Un député pour quoi faire ?
Par Christian FREMAUX avocat
honoraire et élu local .
Plutôt que
de discuter sans fin et sans pouvoir conclure puisqu’il suffit d’attendre le 18
juin et le résultat des élections réelles
pour savoir si le président Macron aura une majorité absolue de députés
ce qui lui permettra de faire voter vite les réformes qu’il a promises, dont
certaines par voie d’ordonnances ce qui est prévu dans notre Constitution et
qui n’est donc pas un passage en force ; ou d’espérer que les républicains l’emporteront ce qui obligera
à une cohabitation constructive avec plus de personnalités de droite ce que le
président semble vouloir et qu’il faut donc satisfaire ? ; ou d’imaginer
que le front national ou les insoumis-qui veulent entrer au parlement pour
faire la loi, des règles, des normes ce qui me parait être un oxymore- auront un score qui leur permettra de
s’opposer à tout, il me parait plus important de s’interroger pour savoir à
quoi sert un député alors même que l’on proclame qu’il va falloir réformer son
statut et ses attributions, que leur nombre va être drastiquement réduit de 577
à 300 ou 400 ? ce qui laissera des circonscriptions donc des territoires
vides, alors même que l’on dénonce la désertification administrative ;
l’absence de services publics dans les zones rurales ; le regroupement déjà
fait des anciens cantons dans une entité
administrative départementale plus large et que le citoyen se plaint d’être
seul sans personne neutre de l’Etat à qui se confier, sans commerces de
proximité, de médecins, avec des forces de l’ordre et de secours disséminées et
lointaines, et qu’à part son voisin -si on le fréquente - le citoyen qui n’est
pas urbain n’a pas d’interlocuteur humain représentant le pouvoir sauf son maire et les
conseillers municipaux, bénévoles donc pas toujours disponibles. La région
s’est éloignée, le sous-préfet aux champs a disparu et on en vient à implorer un dialogue pour
avoir un minimum de contacts avec les membres de la poste ou du trésor public
s’ils n’ont pas été supprimés. Les députés ne vont pas échapper au vent de
réformes qui va souffler et masochisme compris ce sont eux qui vont voter leur
nouveau statut moins avantageux que le précédent, pour l’avenir. M. Bayrou
Garde des sceaux revenu du diable
–vauvert de son exil politique qui
aurait pu disparaitre définitivement par
un choix un peu inattendu et un salto arrière
de toute beauté s’est rétabli sur les principes qu’il prônait dans le désert
depuis des années, concocte le projet de
loi de moralisation de la vie publique que nos nouveaux députés vont voter
comme un seul homme : ils vont devenir des cadres je l’espère supérieurs
pour leurs indemnités fiscalisées, et n’auront plus aucun avantage même pas de
retraite ou celui d’avoir l’esprit familial en embauchant un proche ou en
acceptant du bout d’un costume , un
cadeau d’un ami désintéressé. Ils accepteront un C.D.D. de 5 ans renouvelable deux fois puis retourneront à
leurs chères études ou passeront des qualifications comme pour toute activité
manuelle de base et éviter ainsi pole emploi, car être député est parait-
il tout, sauf un métier ? . L’urgence
est à la pureté des comportements et des
habitudes sur le plan moral qui se confondra désormais avec ce qui est légal
tendance 2017 bien sûr car l’éthique est personnelle, à géométrie variable et l’homme a sa part d’ombre que l’on ne peut
gommer. Pour ma part je n’ai pas aimé la période Robespierre qui voyait des suspects
partout surtout chez Mirabeau et
Danton assez proches de l’argent qui
corrompt . On sait comment l’histoire se finit d’autant plus qu’avec big
brother on apprend tout ce que la presse un peu orientée, pour
la bonne cause bien sûr, relaie innocemment. La justice civile en faillite
attendra, ainsi que la justice pénale qui participe à la chaine sécuritaire
dans l’état de droit, alors même que les menaces terroristes sont critiques et
que l’état d’urgence doit être prolongé. Le ministre de la justice a d’autres
priorités : ni les justiciables, ni les magistrats qui ont besoin d’être réconfortés, ni les forces de l’ordre
ne menacent la république. Les députés, si. Est –il insolent de s’interroger sur le rôle du député
à l’heure du numérique, de la justice prédictive, des start-up de la loi et du
droit, et des nouvelles technologies de l’information. Un robot parlementaire
pourrait tourner la clé électronique sur instructions de son député sans que celui –ci doive être
physiquement présent le mardi ou le mercredi pour participer devant la télévision aux questions au gouvernement,
faire savoir de la tête ou par une mimique qu’il est d’accord ou pas avec la
réponse excédée d’un ministre ou du premier ministre, et faire claquer son
pupitre pour manifester sa mauvaise humeur. Les jeux du cirque ou de la cour de récréation ou des bavardages aux journalistes ,des
députés, qui ont tant énervés les citoyens doivent cesser. De la dignité et de
hauteur s’imposent. Le Président Macron
veut donner l’exemple. Il
parait que l’on souhaite consacrer le
travail du député surtout à la
fabrication de la loi, ce qui n’est pas donné à tout le monde. N’est pas
Cambacères, Portalis ou Tronchet, outre Michel Debré, ou Robert Badinter, qui
veut. M.Delevoye autrefois de droite ? Quand il a exercé les plus hautes
fonctions de la république, lui-même expérimenté, humaniste et compétent a sélectionné les
futurs députés 2.o de la république en
marche qui sont souvent des néophytes bien qu’enthousiastes ce qui est une
qualité puisqu’ils croient à l’intérêt
général. Sauront -ils ces jeunes parlementaires-quelques soient leur date de
naissance- avoir suffisamment de recul , de profondeur liée aux coups de la vie,
de réflexion sur les autres sans parti pris ou croyance qui réduisent, et
d’épaisseur, pour écrire des lois générales, courtes, pas bavardes, compréhensibles
par le citoyen, durables, efficaces, et qui ne clivent pas ou sont faites pour
une minorité, sans que l’on ait besoin de décrets qui les expliquent longuement, de
circulaires qui les précisent et de tribunaux qui les interprètent ? Ou faudra-
t -il que l’élaboration de la loi soit confiée à un petit nombre de
parlementaires en respectant la parité et les diverses opinions mais qui ont les compétences, ont été blanchis sous
les fourches caudines du parlement, ont exercé des fonctions publiques et
privées et sont une garantie face à la
censure du conseil constitutionnel et de la haute administration. D’autant plus
que celle-ci va devoir prendre ses responsabilités puisque il y a peu de
ministres et de secrétaires d’Etat et que les directeurs d’administration
centrale vont devoir faire travailler leurs services dans le sens des réformes
quitte à se saborder quelque peu. Le « spoil system » n’est pas loin .L ‘ENA
qui était vouée aux gémonies a repris le pouvoir et va devoir montrer ce
qu’elle sait faire, à la condition que le politique commande vraiment. Tout
ceci ne milite pas en faveur du député dont le rôle ne doit pas se
cantonner à principalement faire la loi
au détriment de son autre devoir
qui est d’être sur un territoire proche des citoyens et des élus locaux sinon
il devient hors sol. Le député doit être en même temps pour
reprendre l’expression du président à la ville et dans les centres urbains, et à la campagne, ou dans les banlieues et en
province.
Même quand
il sera élu à la proportionnelle, voire parachuté , ce qui permettra à toutes les tendances y
compris extrêmes d’être représentées, sur des listes ce qui favoriseraient les manœuvriers
ou les apparatchiks alors que la mort des partis est programmée puisqu’ils ne produisent plus d’idées mais des candidats
ou des cabales, donc pas forcément les meilleurs, le député doit être dédié à
un territoire, attaché à la terre avec de la boue, où vivent les électeurs, ceux qui
s’abstiennent, votent blanc ou contre. Le député a un mandat national, il
incarne la France. Mais il doit avoir la vocation du sacrifice car il est aussi l‘avocat de ceux qui ne font pas
retentir leur voix, travaillent, paient
leurs impôts, et supportent ce qui ne
leur plait pas, tout en restant et vivant là où ils habitent par filiation ou
choix plus ou moins imposés en espérant avoir un emploi digne pour leur famille
, et des conditions environnementales agréables au nom de l’égalité, même si le portable ne passe pas et qu’ils
sont des intermittents d’internet !. Il doit leur parler, leur répondre, nouer des liens amicaux, le
tutoiement réciproque rapproche mais n’est
pas obligatoire, leur manifester de la compassion et de la compréhension, les entendre, les défendre, les aider à titre
personnel s’il le peut, puis transmettre ce qu’on lui a dit et faire remonter
la réalité du terrain au pouvoir qui
isole à paris et que le microcosme parisien ne représente pas.
La Rotonde, le Fouquet’s et Saint germain-des-prés ne sont pas le centre de la
France. Le député doit le savoir et faire la part des choses. Il doit donc
arpenter les communes surtout les petites, discuter des dossiers avec le maire
et les conseillers municipaux ; les conseiller en droit et les tenir
informés des évolutions législatives, des normes y compris européennes ;
être un facilitateur auprès du préfet de
et l’administration locale, s’y retrouver dans les arcanes de la région et de
l’assemblée départementale. ; être un conseil financier pour boucler les
budgets et aider à trouver des financements. On doit le voir dans les manifestations
locales, les brocantes, les fêtes, les commémorations. Il doit user de sa réserve
parlementaire -qu’il ne faut pas jeter avec l’eau du bain, et que l’on peut contrôler
pour répondre au souci de transparence et de non favoritisme- car sans aide des
projets n’aboutissent pas malgré la bonne volonté des responsables. Le député
est donc vital sur un territoire et il ne peut se contenter d’être un homme d’appareil
ou qui fait carrière. Il doit mouiller sa chemise ou son chemisier, et il est
tel Janus un homme ou une femme à double face. Avec un regard tourné vers
paris pour faire de la politique et
soutenir sa majorité sans être un godillot qui marche au son du canon (
oserais-je écrire au son du Macron ?) car il est un homme ou une femme
libre d’abord et exemplaire. Il écrit la loi donc engage sa responsabilité et
le sort des citoyens. Et un autre regard que scrute sa circonscription pour
être utile, le trait d’union avec le citoyen le plus humble qui a besoin de
confiance, qu’on s’occupe de lui, enfin
que l’on privilégie l’humain. Pour la plupart c’est loin paris et
dangereux ! Amis nouveaux députés de la nouvelle génération, les B. to B.,
les modernes, ne raillez pas les plus
anciens qui seront réélus et ont de l’expérience car ils ont servis et sont encore dévoués,
même s’ils n’ont pas la même approche que vous ou une autre philosophie. Nous avons besoin de cohésion et de sérénité
par ces temps troublés. Nous devons être solidaires. Un député ça doit servir
en chair et en os à incarner l’union, le dévouement, la règle commune,
l’intérêt général et la république. Progressistes, autre nom plus «
in » des réformateurs qui allez voter la loi, ne réduisez pas
le député à un hologramme.
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