Humanisme et bons sentiments
Par Christian FREMAUX avocat et élu
local
Depuis l’arrivée massive d’hommes, de
femmes et d’enfants que l’on qualifie de migrants en mélangeant les notions de
réfugiés, de demandeurs d’asile, de volontaires économiques, et de profiteurs
de l’occasion toutes catégories confondues, sans oublier peut être des
djihadistes infiltrés, on oscille entre l’ émotion et la compassion, et la
peur, car personne ne maîtrise la situation et tout et son contraire se disent.
On joue sur l’empathie ou le rejet selon ses intérêts, son camp politique, sa
philosophie et ses valeurs, et ça plane pour tout le monde. On sent bien que
ceux qui sont au pouvoir ou veulent y revenir, n’ont pas les moyens et hésitent
à s’engager, d’autant plus que l’Union Européenne est partagée et qu’aucun
accord global ne se dessine. L’ONU flotte aussi : faut il autoriser une
intervention au sol ? tout en imposant des conditions d’hébergement sur
place : comment secourir ceux qui ont tout perdu et sont menacés de
mort ? C’est l’hésitation
permanente et la prise de décision aussitôt démentie. On ouvre les bras
que l’on verrouille au plus vite car on ne pourra pas tenir les promesses qui
d’ailleurs n’engagent que ceux qui y croient. Aucune action politique pérenne
ne peut prospérer avec les bons sentiments qui certes font plaisir et soulagent
celui qui les porte, mais qui sont en réalité une forme de satisfaction de son
égo : je suis généreux moi, sous-entendu les autres ne pensent qu’à
eux ! On n’avance pas ainsi .André
GIDE a écrit que ce n’est pas avec de bons sentiments que l’on fait une bonne
littérature .Le grand CORNEILLE aurait revisité LE CID : »Rodrigue as
tu du cœur ? Tout autre que mon père l’éprouverait sur l’heure » et
il aurait confirmé son constat : « nous partîmes 500 mais par un
prompt renfort nous nous vîmes 3000 en arrivant au port ».
Les côtes italiennes n’ont pas de
ports d’accueil sauf des points d’arrivée sauvages et la GRECE dont les habitants
souffrent et qui ont évité le GREXIT de peu, botte en touche et pousse les
arrivants vers d’autres pays. Le berceau de la civilisation n’aurait-il pas de
cœur ? Parlons de sentiments avec
l’image du petit garçon mort sur une plage ce qui nous a tous bouleversé , mais
pas au point cependant d’accepter n’importe quoi, soyons francs, par exemple à
proposer l’accueil de centaines de milliers de migrants puis changer d’avis
après s’être rendu compte que c’était irréaliste voire injuste pour nos
nationaux qui sont au dessous de notre seuil de pauvreté. C’est un combat entre
démunis de tout et persécutés , et pauvres selon nos critères .On ne doit
pas gouverner par l’émotion qui est fugace et changeante. L’illustre avocat Me
MORO-GIAFFERI qualifiait l’opinion
publique comme une catin qui doit être chassée du prétoire. Les politiques
populistes n’ont jamais donné quoique ce soit de bon et il est préférable de se
fonder sur la raison, ouverte et généreuse mais lucide, car reprendre l’espoir
que l’on a suscité est malsain .Il faut bien sûr se réjouir des initiatives
personnelles de ceux qui offrent , sans
contre -partie, le gîte et le couvert. Ce sont des justes. Mais ceux qui ne le
font pas ne sont pas à mettre au ban de la société : ils ne sont coupables
de rien. Les responsables sont à rechercher dans les gouvernements des pays à
feu et à sang, ou incapables de nourrir leurs concitoyens, ou chez les
terroristes qui utilisent désormais en plus, l’arme de la déportation massive
.Il ne faut pas confondre humanisme et bons sentiments qui ont forcément leurs
limites.
JEAN BODIN (1529-1596 à LAON) a écrit
« qu’il n’y a de richesse que l’Homme ».L’humanisme est une philosophie qui place l’Homme et les
valeurs humaines au-dessus de toutes choses. Ce
courant culturel a pris naissance en TOSCANE(Italie) au moment de la
Renaissance .Je ne sais pas si en ce moment, à LAMPEDUSA, les italiens
vérifient cette valeur : ils font au mieux ! Il ne s’agit pas
d’accueillir les migrants par intérêt économique comme en Allemagne semble- t-
il, ni pour faire redémarrer le croissance qui ne se décrète pas et repose
avant tout sur les chefs d’entreprise qui ont besoin de visibilité , de stabilité en droit, et de
sécurité en général avec la confiance
dans nos gouvernants .En outre le ratio coûts de l’accueil et profits à espérer
à court ou moyen terme , ne peut être calculé de façon certaine .Accueillir les
migrants est donc un question avant tout humanitaire et c’est là que le bât
blesse .Est il permis d’écrire, au risque de passer pour un moins que rien, que
voir les allemands faire des haies d’honneur et applaudir les colonnes de refugiés,
m’a laissé perplexe, d’autant plus que la chancelière Mme MERKEL a refermé ses bras un peu plus tard et que
l’enthousiasme s’est refroidi ! Dans notre cher pays pétri de démocratie
et de respect de l’autre, on oppose cependant le camp du bien qui se situe en
général à gauche, à l’égoïsme et à la xénophobie des autres, en vouant aux
gémonies par exemple, M Viktor ORBAN
premier ministre de la HONGRIE .Construire des murs-après avoir démoli
celui de BERLIN en 1989- ne rime à rien car comme pour la ligne MAGINOT en
France de funeste mémoire, les foules qui n’ont rien à perdre les contournent
et finissent pas passer. Mais comment aider la HONGRIE : en a-t-on
seulement l’intention ? Les conseilleurs ne sont pas les payeurs et quand
on n’est pas confronté directement aux problèmes, il est facile de donner des
leçons .Il faut évidement revoir les accords de SCHENGEN ; rétablir des
contrôles aux frontières ce qui ne veut pas dire les fermer ;aider sur
place les pays en guerre et qui font face aux désordres et trouver une
stratégie qui ne se retournera pas contre ses initiateurs, pour détruire l’Etat
islamique et tous les groupuscules terroristes .C’est plus facile à écrire qu’à
faire et il faut au moins un consensus national à ce sujet et pas de la
surenchère ou une guerre picrocholine
comme dans GARGUANTA , de RABELAIS .On s’est souvent gaussé du mot
NATION tel que défini par Ernest RENAN : c’est pourtant le ciment sur
lequel nos valeurs prospèrent et qui permettent aux citoyens de vivre ensemble,
en paix, même avec des idées différentes .Cessons donc de nous quereller car
personne n’a LA solution pour résoudre au-delà du problème des migrants , les
difficultés de notre vie quotidienne. Soyons modestes, ramenons nos débats
internes à de justes proportions et à plus de sérénité et nous franchirons
cette étape dans l’intérêt de tous.
C’est cela l’humanisme.
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