samedi 11 octobre 2025

Le revenant et les mêmes électeurs

 

                            Le revenant et les mêmes électeurs

                    Par Christian Fremaux avocat honoraire

Nommer un premier ministre c’est marcher sur un fil et s’exposer à être critiqué par ses amis qui ne sont pas dans le coup et ses adversaires qui voudraient l’être. La lamentable commedia Del Arte a continué. On n’a pas voulu choisir des boomers mais des expérimentés sans ambition pour 2027.C’est la rupture. Le soldat Lecornu s’est dévoué avec les mêmes électeurs.  Il revient bien qu’on ne connaisse pas son programme. L’opposition hurle à l’injustice et à la censure. On ne l’a pas retenue malgré tout ce qu’elle propose de novateur ! Le premier ministre est porté comme la corde soutient le pendu. Les coupeurs de tête vexés sont à l’affût surtout dans le même camp. Les excités antifas sont les nouveaux Savonarole car qui n’est pas progressiste est un extrémiste de droite. A quoi sert le vote des Français qu’on l’approuve ou non ? On a exclu une masse de votants de la négociation. Où est l’intérêt général ? A-t-on peur d’interroger les Français ? On reste dans du délire. On agonit ceux et celles qui auraient mal voté. Mais un gouvernement doit être une union. Clarifions des mots.    

On connait les caractéristiques de l’autoritarisme : la terreur de l’esprit notamment, l’arbitraire, la répression aveugle, les inégalités, le racisme, la régression sociale. De l’ordre. En 2025 en France l’insulte la plus grave est d’être traité de facho. Mes administrés picards proches de la terre se sentent visés car il est possible qu’ils revotent bientôt ? Ils sont aux taquets et ne veulent pas se faire avoir une seconde fois. Ils ont le sentiment d’être vilipendés par des urbains qui auraient le cœur et les bons sentiments en bandoulière ou par des intellectuels fumeux, dépassés, et insultants.  

Ils sont des millions en France à aller voter mais pas à gauche et ils ont eu des grands- parents ou parents arrêtés, déportés, résistants, fusillés. Le totalitarisme ils connaissent. Ils en ont bavé après-guerre où ce n’était pas facile pour refaire surface et pour reconstruire quoiqu’on pense avec les crises. En permettant à beaucoup de leurs enfants de réussir actuellement, même s’il faut réformer. Toute mesure envisagée fera polémique. Ce n’est aisé pour personne de nos jours. Les sectaires ne sont pas ceux que l’on croie. Ni ceux que l’on désigne en vrac car ils penseraient et voteraient avec un rétroviseur.   

 On leur dit qu’ils sont des individus dangereux car ils ne croient pas à la doxa dominante. Ils regardent entre autres C. News qui créerait l’atmosphère d’insécurité comme s’en étouffe Me Dupond- Moretti ou écoutent Europe I média dit peu objectif avec des chroniqueurs qui seraient partisans. Alors que sur le service public ce serait l’objectivité et la vérité ! Même les fâchés qui ne votent pas n’aiment pas le terme facho. Ils se sentent humiliés. Les antifas sont des pseudos tolérants mais qui cassent ou dénigrent avec jubilation.     

Avec le vocable facho qu’on assimile à populiste ce qui est péjoratif les électeurs de base seraient des intolérants barbares. Des contemporains leur reprochent ce qui serait des idées inacceptables pour les autres. Facho discrédite d’avance tout argument sensé, permet de refuser tout débat, n’oblige pas à justifier ses positions, et est par postulat le contraire du rationnel et du contradictoire. Il élimine d’office les désignés malgré eux indignes de participer au bien commun. Leurs avis ne comptent pas car ils auraient des arrières- pensées sordides. Lesquelles ? En voulant un âge de la retraite cohérent avec la concurrence. Ils sont des sous -citoyens à écarter à tout prix. Car ils veulent qu’on dépense moins. Et on les subirait même s’il y a des élus de plus en plus nombreux. On devrait réfléchir : pourquoi des honnêtes gens votent ainsi ?  

Des bonnes âmes disent qu’il faut avoir une France libérée des vilains rancis, une nation idéale où toutes les communautés s’aiment telles qu’elles sont, que la religion reste privée mais puisse être visible ce qui est une liberté, une France qui est un simple territoire écologiste où tout le monde vit quand et comme il veut et bénéficie de droits sans même avoir contribué. Et qu’on ne doit dénigrer personne y compris ceux qui ont droit à la paresse et à la solidarité avec l’argent public. Sauf les riches. Il faut faire expier ceux qui ont réussi et qui travaillent et qui réclament la stabilité comme évidence. Il faudrait rééduquer ces citoyens égoïstes, les priver d’avoir des représentants et si on pouvait les exiler on le ferait ! Le front républicain a été une tentative. Ce fut le début de la fin démocratique.   

L’idéal de quelques -uns ce serait que le peuple jamais content, suive les élites, celles qui nous ont conduit à tour de rôle depuis des années là où nous en sommes et qui ont trouvé des idées fiscales inédites bien qu’expérimentales pour poursuivre ! L’Etat est devenu obèse mais il avait fallu répondre aux attentes des Français. Ils ont voulu du compromis : ils ont eu du maquignonnage cadré et sélectionné sous menaces de censure.  Le citoyen a eu ce qu’il aurait choisi. Est- ce de la démocratie ?  J’aurais préféré une rupture avec de la responsabilité et moins d’égo. Mais je ne suis pas du petit pré- carré des élites. Et retourner aux urnes fait peur aux futurs battus. On peut dissoudre le peuple dans un marécage.    

L’électeur est libre et le souverain. Les institutions sont notre socle. Les pouvoirs sont délégués par le peuple. A la fin le citoyen doit être respecté, pas réprimandé et obéi selon les votes exprimés. Les idées se croisant on peut être de droite et humaniste. Être pétri de bons sentiments mais être réaliste et adepte de la raison. On a le droit de partager l’avis d’un socialiste M. Rocard et être d’accord pour avoir une immigration choisie. On peut vouloir de la sécurité publique et de la fermeté dans un état de droit revisité. Ceux qui créent des entreprises sans maltraiter les salariés sont à soutenir.  Et préférer ceux qui se fatiguent à ceux qui en profitent. Les hargneux sont le contraire de la démocratie.

Il faut respecter la loi qui est la règle du jeu collective et ne pas approuver les actions des désobéisseurs par principe. On peut croire que les devoirs sont aussi importants que sa liberté sans limite. On peut exiger une morale ou des principes éthiques qui font consensus et qui séparent le bien du mal. Et on n’a pas à corriger un scrutin public qui ne plait pas.   

J’ai expliqué à mes amis du peuple qu’ils n’étaient pas des fachos.  Ai-je raison ?   

jeudi 2 octobre 2025

Nuance et modération

 

                                                     Nuance et modération

                      Par Christian Fremaux avocat honoraire

On est fatigué du climat conflictuel et délétère qui règne. Je n’écris pas haineux car se serait tomber dans le superlatif qui excite. Les concernés se reconnaitront. Des indignés se sentent visés ou dénient la cause qui -selon eux - ne peut être attribuée à des personnes forcément de bonne foi ou inattaquables par définition. Et ceux qui dénoncent les abus mettent en danger l’état de droit sinon la république. Pas moins ! Toute critique ne peut s’adresser à des catégories innocentes par nature. Ou intouchables par statut. Etrange débat public ! Tout ce qui est excessif est insignifiant disait Talleyrand. On ne progresse ni dans l’anathème ni dans la flatterie. Et surtout en tordant les principes. On se dispute pour tout. On n’admet aucun tort : on veut avoir raison quelles que soient les conséquences. Mais si elles sont négatives on n’endosse pas la responsabilité.   

Il n’y a plus d’adversaires mais des ennemis à abattre. Avec du chantage en politique car si on n’accepte pas les propositions d’une opposition très minoritaire par parti elle censure. Elle exige sa victoire, ses scalps ! C’est pathétique et inquiétant. Et irresponsable pour qui veut gouverner la nation. Outre des insultes contre celui qui n’est pas progressiste donc du camp dit du bien. Certains voient des millions électeurs fachos qui l’ignorent et d’autres aperçoivent des illuminés idéologues donc dangereux qui vont casser le pays. Chacun a des opinions tranchées et les exprime. Violemment. Au nom de la liberté on veut empêcher les autres d’argumenter. On craint les idées.  Dans le pays de Voltaire qui se pique de tolérance et donne des leçons de bonne conduite et de réflexion au monde entier avec le succès que l’on connait, on devrait être plus mesuré. Mais on rejette toute contradiction.  Où sont l’union minimum et le respect ? Une des difficultés de l’époque actuelle est que beaucoup prennent leurs désirs pour la réalité et cherchent à les imposer. Prenons des exemples qui divisent.  

Dans l’audiovisuel public en déficit bien qu’alimenté par les impôts de tous, Mme Ernotte sa dirigeante indique qu’elle fait des programmes comme elle pense que la France devrait être. La nation traditionnelle telle qu’elle est selon les citoyens devient du conservatisme « nauséabond ». On apprend que la dame souhaite la suppression de médias privés au nom du pluralisme bien sûr pour que la doxa dominante règne. ORTF sort de son corps ! Deux de ses journalistes font tout pour qu’un candidat d’un parti politique arrive au pouvoir en éliminant un membre du mouvement concurrent. On attend encore les sanctions ou des excuses car sauf erreur le service public doit être neutre. Comment avoir confiance dans l’information publique officielle ?

Avec l’actualité judicaire on est monté sur les grands chevaux. On se méfie de la Justice ? Horreur et injustice ! La magistrature est vent debout contre les propos de M. Sarkozy prononcés à chaud en étant sonné par le verdict qui le conduit en prison. Aurait-il dû dire merci et prononcer son mea culpa avec des menottes ?  L’accusation n ‘avait pas demandé d’incarcération immédiate même un peu différée. Le tribunal est allé au- delà des réquisitions.  La magistrature a l’épiderme sensible quand on lui demande personnellement des comptes et une poigne de fer quand on souhaite de la répression pour les prétendus forts. Elle conteste l’accusation de laxisme sauf pour les personnes vulnérables dans leurs diversités. Qu’elle choisit.  On a entendu les grands mots : indépendance ; état de droit ; interdiction de mettre en cause un magistrat ad hominem et de critiquer la décision ; des années d’enquête et un jugement de 400 pages qui prouveraient que la motivation est « en béton » avec des faits avérés. Malgré les relaxes qui démolissent le fondement des poursuites ? Et justification du mandat de dépôt qui est prononcé chaque jour sans protestations contre des centaines de délinquants ...Ces explications curieuses des juges ne change pas le vide reconnu des preuves.  

Un ancien président de la République vaut donc un criminel patenté ou un trafiquant de drogue ou un OQTF qui récidive. Il est inadmissible d’appuyer sur la tête d’un homme qui a donné pour l’intérêt général et qu’on noie, serait-il coupable. La justice n’est pas une vengeance. Elle protège la collectivité et rappelle la frontière entre le bien et le mal dans la vie courante. L’humanisme ne se divise pas.

 MM. Mmes les bâtisseurs du mur des cons membres du syndicat de la magistrature admirateurs de Mediapart et de son probable faux selon les juges, en ont rajouté une couche. Ils auraient mieux fait de se taire. On est tous d’accord pour condamner fermement ceux qui ont menacé la présidente du tribunal. Ils devront être sévèrement punis. On peut faire confiance dans les magistrats pour ce dossier. Car ils appliquent la loi votée par le législateur. Si celui-ci s’est trompé qu’il rectifie. Le juge pour M. Sarkozy a usé de son pouvoir d’appréciation base de la législation pénale et de l’individualisation des peines sauf pour la liberté pour principe et la détention comme exception, valables pour tous ? L’état de droit est plus large que la Justice qui est déléguée par le peuple souverain qui décide, seul vrai pouvoir. Il faut l’entendre sinon le suivre. L’interprétation subjective des textes sans appel possible, devient problématique. On doute.    

 La polémique n’a pas porté sur l’essentiel à savoir sur la présomption d’innocence, le double degré de juridiction menacé par l’exécution provisoire, les garanties de représentation du devenu coupable, l’absence de risque de récidive ou de danger pour l’ordre public dont le contenu est à géométrie variable. Ce sont des sujets majeurs qui n’intéressent pas les médias. Ni ceux qui veulent un exemple dans l’absolu quitte à être déjugés. Ce qui compte c’est qu’un puissant qu’on déteste humainement et politiquement dorme en prison.  Aux motifs que l’on estime que des faits très anciens non commis par celui qui a incarné la France donc circonstance aggravante pour les magistrats, seraient d’une exceptionnelle gravité. N’y aurait-il eu qu’une intention ou le fait présumé d’avoir su. On n’a pas fait dans la nuance. En dépit du poids des pages.   

Malgré la tripartition au parlement on est revenu au binaire. Tout est blanc ou noir. Essayons le ternaire : thèse, antithèse et synthèse qui conduit à l’ouverture d’esprit sinon aux compromis positifs et gagnants. On pense faussement détenir la vérité qui est multiple. Que chacun se regarde dans la glace : il y reconnaitra son meilleur ennemi qui comme Janus a une face sombre. Personne n’est l’avant -garde éclairée de la morale et de la vertu. On ne doit user de ses pouvoirs que d’une main tremblante et avec modération.