Ne
cédons pas à la facilité.
Par Christian Fremaux avocat honoraire.
Il fallait
s’y attendre. Après la polémique sur les termes ensauvagement et celui de
sentiment d’insécurité les français qui craignent d’être des victimes réelles
ou potentielles pour des faits malfaisants de toute nature ont répondu à un
sondage qu’ils étaient pour le rétablissement de la peine de mort. Docteur
Guillotin au secours on confond 2020 et 1789. Ce n’est pas la bonne période
pour les avocats pénalistes devenus ministres. Me Badinter doit être dans tous
ses états, et Me Dupont-Moretti doit penser que défendre un individu aux
assises est plus facile que défendre le peuple français face aux agresseurs.
Le manichéisme
en matière de justice pénale n’est pas acceptable car si la répression à
outrance avait stoppé les violences, les meurtres, les assassinats, et les
attentats on le saurait. De même si la prévention avait porté tous ses fruits,
on vivrait heureux sans récidive dans une société parfaite. Mais si tel n’est
pas le cas et que l’on constate que le mal existe, que le bon sauvage de J.J.
Rousseau est devenu dans la vie des gens un dangereux délinquant, ou un citoyen
qui ne respecte aucune règle et qui pourrit le quotidien, il faut en tirer les
conséquences. Faire l’autruche n’est pas une politique, dénier la réalité non
plus, vouloir respecter à la lettre les droits de l’homme que les délinquants
ignorent eux, donner des chances successives à ceux qui s’en moquent, accepter
toutes les différences qui sapent les fondements de la république et qui
fissurent la nation, et renoncer devant un climat délétère où chacun estime
n’avoir que des droits sans devoirs, c’est s’exposer à une escalade qui ne peut
rien produire de positif. Notre démocratie représentative est fragile et on
sent bien qu’elle peut basculer dans le pire. Nous devons faire un effort
collectif pour retrouver ce qui fait sens, nos valeurs traditionnelles, y
intégrer des notions nouvelles et faire en sorte que tout le monde ait sa
place, à la condition que les candidats ou ceux nés sur notre sol jouent le jeu
et ne dénigrent pas ce qui existe en parlant systématiquement de racisme, de
discriminations structurelles et d’inégalités voulues, exigent d’obtenir pardon
pour ce qui a été ou est à l’étranger,
veulent des excuses pour ce que nos très anciens aînés ont cru devoir bien faire.
On ne bâtit pas l’avenir en démolissant le passé.
Le citoyen
sait qu’il n’y a pas de solutions miracles en matière d’insécurité, et que
c’est l’affaire de la société en général de mettre en œuvre les moyens qui
s’adaptent aux nouveaux comportements. Oui je n’hésite pas à l’écrire :
c’est à la société d’adapter les outils juridiques et autres supports
techniques pour faire face aux nouvelles menaces, car si l’on attend que le
délinquant potentiel attiré par les profits faciles, ou en proie à ses pulsions
morbides qu’aucun spécialiste médical ne décèle, décide de bon gré de rentrer dans
le rang pour travailler et participer à l’effort comme tout un chacun ou
devenir un homme-femme lambda, on s’égare. Il ne faut pas préparer la dernière
guerre. Il faut prévoir, anticiper et avoir les réponses à ce qui peut
arriver de pire ou de destructeur du lien social. Car au- delà de l’économique et du social,
les problèmes de sécurité et de justice sont des éléments du climat difficile
actuel, de la défiance envers les institutions, du manque d’autorité et du fait
que le citoyen réclame des actes et moins de paroles.
La peine de
mort tient la corde dans les sondages. Qui s’en étonnerait tant la solution est
facile. Mais pour qui et pour quoi ? Quel ministre monterait à la tribune
de l’assemblée nationale pour plaider son retour ? Même pas un ancien
avocat commis d’office ! Mais on comprend les motivations qui conduisent à
cette réponse. Je pense aux crimes de sang qui indignent ; les violences
volontaires aussi chez les jeunes sans vraies raisons et très brutales ;
les attentats qui frappent à l’aveugle mais qui sont signés pour nous
déstabiliser et faire tomber notre civilisation… On est là en légitime défense
et la société a le droit de se défendre et de punir très sévèrement. Ces cas très très graves sont quand même peu
fréquents heureusement même s’il y en a de trop. L’Observatoire national
de la délinquance et des réponses pénales rattaché à l’Inhesj (et début 2021
à I’Ihemi ?) les décrit et donne
des explications. Après un procès qui
doit intervenir le plus rapidement possible et non des années plus tard, la
sanction doit être de la prison ferme, et il faut réfléchir pour
savoir si on maintient les dispositions actuelles d’exécution de la peine puis
de la libération, ou non. Il ne faut jamais priver un coupable d’espoir,
mais on peut en durcir les conditions ? La société ne doit pas appliquer les méthodes
des criminels. Elle ne peut donner la mort : elle doit préserver la vie.
La peine de
mort ne répond pas non plus à ce qui exaspère ou qui cause des dommages de
moindre importance, même si la victime veut avoir sinon vengeance au moins
réparation et que le responsable soit sanctionné. Ainsi le squatteur qui « vole » une
propriété, ce qui révulse tous les propriétaires qui se sont sacrifiés pour
acheter leur bien. Ne faudrait-il pas une loi plus efficace ? Ou celui qui fait des rodéos motorisés dans
les rues : qu’il soit condamné à les nettoyer ! Pour la plupart des
infractions importantes je ne crois pas que les juges soient laxistes. Ils
appliquent la loi que nos parlementaires votent : ceux-ci ont décidé qu’à
moins d’1 an de prison prononcée il fallait trouver une alternative à
l’enfermement. Si les citoyens ne sont plus d’accord, qu’ils fassent changer la
loi et /ou ne votent pas pour des candidats qui ont d’autres raisonnements que
les leurs. Le responsable n’est pas
toujours l’autre. Le citoyen-électeur doit user de ses armes. Ne cédons ni à la
fatalité ni à la facilité.
Il ne
peut y avoir des boucs émissaires. La France a un passé, une histoire qui se
construit tous les jours et des élus verts ont le droit de ne pas aimer le tour
de France cycliste ou l’arbre de nöel. Mais on a aussi le droit d’être en
désaccord avec eux, de ne pas voir le mal partout , de ne pas vouloir de la
société qu’ils prônent , d’être conservateur et libéral puisque l’Etat ne peut
pas tout, ce qui ne veut pas dire ringard, et de penser que la France vient de
loin , que la république qui a fêté l’anniversaire des 150 ans de la 3ème a des
valeurs solides toujours modernes
qu’il faut conforter, et que le consensus est préférable dans la vie quotidienne à de prétendus
progrès qui sont dans la tête de certains exaltés.
La
démocratie participative que beaucoup réclament s’en portera mieux. Les effets
d’annonces ne concernent que ceux qui y croient. En matière de justice soyons
fermes en donnant à nos magistrats les textes et solutions pratiques dont ils
ont besoin. Sans pour autant réchauffer un débat qui n’a pas de sens, sachant
que l’on ne prend pas un marteau pour écraser un virus serait- il le covid-19.
Et rappelons-nous
la formule de John Kennedy : « ne te demande pas ce que ton pays peut
pour toi. Demande- toi ce que tu peux faire pour ton pays ».
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