mardi 16 novembre 2021

La constitution cet obscur objet de désir

                           La Constitution cet obscur objet de désir.

                               Par Christian Fremaux avocat honoraire.

La Constitution notre texte juridique suprême qui organise les relations entre les pouvoirs et fondateur de l’état de droit fait l’objet de convoitise. Pourquoi ? Le citoyen doit- il s’en inquiéter ou s’en réjouir ? Le progressisme et la possibilité de réformes doivent -ils concerner les tables de la loi ? C’est une fixation de certains candidats à la présidence : il faut changer de Constitution pour pouvoir agir ou en modifier certains points pour éliminer les obstacles de droit. Comme si avec de nouvelles règles du jeu les problèmes disparaitraient, les comportements individuels se bonifieraient, les violences diverses s’atténueraient, et le bonheur social économique et sociétal dans une nature sauvée régnerait. On veut le croire.

                                                     Depuis 1958.

Le 9 novembre 2021 le général de Gaulle symbole de la résistance et de la grandeur sans petites combines et manœuvres subalternes a dû se retourner dans sa tombe. On a vu ou aperçu le ban et l’arrière ban des politiques à Colombey -les -deux églises notamment Marine le Pen dont le papa avait combattu férocement le général pour des raisons liées à l’indépendance de l’Algérie. Madame Hidalgo également présente qui se veut l’héritière du socialisme canal historique F. Mitterrand a certainement lu le livre de ce dernier sur « le coup d’Etat permanent » dénonçant le général revenu au pouvoir à qui on prêtait des tentations de dictateur. Surtout en raison de la Constitution qu’il avait mise en place en 1958 avec le fameux article 16 qui pouvait lui donner pleins pouvoirs. M. Mitterrand élu président changea d’opinion et trouva très bien d’être un monarque républicain et d’avoir à sa disposition le texte du général à savoir une Constitution qui avait des fondations fortes et des valeurs républicaines et permettait de gouverner de façon efficace mais démocratique. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis.

                                           C’est quoi la Constitution ?

La Constitution est un ensemble de textes juridiques qui définit les institutions de l’Etat et organise leur fonctionnement et qui s’impose aux lois conformément à la hiérarchie des normes. On y rappelle aussi des grands principes supérieurs dans leurs portées qui viennent de loin et des textes fondamentaux comme les droits de l’homme. La Constitution votée le 4 octobre 1958 à l’initiative du général de Gaulle qui a créé la V -ème république, précise par exemple dans son article 1 que « la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale… ». C’est à l’aune de cette règle fondamentale que l’on apprécie en 2021 les velléités de séparatisme, le débat sur la place des religions ou d’une en particulier et les revendications de certains en matière d’identité, la participation des citoyens aux décisions publiques qui les concernent par les élections et à faire plus entendre leurs voix si on les questionne.  On ne peut faire n’importe quoi : on doit respecter le texte qui est le garant des libertés, de l’objectivité, de l’égalité, et de l’intérêt collectif. Ainsi depuis 1958 avons-nous un pouvoir exécutif (le gouvernement nommé par le président de la République) et un pouvoir législatif (des députés et sénateurs élus par le peuple). Nous avons aussi  et simplement  une « autorité » judiciaire . Faut-il que ladite autorité devienne un pouvoir ? Or on discute sur le gouvernement des juges réel ou supposé. Le général avait choisi une priorisation : La France d’abord, puis l’Etat et enfin le droit. Est-ce immuable à notre époque où l’individu pense n’avoir que des droits ; où la nation est un concept discuté ; où l’Europe et ses juges interfèrent pour tout ; et où beaucoup de paradigmes nouveaux sont apparus, dans le cadre de la globalisation et de l’évolution des mœurs et du rapport à l’autre ? Des candidats pensent que si on ne modifie aucun article, rien ne sera possible on n’avancera pas et les problèmes demeureront. Montesquieu a écrit que l’on ne touche aux lois que d’une main tremblante. On peut le dire de la Constitution- la loi constitutionnelle la plus importante- car on sait ce que l’on a et on ne peut partir à l’aventure.

 Depuis 1958 la Constitution a été modifiée déjà 24 fois : de 1962 avec l’élection du président de la république au suffrage universel avec le reproche actuel au président de sa gestion jupitérienne : au quinquennat en 2000 ou à la création du référendum d’initiative partagée en 2008 pour donner de nouveaux droits aux citoyens.  On utilise selon la Constitution (articles 11 et 89) soit la voie du référendum en interrogeant tous les citoyens, soit la voie du congrès à Versailles où il faut une majorité des 3/5-ème des députés et sénateurs pour que le projet aboutisse. M. Macron a essayé sur divers sujets en 2019 : il a échoué devant les parlementaires.

                                             Des idées percutantes ?

M. Mélenchon veut entrer en VI -ème république et dès son élection réunir une assemblée populaire constituante. Je ne sais pas ce qu’il veut y mettre, comment il va réorganiser le fonctionnement des institutions, qui va décider. Je comprends qu’il veut rendre le pouvoir au peuple : mais est-il sûr que le peuple en veut car avoir des responsabilités c’est risqué (voir les poursuites judiciaires liées à la covid-19) et on peut se contenter de ne vouloir qu’être entendu ? Faut-il bouleverser les institutions pour ça ?

M. Bertrand qui a des idées de fermeté pour combattre notamment la délinquance, le terrorisme, le laisser- aller avec l’assistanat, veut restaurer l’autorité de l’Etat et protéger ceux qui le servent, en obligeant les magistrats à sévir malgré leur indépendance. Il se sent bridé par les lois internes actuelles et celles des juges européens. Il veut un état de droit agile et ne supporte pas que l’on dise que l’on ne peut rien faire notamment en matière de justice rendue au nom du peuple français et d’immigration. Il interpellera donc les citoyens par voie de référendum à questions multiples pour un changement de certaines dispositions de la Constitution pour que le pays et ses citoyens redeviennent souverains. C’est un débat qui a lieu aussi dans d’autres pays européens.

                                                  Faisable ou non ?

Les juristes constitutionnalistes vont donc avoir du pain sur la planche pour savoir si telle proposition d’un candidat est faisable ou non. Pour être crédible il faut dire la vérité et ne pas prendre ses désirs pour des réalités.  C’est le moins que l’on attend d’un futur président de la république.  On a besoin de piliers solides non solubles dans l’idéologie et la polémique. Vive la Constitution qui doit nous nous garder de tout mirage. Et vive la France celle d’Hubert Germain dernier compagnon de la libération, et éternelle

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