On continue comme avant
Par Christian Fremaux avocat
honoraire
Ce qui est curieux
c’est que l’on ne tire jamais de leçons de ce qui s’est passé. On ne change pas
une équipe qui perd ou a été désavouée. On emploie toujours les mêmes slogans ou
ficelles. On reste figé sur ses positions et certitudes. L’immobilisme
a de l’avenir.
L’année 2025
promet d’être de toute beauté dans tous les domaines où rien ne fonctionne on
le sait et on le dénonce. Sans changer de ligne. On coule mais fièrement. En matière de Justice on persiste. C’est un monument
en péril unanimement considéré comme tel tant dans les moyens matériels
qu’humains et je ne parle pas de son éventuelle dépendance au pouvoir exécutif.
Sinon idéologique. Mais on s’acharne à
la saisir et à lui demander de régler tous les conflits, de faire de la morale
en décidant du bien et du mal, et de jouer à monsieur-ou madame je fais attention
à la parité- propre. Les vieilles affaires qui viennent à l’audience pénale
permettent de relancer la machine à buzz et détourner le regard des citoyens de
la triste réalité politique. On les invite au spectacle.
La société
veut du sang notamment pour toutes celles et ceux qui sont des personnalités de
la vie publique en général. Au nom de l’égalité et de ce qui est juste. Il n’y
a pas de plus égaux que d’autres quelles que soient les illustres fonctions
qu’ils ont occupées. On ne supporte plus les comportements du passé, ce
qui est normal. La société est devenue intolérante sinon puritaine ou
sectaire dans le domaine privé et par assimilation à l’expression d’opinions
divergentes. On ne rit plus de tout. Il ne fait pas bon de n’être pas d’accord
avec une minorité agissante dite progressiste. Comme si un camp avait le
monopole du progrès qui ne peut intervenir que si on est en paix avec le passé
dont on a compris les succès comme les échecs. Le récalcitrant devient alors
forcément d’extrême droite -notion fourre -tout non définie mais menaçante par
principe-ce qui permet d’évacuer le fond du débat et d’exclure des millions de
citoyens qui ont mal voté et devraient être rééduqués.
On veut désormais quasiment interdire,
déconstruire, invisibiliser ce qui ne va pas dans le bon sens. Mais on ne sait
pas qui est légitime pour choisir le bon sens. Je ne connais modestement pour
ma part que les débats publics qui offrent des solutions puis des choix validés
par le suffrage des électeurs. Et qui ne
doivent pas être remis en cause dès le lendemain par ceux qui ont été battus.
La stabilité est nécessaire. Cela fait partie de la sécurité personnelle et
d’apaisement pour les années à suivre. On ne peut constamment changer de chemin
ou revenir à d’autres méthodes. C’est anxiogène.
La rentrée
2025 s’annonce alléchante. Je ne parle pas des jeux du cirque qui ont lieu à
l’Assemblée nationale. Tel parti avec des alliés improbables baisse le pouce et
le César premier ministre pour un instant part en exil. Comme le chantait
Jacques Brel : « au suivant ». Je n ’évoque pas non plus M.
Sarkozy qui avec son bracelet électronique-mais lui échappe à toute OQTF-va
devoir s’expliquer sur de prétendues turpitudes Libyennes avec ses amis
anciens ministres. Que de beau monde au
tribunal d’infâmie ! Comme si
le dictateur Kadhafi décédé et ses complices en fuite devaient être crus sur
paroles ! Des journalistes qui
n’ont jamais lu le dossier ont déjà conclu que M. Sarkozy ne pouvait qu’être
coupable ! Mais les procureurs qui soutiennent l’accusation devront
d’abord faire la preuve des infractions et personne ne connait les moyens de
droit et de fait de la défense. Rappelons qu’il ne s’agit pas de condamner
ou de relaxer un individu pour ce qu’il représente et parce qu’on le
déteste ou qu’on l’admire. Mais de décider sur éléments matériels et
intentionnels s’il est coupable ou innocent. La justice ne fait pas la
morale, ne délimite pas le bien et le mal et ne choisit pas un comportement
idéal selon des critères qui lui appartiendraient. Elle applique la loi
existante. Le feuilleton judiciaire de M. Sarkozy se prolonge. A guichets
fermés. Contre son gré.
L’ancien
ministre de la Justice M. Dupond-Moretti a choisi volontairement de refaire du
théâtre. C’est honnête et franc, certains considérant que l’avocat brillant a
été un Garde des Sceaux controversé ne faisant pas l’unanimité. Mais qui peut
se vanter de la faire dans la conjoncture ? L’acteur va expliquer sa vérité et pourquoi
« j’ai dit oui » à M. Macron.
On est impatient de savoir ce qui est confidentiel voire secret et ce qui
pousse une personnalité reconnue et talentueuse à sortir de sa zone de confort
pour affronter un milieu qui n’est pas le sien. Et répondre aux critiques de
l’opinion publique qui, on le sait, ne doit jamais pénétrer dans un prétoire.
Mais dans la politique, oui ! Les planches vont brûler. La médiatisation
aussi.
Ce n’est pas
aux médias de décider qui est exemplaire et victime en construisant des
symboles ou des icônes planétaires. Notamment quand il s’agit de
faits avérés, douloureux, scandaleux mais qui ne concernent pas toute une population
masculine. On ne généralise pas le mal. Par ailleurs en minimisant d’autres faits
tout aussi dramatiques et exceptionnels, en trouvant des excuses culturelles,
sociales ou autres pour ne pas faire d’amalgames. Un crime reste un crime avec des victimes à vie.
Certaines le font savoir à la terre entière, d’autres subissent leurs douleurs
dans le silence et la discrétion. Tous sont dignes d’éloges et de compassion.
Aucune souffrance est plus remarquable qu’une autre. Quelle que soit la cause
juste qui la motive.
La Justice
ne doit pas être instrumentalisée. Il y a un déficit de confiance avec les
juges soit qu’on les trouve laxistes avec les voyous mineurs ou adultes ou au
contraire excessifs avec certains qui ont commis une fois une erreur. Soit parce qu’on doute de leurs indépendances
notamment pour les juges syndiqués et parce que les délais de jugement sont trop
longs et que les magistrats n’ont pas les moyens d’absorber les contentieux de
masse ou les litiges personnels ce qui exaspère le citoyen. Mais on a le
résultat de son vote. Les juges se
débrouillent avec les armes légales que les parlementaires votent et avec les
moyens que leur budget leur permet.
Dans un état
de droit les juges sont fondamentaux. Qu’on les laisse libres de trancher les
litiges y compris pour les politiques qui auront ensuite à se confronter au
verdict de leurs électeurs. Continuons donc le combat pour le droit et l’équité
dans les rapports humains et faisons mentir La Fontaine qui affirmait que «
selon que vous serez puissant ou misérable les jugements de cour vous rendront
blanc ou noir ».
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