mardi 17 novembre 2015

ACTUALITÉ VUE PAR...

L'actualité vue par...

Christian FREMAUX. avocat honoraire. 2ème promotion IHESI -1991-président d'honneur de I'ANA
« Le seul moyen de résister à une tentation c'est d'y céder »a écrit OSCAR WILDE .La tentation de cette fin d'année 2015 est de partager l'inquiétude de certains intellectuels ou classés comme tels, de toutes tendances d'ailleurs, et d'intégrer Ie clan des déclinistes ou prétendus tels qui ne bêlent pas avec les moutons de la  bien-pensance et qui regrettent les trente glorieuses ou certains aspects de celles ci,  en constatant que la société est au bord de la crise de nerfs, que de misérables querelles politiciennes alimentent le désamour entre les dirigeants et les citoyens, mais qui pour autant ne proposent rien de vraiment concret pour combattre le cri de « on a tout essayé ».Mais je ne le ferai pas et je choisis le camp de ceux qui ont foi en l’avenir, et qui essaient de trouver et de proposer des mesures de bon sens, pragmatiques qui s’appuient sur des valeurs incontestables  et qui tendent à réunir plutôt que cliver. Il n’y a qu’un peuple français qu’il soit de gauche, de droite ou d’ailleurs et c’est pour lui que l’on doit faire tous les efforts possibles. Quand on connait la fin de l'histoire il est facile de dire voilà ce qu'il aurait fallu faire. Cela n'exonère pas ceux qui sont à la manœuvre de répondre de leurs erreurs et d'éviter de poursuivre dans l'idéologie : errare humanum est perseverare diabolicum, s'il est encore permis de parler latin puisqu'il semble que les humanités ont mauvaise presse au sein de l'éducation nationale, et conduiraient à des inégalités ?
L'actualité étant protéiforme et abondante, dans notre société de l'urgence où on zappe d'un sujet à un autre , tout étant mis au même niveau d'importance, j'ai choisi ce qui m'a paru significatif dans l'actualité de ce semestre pour faire passer quelques idées ou messages que j'espère positifs car je crois en la France dans l'Europe, qui conserve sa souveraineté pour protéger ses citoyens et combattre le « marché » celui qui doit se réguler tout seul mais qu’il faut contraindre ! ,en son génie, à sa capacité de rebondir, même si ce sont les citoyens qui doivent prendre leur destin directement à leurs comptes, pour que tous les corps intermédiaires et représentatifs qui sont indispensables dans une démocratie, suivent et prennent le relais. « il faut bien que je les suive puisque je suis leur chef » disait Alexandre-auguste LEDRU-ROLLIN en 1849.
Le 18 juin dernier-date qui parle à certains français libres- on a rejoué la bataille de WATERLOO qui a mis fin aux rêves de NAPOLEON de reconquête du pouvoir avec la défaite des armées anglo-prussiennes. On se rappelle du poème CHÂTIMENTS de Victor HUGO : on attendait GROUCHY, ce fut BLUCHER ! Pour l'instant on attend la croissance et l'inversion de la courbe du chômage qui devraient régler tous les problèmes et nous dispenser de faire les réformes structurelles, comme celles  notamment qui concernent le service public  et le marché du travail avec une vraie réforme du droit du travail sans éviter les sujets qui fâchent comme le contrat de travail à durée indéterminée et les …35 heures, alors que l'on participe avec l'Union européenne à exiger des efforts considérables pour  d'autres Etats comme la Grèce , ou l'Espagne…Fais ce que je dis, pas ce que je fais ! Et s'il n'y avait pas de retour vers le futur ? Si se créait sous nos yeux une nouvelle société où la valeur travail ne serait plus la même, si l'ère du numérique, de la dématérialisation, de la technologie exigeait d'autres formes de solidarité entre les hommes ; et si le progrès cher à tous les républicains était dans des rapports sociaux à inventer pour que tout le monde y trouve sa place et soit gagnant ? Et s'il fallait faire du sur-mesure plutôt qu'un costume uniforme...Et si « tu seras un homme mon fils » écrivait RUDYARD KIPLING, mais c'est une autre histoire, celle où la richesse se partage autrement, où les territoires se complètent et offrent tous des espoirs nouveaux selon les compétences et efforts de chacun, et non pas du lieu d'où l'on vient et sa dénomination .On le voit tous les jours : nos valeurs républicaines traditionnelles changent de contenu et ne sont pas comprises pareillement: les libertés individuelles doivent prendre en compte les menaces internes et externes .Comme le disait le prince SALINA dans le GUEPARD, « il faut que tout change, pour que tout reste pareil ».
Il s'agit donc de bâtir de nouvelles perspectives, concrètes car beaucoup attendent, et ne voyant rien venir sont prêts à toutes les aventures, avec des principes solides pour que chacun y trouve un intérêt personnel et que l'ensemble forme une Nation prospère, juste ,n'oubliant personne sur le chemin et assez fière d'elle –même et puissante pour porter sa parole humaniste résultant de son histoire, à I' extérieur.
Il y a eu CHARLIE dont la signification et la portée font l'objet de débats intenses : [lire : << Qui est vraiment CHARLIE ? ces 21 jours qui ébranlèrent les lecteurs du MONDE ».ED. François Bourrin JUIN 2015]. Nous sommes dans l'après CHARLIE, dans notre réflexion sur la liberté d'expression, la tolérance, et la République qui s'est réveillée aux cris des barbares qui sont à nos portes voire déjà chez nous. Ils ont désormais un territoire et de l'argent, beaucoup d'argent. DAESH vend du pétrole, rackette, fait peur en démolissant des merveilles du passé, et décapite en direct en filmant la scène .L'Etat islamique embrigade des (jeunes) hommes et femmes qui viennent parfois de chez nous et veut imposer un califat partout où il le peut. ! Pendant ce temps-là les migrants se déplacent, en colonnes qui nous rappellent d'autres tristes époques, en hordes dispersées, fuient, passent d'un frontière à l'autre  ou se heurtent d’un mur à des barbelés -ce qui n’est pas un vrai progrès humain- et cherchent l'espoir d'une vie meilleure, en provoquant des polémiques tendues. Nous avons a priori, les moyens de les accueillir mais faut-il le faire et dans quelles conditions matérielles et morales, avec un consensus du plus grand nombre d’entre nous ?. Il va falloir réviser en urgence les accords de SCHENGEN  et en attendant gérer avec empathie et lucidité selon nos moyens.

L'Europe, et la FRANCE ne sont pas l'Eldorado : on attend les réfugiés vrais ou faux, avec les bras fermés, même si chacun compatit au malheur de tous. L'immigration est-elle une  chance ? : personne ne le démontre et on pose un postulat. En Allemagne sans doute, écrit M .Charles WYPLOSZ professeur d'économie internationale à l'Institut des Hautes Etudes Internationales et du Développement à GENÈVE. Il pense que l'immigration est , en principe, facteur de croissance économique mais  tout dépend du contexte économique, social et politique du pays d'accueil, en tenant compte de la démographie, d’ailleurs satisfaisante en France [Le FIGARO du 9/09/2015 page 16 ] .La générosité n'a qu'un temps et répond, en ce qui concerne l'Allemagne, aussi à des préoccupations morales [lire JL THERIOT Le FIGARO du 9/09/2015]. L'Europe s'est refroidie car les 28 Etats membres doivent affronter leur propre crise et les revendications de leur population. On est dans la démocratie d'opinion ou sondage en temps réel, les médias questionnant n’importe qui pour avoir un avis autorisé ou non ,et tout azimut. Mais est-ce vraiment utile pour la prise de décision ? Faut-il gouverner au gré des humeurs changeantes, des intérêts contradictoires ? N'est-il pas préférable d'avoir comme seul objectif l'intérêt général qui n'est pas la somme des intérêts corporatistes.
 En se rendant en banlieue, on s’est rappelé les émeutes de 2005, le Chef de l'Etat a répété qu'il n'y a pas de quartiers perdus dans la république, une France périphérique .On apprenait par ailleurs l'assassinat de deux très jeunes garçons à MARSEILLE sur fond de trafic de drogue .M. Christophe GUILLUY, géographe, (qui a reçu le prix AKROPOLIS de l’ANA-INHESJ) a indiqué que les quartiers dits sensibles ne sont pas des ghettos . [Le FIGARO 26/1O/2O15 page 20]. Il a précisé que « les zones urbaines sensibles sont devenues des formes de sas territoriaux..  les banlieues produisent de la classe moyenne (ménages en phase d'ascension sociale ; jeunes diplômés..). La république n'a donc pas lâché ces quartiers..  Selon lui, « ce qui caractérise véritablement la banlieue c'est qu'elle est le réceptacle des flux migratoires et qu'elle fait émerger une société multiculturelle, une autre France »…Il ajoute : « ce n’est plus le vote du « petit blanc » mais un vote d’immigré (en phase d’ascension sociale) qui voit d’un mauvais œil l’arrivée desdits flux . La France périphérique existe .Il y a un phénomène de communautarisme et de question identitaire ».Et il conclut : « nos politiques ont des logiciels périmés, on a l’impression qu’ils ne parlent qu’aux catégories (de plus en plus réduites) protégées de la mondialisation ».Il est donc légitime de s’interroger sur la politique de la ville et les sommes investies puisque pauvreté, délinquance et échec scolaire persistent [LE FIGARO 26/10/2015 page 2].
Dans « génération radicale » rapport commandé par le premier ministre M.VALLS après les attentats, M.Malik BOUTIH député( PS )de l’Essonne écrit que « les islamistes radicaux ne contrôlent pas encore ces quartiers, mais ils y ont établi un rapport  de force nettement visible, à travers l’affichage ostentatoire de signes religieux, le contrôle des commerces de proximité et parfois même les affrontements avec la force publique » . C’est inquiétant, mais il faut voir la réalité en face sans l’exagérer pour trouver des solutions pratiques .Il ne faut pas abandonner certaines banlieues cela va de soi, mais il faut  faire des choix qui reposent sur les valeurs de la république  et ne pas céder  au saupoudrage électoraliste, sachant que les budgets partout sont contraints, et que les collectivités territoriales ne peuvent se substituer à l’Etat.


La laïcité est-elle une solution ou l’un des moyens pour retrouver l’union ?
On pensait il y a encore plusieurs années passées, que l’on avait trouvé un équilibre satisfaisant entre la volonté de l’ETAT de n’être sous l’influence d’aucune religion ou groupe spirituel ,en affirmant sa neutralité  mais on s’est aperçu progressivement que le socle de la loi de 1905 se fissurait , dans l’école, dans les services public au sens large,  puis un peu dans tous les domaines. On a essayé de sanctionner avec modération au cas par cas ,en croyant que cela rentrerait dans l’ordre (républicain) mais la tendance s’est élargie . Comme l’a rappelé DANIEL KELLER Grand maître du Grand Orient de France dans la presse(JDD) « la laïcité est une organisation de la république dans laquelle on sépare ce qui relève de l’intérêt général, des religions , des puissances dogmatiques..Elle a une vision émancipatrice car elle permet aux individus de conquérir leur liberté ». Tout le monde devrait se réjouir d’avoir une telle liberté car la laïcité ne retire rien à personne. Elle impose simplement une règle commune qui permet de ne pas choquer l’autre, de cohabiter harmonieusement, et à l’ETAT  de ne dépendre d’aucun dogme. C’est ce que la CONSTITUTION  rappelle .Mais selon le point de vue que l’on professe, cette valeur d’ouverture est parfois considérée comme un abus ou un rejet. La raison n’a pas pénétré tous les esprits et même  les tribunaux (administratifs) flottent.
Avec les fêtes de fin d’année -je n’écris pas de Noël pour être politiquement correct-  est revenu le débat sur le droit d’installer, ou non sur le domaine public, une crèche qui n’est pour les uns que le rappel d’une tradition culturelle et affective témoignant de leur racine et de leur identité [M.RETAILLEAU sénateur de la Vendée] et pour les autres les libres penseurs qui sont vent debout, un signe religieux ostentatoire et scandaleux, qui ne peut être accepté dans une France de la diversité, de la non-discrimination et de l’égalité (fermez le ban).Les tribunaux administratifs hésitent. Ainsi en octobre 2015  la cour administrative d’appel de PARIS  a sommé la mairie de MELUN de renoncer à une crèche de Noël  estimant «qu’un emblème religieux » n’avait pas sa place dans un « bâtiment public ».Un peu plus tôt la cour administrative de NANTES ne voyait pas dans une crèche l’ombre d’un emblème religieux. Comprenne qui pourra le raisonnement  en droit et l’appréciation des juges : le CONSEIL d’ETAT devra unifier la jurisprudence pour que les élus et les citoyens  s’y retrouvent !
La loi du 9 décembre 1905 s’intitule de la séparation des églises (à l’époque catholique, protestante et juive) et de L’ETAT. Aristide BRIAND en avait été le grand ordonnateur. Il s’agissait de combattre surtout l’influence de la religion catholique – la France étant la fille ainée de l’église - et avait posé le principe que les institutions publiques devaient respecter la liberté de conscience des citoyens .En plus d’un siècle la société a évolué  et avouons  le,  l’islam a surgi surtout vu du mauvais côté à savoir le terrorisme, auquel il ne faut absolument pas l’assimiler. Qu’en est-il de la laïcité aujourd’hui ? Va – elle favoriser la compréhension et apaiser les tensions, c’est la vraie question de mon point de vue .
A l’observatoire de la laïcité présidé par M.JL BIANCO ancien ministre, on souligne que l’article 28 de la loi de 1905 laisse une marge d’appréciation aux magistrats « dans la qualification ou non, d’emblèmes religieux  de ces représentations figuratives »[Le FIGARO 23/10/2015 page 9. M. Stéphane KOVACS].Le rapporteur général dudit observatoire M. Nicolas CADENC, considère que le dîner du ramadan organisé par la mairie de Paris ou la galette des rois de l’Elysée ne font pas de la laïcité une notion à « géométrie variable » en ce qu’elle n’interdit pas aux élus de dialoguer avec les cultes.
M.BIANCO estime que l’important c’est la pédagogie.[ le Parisien 23/10/2015 page 3  : « la laïcité n’est pas un remède miracle : c’est d’abord une liberté de croire, de ne pas croire, ou de changer de religion. Sa limite c’est aussi le trouble à l’ordre public , l’indépendance de l’Etat,  et la stricte
 neutralité du service public »].On va rédiger une charte qui va préciser le cadre juridique et politique pour qu’un vestiaire, par exemple, ne se transforme pas en salle de prière.
La laïcité garantit les valeurs de tolérance et d’humanisme permettant à tous de vivre ensemble. Il ne faut pas de nouveaux clercs, exaltés, et le débat qui consiste à stigmatiser des intellectuels – autrefois qualifiés de gauche c’est- à dire dans le camp du bien, et désormais soumis à la vindicte médiatique  parce qu’ils dénoncent des faits  et favoriseraient ainsi un parti « honni » quoique légal avec de nombreux électeurs- ne rend service à personne  alors que l’on a besoin de mesure et surtout de comprendre.[lire « une autre histoire de la laïcité ».Jean-François CHEMAIN ; Via Romana 2013]. On a le droit et le devoir de réfléchir et d’exprimer son avis sur le christianisme (martyrisé en orient) , l’islam et la liberté de ne pas croire.[lire Abdennour BIDAR et Fabrice HADJADJ philosophes et écrivains ]. Dans son dernier livre « Situation de la France » 2015 édition Desclée de Brouwer, le philosophe Pierre MANENT s’est interrogé sur la montée de l’Islam, et de l’islam radical en particulier qui pose problèmes. Il écrit : « les citoyens de nos nations voient approcher  avec appréhension le moment où l’existence même de la Nation comme communauté de sens et forme de vie commune, sera  radicalement mise en cause ». Il précise que l’expérience française de la laïcité est formée de « trois éléments : l’Etat neutre simplement protecteur des droits individuels ;la société de mœurs chrétiennes ; la nation sacrée ».Mais il ajoute qu’il va falloir apprendre à vivre avec l’Islam,[Le Figaro magazine 23/10/2015], et peut être accepter des accommodements par exemple  sur les horaires de piscine ou les menus de substitution pour éviter des motifs de conflit secondaires tout en étant ferme sur les grands principes. Il demande un gagnant –gagnant. Il faut que les musulmans clarifient leur position dans la société, fassent savoir qui ils sont, ce qu’ils veulent, où ils se situent ,et les efforts qu’ils  sont prêts à faire, pour participer à la vie collective et conforter nos valeurs républicaines, en partageant notre culture, notre histoire, nos traditions, et nos ambitions collectives. Certains craignent que c’est mettre le doigt dans un engrenage fatal, mais peut on toujours refuser des avancées dans la France qui est diverse et égale pour tous ? Ici et là d’ailleurs dans des collectivités, on a trouvé des solutions pratiques et il ne faut pas  que plus tard nous nous interrogions pour savoir ce  que nous avons raté  ou pourquoi nous n’avons pas osé.
Alain MINC, d’origine juive polonaise, pur mérite de la méritocratie a aussi réfléchi aux défis  que nous devons vaincre. Il prône une certaine forme de discrimination positive pour que les musulmans deviennent une partie égale à une autre dans la société et souhaite que l’on suspende momentanément la loi de 1905 pour permettre à l’islam de se mettre dans les mêmes conditions  que les trois religions traditionnelles  [lire « un français de tant de souches (avec un S à souche) » Ed. GRASSET 2015.] Tout ceci se discute. Bien qu’indispensable et devant être consolidée la laïcité n’est pas la panacée. Elle doit jouer son rôle actif dans le cadre d’un Etat fort, recentré sur ses missions régaliennes, pilier des valeurs républicaines, capable de résister aux groupes de pression et de mettre des limites à toute revendication religieuse ou communautaire. Comme le dirait en le pastichant Michel HOUELLEBECQ , l’extension  des domaines de la lutte n’est pas infinie .M.MANENT l’explique ainsi : la  religion s’était réduite à un aspect de l’identité  individuelle. Or pour l’Islam, la religion est un «  fait social massif » et elle ne se dissout pas dans la démocratie.  La religion doit rester de la sphère privée et ne peut exiger une place visible dans l’espace public. Les tribunaux ne pourront pas résoudre toutes les difficultés et interprétations de la laïcité, notion qui reconnait tous les siens dans une coexistence pacifique .La Justice est  alors pour d’autres sujets sensibles, au centre du débat public que l’on approuve ou que l’on rejette l’action et les déclarations (souvent lyriques) de Mme la Garde des Sceaux qui applique la politique judiciaire décidée par le gouvernement.

ACCUSEE JUSTICE,LEVEZ VOUS ; QU’AVEZ –VOUS A DIRE POUR VOTRE DEFENSE ?

Le rôle du Ministère de la Justice et des tribunaux ne se réduit pas à la personne de celui qui les incarne, en l’occurrence Mme la Garde des Sceaux qui plait aux uns et pas aux autres. C’est d’ailleurs la marque d’un ministre dont on se souviendra. Le ministère de la Justice est régalien et incarne l’autorité de l’exécutif : il a pour mission de faire appliquer notamment la politique pénale  –celle dont les médias sont friands- à savoir la philosophie générale sur les délinquants, le rôle de la prison ; la protection des victimes et celle de la société. Je n’oublie pas naturellement le terrorisme  dont on a intégré la menace pesante en permanence. Mais il a aussi en charge le fonctionnement des diverses juridictions sur le plan civil, social, commercial, et public( avec les hôpitaux, les collectivités territoriales…) qui intéressent dans la vie quotidienne l’ensemble des justiciables  qui sont honnêtes, paient leurs impôts et taxes , respectent la loi mais ont besoin d’un arbitre neutre et compétent  –le juge -pour régler leurs litiges personnels. Sauf s’ils en ont été victimes le sort des délinquants les intéresse moyennement, même s’il y a beaucoup de films policiers ou de séries à la télévision sur le crime. Mais à chaque fois qu’il y a une bavure, il faut trouver  toutes affaires cessantes, le responsable et coupable si possible ! On n’échappe pas à ces contradictions. Si de surcroît c’est un politique qui est soupçonné voire interrogé ou encore mis en garde à vue ,  l’imagination grandit et on se réjouit que les prétendus  puissants n’échappent pas à la règle commune. Les médias alors se déchainent et chacun donne son verdict, au mépris d’ailleurs de la présomption d’innocence. ..La Justice ou son ministère doivent répondre des mécontentements et servent souvent de bouc-émissaire. Ce n’est pas le moyen de la faire progresser  et de redorer son blason même s’il faut s’adresser  à celui qui a le pouvoir donc  les responsabilités quand telle ou telle profession est concernée.
Courant octobre les défilés n’ont pas eu lieu de la République à la Nation et ce n’étaient pas des défilés de mode ! On était place Vendôme non pas chez les grands bijoutiers –  car on sait que  le budget de la justice est très insuffisant voire maigre- et  on a pu y voir les policiers dont on comprend la colère ,eux qui prennent continuellement des risques et qui ne rechignent pas à faire des heures  sans fin, mais aussi les agents de la pénitentiaire qui exercent un métier très difficile et dangereux  .Les avocats, qui sont des auxiliaires de justice , n’étaient pas les derniers pour protester contre la réforme de l’aide juridictionnelle et le fait qu’on aurait voulu leur «  piquer » leur cassette ( les intérêts des fonds CARPA ) .Notons qu’un accord a été trouvé après trois semaines de grève des avocats. Les discussions  par ailleurs continuent chacun ayant des exigences légitimes face à l’ETAT qui lui aussi compte ses sous qui se font rares ! Le ministère de la justice est à la fois une organisation du service public ( le fonctionnement des tribunaux)  de la justice et aussi le porteur de valeurs fondamentales : dire le droit , appliquer la loi votée par les parlementaires qui représentent les citoyens, sanctionner ceux qui la violent , et redonner  ou donner  un sens à la vie en société puisque désormais le juge est saisi  de questions qui divisent  les individus ou que le législateur n’avait pas prévu. La justice est une VALEUR et elle doit conforter et sublimer les autres. On a le droit de maudire ses juges lorsque leur décision ne nous satisfait pas. On peut vouloir  la suppression du juge d’instruction symbole du système inquisitoire, cet homme ou cette femme, ce « petit juge », magistrat indépendant qui fait une  enquête à charge  et à décharge, qui décide seul par exemple et au hasard,  de géolocaliser l’ancien chef de l’Etat à l’occasion d’une affaire qui sent la poudre de cocaïne comme si l’intéressé , qui va finir par  être bénéficiaire du titre peu envié de l’homme le plus  suspecté de France ? ,  pouvait être en plus trafiquant de drogue !, ce qui est une démarche judiciaire pour le moins innovante ; qui  ose poser des questions et attend des réponses  crédibles ; qui peut  ruiner une carrière  et qui dans son domaine est aussi «  puissant »que ceux qu’il ou elle interroge. On peut préférer le système accusatoire où la justice est orale, publique et contradictoire  avec un juge arbitre et le jury qui est le peuple,à l’anglo-saxonne et plus particulièrement à l’américaine que l’on voit à la télévision où les avocats libèrent leur client sur parole ou caution,  et qui oblige le procureur à faire la preuve absolue de la culpabilité de la personne poursuivie (on a vu les effets pervers de ce système dans le dossier D.S.K., mais on a le droit de le vouloir).On peut donc être très critique envers les magistrats qui ne peuvent être les seuls à ne pas rendre compte de leurs actes.

Mais on ne peut les suspecter,  et on doit d’abord régler le problème récurrent  qui existe entre les politiques -de tous bords -qui revendiquent l’onction du suffrage universel, qui pourrait être supérieur aux intérêts de la justice. C’est un faux débat qui ne peut conduire qu’à l’affaiblissement de la justice et à des confrontations où deux logiques s’affrontent. Il appartient au pouvoir politique  d’instaurer un vrai débat public, en y passant du temps, sur le rôle de la justice dans un état de droit ; sur les pouvoirs ou les compétences dévolues aux magistrats ; sur leurs places dans les institutions, sur l’exemplarité des décisions rendues. C’est le premier président de la cour d’appel SEGUIER qui disait que « la cour rend des arrêts pas des services ». A défaut d’un réel débat objectif, contradictoire, mesuré, le conflit justice-politique perdurera,  ne sera à l’honneur de personne et il n’y aura pas de vainqueur. On ne devrait pas non plus avoir à  s’interroger sur la volonté avérée et concrète ,ou la capacité de l’Etat à assurer la fonction de justice c’est-à-dire de sanctionner ceux qui dévient et sont des délinquants au sens ordinaire du terme.[ lire  M. Jean -Claude MAGENDIE 1er président honoraire de la Cour d’appel de Paris : « les évènements de MOIRANS, la loi pénale  et la  soft law (droit mou) » qui invite l’Etat à exercer sa première fonction régalienne, la justice ,au risque à défaut, de favoriser l’anarchie [Le FIGARO du 29/10/2015 page 16).« La justice est la liberté en action » disait JOUBERT. Elle s’inscrit dans l’état de droit ce qui ne signifie pas que l’Etat a des droits propres (sauf dans des cas exceptionnels et quand la patrie est en danger).L’Etat doit permettre l’exercice réel des droits individuels et libertés publiques et veiller à la protection des personnes et des biens  en assurant la sûreté contre toutes les menaces, de quelque nature qu’elles soient,  sous le contrôle des tribunaux. Il est donc CONTRE-PRODUCTIF de relancer à toute occasion le débat sur prévention ou répression  car il nous faut les deux ; d’opposer forces de sécurité et magistrats qui sont complémentaires ; et de crier au laxisme et à l’irresponsabilité au-delà des fautes de quelques uns qui existent dans toutes les professions. Certes certaines sont dramatiques et entrainent des conséquences irréparables qui peuvent indigner toute personne. Je propose  que l’on hisse le drapeau blanc et que l’on fume le calumet de la paix (sans herbe hallucinogène)  pour qu’un dialogue constructif  commence entre les magistrats et les forces de l’ordre. L’INHESJ est l’endroit idéal pour se rencontrer. Il ne s’agit pas de jeter l’eau du bain de la société,  à cause de quelques uns qui barbotent dans l’illégalité et sont sans scrupules et morale, pour croire que le bien est naturel et que la loi sera l’horizon indépassable. Quelques soient les désaccords, même justifiés, que l’on ait avec la Justice et les juges qui exercent un métier difficile, et qui ont de l’expérience, des convictions et aussi le droit d’avoir des choix personnels partisans qui évidemment n’apparaissent pas dans leurs jugements. Même si, parait-il , une très petite minorité confond  justice et politique, on ne doit jamais discréditer l’institution et mettre les juges en accusation. La Constitution de la 5ème république a décidé qu’il y aurait une autorité judiciaire. Il nous appartient de savoir ce que nous voulons, et créer éventuellement officiellement un pouvoir judiciaire, avec des garanties d’indépendance et de responsabilité (comme d’ailleurs la cour européenne des droits de l’homme de STRASBOURG semble nous le suggérer, ce qui reviendra à la théorie de MONTESQUIEU et sera peut être un progrès ?) Il appartient aux politiques de tous partis de se prononcer à ce sujet. [ lire Me Patrick MAISONNEUVE, avocat ; « justice et politique : le couple infernal » Actualité PLON fin 2015]. Début novembre  2015 des débats très importants conditionnant l’avenir ont été lancés [LE MONDE du 3 novembre 2015 page 9 ]; Mme TAUBIRA Garde des Sceaux, a présenté devant le sénat un projet de loi organique sur l’indépendance des magistrats , qui crée un statut pour le juge des libertés et de la détention , celui qui a le pouvoir de placer en détention provisoire une personne mise en cause et qui statue sur les demandes de liberté. Ce juge ne doit pas être confondu avec le juge de l’application des peines .Et Mme TAUBIRA a lancé  son  grand projet de « Justice pour le XXIè siècle » qui est la création du service d’accès unique du justiciable. La loi va essayer aussi de favoriser la médiation et la résolution amiable des litiges ; va créer au sein du TGI un grand pôle social ;  on va ouvrir l’action de groupe exercée par les syndicats et les associations, dont les avocats sont toujours exclus (merci pour la confiance !). Mais le cordon entre les magistrats du parquet  et le pouvoir exécutif n’est  pas franchement coupé  alors que la cour de Strasbourg le suggère fortement: indépendance oui, mais avec prudence et on se préoccupe plus  de conflit d’intérêts  des magistrats et du patrimoine … des hauts magistrats. On verra ce qui sortira du débat et du texte final devant l’Assemblée Nationale.  Les républicains ne sont pas restés inertes en matière de sécurité et de justice ; ils ont des idées que l’on ne peut taxer de façon simpliste de propension sécuritaire celle –ci n’étant d’ailleurs pas un gros mot : celle de fusionner le ministère de la justice et de l’intérieur  ne semble pas avoir été retenue, à juste titre selon moi, si l’on veut des magistrats indépendants et une justice forte ne recevant aucun ordre . Ils proposent la création d’un super ministère de la Sécurité Intérieure (ce qui devrait réjouir tous les auditeurs de l’INHESJ)  regroupant police, gendarmerie, et administration pénitentiaire ainsi que les douanes. Cela me parait une piste très intéressante à creuser-sous réserve de la constitutionnalité de certaines propositions comme  le rattachement de la pénitentiaire ou de l’exécution des peines au ministère de l’intérieur ? Surtout si l’on construit des milliers de place de prison pour en finir avec «  l’inexécution des peines » [Le FIGARO du 3 novembre 2015 page 2 , 3 et 4 ]. Par ailleurs on peut aussi réfléchir aux conditions de la légitime défense pour permettre aux forces de l’ordre d’être à « armes égales » au moins en droit face aux forcenés munis d’armes de guerre, ou en matière de terrorisme ; et en harmonisant les critères d’utilisation des armes en cas d’intervention
 entre police et gendarmerie...Les magistrats ne peuvent être des machines à débiter des sanctions automatiques,  sauf à renoncer au grand principe de la personnalisation des peines et réduire leur rôle à des petits « télégraphistes  » de l’exécutif qui a fixé la politique pénale. Enfin les entreprises de sécurité privée-dont les missions sont reconnues désormais par leurs efforts d’efficacité  et de déontologie- ne seront pas oubliées, même si elles ne peuvent que compléter l’action de l’Etat sans se substituer à lui. Comme on s’en rend compte, Justice et Sécurité sont au centre de la vie publique et peuvent conditionner  la reprise de la croissance en redonnant confiance à tous, et il serait utile qu’un certain consensus se dessine. Il ne s’agit pas de prôner un tout répressif qui n’a pas de sens, même si la tolérance zéro ferait plaisir aux citoyens de « base » qui ne philosophent pas sur le crime ou la délinquance qui les concerne directement et pensent aussi à eux, ce qui est naturel. Ou prétendre qu’un mineur de 16 ans est encore ..un enfant ? Il y a longtemps que JJ ROUSSEAU qui avait abandonné ses propres enfants, est dépassé en matière de délinquance .Il ne faut pas être binaire en ces matières difficiles qui font appel à l’émotion et à la raison. En attendant les lois «  définitives »jusqu’en … 2017 car après l’alternance éventuelle peut changer la donne , ce qui est toujours source d’insécurité en général quand on passe d’une politique pénale à une autre, il doit y avoir des rapports apaisés entre tous les acteurs du processus pénal. Police et gendarmerie sont dignes d’éloges car ils enquêtent, arrêtent,  et montent les dossiers que les avocats défendent avec ardeur et talent, pour les juges qui appliquent la loi et sont garants des libertés individuelles ; puis l’exécution des peines qui doit être renforcée par des moyens matériels et humains ; enfin les agents de l’administration pénitentiaire à qui on demande de la sévérité et aussi de faciliter la réinsertion des détenus. Chacun doit résoudre la quadrature du cercle. Je demande donc l’indulgence du jury pour tous ces professionnels qui croient en ce qu’ils font. Il ne faut pas les démobiliser, ou les décourager. Les auditeurs de l’ANA se rappellent d’ailleurs la citation de Blaise Pascal : « La Justice sans la force est impuissante. La force sans la justice est tyrannique ». Et rendons à CESAR ce qui lui appartient en partageant  ce qui ne va pas. Par nos exigences et convictions  personnelles nous avons tous une part de responsabilité dans les décisions de la justice saisie de tout et rien.
Les juges sont devenus les arbitres de toutes les polémiques  sur les mœurs ; sur l’histoire ; sur les querelles internes aux partis politiques ;  sur les revendications sociales où la violence remplace le dialogue ; sur l’anti-racisme, la discrimination ; l’atteinte prétendue parfois à la dignité humaine ; l’humour quelque fois déplacé ; les injures, la diffamation... l’honneur exacerbé. N’en demandez pas plus, la cour (de justice) est pleine . Vouloir réduire  le prétendu « pouvoir » des juges  est inopportun car la démocratie a besoin  d’une justice insoupçonnable et sans peur ,qui renforce l’action de ceux qui sont sur le terrain .L’instrumentaliser  est toujours dangereux et la justice n’a pas à pallier le désir de sanction pour le quidam outragé ou l’absence de courage du législateur ou le manque d’autorité de l’ETAT, ce qui est un vrai souci si cette carence était réelle, ou ressentie comme telle. Même si le gouvernement de M.VALLS n’a pas failli en matière de délinquance selon les statistiques qui certes peuvent toujours être interprétées, et que l’on peut faire encore mieux du moins le croit-on. Laissons les juges juger, peut être en délimitant  leur domaine d’intervention par une concertation sereine et loyale, ce qui n’interdit pas de définir une autre politique pénale qui corresponde à une majorité politique nouvelle .Il n’est pas interdit de répondre aux inquiétudes des français.Le pouvoir exécutif est rarement aveugle (  sauf s’il ne veut pas voir pour faire plaisir  à telle catégorie sociale )  et sourd ( sauf s’il préfère ne pas entendre pour des raisons diverses) et est souvent prompt  à répondre aux  demandes. Le Premier ministre M .Manuel VALLS a annoncé le 14 octobre 2015  diverses mesures pour renforcer, ou renouer le lien police- gendarmerie-justice. Il faut s’en féliciter. [Le Figaro du 15/10/2015 page 9].  Mme  Christiane TAUBIRA ministre de la justice et M .Bernard CAZENEUVE ministre de l’intérieur encadraient le 1 er ministre. C’est tout un symbole qui, on l’espère, se traduira sur le terrain.
Ajoutons que la justice française est comme  celle des autres 27 Etats de l’Union Européenne « alimentée » par la jurisprudence de la  Cour de justice de l’Union Européenne de LUXEMBOURG, et de celle de la Cour européenne des droits de l’homme de STRASBOURG (CEDH) qui n’a pas la même vision que la France en matière de libertés fondamentales, jurisprudences que les juges nationaux doivent suivre, et qui s’imposent en droit interne.
La France est souveraine mais elle doit respecter ses engagements internationaux (exemple en matière de garde à vue, ce qui a été une garantie pour les cinq salariés d’AIR France qui ont confondu négociations avec violences volontaires).LE MONDE du 17 juin 2015 titrait : « A Luxembourg des juges de plus en plus puissants » et rappelait que cette juridiction était régulièrement confrontée aux grands sujets de société : le statut de l’embryon ; les droits des internautes (arrêt GOOGLE SPAIN sur le droit à l’oubli) ; facebook…outre les violations du droit de la concurrence, et les renvois préjudiciels des juges français  qui interrogent la cour sur un point de droit européen, ou par exemple le rachat de dettes de la BCE (arrêt du 16 juin 2015). La CEDH a jugé la législation française sur la fin de vie (5 juin 2015) en confortant la loi LEONETTI (cas Vincent Lambert).
Le 6 octobre 2015 la cour de justice de Luxembourg dans l’arrêt SCHREMS, a signé la mort du « SAFE HARBOR » l’accord entre l’UE et les USA autorisant les multinationales  américaines qui y adhérent à exploiter sur le sol américain les données privées des européens [lire LE MONDE du 8/10/2015 et 22/10/2015 page 16].
La Justice au sens large joue un rôle essentiel, central, dans le fonctionnement des institutions et les rapports entre les citoyens. Elle ne doit pas être «jugée » comme un ministère lambda. Elle conforte les valeurs républicaines quand elles sont attaquées, et fixe le cadre dans lequel chacun doit s’insérer pour que la Nation – qui est une communauté d’individus avec des opinions dissemblables, aux croyances multiples qui regardent dans le même sens  et dépassent leur moi au profit d’un avenir collectif - puisse prospérer et permettre de vivre en commun .Il convient donc de ne pas la mettre en question  sur des sujets polémiques, même s’il est légitime de s’indigner de fautes personnelles  qui entraînent de graves préjudices et qui doivent être sanctionnées, nul n’étant exonéré de responsabilité, ce qui n’est pas  « attaquer » l’indépendance de ceux qui constituent l’institution.

LE TERRORISME est-il en voie de « banalisation » ? Et de l’autorité.

L  ‘autorité de l’Etat en général  est plutôt mise en cause par ces temps chahutés, car on l’estime insuffisante  ou pas assez expressive.Il ne s’agit cependant pas d’user des tribunaux  pour que dans l’urgence des condamnations soient prononcées, un peu à l’aveuglette et en interprétant la loi dans le sens que souhaitent voir les gens excédés. (ex .à CALAIS). La justice ne peut servir de fermeté à l’exécutif  s’il en manque, et la loi  n’est pas un texte qui permet de régler les problèmes à chaud. Mais la réaction à tout manquement à la loi doit être effective.  L’autorité qui n’est pas l’autoritarisme ou le caporalisme   et qui ne remet pas en cause les décisions des juges, nécessite de la fermeté sur les grands principes et de ne pas céder à la culture de l’excuse ou le « pas de vague » pour éviter de contrarier tel groupe d’individus ou telle catégorie sociale. L’autorité c’est de définir des objectifs et exercer le pouvoir  sans le déléguer ou le diluer, ou demander l’avis des uns et des autres à tout moment même si le dialogue est fondamental, pour expliquer l’action .On s’interroge pour savoir où est le pouvoir dans notre démocratie et certains pensent  qu’il est  devenu introuvable ou entre les mains des citoyens voire des « collectifs » auto proclamés ?. Pour  s’exercer vraiment le pouvoir ne peut être détenu par personne ou par aucun groupe. Il est donc partagé et  dispersé :[michael FOESSEL l’utopie du pouvoir]. En revanche il a besoin de s’incarner dans ceux qui ont été élus démocratiquement et qui ont reçu la mission de préserver l’ordre public pour que la cohésion de l’ensemble se perpétue. L’autorité c’est de savoir dire non  et ne pas céder aux arguments compassionnels-même s’il faut en tenir compte- qui remplacent le bon sens et la raison. L’autorité c’est de commander et imposer l’obéissance  à l’intérêt général .L’autorité ne devrait pas à avoir se décréter : elle est naturelle ou pas, et chacun la ressent quand elle est réelle et s’applique  erga  omnes. Elle concerne désormais parmi les priorités le terrorisme, préoccupation majeure des français depuis les attentats de janvier 2015.

Notre éminent ami Alain BAUER professeur de criminologie au CNAM à Paris, et à New York et Pékin,  explique que « les nouveaux  opérateurs nés sur le sol des pays  occidentaux ont remplacé ceux importés de l’extérieur ».[lire : »vers une « ubérisation » du terrorisme .Le Figaro du 1er juillet 2015 page 16].Il explique que « longtemps  le terrorisme fut une affaire d’Etat mais  l’hyper terrorisme s’est fait dépasser par le califat de l’Etat islamique .. et sont apparues en complément deux « nouveautés » : les hybrides, gang terroristes, et le lumpen- terroriste agissant par impulsivité avec les moyens du bord .Le tout porté par un processus d’accélération de la radicalisation grâce à l’incubateur internet. Ces nouveaux opérateurs ne sont du coup plus importés de l’extérieur, mais sont nés sur le sol des pays  occidentaux cibles ».Alain BAUER conseille  que le «  processus de révolution dans la gestion plurielle des terrorismes, engagé par Rémy PAUTRAT alors conseiller de Michel ROCARD, réenclenché par Nicolas SARKOZY puis Manuel VALLS, tous deux ministres de l’intérieur à l’époque de ces mouvements (les « loups solitaires »,les micro-attaques..) », soit accéléré.IL conclut que  le temps n’est plus l’allié de l’anti terrorisme .Dans le FIGARO du 26 août 2015 page 19 « terroristes honteux et analystes du renseignement » , Alain BAUER rappelait que « ce sont désormais les acteurs du terrorisme qui diffèrent  et plutôt que d’enfermer les citoyens et la société dans un coffre-fort inviolable de préférence, c’est la formation des analystes qui doit devenir une priorité ».
La commission d’enquête  sur la surveillance des filières et des individus djihadistes créée en décembre 2014 par M. Eric CIOTTI  député (LR) des Alpes maritimes  avec comme rapporteur M.MENNUCCI député (PS) des Bouches du Rhône, a déposé son rapport début juin et appelé les autorités à renforcer les moyens administratifs et judiciaires  notamment les services d’enquêtes  en contrôlant mieux les entrées et les sorties du territoire ,en gérant les « retours ».Le rapport insiste aussi  sur la nécessité de faciliter l’accès aux fichiers ; de mieux surveiller le secteur aérien et le numérique ; de protéger les mineurs ; de revoir les aménagements de peine ; d’étudier le rôle des imams ; de toiletter la justice antiterroriste...Le gouvernement a immédiatement réagi , a pris des mesures concrètes et il réfléchit  à compléter les dispositifs de toute nature .Le ministre de l’intérieur, M. Bernard CAZENEUVE a créé un état major opérationnel de prévention du terrorisme directement rattaché à son cabinet pour éviter la « concurrence » entre services et faciliter la circulation de l’information. C’est le préfet Olivier de MAZIERES qui dirige la structure .L’affaire de Yassin SALHI qui a décapité son ancien patron, qui avait fait l’objet d’une fiche S  puis n’avait plus été suivi,  a révélé l’obligation de suivre en permanence tous les profils à risque.
En ce qui concerne la sécurité dans les transports le ministre de l’intérieur a dévoilé la nouvelle stratégie à la suite de la proposition de loi du député (PS) Gilles SAVARY qui veut lutter contre les fraudeurs. Le gouvernement veut durcir le texte en le complétant par la possibilité de fouille des bagages ; le droit pour les agents de patrouiller en civil et armés ;  plus de pouvoir de vérification des identités (qui ne sera pas un délit de faciès)…Le gouvernement agit et tente de résoudre les contradictions de la société civile qui oscille en une demande accrue de sûreté et le maintien de ses libertés individuelles ,en revendiquant les valeurs républicaines parfois à contenu variable selon le camp qui les met  en avant .Il faut trouver un bon équilibre, savoir placer le curseur au bon endroit et faire confiance à ceux que nous avons élus qui ne doivent pas prendre systématiquement le contrepied de leurs prédécesseurs, ou qui souhaitent arriver ou revenir au pouvoir avec des propositions concrètes, applicables, « radicales » ou fermes  par leurs nouveautés  ce qui ne veut pas dire  dangereuses pour les libertés , non idéologiques et mesurées pour aboutir, dans ce domaine sensible, à un minimum de consensus. Il faut viser ce qui rassemble .C ‘est Alain PEYREFFITE ministre du général DE GAULLE qui avait décrit la Société de confiance.

Morale et République

Chacun se « gargarise » des mots qui claquent comme générosité, fraternité, liberté, égalité, justice sociale, et évidemment république (  les  marches républicaines, l’esprit républicain,  et surtout le front républicain  qui n’est qu’une alliance  électorale  pour empêcher l’adversaire le plus dangereux pour les valeurs républicaines de gagner les élections) mais ils ne parlent pas à tous de la même façon, et parfois ils n’évoquent plus  rien pour avoir été trop utilisés.  Une grande interrogation  porte sur le temps présent et plus personne ne se risque à des pronostics ni géo politiques sur plusieurs endroits du monde, même proches de nous, où le chaos règne et nous touche, ni sur le plan intérieur où nous gérons l’existant  et le délai court , sans réfléchir sur ce que l’on veut , d’où l’on vient, nos valeurs fondatrices , et comment on va évoluer, avec qui et pourquoi .On ne se pose plus, on pédale de plus en plus vite pour ne pas tomber. Le mot République est cependant structurant comme le dit Jean RASPAIL et il faut ne pas sortir de ce cadre en l’amoindrissant et ou en le réduisant à travers des débats publics qui tournent à l’affrontement  ou au rejet de l’autre , accusé des pires adjectifs pour dénoncer sa pensée, alors que nous sommes les héritiers de Voltaire et des lumières et qu’il y a peu de pays équivalents au nôtre dans le monde. Par exemple alors que le gouvernement prône le retour de la morale à l’école  –ce qui me parait une très bonne idée-  certains se demandent si ladite morale en sera vraiment une ? [Bertrand VERGELY « une morale, quelle morale » ? Le Figaro magazine du 4/9/2015.Dernier livre paru : la tentation de l’homme dieu : le passeur éditions ».Il est possible que l’humanisme dont nous nous parons et que nous mettons en pratique qu’il soit athée ou laïc et créé par l’homme dans son intérêt, ait atteint ses limites faute d’une certaine transcendance à définir. Faut- il une spiritualité pour construire une société qui convienne à tous ? Que se passe-t-il quand tous les désirs matériels de l’homme sont assouvis ou presque ? Comment faire toujours mieux qui est l’aspiration première des progressistes, qui ne sont pas d’un seul côté. On peut ainsi être libéral sur le plan économique et social –avec nos traditions à la française qui demandent beaucoup à l’Etat- et aussi « conservateur » pour les libertés, les mœurs, l’éducation …Ce n’est pas incompatible .On peut avoir l’ « autre » en soi  et se déterminer par son origine, son passé, ses échecs, ses réussites et son présent et ne pas accepter tout ce que les minorités souhaitent même si le principe d’égalité en droit n’est pas discutable. Certes il y a encore du chemin à parcourir pour atteindre l’idéal de justice et de libertés, mais il faut toujours y croire…
M. Vincent LE BIEZ secrétaire général de « droit au cœur » met en garde contre la tentation d’abstraire l’individu de tout déterminisme social, culturel, familial. On ne peut renoncer à l’égalité des chances qui comprend la mobilité sociale, et la récompense des efforts et des mérites.
 Sur le sujet sensible des réfugiés, le philosophe Michel ONFRAY au centre de nombreuses polémiques, affirme que l’on « criminalise la moindre interrogation sur les migrants « [Le FIGARO 11/9/2015 page 14].Il semble que l’émotion se substitue à la raison et la domine ce qui n’est jamais bon signe .Il est légitime de poser les (bonnes) questions, d’où qu’elles viennent. C’est le politiquement correct ou la quasi censure de fait qui sont dangereux. Il faut nommer les choses, disait Albert CAMUS, et « la république n’a pas à faire la sourde oreille à la souffrance des siens » (M.ONFRAY).
Le débat sur la sécurité qui est l’affaire de tous comme ne cesse de l’enseigner l’INHESJ, et la Justice rendue au nom du peuple français qui est un et indivisible, doit donc se poursuivre de façon apaisée et positive. Personne ne détient la vérité. Mais certains l’approchent plus que d’autres. Chacun des citoyens doit trouver sa place dans le cadre de la République, doit pouvoir s’y exprimer librement, vivre comme il le souhaite, sans oublier bien sûr la nécessité du plein emploi retrouvé avec une croissance pérenne , car les conditions matérielles influent sur les comportements, même si elles n’expliquent pas tout, et ne justifient pas les débordements. En réalité ce qui nous est demandé à titre personnel, c’est peu mais beaucoup à la fois : de savoir prendre nos responsabilités dans l’intérêt collectif et de la France. J’ose écrire France  car ceux qui ont le sens de l’ETAT la défendent  d’abord, et elle ne se confond pas avec la république.
Notre excellent ami Pierre MONZANI, préfet et ancien  directeur de l’INHESJ a rendu hommage à l’ancien Ministre d’Etat, Ministre de l’intérieur, M. Charles PASQUA décédé fin juin  en soulignant son sens de l’ETAT. Il a écrit : « il incarnait cette réalité de notre civilisation européenne , être ouvert au monde  et serein face à lui parce que l’on est sûr de ses racines et de son identité » [LE FIGARO 1er juillet 2015 page 16].Que Pierre MONZANI soit entendu, et que ceux qui nous dirigent ou nous dirigeront  car nous sommes dans une démocratie et personne n’est propriétaire du pouvoir, le fassent avec des mains qui ne tremblent pas , avec l’autorité qui s’impose et l’ouverture d’esprit liée à l’absence de dogmatisme. Le Premier ministre M.Manuel VALLS a déclaré qu’il dirait la vérité dans tous les domaines , même si cela « défrise » des militantes illustres du parti socialiste. On ne peut que le féliciter car les français - du moins ceux avec qui je discute dans ma petite commune rurale de l’OISE où je suis élu – sont las des petitesses et  veulent des solutions pour des problèmes identifiés par tant de rapports, et du courage  de notre personnel politique, toutes tendances confondues. Chaque citoyen a besoin de l’exemple qui doit venir de haut et pouvoir partager des ambitions collectives qui le dépassent pour réussir et participer pleinement à la vie civique.

ADDENDUM : je venais de mettre le point final à cet article, quand j’ai entendu vendredi 13  Novembre, M.B.CAZENEUVE ministre de l’intérieur  annoncer un grand plan d’action contre le trafic d’armes. Je m’en étais réjoui car nous sommes en guerre  par la menace intérieure et celle de DAESCH contre qui nous combattons. Certains en doutaient c’est désormais une réalité aveuglante.
 Le chef de l’ETAT  a déployé avec raison notre porte-avions  CHARLES DE GAULLE en méditerranée à l’issue d’un conseil  de défense .La coalition internationale doit frapper fort, car notre sécurité passe aussi par la destruction des bases de l’Etat islamique .Ma joie s’est ternie très vite car le soir même on apprenait les attentats dans PARIS et qu’il y avait eu des centaines de morts et de blessés .On est resté interloqués. Nous devons nous rassembler et reprendre le cri des républicains espagnols :NO PASARAN . Nous ne devons pas céder et nous devons continuer à vivre. L’union de tous les citoyens  qui forment le peuple français, de toutes origines,  obédiences et croyances ou non, est essentielle, autour du gouvernement qui agit .Il y avait eu l’esprit du 11-janvier qui a été discuté, une fraction de notre population  n’ayant pas désavoué les attentats de l’époque. Il faudra créer l’esprit du 13-novembre qui est un vendredi noir,  qui doit être  partagé par tous les citoyens et consensuel  en matière de sécurité et justice notamment,  ce qui n’interdit pas la critique positive,  et la lutte pour le pouvoir car nous sommes presque toujours en période d’élections. La responsabilité de ceux qui sollicitent nos suffrages est d’autant plus importante .Il faut louer l’efficacité de la BRI et du RAID pour la neutralisation des sept terroristes.  L’état d’urgence qui va limiter 12 jours  pour commencer nos libertés a aussitôt été décrété. Rappelons  nous nos débats  sur la loi sur le renseignement sur nos libertés et les besoins de sécurité. Il ne s’agit pas d’armer quiconque, mais de donner des moyens juridiques aux professionnels pour agir, et de contrôler nos frontières. Le Président de la République a déclaré que la France  qui a été agressée serait impitoyable, dans le respect du droit. Il a raison. C’est ce qui fait notre faiblesse (les terroristes n’ont que faire du droit et de l’individu)  mais aussi notre force : la fin ne justifie pas les moyens  et notre démocratie  s’appuie sur des valeurs universelles et des règles légales  qu’il faut respecter .C’est parce que nous savons qui l’on est, que nous nous sommes construits dans les épreuves tout le long de l’histoire, que nous relèverons la tête et comme l’écrirait BORIS CYRULNIK, nous dépasserons nos traumatismes pour rebondir , et nous reconstruire. Nos ennemis ont eu tort de porter le fer dans PARIS : ils ont obtenu l’effet inverse à la terreur qu’ils ont suscitée : ils ont provoqué une vague d’indignation et de résistance. Les autorités en place font leur devoir avec vigueur  et l’opposition qui est responsable, propose ses solutions. Les forces de sécurité ne peuvent être partout et on ne peut accroître leur nombre à l’infini, même si des efforts ont lieu. Les magistrats joueront aussi un rôle central ; pourquoi se priver de l’expérience du juge TREVIDIC  par exemple (il a reçu le prix AKROPOLIS de l’ANA) qui a quitté la section anti-terroriste, car on sait que l’humain est essentiel et que la technique n’est pas suffisante. L’union fait la force : ce proverbe est de circonstance .J’exprime ma tristesse et ma compassion  pour toutes les victimes ; je félicite les forces de l’ordre pour leur réactivité et efficacité ; et comme tous les français, je renouvelle ma confiance envers les professionnels qui ont la lourde charge de nous protéger, des répliques d’actes criminels n’étant pas à écarter, malheureusement. La France est en deuil ; pleurons mais réagissons.



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