mardi 3 septembre 2019

la désobeissance individuelle ou collective mâtinée de violences est un danger mortel


La désobéissance individuelle ou collective mâtinée de violences est un danger mortel.
Par Christian Fremaux avocat honoraire et élu local.
La violence prétendument justifiée par des motifs objectifs et recevables (ou non) s’est imposée comme une caractéristique de notre vie en société. On ne discute plus on cogne ; on ne négocie plus on détruit ; on ne respecte plus l’individu on le frappe ; tout ce qui représente l’autorité n’est plus un adversaire mais un ennemi à éliminer ou à corriger. En général ce n’est pas efficace car aucun gouvernement ne peut céder à la force dans une démocratie où il y a des instances de dialogue, des corps intermédiaires et représentatifs, dans un état de droit. Mais parfois cela paie partiellement car on a peur du peuple, des passer pour des antidémocrates qui méprisent l’expression populaire ou qui refusent la justice sociale.
 C’est ainsi que l’on a désormais les samedis des manifestations dont les slogans sont aussi contradictoires que farfelus pour certains, qu’on n’en voit pas la fin puisque le président de la république sauf surprise que je ne peux imaginer, ne va pas démissionner ; que des grèves et blocages divers vont s’y ajouter, et que la cohorte des mécontents de toute nature va former un bloc -on espère pas un black-bloc - pour s’opposer à tout ce qui les dérange personnellement et menace leurs privilèges et confort, puisqu’ ils détiennent eux seuls la vérité et les solutions pour réformer le pays sans que personne ne soit  perdant, et à moindre coût dans le cadre de la transition écologique et de la société numérique et transhumaine.  On marche à l’émotion, à la satisfaction des désirs individuels, à la tyrannie des minorités et de l’audimat, à l’urgence et à l’absence de règles puisque toute interdiction est une provocation personnelle.
 Je doute qu’une société qui doit vivre de compromis, d’équilibre entre les contradictions, et qui doit défendre l’intérêt général, puisse progresser dans ces conditions où les droits effacent les devoirs, ou toute décision publique est immédiatement contestée, où une minorité agissante ou un groupuscule défendant le bien défini par lui-même exige sa réalisation, ou la transparence anéantit jusque la vie privée, et où la morale remplace la loi ou les principes intangibles. Tout se vaut, et tout peut être remis en cause à partir de raisons personnelles.
  Une démocratie est pourtant fragile, un grain de sable peut la bloquer et la transformer en anarchie - le général de Gaulle parlait de chienlit - et aboutir à ce que l’on ne veut pas : un régime populiste, de type autoritaire. A force de tirer sur la corde elle casse, et parfois l’histoire repasse les plats. Il ne faut pas avoir la mémoire courte.  L’homme est ce qu’il est avec son côté sombre et il ne faut pas croire que le pire ne peut pas arriver.
Il faut donc réfléchir et privilégier la raison sans abandonner son intérêt personnel et la défense de ses droits dans le cadre d’une justice sociale et d’une nation solidaire. Ne jamais être satisfait et demander l’impossible n’est pas être réaliste. C’est mettre de l’huile sur le feu, créer de faux espoirs et donc décevoir. C’est négatif et dangereux.
 On a ressorti un vieux concept qui est devenu une arme de revendication et de chantage massif : la désobéissance.  On l’a entendu et vu sur un pont à Paris où des citoyens s’étaient couchés et attachés pour défendre la planète, sans déclaration préalable ni autorisation naturellement car pourquoi suivre la loi ? et ont refusé de se disperser ce qui a entrainé l’intervention que l’on a dit musclée de la police qui a utilisé du gaz pulvérisé au visage, au grand scandale des gentils écologistes et des médias pour quelques heures indignés. 
La désobéissance civile combat l’autorité de la délibération publique. Cette forme de résistance passive -que finance un milliardaire américain aux USA - consiste à refuser d’obéir aux lois délibérées et votées démocratiquement et à écarter les jugements d’ordre civil. Des citoyens mus par des motivations éthiques ou prétendues telles (que la majorité n’approuve pas de son côté ou ne connait pas) transgressent délibérément de manière publique, pacifique dans l’intention – qui se caractérise par de la violence en fin de compte - une loi en vigueur [lire John Rawls 1971 théorie de la justice]. On se rappelle les campagnes de désobéissance civile en Afrique du sud de 1949 à 1952, et de l’action aux USA de Martin Luther King (1929-1968). La situation est- elle aussi critique en France en 2019 même si le réchauffement climatique mérite qu’on agisse ? On ajoute dans cette pratique au civisme la notion de « civilité » entendue comme du savoir-vivre (ensemble).
La désobéissance civique qui est une notion quasi similaire se distingue cependant de la civile car elle se heurte à la démocratie classique représentative qui incarne la majorité du peuple. Des minorités agissantes veulent avoir raison et déstabilisent les institutions. C’est le refus de vote, le rejet de toutes directives publiques, de la loi… Sans avoir la moindre légitimité, on fait passer son avis avant celui des autres et son intérêt personnel avant l’intérêt général. On veut être aussi vigie auto-proclamée, lanceur d’alerte que d’ailleurs désormais la loi protège. Le cadre légal est abandonné.
Ce genre de désobéissance menace le système institutionnel et la confiance envers ceux qui ont été élus pour gouverner. On revient à la loi du plus fort, le faible n’est plus rien, l’élu est suspect, alors qu’il va de soi que tout abus doit être puni et que le soupçon permanent ne fait pas avancer les choses. On ne peut se contenter d’être contre. Il faut faire des propositions concrètes seule solution pour qu’il y ait du progrès et moins d’injustice ou d’anomalies.  L’individu n’est pas roi et le peuple qui a coupé la tête à Louis XVI est le souverain dans sa majorité.  Personne n’a le monopole du peuple, ou de la vérité ou du bien. On participe tous. On ne peut avoir raison sur tout et tout le temps. Pour les enfants désobéir est un vilain défaut, un manque d’éducation. Pour les adultes individuellement ou en petit nombre collectivement désobéir est mettre en danger la cohésion nationale et la nation, et est péril mortel pour la démocratie. Quant à la violence elle est inacceptable sous toutes ses formes et quel qu’en soit le motif. La fraternité, la tolérance, et le débat démocratique même incisif doivent s’imposer.   

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