jeudi 22 juillet 2021

Les conseils de prud’homme et le virus.

 

              Les conseils de prud’homme et le virus.

                Par Christian Fremaux avocat honoraire.

La loi rien que la loi et le droit avant l’émotion et l’intérêt particulier tels sont les leitmotivs et les devoirs des juges qui n’ignorent pas l’humain cela va de soi dans le cadre des intérêts supérieurs de la collectivité nationale, ni les grands principes de la république et les libertés individuelles comme publiques.  Ils doivent souvent résoudre la quadrature du cercle qui évolue selon les circonstances imprévues et le progrès défini par personne et souvent revendiqué par des minorités agissantes. Les tribunaux rendent des jugements et arrêts et pas des services et ne doivent pas être entrainés dans les polémiques.  Le covid-19 ne changera pas les fondamentaux de la justice et en particulier la pratique du conseil de prud’homme (composé de 4 juges bénévoles : 2 employeurs et 2 salariés) qui a la grande responsabilité de participer à l’ordre public social ce qui à notre époque est suivi de très près par des observateurs attentifs et exigeants avec des injonctions contradictoires selon la place où l’on se situe et les fonctions que l’on exerce entre employeurs et salariés, tous étant des citoyens. Juridiction qui utilise l’équité parfois pour corriger la force qui peut être injuste de la loi et pour juger de l’exécution des contrats de travail ou de leurs ruptures de la façon la plus mesurée et objective possible.  

Le président de la république a annoncé une « vraie-fausse » obligation vaccinale pour la rentrée en espérant n’avoir pas à sévir.  La loi est en cours d’être votée au parlement pour le passe sanitaire, et les débats sur les libertés sont âpres à juste raison s’agissant de droits essentiels pour tous. On parle de sanctions qui peuvent avoir un effet sur le contrat de travail d’où la saisine future et éventuelle des conseils de prud’homme dans les mois qui viennent. Ce sera le contentieux virus !  

Les juristes discutent de la portée de la recommandation forte par l’exécutif ou de la loi qui contraint. Avec un vaccin obligatoire pourra-t-on estimer par exemple qu’il y a une violation d’une liberté fondamentale qui entraine la nullité du licenciement déjà prévue à l’article L.1235-2-1 du code du travail et qui permet de déroger à l’application du barème légal de l’article L.1235-3 du code du travail qui fixe un plancher et un plafond de dommages-intérêts en fonction de l’ancienneté et la taille de l’entreprise ?

La ministre du travail a indiqué que si le salarié ne se vaccinait pas, il pourrait faire l’objet d’un licenciement pour motif personnel c’est- à- dire une cause réelle et sérieuse qui permet de recevoir les indemnités légales et conventionnelles puis de s’inscrire à pôle emploi après avoir reçu un avertissement, mais en persistant dans le refus.  Elle a évoqué aussi une mise à pied préalable (qui n’est habituellement pas payée) et qui renvoie à la faute grave privative de préavis et d’indemnité de licenciement (ancienneté) mais qui oblige l’employeur à régler aussi les congés payés. Je pense que le gouvernement n’a pas arrêté ses choix- tous mauvais a priori d’ailleurs- sur ces points de droit, comme il va écarter un licenciement pour faute lourde que réclament certains employeurs pour n’avoir rien à payer sauf quand même les congés payés. Le virus est déjà mortel. Il ne peut pas y avoir de surcroît des conséquences excessives dans les relations sociales sachant que les patrons se battent pour survivre et faire fonctionner leurs entreprises indispensables à l’économie en général et que les salariés subissent la crise comme tout le monde jeunes comme vieux.  Ce n’est la faute de personne si la covid-19 entraine des dégâts dans les domaines économique, social et de santé. Il ne faut pas que l’on en rajoute sur le travail, les libertés et la justice.  Vont peut- être s’y adjoindre des licenciements économiques individuels motivés par les méfaits du virus.  C’est -dire si le droit du travail – comme d’autres domaines telle la sécurité - risque d’être bouleversé car il faut de plus en plus concilier la défense de l’intérêt général et l’autorité de l’Etat en maintenant les libertés fondamentales de notre état de droit dans notre démocratie. Il y a des conflits de légitimités. Le pacte républicain va devoir être revu et conforté en s’adaptant à ce qu’on n’avait pas prévu.   

Les conseils des prud’hommes apprécieront les litiges puisqu’ils sont en première ligne judiciaire. Les juges de carrière des cours d’appel ou ensuite de la cour de cassation dans des années fixeront la jurisprudence et peut être on l’espère que quand ils se prononceront ,le virus aura-t-il disparu et la raison et la science auront triomphé ? En attendant vu l’urgence ce sont les conseillers employeurs et salariés qui porteront l’immense et redoutable honneur d’allier le droit et l’éthique, de concilier- ce qui est leur mission première- notamment les libertés individuelles et l’intérêt collectif et ainsi de rendre une justice de proximité et concrète qui pacifie.  Faisons leur confiance et attendons les textes légaux validés ou amendés par le conseil constitutionnel composé de sages.             

 

mardi 20 juillet 2021

La justice un monument en péril.

 

                                     La justice un monument en péril.

                            Par Christian Fremaux avocat honoraire

Quand le bâtiment va tout va parait -il sauf qu’avec la crise il a des difficultés ne serait- ce que pour avoir des matériaux et des bras, le confinement ayant ramolli des bonnes volontés. La covid-19 n’a pas amélioré la justice dans son fonctionnement et je crains que les dernières péripéties n’aient atteint les fondations. Cela me désole. Je n’ai pas plaidé activement  pendant plus de 42 ans quasiment chaque jour devant toutes les juridictions de France et de Navarre sans que je m’intéresse encore de près à la justice tant dans son organisation matérielle que pour ses messages dans la société à travers ses décisions .Bien qu’en retraite désormais je continue à exercer peu ou prou et comme président d’audience auprès du conseil de prud’homme à Paris où avec mes collègues magistrats d’origine professionnelle (nous sommes deux employeurs et deux salariés) nous faisons face à un contentieux très important et parfois âpre. La cour d’appel de Paris infirme ou confirme nos jugements et je prends acte du raisonnement en droit et en fait des magistrats de carrière.

Nous sommes quoiqu’en disent des excités peu objectifs dans un état de droit, ce qui veut dire que chacun peut saisir les tribunaux pour faire reconnaitre ses droits, conforter ses libertés y compris de vivre sans vaccin au détriment de la collectivité, voire se battre contre l’Etat c’est-à -dire nous pour l’obliger à agir. Nous vivons dans un beau pays ouvert à la démocratie que l’on critique pourtant et que l’on sabote par l’abstention, où tant de possibilités nous sont offertes en même temps que nous pouvons exprimer à haute voix notre mécontentement. On crie aux mesures liberticides pour tout et rien, mais on veut aussi être protégé. On a la société que l’on mérite et que l’on fabrique. Tel est le cas de la Justice qui n’est ni un pouvoir ni un contre- pouvoir mais une autorité.  

La justice est controversée depuis longtemps voire toujours. Salomon n’est plus  et ne peut arbitrer tous les litiges du quotidien.  César baisse ou non le pouce mais il doit tenir compte malgré lui des médias en continu et des réseaux sociaux donc des minorités agissantes, ainsi que des juges de la cour européenne de Strasbourg et des grands principes humanistes ou prétendus tels. L’opinion publique est entendue quand elle est dans le sens du politiquement correct sinon on doit l’écarter des prétoires naturellement.   On pense que la justice est forte avec les faibles et indulgente pour les puissants. C’est faux et les dernières ou plus lointaines personnalités condamnées vouent les juges aux gémonies. Je parle évidemment de l’aspect pénal qui aborde le mal quasiment le seul qui intéresse le quidam qui veut tout connaitre du criminel, et ignore les victimes en lâchant une larme de compassion, car cela aurait pu être pour soi ! Or le contentieux le plus important  dont les juges non médiatisés ont la lourde charge concerne les problèmes de la vie personnelle,  un divorce, une garde d’enfants, un licenciement,  les conditions de travail avec du harcèlement ou de l’inégalité, un permis de conduire, un petit litige d’abonnement  ou d’assurance, une construction et un permis de construire,  des relations  difficiles avec les administrations, les communes…C’est ce monument qu’il faut consolider, moderniser notamment  par des équipements numériques , des simples téléphones et  des photocopieuses,  remettre à proximité, faciliter la saisine par des procédures rapides et allégées moins complexes, ce qui veut dire augmenter le nombre des juges qui siègent réellement et leur demander d’être les plus véloces possible ; les payer mieux  pour avoir les meilleurs  professionnels,   les faire aider par des assistants administratifs, multiplier les greffiers, et obliger tout le monde dans certaines conditions à du rendement comme dans toute entreprise privée. Le résultat n’est pas l’ennemi du bien, de la réflexion et de la compétence. J’ajoute et de la responsabilité car aucun professionnel fût -il fonctionnaire ou magistrat ne peut se retrancher derrière son ministère ou l’Etat s’il commet une faute grave qui a eu des conséquences. Naturellement ce dernier point se discute.  

On ne peut se contenter de toujours palabrer pour savoir si les procureurs pourraient être indépendants du ministère de la justice ce qui n’est pas le cas constitutionnellement parlant et peut être une fausse bonne idée, et si les juges du siège ne cèdent pas à des pressions. Il faut faire confiance aux hommes et aux femmes, et instituer un système qui permet aux juges d’être impartiaux sachant qu’ils ont le droit d’avoir des humeurs et des convictions et que le plus difficile -et j’en ai une modeste expérience dans mon activité prud’homale- est de n’envisager que la loi rien que la loi, et de ne pas faire interférer avec le droit la morale personnelle ou indiquer le chemin à suivre. Les politiques sont là pour cela.

Bien sûr on se rappelle les maçons du mur des cons ou le parquet national financier qui a contrarié et le mot est faible la trajectoire de l’élection présidentielle de 2017.  Mais globalement la justice selon moi est neutre mais peut être suis- je naïf, et elle rend des arrêts pas des services comme l’a écrit le 1er président Séguier de la cour d’appel de paris au 19 -ème siècle. J’avoue que la mise en examen inédite pour un ministre qui reste à son poste à savoir M. Dupond-Moretti pour un éventuel conflit d’intérêts et la perquisition échevelée de ses bureaux à la chancellerie me perturbent, car la confiance en la justice représentée par une déesse aux yeux bandés s’érode. Mon excellent ex-confrère doit regretter d’avoir fait son travail jusqu’au bout pour défendre tous ceux qui l’ont choisi pour son talent et sa détermination ! On n’y comprend plus rien sur le rôle des uns et des autres et des magistrats entre eux. On ne peut pas dire que la justice en sort grandie. Il y a des fissures dans l’édifice.   M. Dupond-Moretti n’est pas heureusement M. Mélenchon et il ne sera pas en plus poursuivi pour rébellion ! Si des magistrats veulent choisir leur ministre, pourquoi ne pas confier le ministère du travail à la Cgt, Fo et la Cfdt réunis ; ou le ministère des finances au Medef et aux banquiers ; et peut être le ministère des armées à un objecteur de conscience ?  

Le ministère de la justice fait partie du domaine régalien et il doit être fort pour maintenir l’état de droit, défendre les institutions et les valeurs républicaines, et permettre aux citoyens d’exercer leurs libertés, aux entreprises de dégager de la valeur ajoutée, et de poser les limites là et quand il le faut. Il a aussi une visibilité symbolique. Quand la justice passe tout ne se résout pas mais tout peut se comprendre de façon équitable. Confortons notre monument qui est en péril et notre société en sortira plus confiante en elle -même et envers ceux qui la représente puisqu’il ne peut y avoir de plus égaux que d’autres. L’intérêt général n’est l’apanage de personne. La justice est une vertu.     

vendredi 16 juillet 2021

Devoirs d’été.

 

                                                     Devoirs d’été.

                         Par Christian Fremaux avocat honoraire.

Nous sortons provisoirement d’une période difficile et il va falloir préparer la rentrée qui ne s’annonce pas sous des auspices favorables, mais j’espère me tromper, et nous allons nous lancer tête baissée dans la campagne présidentielle ce qui va entrainer toutes les outrances, approximations, injures hélas, disqualification des autres, et promesses improbables. Le citoyen a déjà fait connaitre sa désapprobation par une abstention record aux dernières élections locales. Il est fatigué des débats stériles, du manque d’efficacité de l’exécutif et de tous les dirigeants, des discours contradictoires souvent dans la même catégorie professionnelle comme les spécialistes de l’épidémie, et du fait que toute minorité prétend imposer sa vérité .Il se bat contre le virus en se résignant aux contraintes, et  va cependant  se mobiliser pour l’élection du futur chef de l’Etat car le français est sérieux, responsable, et il ne veut pas laisser son destin et celui de ses enfants entre les mains d’idéologues, de prétendus rebelles divers qui profitent en même temps du système, et il sait qu’il doit protéger les acquis et les valeurs républicaines et traditionnelles.

 Le progrès dont la définition est à géométrie variable et qui n’est pas toujours positif, ne doit pas avoir lieu dans n’importe quelles conditions, au profit de quelques groupes ou individus qui n’exigent que des droits et veulent faire notre bonheur malgré nous. Il n’est pas nécessaire de bousculer ou de déclarer périmés tous les cadres de vie qui font la beauté de nos territoires qui doivent rester vivants et sécurisés, et imposer des règles qui ne correspondent pas aux habitudes sociétales et séculaires qui ont fait leurs preuves. Le citoyen veut que l’on s’occupe de la proximité selon la formule polémique en son temps de « la Corrèze plutôt que le Zambèze », ce qui n’interdit pas que l’on accueille ceux qui sont convaincus que notre société avec nos manières de vivre est enthousiasmante, et que l’on participe au règlement des grands problèmes du monde en étant solidaire avec les plus malheureux. Il n’appartient pas aux élites prétendues et auto-déclarées de décerner des brevets du bien, et de dire ce qu’il faut faire ou non. Personnellement j’en ai assez d’être taxé de racisme pour tout et rien ; d’être accusé de discrimination quand je me réfère à la laïcité liberté qui permet à chacun d’exercer sa liberté de conscience mais qui ne peut entrainer des exigences et des partitions y compris sur le domaine public ; de devoir me repentir pour ce que mes ancêtres auraient fait de mal dans leurs époques pour tout sujet ; et de devoir demander pardon à qui s’estime victime… Et je n’énumère pas plus chacun ayant son expérience personnelle. Je ne digère pas les leçons de morale.  

Je crois qu’en réalité on attaque notre civilisation, ce qu’est notre nation millénaire, ses qualités, ses défauts parfois qu’il faut supprimer, mais ce qui nous a conduit à être dans le monde la 5ème ou 6ème puissance économique et militaire (des pays devraient nous en être reconnaissants) , et surtout à avoir un rayonnement universel par nos valeurs. A force de donner dans le contrat social des coups permanents de canif voire plus (le terrorisme individuel interne ou organisé) il y a le risque que nous sombrions dans le chaos. C’est un danger imminent qui impose une réaction forte en légitime défense.  Je n’évoque pas le terme délitement qui vaut à des généraux en retraite de comparaitre devant un conseil de discipline. La liberté d’expression est réservée à ceux qui se situent dans le camp du politiquement correct, notion fumeuse définie par personne d’ailleurs.  Ainsi quand j’entends des gens parfois très instruits et très privilégiés hurler à la tyrannie, ou à la dictature, ou au totalitarisme à propos de certaines décisions publiques qui désormais sont toutes liberticides (sic) y compris celles qui protègent contre la délinquance ou l’insécurité qui est vécue dans la réalité, ou parce qu’on veut préserver la santé collective, je m’insurge. Je pense qu’en Corée du Nord ou à Cuba et la liste des pays autoritaires qui mettent à mal leurs populations est très longue, leurs dirigeants qui s’auto- qualifient de démocrates doivent être pliés de rire à entendre nos états d’âme et nos discussions ! Nous succomberons par nos libertés et notre droit si  l’on n’y prend pas garde.

 Notre devoir d’été est de se calmer et de retrouver un niveau mesuré de débats qui n’incitent pas à la surenchère et à la violence. Personne ne détient la vérité.  Relisons les philosophes, les stoïciens, les tolérants, Voltaire et les autres, ceux qui définissent la Nation une et indivisible. Bannissons la haine et le complotisme des réseaux sociaux. N’oublions pas que la déclaration des droits de l’homme parlait aussi du citoyen. L’individu peut avoir un conflit d’intérêts avec le citoyen qu’il est d’abord. Sans civisme, sans l’acceptation volontaire de limiter nos ambitions et ce que nous voulons obtenir pour notre confort, l’Etat qui est nous dans sa diversité, ne pourra fournir. Notre devoir d’été est de nous préparer à penser collectif, et notre responsabilité individuelle est de coopérer aux efforts nécessaires. Il ne faut pas de plus égaux que d’autres qui exigent parce que ce sont eux et qu’ils le mériteraient. L’égalité est la norme. La fraternité n’est pas qu’une valeur devenue constitutionnelle et elle implique que chacun aille vers l’autre et que personne ne se soumette, à la condition évidente d’adhérer au cadre républicain, à ses principes, à l’ordre public.  Quant à la loi elle protège tandis que la liberté (sans limites) opprime. Mais nos libertés publiques ne sont pas en danger, les circonstances les malmenant quelque peu à titre temporaire.

Les politiques, les responsables syndicaux et de toute nature, tous les élus à leurs niveaux et les multiples candidats au poste suprême - quelle chance ont les français d’avoir autant de personnalités qui font le sacrifice de leur vie personnelle pour nous quidams de base - devront donner l’exemple, débattre avec sérieux voire passion pour montrer qu’ils croient en ce qu’ils disent,  et ne pas se contenter de critiquer. Ils devront avoir des programmes clairs, et proposer des solutions concrètes, des choix humanistes, sans révolution si possible merci. Ils ont tout l’été pour préparer leurs devoirs pour convaincre en respectant l’adversaire.  Le corrigé aura lieu en avril 2022.

Aux armes légales citoyens car il faut un état de droit fort, et des valeurs morales car le spirituel a autant de nécessité que le matériel indispensable. Optons pour une rentrée raisonnable. On doit y croire.  Sous les pavés la plage disait-on en mai 68. En octobre 2021 il faudra du béton armé pour consolider l’édifice, et pour les décisions difficiles à prendre du courage qui permet l’espoir. Nous devons gagner la paix.  

lundi 14 juin 2021

Billet d’humeur : On perd la boule.

 

            Billet d’humeur : On perd la boule.

               Par Christian Fremaux avocat honoraire

Il y a des parallèles à faire simplement pour constater, déplorer et/ou se réjouir selon ses convictions. Il est temps de voter pour qu’on en finisse de cette répétition car la présidentielle approche et l’artillerie lourde va être dégainée.  

Le gifleur du président de la république n’a pas supporté que M. Macron vienne vers lui sourire aux lèvres pour tenter de le convaincre de sa bonne politique. Contre un sourire une gifle une violence ordinaire, par un simple quidam qui se revendique des gilets jaunes (sic) et des chevaliers au cri de Montjoie-Saint-Denis, c’est la tendance de l’époque. La haine de la macronie dépasse toute ouverture d’esprit. Elle vaut 4 mois ferme avec mandat de dépôt outre du sursis et la privation de droits civiques : c’est le coût du non- respect envers le chef de l’Etat. Oyez oyez braves gens. 

M. Séjourné député européen et proche conseiller du président de la république a déclaré si j’ai bien compris, qu’il fallait interdire Cnews et surtout M. Zemmour car ils rabaissaient le débat public. Je ne sais pas si sur d’autres médias en continu ou si sur le service public le niveau du débat est dans la stratosphère, alors même que les dirigeants et parlementaires de LREM participent allègrement aux échanges d’invectives sur les plateaux télévisés. Je n’ai pas entendu M. Séjourné ancien socialiste sauf erreur, qui doit avoir des qualités intellectuelles incomparables exprimer des idées qui transcendent, font consensus et qui sont applicables concrètement.  Mais est-ce grave docteur comme maladie démocratique de vouloir interdire les idées qui ne vous plaisent pas, les discussions qui abordent les problèmes qui fâchent mais qui préoccupent le citoyen y compris dans le monde rural qui échappe aux bienfaits de la mondialisation, qui fume des clopes et roule au diesel et qui pense que la classe politique n’est pas à la hauteur des enjeux. Comme antidote a-t-on le droit de penser que l’insécurité n’est pas un sentiment, que la justice devrait être forte, que l’énergie verte doit faire l’objet d’une transition et pas d’une précipitation, que la violence doit être contenue le plus possible, que le travail est l’essentiel, et que les problèmes des minorités de toute nature sont importants pour eux mais que la majorité a aussi le droit de vivre selon ses traditions et habitudes. Dois -je prendre un traitement pour ne pas adhérer aux élucubrations des «wokes » ( les éveillés)? M. Séjourné fait simple : pour ne pas diffuser une idée qui ne lui plait pas, il suffit de supprimer l’émetteur. La liberté d’expression ne doit concerner que le camp auto-proclamé du bien qui choisit les sujets et décrète ce qu’il faut faire. Au secours George Orwell ils sont devenus fous.  Vive l’ORTF et à bas la couleur ! (sauf à être en plus taxé de raciste). J’ai dû mal comprendre le conseiller de l’Elysée qui de son bureau jupitérien pense avoir la vérité ?    

Mme Pulvar ex-journaliste engagée et qui prétend devenir présidente de la plus grande région de France où les opinions sont diverses et les intérêts divergents a surenchéri pour demander que le journaliste Zemmour soit déclaré persona non grata sur les plateaux. Elle refusait déjà que des blancs assistent à certaines réunions sauf à rester muets. Elle récidive et elle cumule les rejets : bon début d’union ! A force de vouloir écarter cet analyste-polémiste de la vie publique, je vais finir par l’écouter régulièrement bien qu’il soit  parfois excessif d’après ce que j’ai ouï ,car je défends ceux qui sont attaqués c‘est mon métier !  Je précise que je ne vote pas en Ile-de-France mais dans une zone bien rurale.

M. Mélenchon qui prédisait un acte grave avant la présidentielle qui permettrait de stigmatiser les musulmans a été entendu. Il a eu la gueule enfarinée expression populaire qui est issue de la fable de Jean de la Fontaine « le chat et un vieux rat ». M. Mélenchon qui n’est pas un nigaud- car il pense hautement de lui, croit qu’il domine tout le monde et que son corps est sacré puisqu’il incarne la république- est au moins l’arroseur arrosé.  Il a ri jaune alors qu’il était tout blanc ce qui devrait lui plaire puisqu’il rêve d’un monde « créolisé ».  Il y a eu d’autres personnalités enfarinées ou entartrées dans le passé dont le président se disant normal.  C’est donc le bizutage classique. La Justice va cependant s’occuper de l’agresseur car on ne peut tolérer que le niveau frôle les pâquerettes- comme le dit M. Séjourné- alors que l’on accuse les politiques ou certains de rouler l’électeur dans la farine par des promesses fallacieuses.

M. De Rugy ancien ministre qui aimait trop les fruits de mer quand il présidait l’assemblée nationale, a été aussi été enfariné à Nantes pendant sa campagne électorale. La femme qui l’a blanchi a crié parait-il : « rends les homards ». Sic transit gloria Mundi.

M. Dupond- Moretti ministre en campagne électorale pour les régionales s’est fait apostropher par un candidat du rassemblement national, et par M. Ruffin député de la France insoumise. Il a répondu vertement à l’un et à l’autre et le niveau culturel et civique des dialogues -je veux dire des engueulades- a été confondant. Je ne sais pas si la dignité d’un ministre de la justice l’autorise à participer à une foire d’empoigne. Mais je n’ai aucune leçon à donner. Me Dupont-Moretti a du caractère : les électeurs apprécieront ces débats de comptoir au café du commerce. M. Séjourné va peut- être lui en parler ?  

Le ministre des élections M. Darmanin a parlé de marque satanique à propos d’une éventuelle victoire du RN dans une région qui repousserait tout investisseur. Il est aussi ministre des cultes dans une république laïque qui se bat contre les séparatismes théocratiques. Que l’on laisse Dieu ou le diable en dehors du champ de bataille électoral.  

Alphonse Karr a écrit : « je suis contre la peine de mort, mais que MM. les assassins commencent ».  Les hommes/femmes politiques doivent donner l’exemple et il leur revient de hausser le niveau à la hauteur des grands principes, de la tolérance, et de notre démocratie. Le populisme a toujours mené à une impasse, et vouloir en rajouter dans la démagogie n’est pas positif. Les électeurs votent pour ceux qui leur montrent un chemin clair, apaisé, mais qui conduit à de l’action et de l’efficacité globalement sans oublier personne. Le bulletin de vote est plus fort qu’une invective et donne à celui qui doit l’utiliser la chance d’écarter ceux qui vocifèrent mais n’ont pas de solution concrète. Le citoyen doit parfois être plus responsable  que ceux qui veulent le représenter en proposant des changements extrêmes. Personne ne peut être dupe. La boule doit toujours rouler vers le nord pour tenter d’atteindre l’inaccessible étoile c’est -à -dire l’espoir de vivre tous mieux, en paix.  On doit y croire.  

 

mardi 8 juin 2021

Réformer la justice : oui, mais pour quels bénéficiaires et dans quels buts ?

 

     Réformer la justice : oui, mais pour quels bénéficiaires et dans quels buts ?

                  Par Christian Fremaux avocat honoraire

Le président de la République lui -même a annoncé qu’il lançait les états généraux de la justice. C’est donc du sérieux même si je ne connais pas l’ampleur de la future réforme et quels seront les domaines examinés à part ceux brûlants qui occupent l’actualité. Examinons à titre préventif les aspects pénal et civil puisque la justice est un tout pour le citoyen.

Les plus dubitatifs ou cyniques diront qu’il faut éteindre l’incendie entre des autorités régaliennes et que la décision de réformer vient à la suite du Beauvau de la sécurité où certains policiers ont hurlé que le problème de la police c’était la justice. Ils ont tort et le raccourci n’est pas acceptable dans un état de droit où sécurité publique et justice sont complémentaires et doivent être dans leurs missions spécifiques, indiscutables et insoupçonnables.  Certes il y a de quoi avoir peur et chercher des solutions miraculeuses en regardant les faits divers malheureusement quotidiens et la violence endémique de la société. Ou plutôt la radicalisation d’individus mués par la haine pour des raisons aussi diverses que confuses, sans oublier le fait que certains n’aiment pas le passé de la France et veulent faire payer aux vivants ce que leurs lointains ancêtres ont toléré ou n’ont pas fait de mieux. J’y ajoute les attentats et le terrorisme d’origine interne comme externe.

Tout ceci crée de l’insécurité qui est réelle et pas un sentiment, même si et c’est heureusement vrai la France n’est pas un coupe- gorge comme l’a dit le garde des sceaux. Mais le débat sur la répression à outrance quasi automatique avec le concours Lépine des solutions drastiques n’est pas en phase terminale, les campagnes électorales favorisant la surenchère. Rappelons-nous la phrase célèbre de Blaise Pascal : « la justice sans la force est impuissante :  la force sans la justice est tyrannique ». Tout est dit. Bâtissons des solutions concrètes.

On peut cependant  opposer toutes les statistiques que l’on veut qui prouveraient que les violences étaient au moins égales jadis, que les mineurs sont restés avant tout des enfants, et autres explications ou excuses tirées de réflexions de philosophes, d’intellectuels, de sociologues et autres membres du camp du bien ouverts à tous les autres et à toutes les cultures, rien ne peut persuader le citoyen : la police que l’on méprise, attaque, accuse des pires travers qui seraient systémiques fait son travail ,mais la justice est un maillon faible.

C’est injuste, et Mme Arens 1ère présidente de la cour de cassation  qui représente les magistrats du siège toutes spécialités confondues ainsi que M.Molins procureur général de ladite cour qui incarne le parquet celui qui soutient l’accusation c’est-à-dire le respect de la loi  , sont venus défendre à juste titre leur institution outragée car accablée pour être  réputée  laxiste et globalement insuffisante, en protégeant ses membres même s’ils ont commis des fautes professionnelles ou qu’ils prennent des décisions qui ne correspondent pas avec l’opinion publique. Ce qui est rassurant selon moi, car il n’y a rien de pire que la foule en colère. Mais les juges appliquent la loi que les politiques fabriquent, et comblent les vides juridiques quand une question est officiellement posée dans un contentieux. Il ne faut pas en faire des boucs émissaires. M.Macron leur a répondu en lançant les états généraux : je pense que ces hauts magistrats attendaient une autre proposition plus corporatiste de leur protecteur institutionnel, garant de leur indépendance et de l’autorité judiciaire. Et qu’il leur renouvelle publiquement sa confiance et leurs mérites. Il a dû le faire, mais discrètement ?

La réforme de la justice doit aussi s’étendre à ce qui ne ressortit pas du droit pénal qui intéresse certes le quidam mais n’est pas son habitude. Les contentieux autres sont la majorité et ils génèrent  un sentiment d’injustice ou de désespoir pour certains. Les états généraux rappellent ceux de 1789 : qu’est le tiers état : rien ? Que veut-il : tout. C’est le cas aujourd’hui. Le citoyen-justiciable veut à son service une justice globale performante digne du XXIème siècle dans tous ses tiroirs. Et pas seulement pour que les juges soient réconfortés et reconnus au niveau qu’ils se sont fixés dans la hiérarchie sociale et parce qu’ils estiment devoir être considérés sinon admirés. Mais surtout pour que le sort personnel du consommateur de justice soit amélioré. Il veut aussi être reconnu et être partie prenante participative puisque la justice est rendue en son nom. La tour d’ivoire doit être abattue !

 Il peut y avoir quiproquo et le président a pensé peut- être n’agir que sur la justice pénale celle qui est en lien avec les gendarmes et policiers ? Ce serait dommage de limiter la réflexion car la justice n’est pas circonscrite au plus spectaculaire. Comme Janus l’individu a un recto qui peut être sombre et donc doit respecter des devoirs, mais aussi un verso qui veut la lumière donc faire reconnaitre ses droits. L’annonce au moins de discussions a été bien accueillie par les justiciables, ceux qui sont victimes ou prévenus certes, mais surtout par tous ceux qui ont à régler un problème de la vie privée ; qui sont devant le conseil de prud’homme ou le tribunal de commerce ; qui ont un conflit avec leurs voisins ou leurs mairies ou une administration quelconque voire le fisc, ou avec son assurance, sa copropriété ou un squatteur, car la justice ce n’est pas que le procès pénal  même si de petits dérapages y conduisent pour les infractions au code de la route ou un peu trop d’alcool ou de shit! c’est la vie de tous les jours. Et pour qui un juge est un juge sans distinction subtile entre les différentes fonctions. Personne ne peut se vanter qu’il n’aura jamais affaire à un magistrat. Donc prudence, mais désir d’une justice rapide qui sait trier le bon grain de l’ivraie occasionnelle ou apaiser un conflit par  son jugement.  

 Tout individu qui a eu affaire à la justice a connu les obstacles à l’accès de celle -ci ; le choix indispensable des avocats ; le tribunal de plus en plus lointain puisque les juges de paix de proximité n’existent plus et que désormais les tribunaux d’instance sont regroupés auprès du tribunal judicaire siégeant au chef -lieu du département et que les cours d’appel sont dans les régions. Ils ont subi les délais d’attente interminables avant que leurs dossiers soient évoqués, ont été perdus dans la procédure compliquée ; n’ont pas eu droit à la parole puisqu’ils avaient un conseil qui s’exprime pour eux…Ils ont peut-être gagné, mais l’adversaire a un droit d’appel. Et ils doivent attendre pour que le jugement soit exécuté avec l’aide d’un huissier qui fait payer des frais !... Et je passe les péripéties. Je n’évoque que pour mémoire l’existence du tribunal administratif que l’on trouve dans les régions, qui traite les contentieux administratifs (avec l’Etat ; les collectivités locales ; les services publics…) de plus en plus fréquents par une procédure exclusivement écrite, et dont les juges sont de hauts fonctionnaires. N’est -ce pas une incongruité du passé ?

La liste de tout ce que l’on reproche à la justice est longue et puisqu’il va y avoir des états généraux il faut consulter les cahiers de doléances écrits depuis longtemps. On sait qu’elle manque de moyens matériels comme humains, et que son budget bien que récemment revu à la hausse est insuffisant. On a donc la justice que l’on mérite, en dépensant pour elle avec parcimonie. On vit  un état de droit au rabais. Certes il y a des comportements individuels inacceptables comme les magistrats qui ont construit le mur des cons ou ceux qui ont déclenché une enquête supersonique à la veille des élections présidentielles de 2017 et qui ont éliminé de fait un candidat. Mais c’est une infime minorité qui confond réserve et idéologie. Il y a aussi ceux qui commettent des erreurs parfois avec des conséquences très graves. Dans tout métier c’est le cas, et chacun doit assumer ses responsabilités devant ses pairs et devant la justice : les victimes ont droit de savoir, d’exiger des sanctions, d’être indemnisées. Au lieu de se focaliser sur l’indépendance nécessaire des juges, donnons-leur les moyens d’être impartiaux, de juger vite, de s’entourer d’assistants qualifiés et d’être aidés. Tout en examinant éventuellement leur responsabilité personnelle.  Comme en matière de sécurité le risque zéro n’existe pas. Quand le drame tombe sur vous on ne veut plus rien comprendre ni accepter.  Mais la société a le devoir de faciliter le travail  de ceux qui prennent des décisions difficiles. Ils doivent pouvoir se confier à des collègues, à des experts, que le choix soit collectif, et qu’ils ne soient pas contraints de faire confiance à leur seule conscience et bonne foi. Un juge est une femme ou un homme, un être humain qui peut se tromper quel que soit le domaine concerné ou le cas particulier qu’il doit affronter. 

La réforme de la justice doit être naturellement matérielle mais pas uniquement. La morale ne participe pas mais il y a l’équité, et les grandes règles universelles sont les fondements de la justice avec la loi positive. Nul n’ignore que donner toujours plus de moyens n’améliore pas automatiquement les décisions, s’il n’y a aucun cap, aucune stratégie, ni choix de société ou de civilisation que le peuple a choisis. Le président de la république a annoncé qu’il souhaitait que désormais le garde des sceaux explique aux parlementaires, donc au peuple, chaque année la politique pénale du gouvernement : qui sont ceux qui défient l’ordre public, nos adversaires voire ennemis ; comment les combattons nous avec quelles armes légales ; quel est le sens de la punition et de la réinsertion … ? Bonne idée mais il faudra écouter les citoyens en permanence et entendre ce que disent les élus locaux. 

En matière civile comment améliorer le fonctionnement concret de la justice ? Comment faire du droit donc de la loi un élément structurant de la vie en société pour l’utilisation de nos libertés sans choquer ou nuire à autrui ? Comment faciliter la médiation, la concertation qui donnent des résultats rapides en cas de conflit, sans gagnant ou vaincu chacun ne perdant pas la face ce qui est essentiel quand on estime que l’on a raison et que l’autre a forcément tort : c’est mettre de l’harmonie dans les rapports sociaux…

La question principale est : dans notre état de droit la justice doit- elle passer d’autorité judiciaire à pouvoir judiciaire selon la théorie adaptée à la modernité de Montesquieu, et si oui avec quels moyens légaux ou autres et quels contrôles, pour faire quoi au bénéfice du qui ?

Je souhaite donc que la discussion sur la réforme concerne la justice en tous ses états, et pas seulement celui qui attire l’attention du public et des médias. La justice doit être contextualisée selon le mot à la mode dans un espace plus vaste qui est celui de la vie en société .Il faut rétablir de l’autorité c’est- à -dire le respect des normes générales à tous les étages et dans tous domaines y compris dans la famille ou l’école .On doit s’intéresser au rapport entre tous les individus dans leurs diversités qui acceptent l’usage de la tolérance .Enfin il faut rappeler que pour vivre tranquille il faut donner aussi de la priorité à ce qui est collectif, la défense de la nation et de la patrie avec des citoyens qui n’exigent pas que des droits en écartant les devoirs. Il faut nous mettre d’accord sur les grands principes républicains sinon toute réforme échouera.  Si l’on veut que police/gendarmerie et justice réussissent sans s’opposer il faut leur donner des objectifs communs qui dépassent leurs missions. Et convaincre les citoyens que c’est dans leur intérêt que la justice intervient. 

Tout le monde doit participer. La justice n’appartient ni aux magistrats, ni aux avocats, ni aux politiques ni à un pouvoir ou un contre -pouvoir quelconque : les citoyens l’ont en commun. Ils doivent être partie à la réflexion sans tirage au sort. On a besoin de responsables légitimes. La justice qui est aussi une vertu est une chose trop sérieuse pour ne pas la laisser à des aléas ou à de l’instrumentalisation. Il en va de la démocratie.     

mardi 25 mai 2021

instrumentalisation et/ou idiot utile

 

                 Instrumentalisation et / ou idiot utile.

                   Par Christian Fremaux avocat honoraire.

Dire que la violence y compris verbale domine la société est un truisme et traduit un climat d’insécurité, une société électrisée. Les prétendues élites ne donnent pas toujours l’exemple, et la sérénité ou la tolérance ne règnent pas en maître. On clive entre le camp du bien et celui du mal, entre le politiquement correct et le rejet de toutes nuances qui sont prises pour au moins de la trahison, de qui et de quoi c’est un autre sujet. On conteste tout et son contraire c’est plus rapide, mais sans proposer du concret faisable c’est plus facile.  On relativise les valeurs surtout républicaines car tout se vaudrait, ce qui est inexact. Et on attend le moment clé : deux à trois heures en direct à la télé entre les deux finalistes, où l’on juge le physique, l’esprit, l’expression et les idées des candidats au poste unique de la république. C’est le vote image et impressions.  La démocratie est chronométrée et en couleurs.  

Pour ceux qui auraient mauvaise vue, ou seraient sourds rappelons qu’on est entré en campagne électorale présidentielle bien sûr, car tout ce qui concerne les élus locaux, départementaux ou régionaux sert de prétexte et de répétition. Le sort local des citoyens qui sont sur le terrain et qui ont des besoins est mis de côté. Tout est fondamental, tout est très sérieux, à chaque évènement c’est le drame. Et le lendemain on passe à autre chose. Les lilliputiens se prennent pour Gulliver.

Dans notre quotidien on assiste impuissants aux échanges entre politiques de formules lapidaires qui sont plutôt des invectives sinon des insultes ou des menaces. Cela lasse et ne conduira pas à plus de confiance envers nos futurs élus comme ils ne cessent de la réclamer. Elle ne se décrète pas et le citoyen n’est coupable de rien, sauf de vouloir de la réussite globale et de vivre en paix. Il ne se bat pas tous les jours contre son voisin. On préférerait des discussions positives mais il n’y en a plus.  On twitte, on raccourcit, on résume, on condamne, on soupçonne, on schématise. Le slogan vaut action et il faut surtout discréditer l’autre sans se lancer dans des considérations plus élaborées, plus démocratiques, plus humanistes, pour prouver plus d’efficacité dans l’intérêt général futur.  On sera élu au moins par défaut si on ne commet aucune faute de communication et non pas en fonction de son programme et de ses propres qualités, mais parce que l’adversaire aura été rabaissé et taxé d’infâmie. L’enthousiasme est secondaire, à option et quasiment réservé aux seuls militants. 

L’instrumentalisation consiste à considérer quelqu’un ou quelque chose comme un instrument simplement utile, on veut dire manipulé. On détourne ainsi de son but tout ce qui est l’objectif projeté. On se sert de l’occasion pour desservir autrui. Il y a aussi les idiots utiles d’une cause selon le mot attribué à Lénine, qui en politique s’applique à des personnalités qui servent des desseins divergents de leurs représentations authentiques, fussent-elles sincères.  Les exemples sont légion qui substituent l’émotion à la raison, l’empathie à la nécessité, la conviction à la responsabilité, et la lutte pour le pouvoir à l’attente collective. Comme si un camp pouvait avoir raison sur tout ! 

Dans le champ politique ce n’est plus programme contre programme, et à la limite promesses contre promesses qui n’engagent que ceux qui y croient. Il faut réduire l’adversaire à sa part d’ombre, le ranger dans une catégorie dangereuse totalitaire si possible, ou utopique qui a échoué. L’histoire est évacuée. Il n’y a plus d’exposé des motifs, mais la demande d’adhérer sans réserve à ce qui est proposé. L’expérience des autres est rejetée, et on s’empresse de jeter à la poubelle même ce qui a pu fonctionner jadis, ou qui mériterait d’être maintenu et/ou revu simplement. On n’accepte ni analyses contraires ni avertissements viendraient -ils de voix non officiellement autorisées à s’exprimer mais légitimes, et ayant fait la preuve de leur neutralité et de leur dévouement dans l’intérêt général.  La prétendue bonne parole se cantonne à des citoyens tirés au sort, ou aux vociférations de quelques excités qui ont des haut -parleurs.   

A chaque fois qu’il y a une objection pour des projets de réforme sur des problèmes fondamentaux, par exemple sur la sécurité et les libertés, ou sur la police et la justice, sur l’identité et les frontières aussi, et je n’allonge pas la liste de ce qui est vital, on la balaie en dénonçant de l’instrumentalisation à des fins diverses notamment électorales ou électoralistes. Autant supprimer le parlement ou toute institution dédiée aux dialogues et à la coopération. Pour le peu qui en reste d’ailleurs puisque la démocratie semble se limiter à quelques individus choisis au hasard ? ou à des influenceurs, car il faut faire jeune et participatif.  L’instrumentalisation dénoncée permet ainsi de ne pas répondre à la question sans avoir à préciser son projet et sans admettre la moindre critique et surtout de ne pas être obligé de convaincre.  Mais la bonne foi et le subjectif constat que les prédécesseurs ont échoué ne sont pas la démonstration que l’on détient la vérité. Un peu de modestie grandit.

Les idiots utiles sont les responsables qui prennent le citoyen pour ce qu’il n’est pas.  L’électeur comprend les enjeux et sait faire la part des choses. Il vote parce qu’il croit qu’il aura un avenir meilleur que ce qu’il subit aujourd’hui. Il ne faut désespérer ni Boulogne ni Billancourt. Il faut rassembler. Le quidam veut que les politiques le guident sans l’embrigader ou vouloir qu’il vive contrairement à ses traditions et principes. Et qu’ils soient pratiques en proposant des mesures qui conviennent à la majorité sans vouloir changer la vie ou la planète même si l’individu sait qu’il faut progresser dans tous les domaines y compris pour lui. Accuser d’instrumentalisation celui qui n’est pas d’accord avec vous n’est pas persuader, et est un postulat un peu court jeune homme pour conforter la cause que l’on veut servir car à la fin de l’envoi on ne touche pas. Cela peut au contraire nuire par son excès et sa caricature.

 Créons de vrais débats publics, arguments contre arguments, raison contre émotion qui ne sont pas incompatibles, réalité contre utopie dont on a besoin mais qui a coûté sa tête au lord - chancelier Thomas More.  Instrumentaliser ou prétendre à une manipulation n’est ni débattre ni agir surtout. Revenons à l’essence de la démocratie : la confrontation des idées au -delà des personnes qui les incarnent. Et la recherche de consensus car pour avoir des résultats il faut que tout le monde s’y engage ardemment.      

lundi 26 avril 2021

Le droit contre les tordus.

 

                        Le droit contre les tordus. 

                  Par Christian Fremaux avocat honoraire.

A chaque fois qu’il y a un drame comme l‘assassinat de la policière du commissariat de Rambouillet, monte spontanément un cri de désespoir avec de la compassion pour la victime, de la haine pour le meurtrier, et des commentaires : c’est inadmissible, c’est la faute au gouvernement, il faudrait faire ceci ou cela… Comme si quelqu’un avait la vérité et savait quelle était la solution pour arrêter les crimes volontaires fussent -ils symboliques, politiques ou religieux, familiaux ou de n’importe quelle nature ; ou juguler le terrorisme individuel ou de groupe organisé de l’extérieur, et faire que tout le monde vive en paix.  En matière de forces de l’ordre après quelques jours la victime et sa famille sont quelque peu quasi oubliés : on leur rend hommage publiquement, avec des belles paroles martiales du genre plus jamais cela qui sont à juste titre prononcées par les plus hautes autorités ce qui nous fait du bien. Puis on décore, et on passe à autre chose.

                                           Des réactions peu chaudes.

Je dois avoir l’ouïe bouchée, car je n’ai pas immédiatement entendu pour se désolidariser le représentant du culte concerné qui doit être par définition contre la violence. Je n’ai pas non plus été rendu sourd par une clameur publique spontanée de citoyens comme après les attentats de Charlie hebdo pour soutenir les policiers. A défaut ce silence assourdissant semblerait vouloir dire que certains pensent que se faire tuer ou blesser c’est le risque du métier quand on incarne l’ordre public ou que la mort d’une policière n’est pas un évènement. Je ne tiens pas compte des indignés qui n’admettent pas que l’on soutienne les victimes alors même que l’assassin forcément détraqué et en proie à des problèmes dépressifs ou métaphysiques et absorbant des produits y compris médicamenteux - qui est présumé innocent selon nos règles procédurales bien que mort - aurait eu des circonstances atténuantes ou un coup de chaud qui l’exonérerait de toute responsabilité du même type que pour le bourreau de Madame Sarah Halimi.

                                            Qui veut de ma solution ?

Au- delà de l’horreur on assiste au concours Lépine de propositions de loi ou de modifications du code pénal qui émanent surtout de ceux qui n’ont aucune légitimité. Mais on entend aussi - le cadavre n’étant pas encore froid et l’enquête étant en cours - des responsables politiques notamment qui en profitent pour vanter leur fonds de commerce basé sur la sécurité, et faire croire qu’avec eux cela n’arriverait pas. D’autres veulent changer le système qui serait trop inégalitaire, discriminatoire et empêche de croire, ce qui entrainerait des frustrations et des passages à l’acte. Surfer sur le désastre est indécent et personne n’est dupe. Nul n’a la formule magique légale naturellement et concrète qui permet d’anticiper et d’éviter que des crimes aient lieu, et qu’on empêche des attaques fréquentes des commissariats ou gendarmeries enfin contre tout ce qui représente l’ordre et l’autorité donc la démocratie. On sait que les promesses n’engagent que ceux qui y croient, mais celui ou celle qui annonce n’importe quoi à quelques encâblures des élections prend une responsabilité grave. Il en est de même pour ceux à la réflexion ambiguë qui critiquent toute action ou initiative et qui la jugent toujours insuffisante et sont donc contre. Ils ne veulent rien partager avec la majorité au pouvoir qu’ils veulent remplacer par leur omniscience. 

                                           Un fait divers, une loi ?

On ne peut pas faire une loi à chaque fois qu’il y a une catastrophe naturellement non prévue. N’est pas Cassandre ou la Pythie qui veut. Le gouvernement avec célérité va tenter de pallier les conséquences d’un nouvel assassinat comme celui de Mme Halimi où l’antisémitisme était avéré. Il a raison. Les juges ne peuvent s’en remettre aux seuls experts psychiatres en estimant que la loi ne distinguait pas suffisamment les causes d’abolition du discernement donc de la responsabilité, alors que comme je l’ai constaté pendant mes dizaines d’années d’exercice d’avocat, les juges savent modifier parfois radicalement et soudainement la jurisprudence, interpréter les textes légaux, ou innover dans des domaines que la loi n’avait pas prévu, et qui résultent de l’évolution de la société, des mœurs, de la morale, ou de la bioéthique. Un procès est salutaire pour que la famille des victimes tente de comprendre ce qu’elle ne peut accepter, pour examiner le mécanisme intellectuel ou éducatif du coupable, les raisonnements qui conduisent à la barbarie, et voir si l’entourage est complice.  

                                          La société du spectacle en décors réels.

Je participe moi aussi au concours d’idées. Les télévisions diffusent régulièrement des procès reconstitués ou des faits criminels que l’assassin soit vivant ou disparu. Pourquoi ne pas organiser un vrai procès pour les faits symboliques qui heurtent l’opinion, et les jurés qui sont des citoyens décideront de qui a son discernement aboli ou restreint ou non, puisqu’ils ont au moins autant de bon sens que les experts psychiatres que les magistrats suivent. Je suis pour un procès à la suite de l’assassinat de la policière de Rambouillet pour lui rendre d’abord hommage, et malgré la mort de l’auteur- justifiée par la légitime défense - essayer de comprendre comment Allah Akbar peut conduire au pire. Le Garde des Sceaux veut faire filmer certains procès pour que les citoyens comprennent encore plus comment fonctionne la justice. Chiche ! On nous dit que les assassins sont de gentilles personnes avec leurs familles et leurs voisins bien que brutalement devenus déséquilibrés voire « fous ». D’où un procès qui sera pédagogique. Bien sûr la législation la plus ferme du monde n’empêchera pas les tordus d’agir. La peine de mort n’avait pas évité les tueries. Le zéro crime ou délit est une utopie, surtout avec le terrorisme. Mais sans droit c’est encore plus dangereux.

                                      Pour une politique pénale qui dure.

 Ne légiférons pas pour tout et rien à chaque émotion.  Définissons une politique pénale qui concilie la répression et la prévention sans abandonner nos grands principes qui protègent chaque justiciable et n’en changeons pas à chaque nouvelle majorité. Appliquons sévèrement la loi existante et armons nous légalement si on manque de moyens juridiques. Comme le covid 19 qui est dans le « cloud », nous n’avons pas trouvé le virus du mal. Créons une atmosphère plus respirable, plus apaisée, plus fraternelle et moins laxiste, ce qui impose un effort de tous, colossal pour des radicalisés sectaires. Mais abaissons le glaive de la justice sans trembler. C’est mon dernier mot.       

jeudi 22 avril 2021

l'universel de la laicité doit il devenir relatif?

 

                L’universel de la laïcité doit-il devenir relatif ?

                          Par Christian Fremaux avocat honoraire

La ministre Marlène Schiappa a lancé à juste titre mais avec un peu de retard on ne sait pourquoi après le vote de la loi sur le séparatisme, un grand débat public sur la laïcité qui est une liberté. Je m’en réjouis car cette valeur fondamentale de notre république à vocation universelle est interprétée dans tous les sens et donc critiquée voire haïe.  Certains qui croient au ciel estiment que c’est le droit absolu d’exprimer leur foi et de l’exercer dans l’espace public par des signes extérieurs y compris immobiliers et la liberté débridée de pouvoir vivre leur religion, ou pour ceux qui se refèrent à la possibilité d’user d’une croyance sociale anti-tout quelconque y compris les plus dangereuses de vivre en marge de la société. D’autres qui n'adhèrent pas en une transcendance sauf celle de l’homme qui s’affronte au temporel pensent que ce qui appartient à César ne doit pas être partagé et que rien d’immanent ne peut s’interposer avec la vie en collectivité et les règles républicaines qui sont l’incarnation de la démocratie et qui sont supérieures par raison à ce que l’on appelle les lois de nature, réfléchies et rédigées par personne. Chacun doit conserver l’expression de sa conscience par devers lui.

                                             Des embrouilles qui désespèrent

 On se dispute à ce sujet et les polémiques qui sont vives entrainent des comportements inadmissibles et parfois sont un prétexte pour de la violence. Il va falloir expliquer et expliquer encore que ce qui est bon pour la liberté de conscience concerne tout le monde, riches ou pauvres, jeunes ou vieux, hommes comme femmes, noirs jaunes ou blancs. L’humanité est en jeu, et pour être modestes visons local d’abord puis nous exporterons. Si depuis des dizaines d’années y compris après les indépendances nous avons pratiqué la laïcité elle ne nous appartient pas. Le lointain prédécesseur de M. Erdogan, Mustapha Kemal Atatürk 1er président de la république turque en 1923 l’avait instaurée dans son pays. Tous les espoirs sont donc permis.  Universel s’oppose à particulier, et l’universalisme versus relativisme est un oxymore comme un absolu limité. Nous devons agir vite, éduquer et surtout convaincre. A l’intérieur comme à l’extérieur puisqu’il est admis que des difficultés sémantiques se traduisant en actions néfastes nous viennent de l’étranger, des campus américains notamment. 

                               Les non- croyants sauf en l’harmonie et la tranquillité.

 La plupart des citoyens qui doutent ou ne se sentent pas concernés par un débat théologique ou immatériel en respectant les convictions de chacun - ce qui me parait être une grande majorité - pensent que les sentiments de la sphère privée ne doivent pas s’immiscer dans la sphère publique. Ils sont irrités voire révulsés par des revendications et accusations exagérées, injustes, car ils veulent une vie paisible pour essayer de régler au mieux leurs problèmes quotidiens déjà lourds. On n’a pas besoin d’un climat permanent d’affrontement ou de suspicion. Les Principes constitutionnels notamment sont les piliers de la république et les lois sont faites pour être respectées. Si la loi ne suffit pas il faut la changer, démocratiquement, avec prudence sans partir dans l’exagération, car il ne faut jamais réagir à chaud. Mais la république n’a pas à s’adapter à toutes les particularités et demandes. La laïcité ne peut pas se diviser en stricte observance ou en régime plus libéral dit ouvert (je ne sais pas à quoi d’ailleurs ?) fait d’exceptions pour être moderne et ne discriminer personne. A défaut le caractère d’universel n’a plus de sens.

                                        Les jeunes et...les vieux aussi !

La ministre veut s’adresser prioritairement aux jeunes, mais les plus anciens ont aussi besoin de cours de rattrapage car ils ont connu une période où l’on croyait que le débat sur la place des religions dans l’Etat était clos, qu’après la loi de 1905 et les violents affrontements (contre le clergé mais pas la foi chrétienne soyons francs) chacun avait circonscrit son domaine de compétences et d’influences et qu’il n’y avait plus lieu de se souvenir et de se soucier que la France avait été la fille ainée de l’église (catholique). On s’est trompé et l’actualité nous le crie pour des raisons que chacun connait et constate, et désormais il faut faire face. Et trouver des solutions pour que la « paix » revienne, que chacun différent de l’autre retrouve sa sérénité et ne s’estime pas victime éternelle. Et participe à la réussite- j’allais écrire à la relance post pandémie -pour tous pour que nous fassions nation et non pas une juxtaposition de communautés. Un pour tous et tous pour un hurlaient d’Artagnan et les mousquetaires. Est-ce une référence encore acceptable de nos jours pour tous les énervés sectaires ? Alexandre Dumas un des héros du roman national devrait faire l’unanimité chez les jeunes comme les plus anciens ? 

                                         La laïcité pour les « nuls ».

Le président Macron dans la langue de Shakespeare- ce qui est un exploit pour un gaulois-a tenté d’expliquer à  la télévision américaine ce qu’était la laïcité, notre pratique qui n’a pas d’effets secondaires  sur les droits individuels, puisque aux USA notre humanisme, nos principes, notre mode de vie sont vivement combattus non par des boys du pays profond, mais par des étudiants -les élites locales ?-qui se disent intellectuels et qui considèrent que c’est du racisme, de l’inégalité, de la discrimination, du post colonialisme : n’en jetez plus la cour est pleine alors que  l’histoire de France n’a rien à voir avec celle des USA et leur combat pour pouvoir voter, et l’égalité des droits en général. Martin Luther King et sa lutte dans une grande démocratie n’est pas l’un des révolutionnaires de 1789 qui avaient une vision large de la société et de l’humanité, des droits et des devoirs, sans immixtion de la religion (sauf l’être suprême de Robespierre !), parfois avec un côté sombre et sanglant ce que personne n’excuse. L’universel des droits de l’homme semble pour certains illuminés des campus ne pas avoir franchi l’atlantique, alors qu’ils devraient se rappeler de Lafayette, de la constitution laïque de 1786, et de la démocratie en Amérique selon Tocqueville. Mais la France avec son histoire contemporaine n’est pas l’Amérique avec souvent par ses dirigeants ses références à Dieu.

                                            Comparaison n’est pas raison

 Des étudiants américains qui se disent être des « wokes » (des réveillés) ont ressuscité de vieilles antiennes notamment du professeur français Jacques Derrida apôtre de la déconstruction mort en 2004, et voient du mal partout : toutes les minorités particulièrement de couleur non blanche sont des victimes, sont encore dominées, ne sont pas égales en droit, et notre devise qui y ajoute la liberté et la fraternité n’est qu’une joyeuse farce d’hypocrisie et de soumission. On incite ainsi de loin à la révolte et en France des groupuscules agissants représentatifs de personne et/ou des croyants hétérogènes qui se sentent exclus pour diverses raisons dont celles tenant à la colonisation, suivent les mots d’ordre venant de nulle part légitime considérant que la laïcité n’est qu’un prétexte et en réalité qu’une interdiction, des brimades, de l’autoritarisme, et empêche la liberté de conscience de s’exercer. Il faut donc la refuser voire l’abattre pour imposer ce qui serait le nirvana sans elle ?  Il ne faut même pas essayer de comprendre ce qu’est cette valeur qui peut être un piège ?  C’est un contre sens complet et confondant de bêtise. J’espère que le président Macron a su faire passer avec son talent son message mesuré,  et que celui-ci sera compris en interne jusqu’au très profond de nos territoires et traduit en termes compréhensibles pour nos indignés franco-français qui ont une culture sélective et parfois obscurantiste sans être méchant puisqu’ils fréquentent nos écoles, nos universités, profitent de notre système et de nos institutions , de nos politiques de paix et de la main tendue, du dialogue  permanent public et sont dans le monde économique, donc peuvent librement participer au succès de la France.

                                      La laïcité pour quoi faire ?    

La laïcité c’est une liberté, l’émancipation qui permet de vivre au milieu des autres, en se complétant, sans imposer quoi que ce soit à personne. L’Etat est le garant de la liberté de conscience. Il ne subventionne aucun culte, il reste neutre, mais n’interdit rien. La laïcité ne doit pas être binaire en désignant les bons et les méchants, les progressistes et les conservateurs. Tous ont une place au sein de la république. L’universel permet de dépassionner et dépersonnaliser le débat d’idées. Il ne peut être relatif car tout ne se vaut pas. Il doit conduire au consensuel.

Dans son ouvrage « Le crépuscule de l’universel « (Ed.Cerf 2020),madame Chantal Delsol écrit : « peut- être avons-nous été trop loin dans l’enthousiasme… en considérant qu’il s’agissait d’un utopie universelle » .Faisons comme le voulait le slogan de mai 68 : « soyons réalistes, demandons l’impossible ». Il faut y croire sinon ce sera l’aventure.   

         

mercredi 14 avril 2021

Faut-il respecter la loi?

 

                                           Faut-il respecter la loi ?

                        Par Christian Fremaux avocat honoraire

On vit une période formidable où on ne pardonne rien aux autres tandis qu’on est d’une indulgence infinie pour soi. Alors que la pandémie fait des ravages, que l’économie résiste à coup de milliards magiques, que ceux qui veulent ouvrir leurs commerces en sont écartés, que les jeunes pensent qu’ils sont sacrifiés au profit de la génération ainée, le microcosme s’agite pour peu me semble- t -il. Il s’agit du non-respect d’une directive sanitaire, de la loi donc, de l’interdiction de manger en rond à plus de 6 sans masque bien sûr. On recherche activement qui a profité de repas de luxe concoctés par un chef étoilé tenus dans ce qu’il appelle non pas un restaurant clandestin mais son club privé à savoir son appartement, ce qu’il estime être légal. Mais on traque des délinquants. On suppute une fraude et on estime le cuisinier trop habile sur le plan administratif. On espère pour s’en indigner ramener dans les filets un gros poisson - un ministre si possible - pour montrer au bon peuple qu’il n’y a pas de plus égaux que d’autres et qu’à défaut de lieux ouverts au public manger doit rester un acte citoyen. Qu’ils s’agissent de gargotes ou d’endroits huppés la loi doit être observée. Dans tous les autres domaines aussi. Naturellement je n’approuve pas les comportements irresponsables qu’ils soient illégaux ou immoraux. Mais il faut d’abord prouver la culpabilité, qu’il y a une infraction et que la loi a été détournée ou violée. La rumeur ne suffit pas. Je déteste une société de délation et la chasse aux sorcières. La démocratie mérite mieux.  

                                S’affranchir de la loi est-ce tendance ?

Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Mon sujet est l’insouciance légale qui peut conduire à des drames et la mise de côté de ce qui est la représentation d’un ordre démocratique et à l’anarchie, la chienlit disait le Général. Crise sanitaire ou non, des joyeux drilles de Marseille ont organisé leur carnaval avec des milliers de participants, hilares et débâillonnés. Les soignants épuisés des hôpitaux n’ont pas ri de ce spectacle navrant. Des étudiants déprimés et frustrés de ne plus pouvoir faire la fête - partie intégrante du diplôme universitaire sans doute ? - retrouvent des potes sur les quais pour boire une bière, le masque dans le dos. Cela me rappelle Stéphane Mallarmé : « la chair est triste hélas et j’ai lu tous les livres… ». Les étudiants n’ont plus que des tablettes et des ordinateurs !  Des récalcitrants refusent de se faire vacciner au nom de l’atteinte à leur liberté. Pourtant la Cour Européenne de Strasbourg vient de juger que la vaccination obligatoire était compatible avec les droits de l’homme.  Qui a le mauvais goût de respecter désormais la loi même si elle ne leur convient pas, sinon les citoyens de base qui paient leurs impôts, votent, ne sont pas des prétendus rebelles ou plutôt des tigres de papier et qui croient en l’intérêt général ?

                                             La loi pour quoi faire 

Pour des motifs aussi variés qu’absurdes ou personnels la loi est subsidiaire. On décrète qu’elle ne sert à rien ou qu’elle interdit de trop. Voire qu’elle a des effets non prévus dangereux ou intolérables. Le subjectif prime. On préfère la désobéissance civile (ex. les zadistes). On crée une règle spécifique (ex. les décisions baroques des maires écologistes). On exige par la violence, qu’on impute aux autorités (ex. les gilets jaunes). On privilégie l’émotion et l’humain à la raison (ex. le cultivateur de la vallée de la Roya qui aide les migrants irréguliers, ce que le conseil constitutionnel a validé). Ou tout simplement parce qu’on juge bien pour soi ou pour les autres de ne pas suivre la loi, sans motif avéré et acceptable, et que tout ce qui empêche doit être jeté aux orties. C’est simple. La loi ne sert plus l’intérêt collectif :  elle ignore par prudence ou favorise des intérêts particuliers. Elle est considérée ou non selon le bon vouloir de toute personne. Et certains s’en dispensent. Des élites de toute nature y compris politiques approuvent et théorisent le rejet.    

                                          Qu’est devenue la loi ?

La loi qui est l’expression de la volonté générale est devenue secondaire.  Les parlementaires qui la fabriquent continuent à se disputer sur les mots, sa portée, essaient de n’oublier personne sans discriminer ou blesser certains. Et en évitant de poser les questions qui fâchent en utilisant implicitement la vieille formule de B.Brecht : « quand le peuple vote contre le gouvernement, on dissout le peuple ». J’exagère bien sûr, on tire au sort quelques quidams qui vont déterminer la politique et les projets de loi de l’exécutif, donc la vie quotidienne des citoyens. On n’est plus ou de loin dans les critères classiques de la loi qui doit caractériser un consensus sur un sujet donné pour l’instant et le futur, avec des principes de hauteur, qui est issu de la majorité du peuple, qui concrétise une norme, un idéal et qui est impérative. Elle n’est pas un cadre pour des dérogations. Selon Périclès au V -ème siècle avant J.C : « la loi est toute délibération en vertu de laquelle le peuple assemblé décrète ce qu’on doit faire de bien ou non ; ce que le pouvoir qui commande dans un Etat ordonne, après en avoir délibéré ».  La loi permet les rapports entre les gens et facilite la vie en société. On comprend qu’elle doit être contraignante en droit.  Elle est cependant à géométrie variable. 

                                            Des interprétations.   

En suivant les débats du parlement à la télévision où les députés sont rarement d’accord avec les sénateurs ou l’inverse chacun sait que la loi est un texte de compromis. Les discussions dans les médias semblent ensuite démontrer que les journalistes ou les experts auto-proclamés en savent plus que tout le monde. Puis les intellectuels dits éclairés y vont de leurs commentaires d’autant plus féroces qu’ils n’ont ni légitimité ni responsabilité.  Enfin il y a les sondages : le commun des mortels délivre son avis sinon son oracle. Tout ce processus est la démocratie moderne dite participative.  La loi a pris une signification différente selon les interrogés. S’y ajoute l’interprétation légitime des juges dont c’est le métier, qui étudient l’esprit de la loi votée, les circulaires d’application rédigées par l’administration, puis le texte tel qu’il a été promulgué. Et on arrive à de la jurisprudence parfois contraire entre les décisions ou à ce que les juges comblent des vides juridiques. La loi peut avoir une force injuste mais dura lex sed lex. Et un poursuivi ne peut être réhabilité en victime par un choix personnel de celui qui doit appliquer la loi, serait -il empreint d’une pseudo justification juridique, ou d’humanité qui reste de l’honneur d’un juge. La loi doit être respectée et est la seule marque de confiance que le citoyen a à sa disposition. Elle n’est pas une option. C’est une obligation dans l’intérêt de tous, du peuple et plus au profit des petits que des grands.     

  

jeudi 8 avril 2021

C’est un joli nom fraternité.

 

                                 C’est un joli nom fraternité.

                   Par Christian Fremaux avocat honoraire

On ne cesse de culpabiliser ceux qui ne sont pas des bien-pensants selon des critères auto-définis par une minorité bruyante très agissante, et de se gargariser de la notion de vivre-ensemble qui de mon point de vue est vide, ne veut plus rien dire mais peut entrainer des mirages dangereux et inciter à n’exiger que des droits alors que les devoirs existent aussi, ainsi que l’autorité nécessaire et l’ordre public par le respect des règles votées par le parlement pour qu’une société fonctionne. La liberté n’est pas le droit de s’affranchir de tout !

 Autrefois on utilisait le beau nom de fraternité pour expliquer qu’il fallait regarder l’autre, lui ouvrir les bras, l’aider dans la mesure de ses moyens, le considérer comme un égal et lui faciliter la vie de tous les jours. Puis on a changé de vocabulaire -vivre ensemble-qui est toujours le prélude et la condition nécessaire pour aboutir à un changement de paradigme. Mais le professeur Francis Fukuyama qui avait prédit la fin de l’histoire après la chute du mur de Berlin avec l’avènement et le triomphe de la société occidentale démocratique, s’est planté. On le voit en regardant l’état du monde, l’affrontement d’Etats ou se prétendant tels ou des peuples démultipliés en ethnies ou tribus, les guerres militaires ou économiques avec la mondialisation ou la pandémie du covid 19, les massacres divers, la lutte pour les matières premières dont l’eau, et les gouvernances de pays au mieux nations où des dirigeants aimeraient bien être au pouvoir à vie. Les religions ou croyances spirituelles diverses reprennent de la vigueur et irriguent le comportement de masses qui confondent le temporel et le spirituel. Rendre à César ce qui lui appartient et à dieu ce qui est de son royaume, n’a plus de sens. On est dans une totale confusion. Cela entraine a minima des malentendus, et pour le pire des conflits armés ou presque dans des cas devenus sensibles et inflammables y compris chez nous : les violences qui s’exercent un peu partout, de la petite délinquance qui irrite et crée un climat délétère, des batailles rangées entre jeunes sur fond de trafics ou de pré-carrés à conserver, jusqu’au terrorisme organisé ou improvisé individuellement par ceux que nous avons élevés et biberonnés à notre école et notre art de vivre,  et les principes républicains qui ne parlent plus de la même façon à tous, comme la laïcité. Je n’exagère pas et je regrette d’avoir à le constater : mais le déni ne fait pas une politique et on ne peut trouver des solutions qu’en nommant exactement les faits.    

 Certains-comme moi- partagent la théorie du professeur Samuel Huntington qui croit-malheureusement- dans le choc des civilisations. Nous sommes dans le retour d’un cycle et le passé n’a pas servi de leçons.  Je pense qu’on est dans des contestations dures au moins de valeurs légitimes qui sont contraires sinon contradictoires et de sens de la vie. Même dans nos discussions politiques internes on a des idéologues- outre des révolutionnaires qui ne disent pas vers quelle société merveilleuse, pacifique et consensuelle leurs théories aboutissent - qui estiment avoir la vérité, comme des élus verts qui veulent nous dicter comment vivre, manger, bouger, nous chauffer, nous déplacer, jusqu’à avoir un avis sur quoi rêver, mais surtout pas pour les enfants à Saint Exupéry et à son avion de l’aéropostale selon une maire de moyenne ville… C’est terrifiant : on veut me changer de civilisation alors que je me contente de celle que je fréquente qui peut être modernisée mais pas expédiée ad patres.  On avait inventé le vivre-ensemble pour faire croire que le multiculturalisme qui nous vient de tous ceux qui choisissent de vivre chez nous à leur insu de leur plein gré mais sans avoir été invités, serait la panacée pour aplanir d’éventuelles difficultés et que chacun tout en restant libre dans sa sphère privée, puisse s’assimiler aux mœurs et traditions françaises et surtout aux lois de la république. Objectif exaltant et non contestable !  Certains disaient que c’était ainsi une chance pour la France. D’autres aussi républicains et humanistes que les autres, sincères mais plus pragmatiques et attachés à ce qui fait la grandeur de la nation française, n’ont pas apprécié de devoir faire de la place à des valeurs qui ne s’imbriquaient pas exactement dans l’édifice construit depuis des siècles. Personnellement je n’ai pas vu cette chance mais je dois avoir de mauvaises lunettes et je n’ai aperçu aucun effet positif.  Je suis indulgent avec ceux qui ont pris des grands risques pour venir de loin croyant trouver sur notre terre un accueil digne de ce nom, et des conditions de vie plus agréables et moins risquées que celles qu’ils fuyaient. Ils sont déçus et crient à l’escroquerie intellectuelle pour le moins ! On leur refuse des droits qu’on leur avait fait miroiter avec de la protection sociale ,et des revenus  qu’ils doivent se procurer… tout seuls. Où est le vivre ensemble ? Que devient la fraternité dans ces conditions ?  Ils ne sont pas entièrement responsables.  Ils ont été encouragés par des individus de chez nous qui veulent faire le bien des autres et l’imposer à leurs propres compatriotes.

 Mais ce qui était peut -être possible il y a des années en période de croissance avec peu de candidats, devient problématique par temps de crise y compris sanitaire où il faut fermer les frontières pour tous sans discrimination, d’économie atone et en fort recul. Le droit d’asile doit être perpétué puisque c’est notre honneur et notre devoir, mais le repli sur soi-même devient une protection élémentaire pour le quidam qui a le droit de penser aussi à lui et à ses proches. Il est donc inutile d’opposer ceux qui croient et ceux qui ne croient pas comme le chantait Georges Brassens, ceux qui seraient dans le camp de la générosité et du progrès humain (que personne ne peut définir) et les méchants ; ceux qui se targuent d’avoir les solutions  de toute nature pour l’avenir et ceux qui doutent et préfèrent s’en tenir à des améliorations prudentes ,et aussi pour que les gens des campagnes ne paient pas la vie dont rêvent les habitants des villes …Avec Paul Valéry on sait qu’une civilisation est mortelle, que l’agonie peut durer, mais il faut tout faire pour qu’elle ne tombe pas malade et ne pas lui ingurgiter de force des remèdes de cheval  qui font plus de mal que de bien, avec de l’huile de foie de morue pour faire passer la pilule.  

Et il y a un principe de base dans un pays démocratique : le vote. On ne confie pas le soin  de   déterminer et de conduire la politique du gouvernement aux lieu et  place de l’exécutif à des comités citoyens de quelques personnes tirées au sort, qui se substituent aux élus réguliers ( 925 parlementaires et 520.000 élus locaux ) sans compter tous les corps intermédiaires et les institutions représentatives ;  plus le référendum y compris d’initiative partagée (1/10 -ème des électeurs et 1/5 -ème du parlement) , et tous les « grenelles » possibles ou les cahiers de doléances comme après la crise des gilets jaunes. La fraternité doit d’abord être appréciée par le peuple. L’émotion ne fait pas raison et aboutit souvent à des désastres et à des fractures citoyennes. La fraternité rapproche et soude. Elle est devenue en 2018 un principe constitutionnel donc républicain, comme la liberté et l’égalité.