mardi 7 décembre 2021

Bonne fête Paulette

 

                        Bonne fête Paulette.

                       Par Christian Fremaux avocat honoraire.

On est dans une telle grisaille pas seulement climatique avec la plupart des gens énervés, indignés et en proie à l’émotion nouveau paradigme pour tout qui prend une ampleur démesurée, sans recul, sans indulgence, sans humour ni respect, que l’on se demande si ce n’est pas notre fête permanente, avant d’aborder celles de fin d’année et du 1er janvier 2022 dont on espère beaucoup parfois pour des raisons opposées. Comme si la terre allait cesser de tourner quel que soit le ou la candidate élu (e) à notre présidentielle. Il faudra bien continuer à faire des efforts collectifs et le virus ne disparaitra pas en étant mort de joie. La situation me rappelle le sketch de Guy Bedos qui souhaite une bonne fête à sa femme Paulette qu’il déteste. Peut-on rire ou sourire de tout ce qui est excessif ?

On peut tout désirer ainsi que son contraire. A 13 ans Victor Hugo déclarait vouloir être Chateaubriand ou rien. Malgré ses contorsions politiques le poète - écrivain a réussi.  L’âne de Buridan regardait à distance égale un seau d’eau et un seau d’avoine. Pétrifié il ne savait que choisir : il est mort de soif et de faim. Le en même temps peut conduire à l’immobilisme voire au vide surtout si l’opposition ne propose rien de percutant pouvant rendre confiance aux électeurs. Des personnalités ont la répartie féroce mais en 2021 on use plus de violence et d’outrance verbales que d’esprit. G. Clémenceau qui assistait aux obsèques de Félix Faure (décédé avec « sa connaissance ») a dit à propos de l’ancien président : « il est retourné au néant, il a dû se sentir chez lui ». On aimerait rire par nos temps plutôt que de se désoler et de ne voir que le verre à moitié vide. Comparons-nous avec la majorité des Etats et des peuples dans le monde à feu et à sang.   

Chacun imagine qu’il détient la vérité et que l’autre est un ennemi qui va l’empêcher d’exercer ses droits, avec ses libertés individuelles et faire ce qu’il veut peu important le collectif. On n’évoque jamais la Nation et pour les plus courageux la France avec les devoirs sauf pour dénoncer le voisin qui ne les respecte pas. Il faut de temps en temps se regarder dans le miroir et s’interroger : fais-je bien dans mon intérêt certes mais aussi dans l’intérêt général ? Gavroche chantait « je suis tombé par terre c’est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau c’est la faute à Rousseau ». Voltaire nous manque pour nous apprendre la tolérance. J.J. Rousseau qui écartait les faits pour raisonner dans l’absolu et a abandonné ses enfants a écrit l’Emile ou de l’éducation (morale). L’école doit transmettre des connaissances et la famille se charger de l’éducation, républicaine bien sûr. Tout est possible.

 Malgré les mesures prises pour lutter contre les inégalités, la société est devenue une lutte d’égoïsmes, d’egos surdimensionnés, de discriminés réels ou supposés et de victimes y compris les héritiers de ceux qui ont souffert dans un autre temps avec d’autres valeurs. On ne bâtit pas un avenir commun en regardant sans arrêt dans le rétroviseur. Une opinion est parfois un délit et la justice est saisie pour départager les avis, et fixer les limites de la liberté d’expression. On se plaint des juges mais on leur demande de régler ce que la loi n’a pas prévu, et d’être le souverain de paix des soubresauts de la société ou d’être laxistes pour les uns et trop sévères pour les autres, nos amis. Il faut savoir ce que l’on veut et le citoyen est souvent versatile et contradictoire avec lui-même. Le vaccin de l’objectivité et de la raison devrait être obligatoire. On demande des interdictions de paraitre ou des censures au nom de sa liberté de protester, de son activisme naturellement de bonne foi décrétée par soi-même et de son pacifisme dans le camp du bien auto-défini. Ce qui permet de perturber celui ou ceux que l’on n’aime pas et qui feraient peur aux électeurs qui vont s’abstenir.  Mais les citoyens ne sont pas dupes, ont l’expérience de la politique et savent ce qu’ils veulent. Les faux prophètes ne les émeuvent pas. Ce raisonnement s’applique à tous et chacun a un choix préférentiel et partisan. Ce n’est pas un argument qui permet avec violence active ou passive de tenter d’éliminer l’autre ce qui est d’ailleurs contreproductif. Ne fait pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse (Confucius). C’est le minimum syndical de la démocratie. On ne sait plus qui est l’agresseur et qui est l’agressé. Comme il ne faut pas prendre position pour ne froisser personne comme d’habitude on renvoie tous les intéressés devant le tribunal qui arbitrera.  

Le genre humain est le nouveau vocable à la mode. Autrefois il y avait dans le débat politique ou non les ennemis présumés de classe et du genre humain, les méchants. Ils reviennent et n’auraient pas souvenir de ce qui s’est passé le siècle précédent et les horreurs actuelles. Seule l’élite des éveillés en a conscience ! Paul Valery voyait dans les ennemis du genre humain la tradition et le progrès. Je n’aborde pas la théorie du genre pour ne me fâcher avec personne !  

A vouloir tout concilier et joindre les deux bouts de l’omelette selon l’image culinaire de nos dirigeants de tout horizon, on risque le grand écart et une élongation. L’ancien ministre UDR Alexandre Sanguinetti disait pour critiquer Edgar Faure qu’à force d’avoir un pied dans la majorité et un autre dans l’opposition on allait manquer de pieds.

Remercions les militants violents à leur insu de leur plein gré de démontrer que la république n’a pas besoin des extrêmes et des radicalisés, qu’elle doit être rassemblée, et que la tolérance ne concerne pas les intolérants croyant détenir des certitudes, intolérants qui sont d’après eux ceux qui ne pensent pas bien, et qui ne croient pas comme eux. C’est une confusion totale de réflexion. La République est toujours un compromis qui s’appuie sur des valeurs avérées et des principes notamment celui de la laïcité par ces temps à vocation transcendantale pour certains.

Les Charlots chantaient « merci patron » en dénonçant les pratiques managériales de certains chefs d’entreprise. On a progressé en matière de ressources humaines. Il nous reste à faire mieux dans le débat public qui doit être plus libre, sans tabous, plus apaisé et avec plus de hauteur tout en étant sérieux pour proposer des solutions aux citoyens. Mes citations sont anciennes mais sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques comme l’a écrit le poète André Chenier avant de perdre la tête sous la guillotine. 

Bonne fête de Noël s’il est encore possible de citer Noël sans choquer des libres penseurs ou des adeptes d’autres croyances et sinon pour tous, joyeux 1er de l’an qui est neutre et républicain.   

 

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