jeudi 23 novembre 2023

La non extension du domaine du référendum ou l’occasion perdue

 

 La non extension du domaine du référendum ou l’occasion perdue

            Par Christian Fremaux avocat honoraire

Tout ça pour ça ! J’irai- je n’irai pas c’est du tango avec musique cacophonique.  Le référendum de l’article 11 de la Constitution fait rêver mais il semble que son extension à des sujets sociétaux, ceux qui intéressent vraiment les citoyens qui veulent donner leur avis soit remise aux calendes grecques. Sauf pour la fin de vie ce qui n’est guère enthousiasmant et est un problème personnel de conscience du concerné, de sa famille et du corps médical. Mais c’est la démocratie qui va être à bout de souffle si on ne lui insuffle pas rapidement plus de respiration. On proteste, on défile, on casse dans la rue mais on ne va pas voter.

C’est non d’avance. La question ne sera pas posée. Cela rappelle le magistrat Delegorgue qui présidait les assises pour juger Emile Zola et son « j’accuse » et qui refusait obstinément que Me Labori le célèbre avocat interroge des témoins qui avaient un rapport avec l’affaire Dreyfus. Toute ressemblance avec l’actualité est pure coïncidence. 

Le président Macron n’a pas réussi sa deuxième rencontre de Saint Denis. La proximité de la nécropole des rois où devrait souffler l’esprit a fait que ses projets dont celui sur le domaine du référendum, ont été enterrés faute de participants, les présents étant relativement d’accord pour ne rien faire et surtout ne pas donner le gain du match à l’un ou à l’autre. Je déplore que des chefs de parti n’aient pas fait l’effort de se déplacer conduits par leurs chauffeurs ne serait- ce que pour dire qu’ils proposent autre chose. Ceux pour qui je vote m’ignorent. Certes il y a plus de signes de communication que d’actes. J’appartiens à ces 50% d’électeurs qui participent à chaque scrutin et j’aurais aimé que les représentants du peuple cette prétendue élite démocratique ne boudent pas et soient positifs. Puis qu’à l’assemblée ils ne jouent pas la surenchère ou la politique du pire. A défaut leurs leçons de morale et de civisme ne sont que des paroles verbales sans consistance et la confiance en leurs capacités à gouverner diminue.

Et pas depuis Colombey-les -Deux églises où souvent on rend hommage à l’absent qui ne peut répliquer sans tirer les conséquences de l’action du général de Gaulle. On a même vu se recueillir les héritiers de ceux qui le combattaient ! La société du spectacle se réveille mais les acteurs sont mauvais. Le général a usé du référendum et quand la réponse n’a pas été celle qu’il souhaitait il est parti. Qui aura le courage de recommencer ? C’est à cela qu’on mesure la grandeur d’un homme ou d’une femme d’Etat.

Les citoyens aimeraient être consultés sur l’immigration, la sécurité, la justice, la décentralisation… sur ce qui les touche dans leurs vies quotidiennes. Je dis oui. Mais ces sujets délicats ne plaisent pas aux bien- pensants qui préfèrent dissoudre le peuple s’il ne suit pas ceux qui s’estiment éclairés et pensent que les citoyens doivent approuver ce qu’ils imaginent. Comme si le bien se décrétait et qu’une société idéale avec la fraternité existait uniquement avec de bonnes intentions. Les affrontements guerriers en cours un peu partout sur le globe nous montrent que l’identité, la violence, l’idéologie voire la nature désormais divisent les hommes et les femmes surtout quand la religion s’en mêle.

 Les sujets de tous les jours chiffonneraient- ils des élus politiques qui craignent pour leurs sièges ? Et le plus grave :  on nous dit que les juges européens pourraient ne pas valider : le droit constitutionnel français est -il contre son peuple ? Personnellement on ne m’a pas demandé de voter pour les membres de la commission européenne et sa bureaucratie. Et si on remettait un peu de souveraineté dans ce capharnaüm dans lequel est engluée la majorité silencieuse. A vie ? A force de botter en touche on va vers le carton rouge sinon au succès d’un populisme imprévisible. En Argentine les électeurs viennent d’élire « El Loco » devenu président bien que poursuivi par la justice et peut être bientôt détenu ? Et si le populisme n’avait pas tout faux ? Les politiques contraires n’affichent pas de résultats merveilleux. L’aspect droits de l’homme et éthique n’est plus universel. Ne dénions rien.

Tout devient possible. Il sera trop tard pour dire on aurait dû agir et ne pas refermer le couvercle sur la marmite. Faire parler le peuple est un moyen préventif.  

On objecte mais quelle question faut-il poser ? Comme si nos responsables n’étaient pas plus intelligents que nous et que la complexité obligeait à renoncer. Nicolas Sarkozy a fait voter le référendum d’initiative partagée. Pourquoi ne pas en atténuer les conditions et essayer ? On a dit non au référendum d’initiative citoyenne ce que j’ai agréé en raison de la démagogie et de la dérive possibles. Il est écrit nulle part que l’électeur a le droit sinon l’obligation de voter tous les 5/6 ans et le devoir d’être reconnaissant entre les échéances en acquiesçant à ce qui n’avait pas été exposé dans le détail ou qui vient de surgir. L’électeur est-il plus bête que celui qui a phosphoré sur la question à trancher ?

Un référendum est un outil pas la panacée. On sait le peuple méfiant depuis le vote sur Maastricht rectifié ensuite par le traité de Lisbonne. Personne ne veut se faire avoir une nouvelle fois ! La balle est dans le camp des politiques qui doivent commencer par le début : étendre les possibilités de recours au référendum.

Je veux être interrogé non pas par la police car je suis innocent mais je veux donner mon opinion sur mon avenir. Est-ce trop demander ? Nous nous revendiquons à juste titre d’être une véritable démocratie dans le monde, sans conflits internes entre tribus, clans, communautés, factions quoique ce sujet commence à inquiéter. A -t -on l’occurrence de le dire sans être traité d’extrémiste ?

Nous n’avons pas d’ennemis extérieurs déclarés sauf le terrorisme. Je ne réclame pas l’extension du domaine de la lutte comme Michel Houellebecq car nos rebelles petits bourgeois s’en préoccupent. Mais je milite pour que de nombreux sujets de société vitaux pour notre cohésion puissent être soumis au référendum. Que MM.et Mmes les parlementaires s’activent personne ne détenant la vérité, certains moins que d’autres cependant. 

Une occasion perdue se retrouve rarement. Les électeurs veulent aller aux urnes et s’exprimer, ce qui est une liberté fondamentale. Donnons- en leur la possibilité c’est un minimum démocratique. Le muet du sérail n’apporte rien à personne.

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