L’arc républicain
Par
Christian Fremaux avocat honoraire
Depuis A. Camus
on sait que ne pas bien nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde. Notre
personnel politique vit au rythme de petites phrases, de slogans,
d’approximations quand ce ne sont pas de contresens historiques ou sémantiques.
Cela fait le buzz et évite d’aborder le fond avec des arguments objectifs,
contradictoires, vérifiables.
L’émotion a remplacé la raison et l’urgence du
jour remplace celle de la veille. On considère des rappeurs comme les nouveaux
intellectuels influenceurs pour la jeunesse avec leurs valeurs atypiques et on
les invite à s’exprimer doctement sur tous les sujets y compris les plus
délicats comme l’antisémitisme, l’environnement, le racisme, la citoyenneté et
la politique sinon l’économie avec le partage de leurs richesses. Cette
dernière exigence ne les concernant pas, il ne faut rien attendre de ces
généreux artistes et surtout pas des solutions.
Des élites énamourées
et bien entendu absolument pas intéressées par la récupération électoraliste
tapent des mains, et se pâment à entendre la voix râpeuse des banlieues et les
explications de quasi stars en colère, en considérant que ce qui est de bon
sens et traditionnel comme les valeurs républicaines sont à ranger au magasin
des accessoires. On y substitue le racisme, les discriminations, les
inégalités, qui seraient structurellement avérés. Sans oublier l’écriture
inclusive, le genre, la tenue vestimentaire ou autres étrangetés qui feraient
partie du nouveau progrès indispensable. Certes tout ceci divise plus qu’il
n’unit mais on ne fait pas de plats purs sans casser des œufs périmés affirment
nos marmitons endoctrinés qui se disent humanistes.
On aurait besoin
parait-il des réflexions intenses des jeunes qui surtout ont esquivé l’école et
sont rebelles appuyés sur de plus anciens, des bobos ou des éveilleurs qui
savent tout de la morale ou du comportement des humains, à la vie de tous les
jours. Sauver la planète avant la fin du mois par exemple. Eradiquer les injustices
aussi. Nos politiques progressistes parlementaires ou militants ont besoin des
lumières de ceux qui ne participent pas à la société puisqu’ils la contestent.
C’est grave si nos élus sont conseillés par des hip-hoppeurs communautarisés. Car la majorité
silencieuse composée de papis soixante- huitards qui en auraient bien profité (comme s’ils n’avaient pas
énormément travaillé après la 2ème guerre mondiale et les guerres
d’indépendance, et affrontés des conflits de toute nature dont les crises énergétiques
et financières puis cotisés à fond pour la génération qui suit ) ou d’individus
responsables qui réfléchissent et assument leurs engagements dans
l’intérêt général ,ne servirait plus à rien sauf à retarder les échéances et
donc à contrarier les bien- pensants qui ont des objectifs particuliers
qui décoiffent !Leurs opposants sont à éliminer. C’est toujours A. camus
qui a dit que « chaque génération se croit vouée à refaire le
monde : la mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas ». Conserver
nos acquis tout en corrigeant ce qui ne va pas est déjà la mission principale.
La table rase n’a jamais rien rapporté. N’est pas Attila qui veut.
Car nos
idéalistes oublient que la France n’est pas seule dans le monde, que des
Etats émergents voire capitalistes sans l’avouer polluent la planète, -la
France ayant une part de 1% dans le total-, que des guerres existent, que des
migrations s’intensifient avec les dangers sur la personne et le climat qui
change, et que notre situation locale économique comme sociale n’a pas besoin
qu’on lui rajoute des charges supplémentaires ou des débats qui créent un climat
délétère. En culpabilisant certains qui n’ont forcément aucun cœur. S’il faut
donner place à une nouvelle société, aux mélanges de toute nature, à ChatGPT qui
substitue la machine sans poésie ni fantaisie à l’imagination humaine, si les
algorithmes sont l’alpha et l’Omega de l’être vivant, attention danger.
Si les
libertés sont illimitées car les devoirs collectifs n’apportent rien, on va
bâtir une démocratie qui va poser problème. Si on ajoute dans le monde
politique une partition entre le bien et le mal à partir de concepts abscons et
partiaux on se dirige vers des exclusions alors qu’on a besoin d’union.
On entend
désormais parler d’arc républicain pour désigner ceux qui sont du club et ceux
qui n’ont pas droit d’entrée. Et de parole. Je ne sais pas qui détient cet arc
et qui est l’archer suprême qui décide d’envoyer une flèche, celle qui défend
un agressé ou tue un agresseur. Robin des bois est passé de mode ! Ce
n’est en tous les cas pas un arc en ciel car des couleurs sombres n’en font pas
parties, du brun noir, au rouge écarlate, ou au vert très foncé tirant sur le
violet. On se contente de couleurs neutres, ce qui va de l’extrême centre à
droite et de l’extrême centre à gauche, en passant par les centristes incolores,
les libéraux ouverts à l’Etat, des conservateurs lucides ou touchés par la
rédemption, des socialistes peu colorés…Le choix est subjectif et restrictif. Le
chef cuisinier coupe les deux bouts de l’omelette. Ce qui réduit le choix de qui
est dans l’espace démocratique et renvoie dans leurs foyers les électeurs qui
sont daltoniens. Car il n’y a aucun critère défini à respecter. Des obscurs partisans auto- proclamés
éclairés trient les bons électeurs qui peuvent participer aux scrutins et
gouverner en faisant des compromis et en négociant, et les mauvais qui doivent
rester chez eux en baissant la tête et en s’excusant ou en allant à Canossa. Je
ne crois pas que la démocratie progresse avec cette méthode car le seul arbitre
légitime est le citoyen qui vote comme il l’entend. Seul l’Ulysse
politique peut bander l’arc. Est-ce M. Macron qui a réuni toutes les têtes
politiques de gondole ?
L’arc renvoie
à des vérités historiques ou des légendes au- delà des indiens d’Amérique qui
ont été exterminés et dont les successeurs se battent actuellement devant les
tribunaux pour reprendre leurs biens. L’injustice ne meurt jamais. On se rappelle
de Guillaume Tell en Suisse qui avait oublié de saluer le chapeau impérial en
passant sur la place du village et qui fut condamné à tirer avec son arbalète
une flèche -un carreau -dans une pomme en équilibre sur la tête de son fils. L’arbitraire
a perdu. On se souvient surtout du « bateau ivre » poème d’Arthur
Rimbaud : « comme je descendais des fleuves impassible je ne me senti
plus guidé par les haleurs ! Des peaux rouges criards les avaient pris
pour cibles, les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs ».
Mais il faut
ne pas oublier la flèche de Parthe, anciennement Iran. Les combattants
faisaient semblant de partir mais tiraient des flèches par derrière. L’arc
républicain n’est pas un bouclier et les électeurs ostracisés se feront un
plaisir de le contourner. On ne joue pas avec la démocratie qui doit être
sincère et responsable. A vouloir être trop malin c’est parfois contre-
productif.
C’est tellement juste ! Merci cher Christian pour ce papier qui devrait rappeler je la démocratie mérite mieux que ce qui nous est «servi »…! Amitié
RépondreSupprimerTrès bien dit. Partagé sur Twitter
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