La liberté denrée rare sur le marché.
Par Christian Fremaux avocat honoraire.
C’est la guerre sur un territoire aux portes
de l’union européenne. On est choqué. Elle l’est déjà ailleurs dans le monde en
orient notamment où la réaction chez nous est moins grande pour des motifs
divers sauf en ce qui est l’immigration. La politique internationale, les intérêts des puissances,
les égos démesurés, et les rancœurs historiques entrainent souvent des
conflits. La mobilisation est générale dans les esprits évidemment pour ceux
qui ne sont pas en première ligne et les conseilleurs ne peuvent être les
payeurs. Les va-t’en guerre défensive pour des raisons idéologiques et des
raisonnement tirés des Ong ou de Saint -Germain des prés avec la réponse du
faible au fort doivent mettre un silencieux, sur leur verbe bien sûr ! Des
êtres humains ont perdu leurs libertés voire leurs vies et souffrent. Il faut
les aider sans restriction. Chacun a son opinion sur l’origine de la lutte
armée mais quelles que soient ses raisons l’agresseur a tort. La force ne
résout rien. Elle envenime et laisse des séquelles. L’histoire nous l’a appris.
Les sentiments submergent mais la diplomatie doit gagner. La Russie ne pourra
triompher car elle est déjà au ban des nations. Il faut négocier,
concilier et qu’il n’y ait ni vainqueur ni vaincu. Facile à écrire j’en ai
conscience. Mais l’avenir est en jeu et nos libertés collectives avec. Il faut
réfléchir à deux fois avant de s’emparer de la liberté comme d’un étendard qui
peut être aussi belliqueux que défensif. Et ne pas affirmer qu’on ira au bout
(de quoi ?), qu’on ne cédera jamais : paroles verbales ! Eugène Delacroix
a peint la liberté guidant le peuple. Il peut arriver que l’on n’aboutisse
nulle part ou qu’il faille retourner en arrière, les divers printemps
politiques nous l’ont montré. Mais espérons, car les démocraties sont la seule
solution possible et souhaitable. Avant d’être
guillotinée Mme Rolland a soupiré : « Ô liberté que de crimes on
commet en ton nom ».
Comparaison
n’est pas raison mais il faut savoir parfois en profiter pour réfléchir
sur nous- mêmes et voir si on n’est pas des enfants gâtés à propos de libertés.
Nous avons l’habitude en France de disperser ou mépriser ce que l’on possède
à profusion sans même s’en rendre compte. Le mot liberté est sur toutes
les lèvres de nos concitoyens et on est prompt à dénoncer ce qui l’amoindrirait
ou serait une atteinte forcément scandaleuse. Peut-on être plus mesuré dans les
revendications et tolérant sans juger l’autre avec qui on n’est pas d’accord et
en essayant de le comprendre sans l’approuver ou le persuader pour aboutir
globalement à une société plus apaisée ? Ce qui n’enlève rien à ceux qui
réclament un meilleur sort et combattent les injustices. La liberté qui se
trouve sur le marché à l’étranger avec parcimonie et avec une loupe mais qui
est plutôt en excellente diffusion en France doit se partager et ne pas être
l’apanage de minorités inclusives ou de personnes qui pensent détenir la
vérité. La collectivité a des droits. La liberté ne peut être illimitée sinon
c’est le désordre et la loi du plus fort, et ne peut résulter que du résultat
d’un dialogue objectif. Les ayatollahs de la liberté tous azimuts me
critiqueront. Mais j’essaie de ne pas galvauder ce qui est précieux et rare car
les mots ont une signification et à trop les interpréter ils se vident de tout
sens concret. Prenons dans notre pays peu suspect de dictature ou de
totalitarisme les exemples du terrorisme et de la pandémie qui mettent à mal
par obligation pratique l’absolu de la liberté.
D’abord le terrorisme a obligé nos dirigeants
pour préserver nos libertés à faire voter démocratiquement des lois qui ont été
qualifiées par certains de liberticides. C’est exact sur le principe. Des
libertés ont été quelque peu rognées mais peut-on ne pas se préparer à se
défendre contre des actes de guerre et à les sanctionner ,contre la destruction de
nos valeurs, de nos choix collectifs, de notre civilisation. Nous avons une
culture et un passé que nous devons accepter globalement avec le bon et le
mauvais : Clemenceau disait que la révolution est un bloc. Qui peut
sérieusement soutenir que le terrorisme n’est pas une attaque pour tuer et
déstabiliser, qu’il vient de l’extérieur et encore pire de l’intérieur c’est-à-
dire mené par des individus qui ont été élevés en France avec le principe
liberté, égalité, fraternité et j’ajoute laïcité, et qui ont profité de la
république ? Certes les dispositions légales prises pour lutter contre le
terrorisme ont été incluses dans notre arsenal juridique. Et pourraient
être utilisés contre ceux qui ne sont pas terroristes, mais délinquants de
grande envergure, voire plus modestes ce qui est relatif pour les victimes.
C’est un débat concernant l’aspect régalien de la campagne présidentielle et
surtout législative qui va suivre. Qui va oser plaider pour les libertés
individuelles absolues ? Qui accepterait que le pouvoir exécutif ne prenne
pas des dispositions pour protéger la population innocente et pour punir ceux
qui nous agressent. Il suffit de lire les comptes rendus de l’actuel procès
d’assises qui juge les responsables des attentats de 2015 pour être
convaincus que les libertés n’existent que parce que parfois il faut
fixer des limites et dire non.Tendre la deuxième joue est réservé à ceux qui
croient sans restriction en l’homme bon. Les humanistes ont le devoir de
réfléchir et d’allier sagesse et grands principes avec ouverture d’esprit et
fermeté. Jean Bodin a écrit que la seule
querelle qui vaille c’est l’homme. Mais parfois la réalité nous rattrape et la
liberté peut avoir le visage de Janus. La guerre est une chose trop grave pour
la confier aux militaires ou à l’émotion.
Ensuite
la pandémie qui est un autre exemple où les libertés ont été malmenées,
mais dans l’intérêt collectif. Le pouvoir toujours avec des votes du parlement
a pris des mesures provisoires qui ont concerné nos libertés, celles d’aller et
venir, de fréquenter tel ou tel lieu, de devoir porter un masque, et a
incité à la vaccination. Certains « résistent » (je n’insiste pas sur
le grotesque outrancier de ce terme), car ils veulent être libres de leurs corps,
de leur santé donc de mourir ou être malades mais selon leurs choix. Et bien
sûr d’être pris en charge si nécessaire dans nos hôpitaux. Au nom de leur liberté ils refusent toute
directive gouvernementale servirait-elle à protéger le reste de
la population. La solidarité ne compte pas pour ces rebelles de
papier : leurs convictions dominent. C’est un débat de société pour riches
puisque dans de nombreux pays il n’y a ni vaccin, ni hôpitaux, ni sécurité
sociale, ni solidarité nationale. L’homme / la femme sont ce qu’ils sont
avec leurs qualités et leurs défauts. Il faut essayer de les convaincre car le
bien n’est pas une donnée naturelle, innée, surtout chez les autres.
Il faut plutôt réfléchir au mal en général qui est beaucoup plus difficile
à définir et à canaliser ce qui est aussi un problème de liberté(s).
Descartes a dit que le bon sens était la chose du monde la
mieux partagée. Je n’en suis pas certain. Mais je suis sûr que la liberté et la
démocratie ne se monnayent pas. Chacun a le droit de vivre selon ses
convictions bien que le moi soit haïssable selon Blaise Pascal. Dans le cadre
républicain qui soude dans la nation avec ses valeurs et son histoire en ce qui
nous intéresse, en écrivant partout liberté comme le poète Paul Eluard en
…1942 !
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