vendredi 20 mars 2020

dura lex sed lex


                        Dura lex sed lex.
           Par christian Fremaux avocat honoraire.
Pour lutter contre tous ceux qui font preuve d’inconscience sanitaire ou d’égoïsme surtout, et d’incivisme ensuite mais les devoirs sont devenus secondaires dans notre société individualiste, et qui se croient malin en ne respectant pas les mesures de confinement, le gouvernement à fait fixer dans la loi le montant de l’amende à 135 euros qui peut être majorée si le récalcitrant aggrave son cas. Comme ceux qui interpellés plusieurs fois n’ont pas d’attestations, ou qui se moquent des avertissements, voire sont agressifs pendant les contrôles.  Ceux qui continuent à être dehors pour se balader ou faire du sport sans respecter un court périmètre, à se rendre en masse dans des marchés de plein air, à picoler ou fumer avec des potes sur la voie publique, à poursuivre leurs trafics divers, en narguant les autorités et en inventant n’importe quoi pour ne pas avoir rempli avec sincérité l’attestation de déplacement dérogatoire qui n’est pourtant qu’une auto-justification,  sont de dangereux irresponsables .Désormais ils vont être  aussi des délinquants qui auront un casier judiciaire. Le gouvernement vient de décider de poursuivre les plus rebelles avec le délit de mise en danger de la vie d’autrui.
Je ne doute pas que des éminents juristes trouveront des arguments de droit pour tenter de faire annuler les sanctions, sur la base de fondements juridiques insuffisants contraires aux principes constitutionnels ou à la préservation des libertés individuelles, et plaideront avec talent  et force -car ils auront été au repos forcé quelques jours et doivent se rattraper- que la protection collective ou l’état de nécessité publique ne suffisent pas pour justifier un régime dérogatoire aux droits élémentaires comme ceux de circuler, parler, avoir une vie privée. Et même de manifester puisque l’inénarrable M.Martinez phare de la Cgt veut organiser une grève car il estime que les salariés du privé, ou soignants, ou pompiers et  fonctionnaires ou toute personne d’un secteur vital qui exercent leurs fonctions et qui sont en contact avec des individus ne sont pas assez protégés faute de masques et de gel hydro- alcoolique. J’ajoute qu’il faudra aussi remercier ces courageux non pas uniquement par de bonnes paroles mais par des espèces sonnantes et trébuchantes quoiqu’il en coûte a dit le président.  Mais si le leader maximo syndicaliste a raison sur le fond, est -ce le moment d’organiser une pagaille supplémentaire ?   Concernant les policiers et gendarmes je ne sais pas si la commisération du confiné de la Cgt va jusqu’à soutenir les forces de l’ordre - celles à l’origine des violences en cas de défilés selon lui - qui sont sur le terrain pour faire respecter la loi et les mesures sanitaires ? Eux aussi sont en première ligne pour les risques.
Les avocats quand ils retrouveront leurs cabinets auront du pain sur la planche pour faire annuler les amendes et défendre les poursuivis devant les tribunaux correctionnels, et tenter de faire triompher les libertés publiques face à la sécurité globale et aux contraintes exceptionnelles. On a connu déjà ce débat avec les attentats : faut- il limiter les libertés individuelles au profit d’une sécurité collective, et comment la loi peut- elle trouver un équilibre pour concilier libertés et ordre public, et défense de l’intérêt général. On se rappelle la polémique avec la loi dite anti-casseurs début 2019 par exemple ce que les plus sourcilleux humanistes auto-proclamés adeptes des droits absolus de l’homme ont qualifié de liberticide jusqu’au moment bien sûr où la disposition prise trouve son utilité.  On peut toujours ne rien faire, estimer que tout est de trop, que les précautions sont illégitimes, que l’Etat est Léviathan, que tout est excessif et le danger sur-estimé.   Mais si on ne fait rien ou pas assez et que l’on se prive d’instruments d’action, on pourra ensuite se le voir reprocher et être poursuivi.  Il y a des exemples dans le passé. Je crains que madame Buzyn quel que soit son destin municipal à Paris, ait par ses propres déclarations d’ancien ministre avec d’autres des comptes judiciaires à rendre quand la crise aura été jugulée.
Et comme quoi il ne faut jamais procrastiner. Le président Macron a dans ses projets une réforme de la constitution notamment pour diminuer le nombre des députés et sénateurs,  réduire le cumul des mandats, et  supprimer la Cour de justice de la république compétente pour juger les ministres qui sont accusés d’avoir fauté dans le cadre de leurs fonctions. Il a échoué l’année dernière à faire passer cette réforme qui désormais attend, car il n’a pas trouvé de majorité dès 3/5 ème des parlementaires pour la voter en congrès à Versailles. Ladite Cour existe donc encore. Hélas ! soupire sans postillonner et sans masque madame Buzyn et des collègues qui peuvent être concernés et qui se lavent les mains au savon.   
La mise en danger de la vie d’autrui est définie à l’article 223-1 du code pénal. Cette disposition prévoit une sanction d’1 an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende pour « toute personne qui a exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ». Nous sommes dans le risque, sanitaire en particulier. Il n’y a pas d’acte précis, ni conséquence concrète et avérée. On peut punir un auteur qui n’a pas voulu porter atteinte à l’intégrité physique d’autrui et alors que ladite atteinte n’a pas été commise. C’est délicat en droit et surtout en intentions. Ce qui est sanctionné c’est un acte et le résultat d’avoir exposé directement quelqu’un à un risque, et le lien de causalité entre les deux conformément au principe de la responsabilité. Il faut avoir violé de façon manifestement délibérée ce qui caractérise l’élément moral, une obligation particulière qui correspond à un comportement déterminé : c’est donc un délit d’action (commettre une infraction comme un vol, une escroquerie…) ou d’omission (ne pas avoir suivi un règlement).
 Outre le domaine médical avec la responsabilité des médecins, on a vu depuis des années et on voit dans l’actualité judiciaire de nombreux procès contre des laboratoires pharmaceutiques notamment sur ce fondement juridique entre autres bien sûr selon les dossiers et les victimes. D’autres vont suivre. Car la santé comme le climat ou la préservation de la nature sont des enjeux désormais majeurs.  On ne tolère plus la défense de Mme Dufoix alors ministre : « je suis responsable mais pas coupable ». Notons qu’avec MM.Fabius  1er ministre en 1984-86 aux moments des faits du sang contaminé  et Hervé ministre,  elle a comparu en 1999 devant la cour de justice de la république sous la prévention «  d’homicide involontaire et atteinte involontaire à l’intégrité physique des personnes ».On ne pouvait appliquer à titre rétroactif le délit de mise en danger de la vie d’autrui qui n’existait pas en 1984-86.  M.Fabius actuellement président du conseil constitutionnel connait bien le sujet et pourra avec ses collègues apprécier les lois d’exception qui sont actuellement votées.
 L’article 223-1 du code pénal existe depuis 1992 et a été activé avec la mise en vigueur le 1er mars 1994 du nouveau code pénal, avec une notion inédite :  la responsabilité des personnes morales.  Il ne peut donc concerner que des actes ou faits postérieurs à ces dates.   Il a été modifié par la loi n°2011-525 du 17 mai 2011.Son domaine a été étendu aux infractions routières ou comportement sur la voie publique (conduite en état d’ivresse ou sous l’emprise de stupéfiants) et il est appliqué fréquemment dans les entreprises. La loi est dure mais c’est la loi surtout dans les périodes de troubles, de dangers, ou de grande peur.

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