jeudi 8 octobre 2015

Le libéralisme est-il une valeur de gauche, ou de droite, ou d’ailleurs ?

Le libéralisme est-il une valeur de gauche
ou de droite, ou d’ailleurs ?

Par Christian FREMAUX avocat et élu local.

Notre microcosme politique et les milieux germano –pratins ( les habitants du quartier de Saint-germain-des prés, détail fondamental pour ceux qui ignoreraient cette localisation siège de la bien pensance ), s’agitent fréquemment sur divers sujets dont l’importance pratique échappe à l’entendement commun, et qui disparaissent aussitôt nés ; mais on palabre, on s’injurie, on s’affronte  heureusement verbalement pendant ce laps de temps, alors qu’il y a de vrais problèmes à résoudre , sans idéologie de préférence .C’est RABELAIS avec GARGANTUA qui avait décrit les guerres pichrocolines, qui sont des péripéties souvent burlesques ou dérisoires, et dont le motif apparaît obscur ou insignifiant. Loin de moi de sous-estimer le combat d’idées bien au contraire, et les discussions macro-économiques qui font le délice des étudiants de Sciences po., ou les débats sur les meilleures politiques pour faire revenir la croissance et donc la prospérité qui seule permet la redistribution (car il faut d’abord produire des richesses pour retrouver de l’emploi).Elles sont essentielles sauf pour le quidam qui n’y comprend goutte et qui se contente de réclamer-pour le moins- des résultats, en préférant les actes à la parole. Mais abordons aussi les sujets de réflexion car le gouvernement quelqu’il soit doit avoir une doctrine pragmatique et non figée sur des dogmes dépassés,  des objectifs à atteindre, et des moyens à choisir.
C’est une nouvelle fois M.MACRON (que je félicite même si je ne soutiens pas M.HOLLANDE) ministre de l’économie, qui a mis de nouveau le feu aux poudres en affirmant que « le libéralisme » était une valeur de gauche .Encore faut il savoir ce qu’un énarque, ancien banquier ,entend par valeur et libéralisme et dans quels domaines autre que l’économie dont il est chargé cela s’applique ? Bien sûr et immédiatement certains responsables de droite se sont gaussés de M.MACRON et ont  revendiqué l’usage du libéralisme : mais sont ils audibles les héritiers du gaullisme et donc de l’intervention de l’Etat, et le libéralisme est-il exclusivement une valeur de droite ? Comment peut-on être libéral quand on est  comme M.MACRON dans un gouvernement qui maintient les 35 heures dans l’entreprise ,qui continue à empiler les normes, les lois, les réglementations diverses ; qui considère comme droit acquis le statut de la fonction publique avec l’emploi à vie ; qui encadre le logement, impose à des communes de construire un pourcentage d’habitations sociales sous peine de poursuites ; qui ne revisite pas le code du travail..N’en jetons plus la cour est pleine .Mais qui, dans d’autres domaines touchant à l’individu  et aux mœurs, légifère pour donner des droits nouveaux, malgré l’hostilité d’une partie de la population, qui prolonge l’esprit libertaire de MAI 68 ; qui a fait voter la contrainte pénale qui remplace la prison dans certaines conditions ;qui voudrait bien supprimer les notes à l’école car il ne faut traumatiser personne, et qui a une approche  de l’autorité et de l’ordre public très protectrice des libertés individuelles, ce qui  ne peut lui être reproché par ailleurs.
Le libéralisme de gauche n’est donc pas univoque et pour tout ; il fait le grand écart permanent entre l’économie qu’il veut libérer tout en utilisant l’ETAT pour intervenir là où il estime que l’individu  ou l’entreprise n’en font  pas assez ou que l’intérêt général a besoin d’aide : il est ainsi plutôt dirigiste. Alors qu’il laisse les problèmes de société à l’appréciation de l’individu pour lui permettre de s’épanouir, égoïstement, en miroir aux nécessités de la vie en société qui impose de l’autorité, de la discipline voire un peu d’abandon  de nos libertés dans l’intérêt général ,sous le contrôle vigilant des juges car la raison d’Etat ne peut tout justifier .La gauche ne veut désespérer ni BILLANCOURT, ni BOULOGNE pour reprendre la formule réductrice et dépassée de JEAN-PAUL SARTRE, car la France a besoin d’union qui fait la force et pas de clivage permanent.
Si le libéralisme qui a réussi a été incarné par M.REAGAN aux USA et Mme THATCHER en Grande Bretagne, et a laissé surtout à l’intelligentsia française de mauvais souvenirs, il n’est  pas question de l’appliquer comme nos amis anglo-saxons car nous avons nos habitudes, nos citadelles, notre culture, notre façon de vivre ensemble et nos principes républicains fondés sur la solidarité, la fraternité, l’aide à ceux qui en ont besoin, les règles sociales venant de la résistance et des lois des années 1944-45 qui sont en acier trempé et constituent le socle de notre société, même s’il y a la mondialisation qui comme le nuage de TCHERNOBYL devrait nous épargner selon certains qui veulent se replier sur nos acquis sociaux et nos frontières. Autrement dit nous voulons un libéralisme  AD HOC qui libère et protège à la fois ; qui peut favoriser l’emploi et bénéficier aux entreprises ; qui nous permet de combattre tous les dangers et menaces comme le terrorisme ; qui conforte la laicité en permettant toutes les spiritualités ; en un mot  qui nous permet de vivre et de réussir tous. M.MACRON qui se dit homme de gauche, et on le croit , est un adepte du progrès, mais sans le définir car chacun l’imagine selon ses souhaits. L’histoire peut rapprocher tous les partisans du libéralisme.
Le libéralisme est en effet une création  française des 18 ème et 19 ème siècle avec Benjamin CONSTANT  , TOCQUEVILLE et Frédéric BASTIAT  (lire sous la direction d’ALAIN MADELIN : « aux sources du modèle libéral français »Editions PERRIN 1997).Adam SMITH n’ apas tout découvert .Il s’est inspiré  de TURGOT et sa réflexion fondamentale  sur la pensée économique libérale moderne. Selon le flamboyant  et très compétent député et ministre que fut ALAIN MADELIN il y a un libéralisme philosophique et politique avec l’idée que l’homme est libre, y compris de faire le bien comme le mal. S’y ajoute le libéralisme juridique avec la liberté contractuelle et le rôle central du juge. Dans une démocratie  le pouvoir législatif comme le pouvoir exécutif ne peuvent être tout puissant : c’est la séparation stricte des pouvoirs de MONTESQUIEU qui doit dominer. Le droit s’impose comme régulateur car l’Etat ne peut s’emparer de tout  et être omnipotent.(lire Guy SORMAN : « l’Etat minimum » éditions ALBIN MICHEL 1985). Dans le FIGARO du 30/9/ 2015le philosophe François BELLAMY indique que « la liberté se nourrit d’un héritage, d’une langue , d’une éthique ». Au plan économique il s’agit de lutter contre les rentes, ou les privilèges écrit M Robin RIVATON membre du conseil scientifique de FONDAPOL, avec l’égalité des chances et la valorisation de la réussite .M. Guillaume PERRAULT rappelle que le  libéralisme sert à affranchir  l’homme de toutes les contraintes héritées de la tradition et de l’ordre social. Est-ce le cas à AIR France où l’ETAT est actionnaire à 17% et n’a pas su mettre en place le dialogue social   . Les graves incidents qui ont eu lieu lors de la réunion d’un C.C.E. ne peuvent rester impunis .Il est préférable d’avoir un Etat garant à la place  d’un Etat gérant.
Le libéralisme est donc sinon une valeur, du moins un système de moyens que gauche comme droite ont en commun. Qu’ils le mettent en action  et on peut espérer que la situation de la France, s’améliorera.


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