vendredi 18 avril 2025

La quadrature du cercle

 

                                   La quadrature du cercle

          Par Christian Fremaux avocat honoraire

Gavroche chantait « je suis tombé par terre c’est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau c’est la faute à Rousseau ».  On ne sort pas des raisonnements binaires. L’actualité judiciaire le prouve.  Une candidate à la présidence de la République va-t-elle faire défaut en 2027 ? S’en remettrait- on ? Un seul être vous manque et le monde est dépeuplé.

Comment concilier la Justice c’est -à- dire le droit sans privilégiés et la politique c’est- à- dire le bien pour tous ? Arriverons nous à dépasser nos préjugés pour sortir d’accusations sans fin. Peut-on aboutir à un gagnant -gagnant et ainsi avoir une société qui ne s’émeut pas quand la justice se mêle de politique ? Doutons-nous de nos principes suprêmes, ceux qui sont les piliers de la République ?  Peut- on débattre avec la raison sans émotion ?

Une société moderne qui fonctionne harmonieusement c’est comme un triangle qui devrait être isocèle : en pointe en haut la démocratie, à une base le peuple et à l’autre la justice. Mais des géomètres ne l’observent pas ainsi.

M. Pierre Rosanvallon a déclaré au journal Le Monde « que les juges incarnent, autant que les élus, le principe démocratique de la souveraineté du peuple ». Quand il était président du conseil constitutionnel M. Fabius avait fait savoir par avance sauf erreur, que tel référendum sur tel sujet ne serait pas conforme au texte suprême. Sauf à réformer la constitution.

 Si une autorité qui n’est pas dans le camp du bien s’était ainsi prononcée comme ces deux intellectuels, ça hurlerait dans le landerneau médiatique. On crierait au coup d’Etat juridique et au gouvernement des juges outre le déni démocratique ! Et que le peuple est secondaire face à une élite éclairée ! L’Histoire bégaie.   

 Je ne peux me comparer avec ces sommités philosophique et sociologue ou juridique mais comme j’ai une voix/un bulletin de vote comme eux je m’exprime comme électeur de base, membre du peuple d’en bas. Je m’autorise à parler de démocratie et des juges. Je ne suis pas d’accord avec ces personnalités qui réfléchissent subtilement. Le peuple n’a pas besoin qu’on lui tienne la main dans l’isoloir. Ou que des juges agitent leur couperet légal. Il est sur le terrain et y a appris la vie. Il subit depuis des années les politiques publiques versatiles qui ont mené dans le mur sinon à la faillite, sans oublier les menaces de toute nature. Et on lui dit que c’est sa faute ! Si désormais les juges sont à égalité avec lui voire ses supérieurs, il désespère. Alors que les décisions sont prises au nom du peuple français qui est donc le souverain unique. La souveraineté ne se partage pas, comme la bombe atomique.  

Les citoyens croient trouver en la justice des arbitres impartiaux malgré tout ce qui se colporte et des bavures conduisant au mur des cons. Et ce seraient les 9000 magistrats de France qui après avoir réussi jeunes un concours difficile, sont nommés à vie, en gardant leurs convictions et croyances, en ne rendant quasiment pas de comptes puisqu’ils sont indépendants -les procureurs étant un peu à part- qui montreraient la voie à suivre à des millions d’électeurs ? Ou qui par leurs jugements parfaitement légaux en appliquant les lois que les parlementaires votent, pèseraient même indirectement sur un scrutin public et ainsi orienteraient ou contrarieraient le vote des citoyens. Ou empêcheraient telle volonté. La citoyenneté démocratique serait avant tout ou aussi judiciaire ? J’ai dû comprendre de travers MM. Rosanvallon et Fabius en croyant qu’il y aurait deux légitimités égales avec un penchant favorable pour la Justice. Exit les manants.

Il ne s’agit pas de remettre en cause l’état de droit qui se caractérise par la séparation des pouvoirs, la hiérarchie des normes donc la constitution et la loi d’abord, et une justice indépendante. Qui veille sur les libertés fondamentales et les déclarations des droits. Et des devoirs qui protègent la collectivité. Souvenons-nous qu’en 1958 la constitution a qualifié la justice d’autorité judiciaire et non de pouvoir. Mais rien n‘interdit de muscler le droit pour faire face à ce qu’on n’avait pas prévu dans les années passées et à la conjoncture mondiale qui change. Au lieu de lois parfois fumeuses et qui clivent à portée sociétale attaquons nous aux vrais problèmes quotidiens qui engagent aussi l’avenir. Et ne voulons pas tout règlementer. Faisons confiance à la conscience des citoyens et des professionnels en fixant seulement des limites. Ne remettons pas toute question à la sagesse des juges. En revanche respectons le vote des citoyens qu’il faut convaincre, pas exclure. L’arc républicain tire des flèches empoisonnées. C’est cela la démocratie élémentaire. Il appartient ensuite aux élus de faire taire leurs inimitiés voire plus et certitudes dogmatiques et de trouver des solutions consensuelles. Les donneurs de leçons n’ont pas la science infuse.   

 Pour résoudre la quadrature du cercle Il est peut- être temps de revoir le rôle de la justice qui est essentielle dans un état de droit. A la condition qu’elle ne se substitue pas au peuple au nom de qui elle se prononce. Il y a un équilibre difficile à trouver mais on peut le faire. Pour sortir de nos querelles et que le soupçon n’existe plus. Quand on touche aux juges, quand on les attaque, quand on les contourne, la démocratie vacille. Et le peuple en subit les conséquences. Mais il faut aussi que les magistrats y mettent du leur, qu’ils ne se drapent pas dans leurs robes immaculées et qu’ils acceptent d’être critiqués. Que leurs responsabilités puissent être engagées comme pour tout citoyen d’une démocratie. Il n’y a pas de plus égaux que d’autres.

Les réformes sont connues et sont dans les tiroirs. Que nos parlementaires -forcément courageux comme l’aurait écrit Marguerite Duras - aient la hardiesse de voter une grande réforme urgente. Une fois n’est pas coutume !  On ne peut continuer de s’étriper à chaque fois qu’un politique est jugé. Et ce n’est pas fini puisqu’on veut laver plus blanc que blanc. A qui le tour M. propre ? La justice a les yeux bandés mais porte la balance et le glaive.   

Il ne peut y avoir des juges contre la démocratie ou la démocratie contre les juges. Les légitimités se complètent et ne se combattent pas. Ce que veut le peuple il doit l’obtenir. Que cela plaise ou non à des minorités ou à ceux qui pensent avoir la vérité. 

1 commentaire:

  1. Comment les juges peuvent ils se syndiquer. Je ne comprends pas

    RépondreSupprimer