qu’il ne fallait pas distinguer. Sauf à avoir fait régulièrement l’école buissonnière ou d’être un décrocheur précoce, personne y compris les cancres que ne sont pas les candidats au poste suprême ou les commentateurs professionnels du moins je l’espère, ne peut ignorer l’histoire de France, sa construction avec la monarchie, puis la 1ère république qui conduit à l’empire, enfin la République définitivement au moins depuis 1875 quelles que soient les crises, guerres et menaces diverses. Sur ce sujet on fait une querelle d’allemands à M. Zemmour qui a d’autres croyances ou obsessions que l’on peut combattre. N’est -ce pas Voltaire qui disait « je ne partage pas vos idées mais je me ferai tuer pour que vous puissiez les exprimer ». Puis il allait se réfugier à Ferney ou partait en un exil proche quand ses propres idées chagrinaient des puissants. On ne peut quand même pas demander à nos courageux moralistes de salon auto-satisfaits de leur générosité sans conséquences pour eux de s’installer à la Bastille ou de se réfugier en Andorre ou à Monaco.

                                           Sur la République.

Le seul à vouloir une autre République la VI -ème est M. Mélenchon qu’on ne soupçonne pas de noirs desseins et qu’on ne critique pas vivement même si on ne connait rien du contenu de sa République que l’on devine forcément plus démocratique, plus participative, plus ouverte et plus distributive. La République est un mode d’organisation des pouvoirs publics qui n’est pourtant pas adoptée par tous les pays réellement démocratiques, comme notre pratique à la Française avec notre système semi-présidentiel : le chef de l’Etat élu au suffrage universel direct décide ; le gouvernement met en forme, détermine et conduit la politique de la nation et le parlement vote ou non. Comme la démocratie, la République est le pire des régimes juridiques à l’exception de tous les autres pour paraphraser W. Churchill.  Des élections à tout niveau ; un état de droit avec des contre- pouvoirs ; des valeurs dont les droits de l’homme largement interprétés d’ailleurs ; et des grands principes. Ainsi l’article 1 de la constitution indique que la république est indivisible, laïque, démocratique et sociale, avec la devise liberté, égalité fraternité. 

                                                 Sur la France.

La France est une nation qui s’est constituée au fil des siècles, qui rassemble les citoyens de toute origine qui acceptent sans oublier qui ils sont de suivre et d’appliquer les principes et valeurs républicains pour intégrer une civilisation à laquelle ils croient. La France ne répond pas à une définition figée, elle est unique, s’adapte à la modernité mais demeure immuable dans ses fondements universels. On s’y réfère dans le monde. Elle dépasse les individus ou les communautés elle n’est pas la somme de particularismes. Elle est faite de chair et de sang et d’âme qui transcende. Elle a du mépris pour des intérêts matériels personnels qui ne sont pas de son royaume, tout en faisant assurer le bien- être dans la paix de tous. Elle ne dépend pas d’un régime politique mais a besoin d’institutions fortes, de stabilité pour affirmer sa puissance et sa souveraineté.  Elle a des intérêts vitaux, protège tous ses enfants où qu’ils soient, défend une identité qui peut évoluer dans un cadre plutôt hédonique à faire progresser pour tous qui a fait ses preuves.  Elle est d’essence naturelle supérieure à son organisation constitutionnelle. Tous les candidats devraient faire connaitre leur vision de la France au lieu de s’en tenir à des propositions techniques. Ils se reconnaissent tous dans le général de Gaulle qui pensait qu’il y avait dans l’ordre : la France, l’Etat, le droit.

             Je n’ai jamais si bien compris la plaine que du haut des montagnes (Ibsen).

Au secours Voltaire, à l’aide les humanistes, les démocrates et les raisonnables ils sont devenus fous. Parler de la France au lieu de la planète et de la fin du mois va être un handicap. Où est la tolérance des idées, le débat qui grandit ? Je n’aime pas les leçons de morale. Quand le sage montre la lune l’idiot regarde le doigt qu’il soit celui controversé de M. Zemmour ou le sien et pourquoi pas le mien pour éviter de se regarder le nombril.   

 

 

 

 

 

 

 

 

vendredi 19 novembre 2021

L'ère des co-.

 

                                         L’ère des co-.

              Par Christian Fremaux avocat honoraire.

On a pris l’habitude de vivre avec des co-. sans oublier le fameux .co-m qui se perd dans la  co-mmunication. On ne cesse de parler de co-location pour le logement des jeunes ; de co-voiturage pour limiter la pollution ; de co-working pour l’organisation du travail ; de co-mmunautés pour dénoncer le séparatisme ; de co-production de sécurité en matière de délinquance ; de co-existence de cultures, d’identités ; de co-développement avec les pays qui en ont besoin… Chacun ajoutera son propre co-.

Les sondages nous disent que la France s’est droitisée, mais qu’en même temps M. Macron qui n’est ni de droite ni de gauche ni d’ailleurs a de grandes chances d’être réélu. Attendons cependant le sondage réel à savoir le verdict des urnes en milieu avril 2022, le 1er avril et ses blagues étant passé. En matière politique va-t-on vers la co-habitation avec un président de la république de nulle part qui devrait composer avec une majorité parlementaire qui n’est pas la sienne ? Ce serait co-casse.

Les français vont choisir car ils ne se laissent pas abuser par les belles déclarations des candidats avérés ou virtuels à ce jour et ils ont de l’expérience en matière de combinaisons et de la mémoire. Ceux que je rencontre car je ne parle pas au nom du peuple comme prétendent le faire certaines élites auto-proclamées, sont fatigués des polémiques, de la violence, des indignations permanentes, et ils ont perdu confiance dans les décideurs publics. Ils ne se laisseront pas impressionner par tous ceux qui veulent leur donner mauvaise conscience avec le wokisme venant des universités américaines, le féminisme outrancier, la repentance pour tout et rien à propos de l’histoire de la France, avec le prétendu progrès au bénéfice de toutes petites minorités alors que les problèmes de fond qui intéressent la majorité des citoyens ne sont pas réglés.  Dans leur vie de tous les jours ils se confrontent à du concret, à leurs budgets, à leur environnement, à leur travail, à leur famille : on est loin des donneurs de leçons.  Ils veulent une nation apaisée, pas en burn-out et énervée, et être en tranquillité avec leurs traditions et art de vivre.

La cohabitation désigne la fréquentation institutionnelle entre le chef de l’Etat et un chef de gouvernement issu de la majorité parlementaire et qui sont antagonistes dans les idées, dans les projets, dans la pratique du pouvoir. Cela peut conduire à des blocages. On se rappelle du duo François Mitterrand-Jacques Chirac. La Constitution de la Vème République permet de partager le pouvoir exécutif par ses articles 5, 20 et 21. Des spécialistes estiment que c’était alors le septennat, et que puisque désormais nous sommes en quinquennat une co-habitation n’est pas envisageable car les électeurs ont toujours donné une majorité parlementaire au président de la république élu. On a cependant connu des majorités faibles ou frondeuses dont une récente qui a empêché un président de se représenter. Et si les pronostics étaient déjoués puisqu’en politique il ne faut rien exclure, les ambitions des uns ne s’opposant pas à des revirements sur l’aile des autres, dans l’intérêt général cela va de soi ?

Il se dit dans les cercles autorisés dont je ne fais pas partie,  que les français ne seraient pas hostiles à un gouvernement d’unité nationale en prenant les meilleurs dans chaque camp, pour  mettre en œuvre enfin les réformes tant annoncées comme rétablir l’autorité et l’ordre avec une justice qui joue son rôle et prendre les mesures qui s’imposent dans le domaine économique et social dont celui de la fin du mois - il y a déjà des multitudes de rapports qui pointent ce qu’il faut faire - et lutter contre toutes les menaces internes comme extérieures, y compris climatiques, en rappelant les devoirs de chacun au- delà de ses droits individuels et des libertés publiques qui ne peuvent être infinies. Assez de choix binaire et de devoir dire oui ou non, le citoyen qui paie ses impôts réfléchit aussi. Il se co-ncerte avec lui-même.

 La pratique de l’exercice du pouvoir avec le quinquennat a changé : nous sommes dans un régime semi-présidentiel avec l’élection du Président de la République au suffrage universel. Jupiter décide de tout, son gouvernement suit, et les parlementaires approuvent. Que fait- on si on s’est trompé par idéologie ou mauvaise analyse et si le peuple n’est pas d’accord : faut-il attendre 5 ans, ou un éventuel référendum, ou le combat dans la rue pour faire pression ?

Il n’est donc pas impossible que le peuple plus intelligent que toutes les élites réunies décide de ne pas mettre ses œufs dans le même panier et qu’après avoir élu un président de la république qui incarnerait telle tendance politique, il lui adjoigne des responsables d’une autre tendance pour trouver un équilibre et forcer l’exécutif à l’entendre en prenant les décisions qu’il attend. Le peuple souverain retrouverait un ordre naturel : il choisit et il commande, et ils exécutent ?  Fantaisie, mais pourquoi pas ? Quand j’énonce cette hypothèse auprès de dirigeants au pouvoir que je rencontre, ils restent souvent cois.  Cela pourrait aussi advenir constitutionnellement parlant en cas de dissolution de l’assemblée nationale (que l’on a connue dans le passé) ou un empêchement du président de la république (ce que je ne souhaite pas mais qui a existé). Ce serait une première sous le quinquennat donc très moderne en matière de régime représentatif et participatif ! L’union fait la force chacun en a co-nscience. (Avec cet article on voit l’absurdité de l’écriture inclusive en outre dévoyée). 

Il y aurait ainsi co-opération et co-résultats. On ne pourrait que s’en réjouir et pousser le cri de joie du coq français vainqueur : co-corico.            

mardi 16 novembre 2021

La constitution cet obscur objet de désir

                           La Constitution cet obscur objet de désir.

                               Par Christian Fremaux avocat honoraire.

La Constitution notre texte juridique suprême qui organise les relations entre les pouvoirs et fondateur de l’état de droit fait l’objet de convoitise. Pourquoi ? Le citoyen doit- il s’en inquiéter ou s’en réjouir ? Le progressisme et la possibilité de réformes doivent -ils concerner les tables de la loi ? C’est une fixation de certains candidats à la présidence : il faut changer de Constitution pour pouvoir agir ou en modifier certains points pour éliminer les obstacles de droit. Comme si avec de nouvelles règles du jeu les problèmes disparaitraient, les comportements individuels se bonifieraient, les violences diverses s’atténueraient, et le bonheur social économique et sociétal dans une nature sauvée régnerait. On veut le croire.

                                                     Depuis 1958.

Le 9 novembre 2021 le général de Gaulle symbole de la résistance et de la grandeur sans petites combines et manœuvres subalternes a dû se retourner dans sa tombe. On a vu ou aperçu le ban et l’arrière ban des politiques à Colombey -les -deux églises notamment Marine le Pen dont le papa avait combattu férocement le général pour des raisons liées à l’indépendance de l’Algérie. Madame Hidalgo également présente qui se veut l’héritière du socialisme canal historique F. Mitterrand a certainement lu le livre de ce dernier sur « le coup d’Etat permanent » dénonçant le général revenu au pouvoir à qui on prêtait des tentations de dictateur. Surtout en raison de la Constitution qu’il avait mise en place en 1958 avec le fameux article 16 qui pouvait lui donner pleins pouvoirs. M. Mitterrand élu président changea d’opinion et trouva très bien d’être un monarque républicain et d’avoir à sa disposition le texte du général à savoir une Constitution qui avait des fondations fortes et des valeurs républicaines et permettait de gouverner de façon efficace mais démocratique. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis.

                                           C’est quoi la Constitution ?

La Constitution est un ensemble de textes juridiques qui définit les institutions de l’Etat et organise leur fonctionnement et qui s’impose aux lois conformément à la hiérarchie des normes. On y rappelle aussi des grands principes supérieurs dans leurs portées qui viennent de loin et des textes fondamentaux comme les droits de l’homme. La Constitution votée le 4 octobre 1958 à l’initiative du général de Gaulle qui a créé la V -ème république, précise par exemple dans son article 1 que « la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale… ». C’est à l’aune de cette règle fondamentale que l’on apprécie en 2021 les velléités de séparatisme, le débat sur la place des religions ou d’une en particulier et les revendications de certains en matière d’identité, la participation des citoyens aux décisions publiques qui les concernent par les élections et à faire plus entendre leurs voix si on les questionne.  On ne peut faire n’importe quoi : on doit respecter le texte qui est le garant des libertés, de l’objectivité, de l’égalité, et de l’intérêt collectif. Ainsi depuis 1958 avons-nous un pouvoir exécutif (le gouvernement nommé par le président de la République) et un pouvoir législatif (des députés et sénateurs élus par le peuple). Nous avons aussi  et simplement  une « autorité » judiciaire . Faut-il que ladite autorité devienne un pouvoir ? Or on discute sur le gouvernement des juges réel ou supposé. Le général avait choisi une priorisation : La France d’abord, puis l’Etat et enfin le droit. Est-ce immuable à notre époque où l’individu pense n’avoir que des droits ; où la nation est un concept discuté ; où l’Europe et ses juges interfèrent pour tout ; et où beaucoup de paradigmes nouveaux sont apparus, dans le cadre de la globalisation et de l’évolution des mœurs et du rapport à l’autre ? Des candidats pensent que si on ne modifie aucun article, rien ne sera possible on n’avancera pas et les problèmes demeureront. Montesquieu a écrit que l’on ne touche aux lois que d’une main tremblante. On peut le dire de la Constitution- la loi constitutionnelle la plus importante- car on sait ce que l’on a et on ne peut partir à l’aventure.

 Depuis 1958 la Constitution a été modifiée déjà 24 fois : de 1962 avec l’élection du président de la république au suffrage universel avec le reproche actuel au président de sa gestion jupitérienne : au quinquennat en 2000 ou à la création du référendum d’initiative partagée en 2008 pour donner de nouveaux droits aux citoyens.  On utilise selon la Constitution (articles 11 et 89) soit la voie du référendum en interrogeant tous les citoyens, soit la voie du congrès à Versailles où il faut une majorité des 3/5-ème des députés et sénateurs pour que le projet aboutisse. M. Macron a essayé sur divers sujets en 2019 : il a échoué devant les parlementaires.

                                             Des idées percutantes ?

M. Mélenchon veut entrer en VI -ème république et dès son élection réunir une assemblée populaire constituante. Je ne sais pas ce qu’il veut y mettre, comment il va réorganiser le fonctionnement des institutions, qui va décider. Je comprends qu’il veut rendre le pouvoir au peuple : mais est-il sûr que le peuple en veut car avoir des responsabilités c’est risqué (voir les poursuites judiciaires liées à la covid-19) et on peut se contenter de ne vouloir qu’être entendu ? Faut-il bouleverser les institutions pour ça ?

M. Bertrand qui a des idées de fermeté pour combattre notamment la délinquance, le terrorisme, le laisser- aller avec l’assistanat, veut restaurer l’autorité de l’Etat et protéger ceux qui le servent, en obligeant les magistrats à sévir malgré leur indépendance. Il se sent bridé par les lois internes actuelles et celles des juges européens. Il veut un état de droit agile et ne supporte pas que l’on dise que l’on ne peut rien faire notamment en matière de justice rendue au nom du peuple français et d’immigration. Il interpellera donc les citoyens par voie de référendum à questions multiples pour un changement de certaines dispositions de la Constitution pour que le pays et ses citoyens redeviennent souverains. C’est un débat qui a lieu aussi dans d’autres pays européens.

                                                  Faisable ou non ?

Les juristes constitutionnalistes vont donc avoir du pain sur la planche pour savoir si telle proposition d’un candidat est faisable ou non. Pour être crédible il faut dire la vérité et ne pas prendre ses désirs pour des réalités.  C’est le moins que l’on attend d’un futur président de la république.  On a besoin de piliers solides non solubles dans l’idéologie et la polémique. Vive la Constitution qui doit nous nous garder de tout mirage. Et vive la France celle d’Hubert Germain dernier compagnon de la libération, et éternelle

mercredi 10 novembre 2021

Et si Sisyphe était heureux?

 

                       

                         Et si Sisyphe était heureux ?

         Par Christian Fremaux avocat honoraire.

 Si on écoute les beaux parleurs, on ne sait plus où l’on habite, avec qui et ce qu’il faut faire. Je prends un exemple limité.  Deux tendances aussi néfastes l’une que l’autre co-habitent et leurs défenseurs ajoutent à la confusion du débat public. Dans les deux cas on prône l’immobilisme, et il n’est même pas moins 5 mais minuit (docteur Schweitzer !).  

 D’un côté les «collapsologues » les plus radicaux qui prédisent la fin de l’histoire civilisationnelle, de la planète et donc des humains avec leurs défauts, estiment que tout est joué et que quoique l’on fasse c’est trop tard. Il faut attendre le désastre et la disparition de l’humanité, ou tout détruire maintenant de l’organisation sociale aux institutions pour que renaisse une humanité meilleure et plus éclairée et que l’homme devienne bon dans une nature abondante. L’homme aurait creusé lui -même sa tombe. Même en interdisant aux vaches d’émettre du méthane, d’exiger pour l’homme qu’il ne mange plus de viande mais de l’herbe et de rendre impossible de venir en voiture roulant au diesel au centre des villes, on ne pourra pas juguler la pollution qui  tue ni le réchauffement climatique et les ressources naturelles sont épuisées. C’est fort dans le discours. La pythie adolescente Greta Thunberg qui on le sait a une expérience inouïe de la vie, énonce dans sa langue harmonieuse que je ne comprends pas que c’est de la responsabilité des générations adultes au pouvoir si les futures n’auront pas la vie de leurs grands- parents et parents. Mais qui vont quand même laisser une société qui produit des ressources et des améliorations pour l’ensemble. On a pourtant connu pire dans le passé. On a essayé de force tous les .ismes, le fascisme, le nazisme, le marxisme et le communisme et aussi le maoïsme, outre les totalitarismes sous versions multiples ce qui n’était évidemment pas mieux. On lit sur le visage gracile de la « jeanne d’arc » de la nature la fureur qui l’anime, contre le capitalisme et le mondialisme et le populisme, avec la haine contre ceux qui ne pensent pas comme elle. Elle détient la connaissance, elle est venue, elle a vu et s’est étouffée de rage. On sait qu’il y 50 nuances de vert plus ou moins punitif : mais elle incarne le vert-rouge écarlate qui conduit à la mort. J’ai peur car on ne pourrait plus rien faire sauf subir la fin.

 Personnellement je ne me sens pas  responsable de mes grands-parents qui ont survécu aux deux guerres mondiales, ni de mes parents qui ont essayé après 1945 de rebâtir une France unie dans la décolonisation ,  généreuse avec celui qui venait d’ailleurs, solidaire entre les citoyens avec de grands desseins  nationaux , qui portait une parole universelle et une démocratie avec une république qui fonctionnait , des institutions solides  ,et qui a plutôt réussi malgré des imperfections inhérentes à toute société dont nulle n’est parfaite .Je ne les accable pas, et ne  reproche pas à la génération qui m’a précédé de n’avoir pas fait suffisamment .Je me regarde dans la glace et j’assume.

 Je ne m’estime pas comptable ce que qui se passera à l’horizon 2030/2050 voire 2100 !-qui sait d’ailleurs où on en sera ?- car je fais confiance à l’Homme et pas à  la providence comme aurait écrit Voltaire, pour s’adapter, trouver  les solutions techniques et humaines pour continuer l’aventure de l’humanité  dont personne au passage ne définit son contenu. Je crois que la vie est un risque depuis toujours, qu’il ne faut pas l’ignorer mais le prendre à bras le corps pour trouver des réponses. J’aurai fait ce que j’ai pu avec mes moyens ; j’aurai participé à mon niveau notamment en matière civique ; je laisserai une situation la plus saine possible même si elle n’est pas parfaite, et la génération qui me suit devra faire mieux que moi et rendre des comptes à ses enfants. Je ne peux avoir une responsabilité éternelle. Je ne me repends pas ; je n’avoue rien ; je suis ce que j’étais en souhaitant faire plaisir à ceux que j’aime et leur donner les outils pour réussir.  Je ne suis pas un coupable putatif.  Je n’ai sacrifié ni les jeunes présents ni leurs successeurs.  Je redonne ce que j’ai  reçu avec des intérêts, et je transmets tout sauf mes erreurs. 

 La globalisation est passée par là, certains croyant que le progrès- mantra ou panacée – règle tous les problèmes et est infini : on voit bien qu’il peut être aussi un leurre. Les peuples ont évolué et les besoins aussi. La nature est ce qu’elle est, il faut la protéger mais pas la sanctuariser. Elle a une force vitale qui complète celles de l’homme qui pense.  

 Ma génération de baby-boomers a globalement profité d’une situation favorable et mai 68 a fait changer de paradigme pour le bon et le moins bon dont on paie encore les conséquences sur certains sujets aujourd’hui. L’individu est devenu roi, il n’a plus de devoirs, et ce qu’il croit est la vérité.  L’Etat s’est racorni dans ses prérogatives mais doit être présent et efficace quand on l’appelle au secours la crise sanitaire nous le démontre. Il ne dirige plus mais distribue des droits, n’a plus de visions à long terme et flotte au milieu des injonctions contradictoires. L’autorité est un gros mot mais vide de sens : on ne punit plus on éduque, on ne fait plus respecter l’ordre public et la loi qui ne sont compris qu’au service de celui qui les revendique pour lui. Les fonctions régaliennes ont été reléguées au magasin des accessoires car il ne faut faire de la peine à personne, et dire non est devenu impossible pour chaque revendication, minoritaire en particulier. Dont acte. Les défaitistes ou déclinologues ont de la matière pour alimenter leur pessimisme. L’immobilisme conduit à la perte et détruit la confiance.

 De l’autre côté et les remarques sont plus rapides restent ceux que l’on qualifie péjorativement de « conservateurs », ceux qui pensent que malgré tout avant c’était au moins aussi bien, plus apaisé, plus uni, et qui ramènent tout à l’identité du peuple valeur certes fondamentale, et qui sont partisans d’un repli dans le cadre national, la nation étant la structure essentielle ce que je crois. Ils ont cru à la science et à la raison qui domine l’émotion et l’empathie. Je partage avec eux le rejet du wokisme, de l’écriture inclusive, de la racialisation, de l’intersectionnalité, de la repentance et j’en passe en paraphrasant la formule de Clémenceau à propos de la révolution française : la France est un bloc avec son histoire, ses défauts et ses qualités, et elle demeure un modèle universel comme grande puissance qui doit retrouver son vrai rang. Encore faut-il aussi convaincre ceux de l’intérieur qui contestent les valeurs républicaines, l’art de vivre à la française, ses traditions et qui souhaitent plus se séparer de la collectivité ou imposer leurs croyances que de former une union dans la diversité. Il n’est pas ringard ou illégitime de vouloir rester ce que nous sommes. On ne demande pas au pouvoir de faire notre bonheur malgré nous : on lui demande de consolider ce qui a fait ses preuves, et de réformer ce qui a besoin de l’être. Personne ne détient la clef de l’avenir et on ne peut donner de leçons à ceux qui hésitent. Il faut donc continuer sans rien renier voire revenir en arrière.  Lesdits conservateurs sont donc comme les collapsologues mais pour des raisons diamétralement opposées, plutôt adeptes de l’immobilisme.   

Au-delà des propositions techniques concrètes qui vont fleurir dans la campagne présidentielle, il va falloir choisir notre modèle de vie pour les années qui viennent. Il ne faut annoncer ni drame ni statu quo. Malgré les contingences Il faut agir à la recherche du meilleur que l’on appelle bonheur comme Saint- Just en son temps y aspirait.  La critique doit s’accompagner de faits précis et de solutions faisables.  L’apocalypse et la déconstruction ou le sur-place mènent à la ruine. Il faut trouver la voie médiane et travailler tous continuellement et être optimiste. Comme l’a clamé Albert Camus  imaginons Sisyphe heureux lorsqu’il remonte inlassablement son rocher        

mercredi 27 octobre 2021

rendre le pouvoir au peuple

 

                      Rendre le pouvoir au peuple.

                     Par Christian Fremaux avocat honoraire.

Par ces temps de pré- campagne électorale présidentielle qui ne dit pas vraiment son nom avec de vrais-faux candidats, on entend souvent l’incantation à vouloir rendre le pouvoir au peuple. Cela signifie qu’il l’a perdu, qu’il a été confisqué on ne sait pas précisément au profit de qui mais en soupçonnant des technocrates, et qui sont les véritables pickpockets qui en profitent. Pourtant en République on gouverne par et pour le peuple. On se gargarise de ce mantra qui est l’ensemble des personnes soumises aux mêmes lois et qui forment une nation. Du moins en théorie car on s’aperçoit bien que l’application de la loi est à géométrie variable et que certains récusent le terme de nation au bénéfice de la simple juxtaposition de groupes culturels différents qui essaient de coopérer sur un même territoire sans frontières si possible ce qui permet de se détacher d’un mode de vie, de principes institutionnels ou immatériels, et de valeurs communes. On abhorre l’Etat- Léviathan mais on l’appelle au secours en cas de crise. On rêve de l’auberge espagnole où le peuple est au four et au moulin. Des prétendues élites auto-proclamées mais bruyantes déconstruisent tout ce qui fait sens depuis des siècles. Mais démolir n’est pas jouer : il faut être concret, sérieux et proposer, sinon on ne sort pas de la polémique et il n’y a aucun bénéfice pour le peuple que l’on veut servir. 

La démocratie directe athénienne avec l’assemblée délibérante (l’ecclésia) est difficile à mettre en place. Les citoyens réunis votaient à main levée et la loi était ensuite exposée au public dans l’agora. Aujourd’hui c’est tout juste si on n’exige pas que la loi soit votée par les réseaux sociaux ou les minorités agissantes et les groupes de pression. Notre système représentatif avec des élections libres à intervalles réguliers, des élus et divers corps intermédiaires, est décrié. On dit que le citoyen doit avoir son mot à dire sur tout ce qui le concerne, en permanence être interrogé (et non seulement sondé) et que les pouvoirs exécutif comme législatif ne font plus l’affaire. Que seul le peuple sait ce qui est bon pour lui. Mais on n’explique pas comment on tranche, qui a le choix final, par quelles structures institutionnelles légitimes, sur quels sujets, par quels moyens, avec quels recours…  Je ne crois pas qu’un comité ad hoc de personnes tirées au sort soit plus intelligent que des experts patentés qui donnent un avis technique qui doit être validé ou non par les politiques- je pense à l’assemblée nationale- qui engagent leurs responsabilités. Sortons de la mode et de l’utopie qui veulent qu’un quidam soit par nature intègre, compétent, soucieux de l’intérêt général et représente le peuple dans ses multiples composantes et croyances.

Avant de jeter ce qui fonctionne même si on doit l’améliorer voire le réviser, ne jouons pas les apprentis sorciers qui transforment le plomb de ce qui existe en un idéal en or pour imiter nos glorieux ainés de 1789 où le petit peuple a souffert dans l’espérance de jours meilleurs sans de plus égaux que d’autres. Avant de se lancer dans une assemblée constituante prévoyons des expérimentations novatrices le peuple n’étant pas une variable d’ajustement ni corvéable à merci. Il a besoin aussi de tranquillité et de stabilité.  Ne passons pas à la 6ème république sans avoir épuisé toutes les possibilités de la 5ème qui fait la preuve de la solidité de ses fondations. Et posons-nous d’abord la question : y a-t-il un peuple soudé sur des principes d’universalité qui fait la nation ? Quel(s) pouvoir(s) devons- nous rendre à quel peuple ?   

Avec les gilets jaunes il y a eu la demande de fonder le référendum d’initiative populaire, alors même qu’existe le référendum d’initiative partagée créé par M. Sarkozy qu’on n’utilise pas, pas plus que le référendum cher au général De Gaulle. Au lieu de réinventer la roue faisons la tourner vers ce qui se trouve déjà quitte à modifier la constitution et son article 11 pour permettre plus de souplesse dans la ou les questions posées sur l’organisation des pouvoirs publics et augmenter les domaines pour solliciter l’avis des français. Mais pour cela il ne faut pas avoir peur des réponses du peuple, et ne pas transformer un non comme en 2005 par un oui législatif. Le pouvoir du peuple c’est de se prononcer et que ceux qui sont chargés d’appliquer les décisions le fassent y compris si elles leur déplaisent.

Des maires ont mis en place des budgets dits participatifs parfois genrés pour distinguer dans le peuple ! dont on ne sait pas bien ce que cela veut dire, mais je n’ai aucune compétence dans ce domaine après 37 ans d’élu municipal dans une commune de 600 habitants en zone rurale : j’interroge « mon peuple », mes concitoyens dans la rue ou chez eux, dans les cérémonies officielles ou à l’occasion de réunions dédiées, et ils font confiance à ceux qu’ils ont élus. C’est ringard ?   Rendre le pouvoir au peuple c’est aussi le considérer comme composé par des adultes et non des adolescents attardés ou wokistes qu’il faut guider par une lumière qui vient du haut. Une démocratie ne vit que si le citoyen par son avis - son vote – sera entendu, compris et suivi. Encore faut -il que les propositions des candidats soient claires.    

Rendre le pouvoir au peuple c’est encore faire en sorte que la justice prononcée au nom du peuple français ne soit pas dépendante de cours de justice extérieures au- delà de ce que le peuple a décidé par sa constitution et ses lois. Il va de soi que les traités internationaux signés par la France doivent être scrupuleusement respectés, car la France n’a qu’une parole et qu’une signature. L’Union Européenne en particulier a fondé son existence par l’intégration des Etats par le droit. Mais à 27 membres c’est devenu la quadrature du cercle, le droit devient tordu et les citoyens ne tolèrent plus les oukazes, je veux dire les règlements et directives venus de Bruxelles établis par des bureaucrates évidemment non élus ce qui n’est pas entièrement juste puisque les Etats participent avec le parlement européen à la décision librement consentie et négociée. Le citoyen veut que sa justice puisse prononcer les peines que méritent des individus, que le droit européen ne s’oppose pas à des politiques publiques, et que ce qui apparait comme un gouvernement de juges lointains ne contrarie pas le peuple souverain qui choisit son destin et sa manière de vivre.  

 Il va donc falloir que tous ceux qui veulent rendre le pouvoir au peuple nous expliquent de quoi il s’agit, qui décide quoi, le mode d’emploi, et la pertinence. En évitant une sorte d’élection continue ou des interrogations et récriminations sans fin. Il s’agit de restaurer une république vivante et moderne plus informative avec les citoyens, avec son histoire, ses valeurs et ambitions et des débats publics sans tabous, sans anathèmes, sans rejet de l’autre. Il faut rendre au moins ce que l’on a reçu, avec des dividendes c’est préférable.          

vendredi 8 octobre 2021

La démocratie un concept ou une réalité qui se dégrade ?

          La démocratie un concept ou une réalité qui se dégrade ?

                           Par Christian Fremaux avocat honoraire. 

On a que le mot démocratie à la bouche. On revendique des libertés pour tout et rien surtout si elles ne concernent qu’un petit groupe d’individus. On est exigeant pour les autres car pour soi on n’a plus de limites. Un petit clan sans légitimité particulière ni élu ni représentatif de qui que ce soit, définit les normes et les thèmes à débattre entre soi en se regardant dans la glace et en admirant leur nombril, et exclut ceux qui ne sont pas dans la bonne ligne, dans la bienpensance terme fourre-tout qui ne veut rien dire sauf à disqualifier.  Les renégats ou ceux qui essaient d’émettre des idées différentes même parfois extrêmes en paroles et en principe deviennent nauséabonds et infréquentables, fachos de surcroit car ils clivent au-delà de ce qui est toléré et pourraient convaincre des électeurs ce qui serait inadmissible. Les citoyens doivent se contenter de ce qui est bon pour eux, selon les critères des mêmes ayatollahs. La démocratie est pourtant l’échange même vif, le débat public contradictoire et aucune question ne peut être taboue. Pour être élu dans la clarté il faut convaincre et ne pas gagner par défaut. On verra dans quelques mois si les électeurs ont été persuadés par cette méthode sectaire qui veut faire leur bonheur parfois malgré eux. On se rappelle la vieille formule de Bertolt Brecht : « puisque le peuple vote contre le gouvernement il faut dissoudre le peuple ». Notre démocratie semble se dégrader.

La démocratie est une forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple composé des citoyens et de ses représentants élus, à la Nation comme le déclarait l’abbé Sieyès en 1789 qui s’interrogeait sur ce qu’était le Tiers -Etat. On devrait donc être satisfait qu’il y ait des populistes (littéralement les membres du peuple) et des Etats issus de cette mouvance que l’on rejette pourtant sous le terme de régimes illibéraux. En Europe notamment la Pologne ou la Hongrie partagent ce discrédit car ils écartent la doxa de l’union européenne et la mondialisation dite heureuse, protègent leurs frontières, ne sont pas ouverts aux migrants… Chacun appréciera ce que font ces pays où l’état de droit est pratiqué sous des aspects particuliers : les élections sont a priori libres et les dirigeants sont élus voire réélus par un processus électoral classique. Mais la justice, les médias, l’enseignement, l’immigration et la protection de certaines minorités sont gérés selon des critères qui ne conviennent pas à la pensée dominante en France ou dans l’ensemble des autorités des institutions européennes. Chacun a son avis sur ces situations.

Le jeune politologue américain Yascha Mounk a écrit « le peuple contre la démocratie » en estimant que la démocratie libérale qui triomphait (Francis Fukuyama avait écrit la fin de l’histoire après la chute du mur de Berlin) était désormais menacée par la montée des populismes en raison de la désillusion des citoyens envers les élites, les partis politiques, les décisions publiques, voire le personnel politique qui n’apparait plus à la hauteur des enjeux présents et futurs (il n’y a pas de propositions crédibles) et en qui on a perdu confiance. La désobéissance civile (on refuse d’appliquer la loi ,parfois aussi chez les magistrats !) et civique (on s’abstient d’aller voter car cela ne servirait à rien), entrainent de la violence dans les rues, dans les rapports humains, et paralysent les institutions puisqu’il faut créer des comités ad hoc de quelques citoyens choisis  arbitrairement qui sont supposés être neutres et de bonne foi,  avoir la science infuse et qui se substituent au parlement ou à des institutions chargées de réfléchir à des sujets pointus ou à la mode dans l’urgence et l’émotion.  La démocratie est ainsi court -circuitée, et on croit que le peuple n’est pas dupe. Nos élites dirigeantes sont des lumières.  

Il nous faudrait un nouveau Tocqueville qui enquêterait sur la démocratie en France ; sur la transparence exigée du haut en bas ; sur les réseaux sociaux avec leurs qualités et leurs grands défauts en matière d’expression et d’incitation à la haine ; sur l’abstention massive ; sur l’état de droit en général réclamé par tous mais bafoué par les mêmes ; sur la justice indépendante et pourtant soupçonnée d’être perméable à des idéologies et à des règlements de comptes avec des exemples concrets comme le mur des cons.   

La crise du covid-19 et les confinements ont démontré combien la démocratie était fragile. On a hurlé aux lois forcément liberticides, aux interdictions diverses, donc à la réduction de nos libertés. L’intérêt individuel a été en confrontation avec l’intérêt collectif ou général et il a fallu que l’exécutif agisse à vue entre fausses informations (des mensonges volontaires disent certains) ordres et contre-ordres, navigation à la godille et communication approximative, anxiogène donc ratée.  Certes les experts médecins- tous des professeurs éminents- n’ont pas clarifié la situation et les politiques ne sont pas seuls responsables : ce sera la Cour de Justice de la république qui épluchera le rôle des ministres et 1er ministre, le président de la république étant pénalement irresponsable pendant son mandat. Les tribunaux pénaux pour le menu fretin diront si des infractions ont été commises ou non. Le virus par lui-même coupable principal ne sera pas entendu, pas mis en garde à vue et pas condamné.  Vive la démocratie judiciaire qui fera connaitre sa vérité dans un certain temps.  

Les reports successifs de l’état d’urgence sanitaire ont été validés par le parlement -qui représente le peuple- mais des membres dudit peuple contestent cette atteinte à leurs droits d’aller et venir ; à disposer de leur corps ; à se soigner s’ils le veulent ; à se protéger ou non dans l’intérêt des autres. Le général de Gaulle aurait critiqué cette pagaille, de chienlit.

Réfléchissant sur la droite politique et la gauche culturelle M. Jacques Juillard pense qu’il y a deux conceptions de la démocratie fondée sur les droits de l’homme essentiels dans notre démocratie qui ne s’interprètent pas de la même manière par tous en France, et ne sont même pas existants ou considérés comme quasi universels dans d’autres pays. Il écrit que «  les droits de l’homme étaient naguère essentiellement politiques, tandis que  « les droits humains» d’aujourd’hui » sont essentiellement sociaux fondés sur un individualisme effréné ».  Il a raison et ma conclusion personnelle est que notre démocratie n’est plus ce qu’elle était et qu’il va falloir la revisiter, la reconstruire (et non la déconstruire selon le slogan « wokiste » à la mode pour d’autres domaines), la vivifier par la réaffirmation et la traduction concrète des valeurs républicaines si l’on veut continuer à vivre dans un régime de libertés et d’égalité sinon fraternité, en additionnant les différences pour les agréger à un destin commun qui sera celui de la Nation. Et non pas un cadre malléable vidé de sens, distributeur de droits, sans règles coercitives, sans autorité, sans ordre public et sans responsabilité pour quiconque. C’est la réalité et de la responsabilité de chacun là où il se situe pour que le peuple ne soit plus contre la démocratie et comprenne qu’il détient un trésor précieux que l’on ne dépense qu’avec parcimonie.     

lundi 27 septembre 2021

On veut comprendre les politiques.

 

                On veut comprendre les politiques.

               Par Christian Fremaux avocat honoraire

N’est-ce pas le nœud gordien à trancher pour que les choix soient positifs, que l’abstention s’abstienne, et que le-la futur.e élu.e  présidentiel.le le soit sans  ambiguïté ? Car on s’aperçoit qu’à peine proclamé dans l’enthousiasme de ceux qui ont voté pour lui le président est contesté, et ce qu’il devait réformer n’est plus accepté voire vivement combattu dans la rue ! Y a-t-il eu maldonne ? Qui n’a pas été clair : le candidat qui est resté flou en faisant le grand écart pour plaire au plus grand nombre ? Ou les citoyens qui n’ont retenu que ce qui les arrangeait et n’ont pas tout compris des déclarations pompeuses ou des promesses subtiles ? Surtout quand il y a des crises violentes, sanitaire, économique et sociale ou autre avec des menaces qui ont tout bouleversé, des changements de valeurs, des exigences de droits nouveaux, et que la stabilité du fameux slogan fourre-tout du vivre-ensemble est un souvenir du passé. Le progrès est mis à toutes les sauces et le cuisinier en chef ne sait plus quelles recettes choisir.

Il y a manifestement un problème d’audition et de compréhension de nos hommes-femmes politiques qui sont très nombreux à vouloir faire notre bonheur. Ceux et celles qui seront rescapé.es des primaires, congrès, désignation ad hoc ou autre système de sélection par quelques milliers de militants, devront expliquer leurs programmes fruits  de négociations, de compromis, d’abandons divers, d’incohérences globales dissimulées en projets progressistes ,mélangeant la croissance et la déconstruction, l’amour de tous en désignant des méchants, des profiteurs qui s’enrichissent sur le dos des pauvres …On s’y attend mais on commence à  être fatigués  des anathèmes et injures ou exclusions dans notre bel état de droit et sa liberté d’expression à géométrie variable. On voudrait que les promesses se concrétisent rapidement en actes, que l’on fasse moins de diagnostics discutables, et que l’on dise comment on va faire, avec qui, selon quels coûts car on ne rase pas gratis, et comment on va souder la Nation dans sa diversité et ses croyances parfois antinomiques en lui donnant un destin, des objectifs et des valeurs communes. La République ne peut tout régler. On veut comprendre et ne pas être déçus. Encore faut-il parler de la même chose.  

J’illustre mon propos par des exemples concrets de l’actualité pour montrer qu’on n’arrive même pas à se mettre d’accord sur le vocabulaire et sur les faits. Ainsi dans un débat télévisé avec le vieux briscard politique professionnel J.L. Mélenchon celui-ci a admis s’être souvent trompé, mais a déclaré qu’il avait changé donc on pouvait le suivre désormais. Il est pour la créolisation de la société au sens du poète Edouard Glissant qui la définit comme la mise en contact de plusieurs éléments de culture sur un même endroit ce qui permet la cohésion sociale. Je ne sais pas si un poète peut trouver sa place dans le débat en cours mais la poésie ne nuit jamais. J’ai appris ce qu’était la créolisation, merci. C’est un fait. M. Mélenchon se dit optimiste. Son contradicteur était M. Zemmour vrai -faux candidat à la présidence de la république, avec ses références (parfois datées : qui connait bien Jacques Bainville ? je suis allé le lire, merci), confirmant fortement ce qu’on nomme comme des obsessions surtout sur l’identité qu’il ne confond pas avec la créolisation, et ses certitudes sur le déclin et un avenir incertain qui sont peut- être fondées ? M.Zemmour pense ne pas être pessimiste mais réaliste. Les mots sont donc essentiels.

 Il y avait en direct par des journalistes un contrôle des chiffres avancés par l’un et l’autre et vérifications d’éventuelles fake-news. Comment l’électeur peut- il s’y retrouver ?  Il aurait été plus rapide d’injecter aux débatteurs un sérum de vérité avant l’émission et comme je suis ancien cela m’a rappelé ce que disait M. Georges Marchais illustre secrétaire général du parti communiste au journaliste qui l’interviewait : « ce n’est peut- être pas votre question mais c’est ma réponse » ! On avait ri, mais jaune pour beaucoup d’électeurs.

Le débat continua sur la déclaration des droits de l’homme base de notre état de droit et de nos valeurs républicaines que l’on croit toujours universalistes, que chacun revendique pour en tirer des conséquences contraires. M. Mélenchon se dit républicain de 1789 et que les droits de l’homme s’adaptent en 2021-22 à tout, que l’on peut les appliquer en les étendant quasiment à l’infini. C’est un fait. M. Zemmour qui ne s’estime pas moins républicain pense que les droits de l’homme-sans les devoirs- ne peuvent pas tout résoudre. Il dénonce le gouvernement des juges qui s’immiscent dans le pouvoir exécutif ou pour les européens dans notre souveraineté, et que l’identité nationale ne permet pas de donner des droits à n’importe qui. C’est le même fait. On part du même texte.

Même réflexion avec le sentiment d’insécurité ou l’existence de violences réelles et dangers ou trafics divers ; et la justice laxiste ou non… Chacun a ses exemples et interprète les faits.    

J’espère que nous allons sortir de la confusion et de l’ambigüité. Les candidats devront parler vrai, et s’appuyer sur des faits avérés et non expliqués par l’idéologie ou vus par des lunettes déformantes pour faire plaisir à telle ou telle partie de l’électorat.

« Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément » a écrit Boileau.  Si l’on veut éviter encore plus de maux que ceux qui seront vilipendés dans la campagne présidentielle, il faut que nos présumés très intelligents politiques à qui on reproche d’être loin du terrain se mettent à la portée de leurs électeurs pour certes élever le débat mais surtout pour que les citoyens comprennent les enjeux, et décident en toute connaissance de cause. Car si on choisit le mauvais candidat on en prend au moins pour 5 ans ce qui est long surtout quand on est innocent.  C’est plus facile à écrire qu’à faire car une campagne politique est souvent réductrice, quelque peu éthérée dans les positions, et parfois de qualité médiocre sinon démagogique. Le peuple n’est responsable de rien, il subit et suit les chemins qu’on lui demande d’emprunter mais qui parfois mènent à une impasse.

Les citoyens veulent comprendre les candidats. Ceux-ci veulent être compris des électeurs. Ces derniers trouveront d’autant plus facilement l’urne pour voter qu’ils seront certains de faire le bon choix en ayant approuvé par raison ce qu’on leur proposait clairement sans émotion sur-jouée qui recouvre tout.  La confiance doit donc être réciproque.

     

lundi 13 septembre 2021

la justice de la CJR est- elle équitable?

 

                 La justice de la C.J.R. est -elle équitable ?

                  Par Christian Fremaux avocat honoraire. 

On attend de la justice qu’elle applique le droit sans faire de morale, condamne si les infractions sont avérées, relaxe si tel n’est pas le cas, et qu’elle personnalise sa décision en tenant compte de l’équité au profit de l’individu poursuivi. On connait la cour d’assises qui apprécie les crimes. Me Dupond-Moretti avocat en était un ténor. On a l’habitude des tribunaux correctionnels qui jugent parfois des personnalités ou des anciens dignitaires politiques pour des faits de droit commun comme des achats de costume, le travail d’un proche payé par de l’argent public, des dépassements de comptes de campagne, de la corruption, ou autres délits comme le fait le justiciable moyen. Parfois de la prison ferme est prononcée. On attend l’appel ou le pourvoi en cassation. Souvent on pense que l’indépendance des magistrats est un leurre, et qu’ils subissent des pressions pour condamner ou non. La politique s’est immiscée dans la justice selon l’opinion publique. Mais c’est parfois le contraire : la justice prend place dans la politique. Les juges n’ont rien demandé mais on les oblige à se prononcer sur des décisions publiques de politique réelle.  

En 1993 on a créé la Cour de justice de la république qui a pour mission globale de juger les ministres en exercice ou qui ont quitté le gouvernement, qui auraient pu commettre des fautes, des manquements devenus des délits voire des crimes dans l’accomplissement de leurs fonctions. Cela partait d’un bon sentiment : personne ne doit échapper à sa responsabilité que l’on soit puissant ou misérable, et encore plus avec l’ère de la transparence, du soupçon et de la justice pour tous. Les plus responsables doivent répondre encore plus de leurs actes.  C’est une question de confiance dans l’intérêt de la vérité et de l’égalité entre les citoyens solidaires d’un même destin et des conséquences d’une décision publique. Sa composition est particulière :il y a   3 magistrats du siège dont le président, et 6 députés plus 6 sénateurs. Les poursuites sont gérées par le procureur général de la cour de cassation. Toute personne qui se prétend lésée peut déposer plainte dont la recevabilité est examinée par une commission. Il y a ensuite l’instruction des faits dénoncés. Si les magistrats instructeurs les estiment fondés la personne poursuivie est jugée par la cour. Celle-ci n’entend ni témoins ni victimes. Cela donc évite de ne juger qu’en fonction de l’émotion, bien que présente surtout en matière de santé ou de la vie.La CJR ne s’est prononcée au fond qu’à de rares reprises. L’affaire la plus emblématique fut celle du sang contaminé. Avec la formule devenue culte : « responsable mais pas coupable… ».

L’actualité nous a comblé. M. Dupond-Moretti ministre de la justice en exercice a été mis en examen pour divers motifs dont celui de profiter de ses fonctions de ministre pour régler des comptes d’avocat. On a peu réagi. Le ministre gère toujours les magistrats et se bat pour l’amélioration de la justice quotidienne.   Mais Mme Buzyn ancienne ministre de la santé, responsable au gouvernement jusqu’aux élections municipales et chargée de la crise de la covid-19 vient d’être mise en examen par la CJR notamment pour mise en danger de la vie d’autrui, infraction qui implique une intention. Le port du masque la rattrape.

 Ce fut un tollé : comment la justice peut-elle poursuivre un ancien ministre alors que la crise n’est pas terminée disent les uns. Les autres répliquent que la responsabilité d’un ancien ministre ne peut être écartée par principe et que tout le monde est responsable de ses fautes. Tous s’interrogent sur le rôle de la justice. Faut-il que les hommes et les femmes politiques comparaissent pour leurs actes ou abstentions ou décisions inappropriées devant un tribunal ordinaire comme n’importe quel justiciable ? Ce qui veut dire que les juges prennent le pas sur les politiques alors que l’institution judiciaire n’est pas un pouvoir mais une autorité ? Ou seul le suffrage universel est le juge suprême, sachant que les ministres sont nommés-et non élus- par le président de la république élu au suffrage universel, sur proposition du 1er ministre qu’il a désigné, et dont la responsabilité politique peut être engagée devant le parlement ? Les juges n’auraient ainsi aucune légitimité. Pourquoi alors avoir créé la cour de justice de la république que d’ailleurs M. Macron voulait supprimer en 2017 ? Mais sa réforme constitutionnelle n’a pas trouvé de majorité au congrès à Versailles.

Le débat est lancé tandis que les juges feront leur travail celui prévu par les textes légaux et sachant que le responsable en chef le président de la république a une irresponsabilité pénale pendant son mandat selon les articles 67 et 68 de la Constitution. Si M. Macron se représente et est réélu en 2022, cela repousse l’échéance vers 2027-2028. D’ici là les ministres en exercice qui vont être aussi poursuivis tout est possible, l’ancien premier ministre, les hauts fonctionnaires voire l’Etat car tout s’est fait avec son autorité et les moyens suffisants ou non qu’il a déployés, seront sanctionnés ou blanchis.

On n’a donc pas fini de parler de la CJR et de la justice. Cela peut décourager les plus compétents qui n’auraient pas envie de se dévouer pour la chose publique, puisque le risque zéro n’existe pas, et qu’être ministre devient un métier dangereux. Les aléas de la vie ne sont plus supportés et chacun veut faire reconnaitre « ses » droits sur la collectivité. Il y a actuellement des milliers de plaintes recopiées à partir d’internet, ce qui est regrettable et peut avoir un effet contre-productif. La CJR n’a pas été créée pour des contentieux de masse et siéger jours et nuit et contrôler l’action publique. Paradoxalement on dénonce le gouvernement des juges mais on leur soumet n’importe quel dossier fut- il important ou non. La covid-19 ne sera pas jugulée par les décisions de la CJR qui par son enquête permettra cependant d’améliorer la prise de décision du pouvoir exécutif et surtout le fonctionnement de l’Etat et de l’administration en général, autre sujet de débats sur la décentralisation ou la déconcentration. 

Pour qui se sent non « coupable » même par incompétence ou manque de courage politique ou d’avoir été involontairement insuffisant mais qui est avant tout responsable, un procès pénal  donc public est difficile à assumer. Une condamnation est insupportable sinon injuste. N’en rajoutons pas. Ne cherchons pas des boucs émissaires. Pointons les défaillances, les négligences, les hésitations, les manquements en déplorant de n’avoir pas pu faire bouger le « mammouth », pour remédier à ce qui n’a pas marché.  La justice y compris la CJR n’a pas pour mission de condamner à tout prix. Parce qu’elle doit être équitable au -delà du droit elle permet de retrouver l’apaisement et la réconciliation pour regarder l’avenir et ne pas commettre les mêmes erreurs. Nous devons avoir foi dans les décideurs publics. La justice doit y jouer sa partition. Le seul à condamner est… le virus.

    

réflexions mitigées

 

                         Réflexions mélangées.

             Par Christian Fremaux avocat honoraire.

J’ai lu dans la presse que les talibans avaient nommé un gouvernement d’hommes exclusif puisque constitué uniquement de pachtounes et de mollahs sans aucune minorité de tadjiks, ouzbèkes, hazaras, serait-elle chrétienne ou non croyante voire laïque si ce mot existe sur place ? Qu’en disent nos séparatistes locaux français de diverses communautés ? Par ailleurs je n’ai pas entendu les protestations indignées sur le sort des femmes afghanes et des enfants par nos féministes voyant en France du harcèlement pour tout et par tous et adeptes de « me -too » : avec la burqa intégrale c’est plus difficile ! Les plus optimistes d’entre nous croyaient à un gouvernement inclusif. Comme le chantait Julio Iglesias « non je n’ai pas changé… ». L’utopie se heurte toujours à la réalité.

Les talibans ont recréé un ministère dont l’intitulé m’a toujours rendu dubitatif : celui de la prévention du vice et de la promotion de la vertu. Sans vouloir naturellement comparer avec l’importance de nos ministères en France, avec François Mitterrand nous avions eu le ministère du temps libre. M. Giscard d’Estaing avait créé celui de la condition féminine. Chacun peut apprécier les libellés encore faut-il qu’ils correspondent à un vrai progrès. Mais il y a une justice en Afghanistan qui se veut comme telle et qui applique le code avec sévérité : la charia qui permet de couper la main pour un vol et autres gracieusetés. Les avocats afghans ont du travail s’ils peuvent plaider ?  Notre état de droit que l’on veut exemplaire a dû être mal expliqué ! Nos juges ne sont pas compris. Et la déclaration des droits de l’homme n’a pas fait l’objet d’une traduction compréhensible. Le mot démocratie n’existe pas dans la langue du pays. On devrait envoyer nos rebelles humanistes-tolérants -bienpensants qui considèrent que notre pays est globalement liberticide faire de la formation accélérée à Kaboul.   

Chateaubriand a fait un compte rendu acerbe sur le ministre des relations extérieures de Napoléon 1er le prince de Talleyrand-Périgord et de Fouché ministre de la police de l’empereur se rendant nuitamment de conserve auprès du nouveau pouvoir celui de Louis XVIII pour l’assurer de leurs ralliements positifs dans l’intérêt de la France, après la chute de l’Aigle. Il a écrit : « j’ai vu le vice appuyé sur le bras du crime ». En politique la trahison est un art . Les talibans ramassent les grosses miettes surtout militaires qu’ont laissées sur le terrain les américains, et essaient de conserver de bonnes relations diplomatiques avec l’ancien envahisseur sous l’œil attentif des russes et des chinois. En pratique ils mettent en place leurs certitudes et leurs principes d’un autre âge, mais qui correspondent à leurs croyances : pas de culte de la beauté mais de la barbe, de la musique mais religieuse, la lapidation, et pas de loisirs cela pervertit ; les femmes à la maison et l’école au compte- gouttes… Sur le plan économique et social mise à part l’aide financière internationale, j’avoue que je ne sais rien. Eradiqueront- ils les trafics dont celui juteux de la drogue ?  Nous on accueillera les afghans persécutés qui fuient.

Un responsable afghan a été clair auprès de l’agence Reuters : « il n’y aura aucun système démocratique ni aucune discussion sur le système politique. C’est la charia et c’est tout ». Exit une république ou tout modèle qui s’en rapprocherait on est dans un bon vieux  régime théocratique totalitaire.  Les occidentaux ont aussi perdu cette bataille civilisationnelle ou institutionnelle. Chez nous on évoque la dictature sanitaire, les décisions unilatérales du chef de l’Etat, son mépris pour le peuple ou pour certaines catégories de la population, les lois forcément autoritaires bien que votées dans l’intérêt collectif et pour la protection du plus grand nombre, l’impossibilité d’user de nos libertés individuelles anti-vax ou anti- passe sanitaire et j’en passe. Sans compter le laxisme face aux violences et à la délinquance. Comparaison n’est pas raison mais à Kaboul les problèmes se règlent autrement. Notre démocratie est un exemple dans le monde, ne l’altérons pas. On devrait modérer nos ardeurs de contestations en conservant notre liberté d’expression. Nous avons besoin de solidarité et d’union dans un débat public de haute tenue et de respect mutuel.  Surtout avec le procès en cours de M. Salah Abdeslam et ses complices : notre justice doit rayonner et ressortir au camp des vainqueurs malgré les souffrances et le ressentiment à juste titre des victimes. M.Abdelslam comme M.Merah ne peuvent devenir des héros  pour une minorité qui vit en France en ayant bu le lait républicain et ayant suivi les cours de notre école laïque. Ce sont des assassins.   

C’est un joli nom « camarade » chantait Jean Ferrat pour magnifier les luttes pour les libertés réelles et non formelles. Il évoquait aussi la nuit et le brouillard des camps, ce qui à notre époque perdure et renvoie à des territoires renfermés sur eux-mêmes soumis à une répression féroce.  On ne peut abandonner personne, en particulier ceux qui sont dans la détresse. Peut-on être tolérant face à l’intolérance ? Guillaume Apollinaire a affirmé « que jamais les crépuscules ne remplaceront les aurores ». Le poète a toujours raison, il voit plus haut que l’horizon…. Et nous avons toujours la résilience pour rebondir.

La prévention du mal ou du vice est d’avoir un mode de vie consensuel et des lois et des règles qui s’appliquent à tous dans l’égalité et la compréhension mais sans faiblesse. La promotion du bien et de la vertu c’est de récompenser ceux qui ne trichent pas, participent, sont civiques, connaissent leurs devoirs et demandent peu sans exiger ou profiter en assumant leurs propres responsabilités à leurs niveaux. La réussite ne peut qu’être collective.

Notre humanisme n’est ni pleureur ni victimaire et nous ne sommes pas rongés par une permanente culpabilité.  Nous avons des valeurs supérieures dans la liberté de conscience et un système organisationnel républicain qui permet à chacun de profiter de l’ascenseur social qui peut avoir des pannes certes mais qui permet de se hisser si nous nous prenons en mains. Faisons le contraire de ce que les talibans et  leurs imitateurs revendiquent. Comme pour les terroristes n’attendons ni repentir ni compassion car ils vivent dans un monde qui ne sera jamais le nôtre. On a le droit de détester ceux qui tuent ou veulent imposer par la force ou le nombre leurs modèles de vie. Personne n’a envie de quitter le paradis : pourquoi y a-t-il tant de monde sur les routes et les mers qui espèrent une vie meilleure en venant chez nous malgré nos défauts ? 

Le malheur Afghan entre autres nous oblige à encore plus de grandeur, d’universalisme et d’efficacité. Cela dépend de nous.