De quoi un agresseur est- il le
nom ?
Par christian Fremaux avocat
honoraire
A l’occasion de l’élection présidentielle de 2022 le journaliste
Gilles Bouleau avait posé à chacun des candidats la même question : M.
Poutine est-il un dictateur ? comme si le vocable pouvait avoir
une influence sur les combats ou expliquer la motivation de celui qui est un
agresseur patenté.
Tous ont
refusé de répondre à la question au prétexte principal qu’un (futur) chef d’Etat
réfléchit et ne cède pas à l’émotion, n’insulte pas l’avenir, qu’il n’a pas à
qualifier péjorativement un collègue Président qu’il va fréquenter et avec
qui il va falloir négocier. Les candidats avaient esquivé une réponse franche
et massive sauf M. Jadot leader des verts. Il avait affirmé que oui M. Poutine
était un dictateur. Ce dernier en a tremblé de peur. Mais a intensifié son
opération militaire spéciale contre les « nazis » d’Ukraine !
Mais qui doute
que les méthodes brutales du chef de guerre russe ne respectent pas le caractère
humain de la vie, ni les canons du droit international et humanitaire ni les règles
du droit de la guerre sur la protection des civils notamment ? Si
l’on peut admettre qu’il y a des guerres propres qui ne font qu’un
minimum de dégâts ! La guerre ne se divise pas en bonnes et
mauvaises actions.
La Cour
Pénale Internationale [C.P.I] de La Haye a ordonné une enquête sur les actes de
M. Poutine et de ses complices qui peut être dans l’avenir seront incarcérés
pour génocide, crimes contre l’humanité et de guerre et crimes dits
« d’agression ». Mais observons que ni la Russie ni l’Ukraine n’ont
ratifié le traité de Rome de 1998 fondateur de la C.PI. M. Poutine ne va pas se
livrer et plaider coupable puisqu’il prétend se battre pour la liberté de
ses compatriotes. Et la protection de la grande Russie.
Le terme
dictateur est surtout à usage interne. Ce sont les citoyens russes qui ont déjà
connu l’ère soviétique et le goulag qui peuvent qualifier leur président. S’ils
osent s’exprimer sans se retrouver en prison ou subir des représailles. Il y a 50 nuances de dictature ou de
totalitarisme mais le résultat est constant : le mal, l’intolérance, la
volonté de puissance, la peur de disparaitre ou d’être amoindri, la certitude
que sa vérité exclut toute humanité, entrainent des souffrances et des vies
brisées. Tout le reste n’est que sémantique.
Des guerres
ont été déclenchées aussi par des dirigeants parfois occidentaux a priori sains
de corps et d’esprit, humanistes déclarés et entourés d’hommes et de femmes raisonnables
attachés aux libertés, à la démocratie et au droit. Les motifs de guerre
étaient louables, d’essence humaniste et libérale vérifiés et avérés du moins
en théorie. On combattait pour le bien, pour la civilisation et pour chasser du
pouvoir un tyran comme dans la philosophie athénienne. Mais aussi pour défendre
des intérêts matériels et stratégiques des Etats ne le rappelons pas trop fort.
Que M. Poutine
soit un dictateur peu importe. On prend les faits tels qu’ils sont. Serait-il un
prétendu démocrate à la mode russe ou de fer que cela ne changerait rien.
On peut y ajouter que la démocratie telle que nous la concevons est un concept
à implanter et conforter en permanence avec ses qualités et ses
défauts. Chaque individu a le droit de vivre en liberté sans être à la
merci d’autocrates persuadés de savoir ce qui est bon pour leurs peuples ou les
autres.
Alors
dictateur, barbare, mégalomane, despote ou criminel ou tout autre qualification
ne change pas l’action néfaste de M. Poutine. Mais il faudra bien un
cessez-le-feu et une sortie de crise qui sont du domaine des diplomates et des politiques.
Georges Clemenceau disait que la guerre est une chose trop sérieuse pour la
confier aux militaires. Elle est aussi trop grave pour la laisser à un
dirigeant totalitaire et « possédé » sauf à le convaincre que son
intérêt est de lâcher du lest sans exiger l’impossible. L’Ukraine devra aussi
peut être faire des concessions. Personne ne peut perdre la face il faut
au moins apparemment un gagnant -gagnant. C’est cynique et injuste. Mais la
morale n’intervient que très rarement dans les conflits. Une guerre finit par se
terminer mais il faut s’assurer d’une paix solide et durable.
On peut se faire plaisir par le vocabulaire
mais l’essentiel est de trouver des solutions concrètes pour arrêter la
lutte armée. Et on doit faciliter l’action de notre chef de l’Etat qui
maintient à juste titre le dialogue et essaie de trouver des mesures justes et
efficaces. Une défaite mais pas d’élimination. Sans que la France devienne une nation co-belligérante.
L’agresseur
est le nom de l’égo surdimensionné d’un puissant méconnu ou rabaissé, de la
volonté d’avoir raison contre tous, de vouloir défier ceux qui ne pensent pas
comme lui, d’avoir des valeurs qui ne seraient pas universelles. L’agresseur
est protéiforme.
Un agresseur
se suffit à lui -même. Il peut invoquer toutes sortes de raisons
qu’il estime être justifiées, cela ne change rien pour les victimes. L’agresseur est un autre nom pour la revanche
historique, la peur de disparaitre, l’ambition, le sentiment de puissance ou la
nécessité de se sauver soi-même. L’autre est toujours seul responsable de la
situation. L’agresseur est celui qui attaque. Il en a fait le choix et a
dû en mesurer les conséquences. L’agressé est celui qui résiste à l’agression.
Parfois en légitime défense il peut aussi contre attaquer. Les survivants
ont des droits !
L’agresseur est
donc le nom de la violence illégitime. Puisque la légitimité est de régler les
différends par le dialogue et la négociation. Notre époque ne manque pas
d’institutions mondiales ou régionales, de conseils dédiés, de comités ad hoc,
de conférences internationales et de lieux divers où l’on peut discuter même
âprement. Et signer des cessez le feu, des compromis, puis des accords, avec la
bénédiction des instances les plus hautes sur le plan mondial tant en droit et
de sécurité qu’éthique. Pour préserver les intérêts de chacun.
Aller à
Canossa c’est déjà fait et fut positif. Se rendre à Munich a entrainé des
drames. Chacun doit être mis en face de ses responsabilités humaines avant
d’être politiques ou souveraines.
Mon cher Christian c’est une très juste analyse que vous venez de faire je regrette que vous ne soyez pas ministre des affaires étrangères !
RépondreSupprimerVous avez un œil particulièrement exercé !
Avec mes amitiés
Bernard de Souzy
Merci et content cher Bernard d'avoir de tes nouvelles qui sont bonnes j'espère dans ce bazar ambiant. Tu as un vrai oeil et du talent comme artiste et je regarde tes tableaux toujours chez moi.Je m'amuse avec mes articles publiés un peu partout..Amitiés. C.Fremaux.
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