mardi 3 septembre 2019

les citoyens doivent aussi changer d'état d'esprit


Les citoyens doivent aussi changer d’état d’esprit.
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
Quand on suit l’actualité de notre beau et vieux pays comme le dénommait le général de Gaulle on est sidéré par tant de polémiques vaines ; de discussions inutiles dont la conclusion  change au fil de la journée ou du lendemain ; de revirements spectaculaires (M.Cohn-Bendit se revendique désormais gaulliste !) ou de trahisons justifiées par des motifs aussi farfelus qu’intéressés (certains  maires prennent des étiquettes nouvelles ,celles présumées les   plus porteuses pour  gagner les futures municipales, bonjour les convictions) ; et de pertes de temps à essayer de convaincre ceux qui refusent de l’être et se méfient de tout sauf de leurs propres certitudes ; enfin de la propension à exiger par des manifestations souvent violentes des réformes nécessaires et argumentées par de multiples expertises et par la situation financière du pays,  à condition qu’elles ne les concernent pas personnellement mais qu’elles impactent les autres  qui n’ont qu’à payer ou subir.
 Que sont devenues les notions de retenue et patience, de solidarité, de partage, de tolérance, d’objectivité et d’intérêt général ? On a parfois des surprises, des changements comme M.Macron qui a choisi une autre solution pour la réforme des retraites que celle négociée depuis des mois par M.Delevoye : mais attendons le  projet définitif. Cela peut rappeler et conduire à Waterloo : la garde meurt mais ne se rend pas, et Napoléon attendait Grouchy or ce fut Blücher. Certes c’est parfois pire ailleurs. Mais notre société va mal psychologiquement : on est passé du burn- out à des crises d’épilepsie. Le citoyen se roule par terre s’il n’obtient pas tout, tout de suite.  On n’attend plus la réponse à la question qui est une injonction. On proteste par avance, on crie à l’inégalité et à l’oppression, on accuse l’autre surtout les dirigeants de vouloir tout casser pour fournir des bénéfices aux plus riches.
 On est quasiment revenu à la lutte des classes, aux intérêts des corporations ou des communautés. Il n’y a plus de ciment qui conforte, de sentiment d’appartenance à une entité soudée dans une cohésion sociale. L’émotion l’emporte sur la raison – comme pour le problème des migrants et l’islam en France qui devrait s’intégrer dans le cadre de la laïcité comme la religion catholique et les autres cultes, ce qui apaiserait déjà les esprits - et l’empathie sert de politique. On dénonce, on invective, et on cloue au pilori médiatique. Si on se trompe on ne s’excuse pas, on passe à autre chose en laissant la victime se débrouiller car il n’y a jamais de fumée sans feu.
 L’historien américain Francis Fukuyama après la chute du mur de Berlin avait prédit la fin de l’histoire et l’instauration du modèle occidental de démocratie libérale. Il s’est trompé. Les populismes règnent. Certains en France veulent une démocratie directe participative où le peuple par nature pur et compétent gouvernerait, sans se souvenir des régimes soviétiques, maoïstes ou chinois et sans compter les dictatures et les théocraties où la parole de dieu remplace la loi. On rejette tout régime représentatif, avec des élections libres au cri du tous pourris ou simplement profiteurs.  Mais on ne dit pas précisément par quoi et comment remplacer la démocratie représentative, et quelle voie économique peut produire les richesses qu’il faut redistribuer. Les économistes y compris les prix Nobel que l’on voit s’exprimer un peu partout sont perdus entre l’offre et la demande, Milton Friedmann et John keynes  (lire Alain Minc) et n’ont plus de modèle pertinent.
 Marx et le collectivisme sont morts et enterrés, et le libéralisme /capitalisme en manque de globules a besoin de vitamines et d’un profond lifting. Il faut inventer du nouveau et créer une start-up de l’économie moderne. Peut- être que Tocqueville avait des idées et à défaut   au secours trouvons le bon expert avec des idées applicables celles qui permettent de trouver l’équilibre entre les volontés contradictoires des citoyens, entre l’Etat qui garantit et favorise les initiatives et celui qui protège et dirige tout, en n’ayant pas le seul intérêt matériel comme horizon.   Comment exercer le pouvoir et avec quelles boussoles ? C’est grave docteur que nos dirigeants ne sachent plus où donner de la tête, creusent des trous comme le sapeur Camember pour combler des vides, et ne répondent qu’à l’urgence.
Quelles options choisir puisque gouverner c’est prévoir. On veut une société plus ouverte, fondée sur les technologies et le plaisir de l’individu qui comme un enfant doit obtenir ce qu’il veut, même si la majorité est réticente ou n’accepte pas. Tant pis pour ceux qui ne vivent pas en ville, roulent au diesel par nécessité, reçoivent internet par intermittence et n’ont pas de travail dans l’économie mondiale, et on exige la satisfaction de revendications humaines spécifiques dans le domaine biologique ou autre, naturellement remboursées par la sécurité sociale. On fait assumer son désir par la collectivité.  Le voisin devient suspect s’il ne partage pas les mêmes valeurs et la violence est un simple moyen de faire céder qui résiste.
Bien sûr on dénonce les violences policières, puisque celles des manifestants ou des protestataires de tout poil sont forcément justes et nécessaires. Les maires sont bons à jeter car ils empêchent de faire ce que l’on veut et ils ont le culot de vouloir faire respecter la loi et les décisions du conseil municipal. On s’étonne ensuite que les vocations pour les futures municipales soient en diminution, sauf pour les partisans politiques et ceux qui savent tout ou veulent imposer leurs principes de vie.  On va dans le mur en klaxonnant. Une fois qu’on a dit cela que faire ?
Il va bien falloir que l’on retrouve du bon sens, de l’autorité qui n’est pas de l’autoritarisme, des valeurs qui sont communes, et des règles de droit impératives. C’est comme si dans un match de foot il n’y avait pas d’arbitre ni de règlement, qu’on ne savait pas s’il y a hors-jeu, pénalty ou non, que certains joueurs s’arrêtaient pendant le match pour leurs croyances personnelles pendant un moment, qu’hommes et femmes étaient séparés dans les tribunes, et que le score était voté par référendum en direct. Il doit y avoir respect de la loi, qu’on l’approuve ou non, puisqu’elle est démocratiquement élaborée et promulguée, sous réserve de l’appréciation ferme de la justice.
 Nous sommes tous plus ou moins coupables et nous devons nous y mettre aussi à abandonner un peu de nos droits et exigences au profit des devoirs dont on ne parle jamais, de l’intérêt général et de la sécurité globale. Les menaces graves sont partout et un drame peut arriver à tout moment, par un individu, un groupe ou la nature.  Nous devons faire preuve de beaucoup plus de civisme. « Notre maison brûle » avait dit le président Chirac en parlant du climat. Le président Macron a repris la formule mais il faut l’étendre à tout ce qui ne va pas dans la société. Les pompiers qui sont scandaleusement régulièrement agressés comme les médecins et les policiers, ne peuvent être partout dans tous les secteurs de la vie. Nous devons prendre nos responsabilités car nous  avons notre destin en main et nous participerons chacun à l’échec ou à la réussite qui ne peuvent qu’être collectifs. Soyons adultes ce qui n’empêche pas de défendre ses propres intérêts et agissons. Il ne me plait pas de me faire tancer par une fillette de 16 ans la petite Greta, gamine sans savoirs ni légitimité, manipulée, et vêtue d’un manteau vert de martyr de la planète trop grand pour elle.  Va-t-on pousser le ridicule à lui donner un prix par avance puisque c’est la rentrée scolaire, comme on avait attribué le prix Nobel de la paix au président Obama deux jours après qu’il ait pris le pouvoir pour la première fois. On a vu la suite.
 Nous devons donc collectivement changer d’état d’esprit. Certes la classe politique qui se succède depuis des années, quelle que soit la politique choisie, n’a pas réussi à régler les problèmes économiques et sociaux, auxquels s’y sont ajoutés la querelle sur le climat, l’immigration sauvage et des problèmes sociétaux. D’où la vague de dégagisme, les électeurs croyant qu’en changeant les têtes tout s’améliorerait. Mais on a les dirigeants que l’on mérite et que l’on a choisi librement et si le vote des législatives de 2017 a donné quatre grandes tendances dont deux extrêmes, comment faire la synthèse ? Les citoyens ont donc une part de responsabilité dans la situation actuelle, outre leurs exigences particulières, et il faut que globalement nous nous ressaisissions. Les élus qui essaient de faire plaisir à un maximum de gens ne sont pas coupables de tout, les torts sont partagés. Il faut le reconnaitre et pour chacun d’entre nous revenir à plus de modération sachant que l’Etat n’est pas magicien ou sur- puissant et qu’il faut bien prendre l’argent chez certains si l’on veut faire des réformes efficaces puisque on ne veut pas toucher aux dépenses publiques pour ne peiner personne !  

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