mercredi 3 mai 2023

les vengeurs démasqués

 

                                          Les vengeurs démasqués 

                          Par Christian Fremaux avocat honoraire

On connait tous les héros récurrents que l’on admire dans la bonne humeur de Zorro le vengeur masqué à Batman qui combattent l’injustice et rendent leurs biens aux pauvres ou aux humiliés. Ou de la reconnaissance. On dirait ceux qui sont en première ligne actuellement. Ils sont bons enfants comme nos revendicateurs au départ avant l’explosion souvent du final et utilisent la force tout en étant pacifistes. La comparaison avec ceux qui défilent s’arrête là. Il y a une hypocrisie évidente avec nos syndicalistes qui estiment n’avoir aucune responsabilité dans les violences tout en organisant ce qui est attendu sinon espéré pour faire pression et en rejetant la faute sur l’Etat titulaire de la violence légitime et qui protège ceux qui protestent. Dans la hiérarchie des droits celui de manifester n’est pas supérieur aux autres et il n’est pas un permis de tuer ou de blesser ou de casser. C’est un peu facile de dire on n’y est pour rien si des voyous agissent quand on a créé les conditions de l’affrontement voire y avoir appelé au moins implicitement. Le prétendu déni démocratique se partage pour le moins.

La CGT qui en tout voit du tragique et ne regarde pas à l’extérieur, la France selon elle étant le pays des damnés de la terre, avait décidé d’agir car la partie n’est pas terminée malgré la promulgation de la loi. Elle le sera d’après nos justiciers quand la réforme des retraites sera retirée. On verra. C’est la conception de la démocratie selon nos élites travailleuses. Je ne sais pas ce qu’en pense le contribuable car je n’ai pas l’oreille du quidam. Je vais me faire brancher un sonotone.

S’y est ajouté le fait que 9 joueurs non sélectionnés par le peuple mais titulaires pendant 9 ans ont confirmé le score d’autant plus facilement qu’ils sont en même temps les arbitres suprêmes. Il n’y a pas de n° 64 parmi les sages constitutionnels. Mais une loi se revoit ou s’abroge c’est vrai. L’état de droit est acceptable quand il vous donne raison.

En politique l’adversaire c’est l’Etat qui incarne le peuple donc moi. Tout le monde paie pour la décision publique qu’elle soit bonne ou mauvaise. Et des nulles idéologiques on en a connu depuis des dizaines d’années. On ne citera personne.

Les spectateurs sont ravis quand le match a été vif, indécis sinon tendu. On félicite le vainqueur et les déçus se disent que la prochaine fois ils feront mieux. On ne réclame pas un pénalty sur le tapis vert de la rue pour crier « on a gagné ». Les finalistes ne sont pas les mêmes chaque année. C’est le fair-play. Cela s’appelle aussi la démocratie.

 Si c’est l’équipe de France on ne lui tire pas une balle dans le pied en affaiblissant l’exécutif en le paralysant et en hurlant à la vengeance, sinon tous les citoyens sont victimes. Les sondages ne font pas le résultat même s’ils donnent de l’espoir aux supporters.

Pour la coupe de France de football la CGT avait annoncé vouloir mettre un feu vengeur à la 49 -ème minute et 3 secondes. Quelle imagination, quel talent !   C’est elle qui a pris un carton rouge pour avoir confondu sport - donc la joie, la fraternité dans l’effort, la compétition d’égaux - et défense d’intérêts corporatistes comme si elle détenait la vérité et était soutenue par les 78.000 sportifs présents. Ce fut un bide mais le match retour était prévu pour le 1er mai.

 Des millions ou des centaines de milliers protestants pour un motif ou un autre dans la rue selon la CGT contre 12.000 policiers et gendarmes, l’issue était connue, le match plié surtout devant les caméras où tout est filmé. Tout étant considéré comme des bavures institutionnelles. La vengeance est un plat qui se mange froid, en l’occurrence ce fut brûlant. Je plains toutes les victimes et surtout les forces de l’ordre qui n’agissent que sur ordres et ne sont pas volontaires pour se faire démolir par des participants décrits comme forcément doux ! Mais aussi badauds admirant la représentation sans broncher ou empêcher quoique ce soit. Toujours avec les mêmes acteurs en noir au milieu des drapeaux. Sans que l’on entende des cris de soutien ou de compassion pour ceux qui font leurs métiers. L’émotion va toujours dans le même sens. L’être humain est reconnu comme tel selon une géométrie variable.

Il ne peut y avoir de vengeurs ni masqués ni à visages découverts qui veulent faire payer un affront et obtenir réparations. De qui ? De l’Etat donc de moi, mais quelle faute ai-je commise ? Sinon aucune réforme n’est possible et il faudra agir dans l’urgence car les agences de notation et les faits sont têtus. Dans une société civilisée l’apaisement est la règle. Le rapport au travail s’est modifié il faut en tenir compte. Que l’on propose ce qui est possible et non démagogique. Sans bouder ni menacer.  La Nation a besoin d’union. Les mécontents sont légion on ne les ignore pas mais la cause n’est-elle pas répartie entre l’Etat providence dans lequel nous vivons et le toujours plus des consommateurs que nous sommes devenus à la place d’être des citoyens avec des devoirs dont celui de modération ? Outre des évènements de toute nature que nous ne maitrisons pas. La démocratie qui doit faire coexister les antagonismes c’est discuter publiquement, prendre une décision légale contradictoirement, et s’y tenir. Négocier n’est pas trahir.

La violence physique, morale ou psychologique est intolérable quelles qu’en soient les raisons. Il n’y a que la vie qui vaille. La démocratie est fragile le monde nous l’apprend, et voir la vie en sombre et tout contester est dangereux et contraire à un progrès nécessaire. Il me parait contreproductif de vouloir un arc dit républicain qui arrangerait tout. Pour ne parler qu’entre soi, en initiés humanistes ou prétendus tels ? Ce qui est peu civique. Et le serait encore moins avec un scrutin à la proportionnelle intégrale comme exigé. Que fait-on de ceux qui n’en feraient pas partie et qui sont néanmoins des citoyens comme les autres que l’on l’admette ou non et qui jouent le jeu républicain ? Qui décide et au nom de quelles valeurs ? A -t-on le droit de poser la question ?

Il faut démasquer les vengeurs qui portent des faux nez et des fausses barbes. Ce sont des vrais anti -démocrates, des semeurs de haine qui excluent. Notre société a besoin de plus de calme et de retour à la tolérance et au respect de l ’autre. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas batailler verbalement pour trouver les solutions les plus consensuelles qui corrigent les inégalités et qui favorisent la redistribution. Mais l’autorité et l’ordre public doivent l’emporter. Car sans lois les libertés sombrent. Sans sanction tout s’aggrave.

Ce fut la fête au travail le 1er mai. Tout dépend bien sûr de ce qu’on entend par fête !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire