ACADEMIE DES SCIENCES D’OUTRE-MER. Séance du
vendredi 7 décembre 2018 : « La CPI
et l’Afrique »
par Me Christian FREMAUX avocat honoraire au
barreau de paris.
M. le président de l’académie des sciences d’outre mer,
M. le
secrétaire perpétuel ,
Mesdames et messieurs les académiciens,
Mesdames et
messieurs,
Nous allons évoquer
la justice pénale -celle qui sanctionne, punit, emprisonne ou … acquitte un INDIVIDU et non un groupe, une
entité ou un Etat (sauf pour les crimes d’agression depuis juillet 2018)- , et en particulier la justice pénale internationale représentée par la COUR PENALE INTERNATIONALE
qui siège à La Haye (Pays-Bas).
J’ai commencé à réfléchir au début de
l’année 2018 au sujet à savoir pourquoi
des Etats d’Afrique voulait la quitter en pensant que l’ Afrique était
particulièrement visée par les poursuites. Et que cela devenait injuste. Mais ce stade est dépassé.
J’ai dû progressivement revoir ma copie car
l’actualité évolue chaque jour et il y a
eu au moins un coup de théâtre : M.J.P. Bemba de la RCA qui avait été condamné à 18 ans de prison
comme chef de guerre du Mouvement de libération du Congo et qui avait envoyé en
2002 ses troupes en Centrafrique a été… acquitté en juin dernier sous les hourrahs pour les uns et sifflets pour les autres , les victimes en
particulier. On s’est interrogé sur les motivations de la cour…
Et s’y est ajouté le fait que depuis
quelques semaines divers Etats non
africains- sont passés aussi sous les
fourches caudines de la cour . Les USA
ont « piqué » une colère noire- si j’ose dire- car la cour s’est intéressée
à son cas parmi d’autres comme celui des anglais, des vénézueliens et désormais
des combattants au Yémen. Jusqu’où et jusqu’à qui va-t-on aller ? Les
chancelleries cherchent des parades.
La cour prend une importance
considérable puisque divers Etats dont des puissants la critiquent. Voire
menacent les juges ! Le sujet d’un peu théorique est devenu
majeur car on touche à des hommes et femmes qui représentent des Etats
établis, souvent donneurs de leçons.
Nous allons donc nous interroger pour savoir si la cour est vraiment utile- car elle est décriée comme
toute justice - ; si elle est partiale comme certains pays d’Afrique le soutiennent
en voulant la quitter et en la
récusant ; si elle joue un rôle dans les relations internationales et dans
la bonne gouvernance celle qui permet de prendre le pouvoir par le droit, par les urnes et pas par les armes ; en
un mot si cette justice est « crainte » et est efficace
pour contribuer à la paix dans le monde en établissant des règles qui
pourraient être universelles ou du moins respectées par les individus qui se
battent pour parvenir au pouvoir.
Nous
parlerons implicitement politique c’est -à -dire le gouvernement des hommes avec leurs forces
et leurs faiblesses , et surtout les limites à ne pas dépasser pour arriver ou
conserver le pouvoir. Ou pour y venir : je pense au cas de M.Jean- Pierre
Bemba de R.D.C. qui a la suite de son
acquittement a voulu être candidat aux élections présidentielles dans quelques
jours fin décembre 2018, mais la
commission électorale n’a pas retenu sa candidature…
J’ai donc l’honneur
de me présenter devant vous pour évoquer
la COUR PENALE INTERNATIONALE (C.P.I.)
dans ses relations avec les Etats
africains et avec ses dirigeants surtout
passés et ses hauts cadres militaires -parfois toujours en place ou pas
loin-qui ont participé à des actions qui leur sont reprochées.
Vous voudrez bien prendre mes propos pour ce qu’ils sont,
c’est -à- dire certainement insuffisants car je n’entrerai pas dans les détails
des cas que je vais citer ; partiaux
aussi parce que ce sont les propos d’un avocat qui défend
un cas, une thèse et à qui on ne
demande pas de trouver LA vérité mais de s’en approcher le plus possible.
L’avocat ne rend pas les jugements.
C’est vous qui m’écoutez qui serez les juges et qui aurez une intime
conviction pour vous prononcer sur l’existence de la cour pénale internationale ,sur
son utilité et ses succès , ou sur ce qui lui manque.
C’est un euphémisme de dire d’emblée que justice internationale et dirigeants
africains destitués et / ou poursuivis ne sont pas navigants ensemble sur un
long fleuve tranquille et que les relations sont plutôt tendues .Mais il
faut le reconnaitre : toutes les
procédures ouvertes depuis 2002 dans 8 Etats ont concerné l’Afrique .Certains
n’aiment pas. Personne n’aime d’ailleurs de devoir rendre des comptes.
Mais quand il s’agit de chefs d’Etat ou de chef de guerre,
ou de ceux qui prétendent arriver au pouvoir, ou qui y sont parvenus la menace
judiciaire est impensable : c’est forcément un complot et on leur en veut
pour des raisons incompréhensibles. Eux seuls peuvent guider le peuple pensent -ils
et ils n’ont à rendre des comptes qu’à celui-ci. Mais les peuples ont évolué.
Ils n’acceptent plus la fatalité, le déterminisme, ont une conscience sensible, plus de
connaissances, sont avides de
transparence, et d’égalité quand il
s’agit de s’expliquer : le règne de
l’impunité est terminé.
Avec les médias l’opinion
publique a désormais sur le plan interne un poids considérable, et
l’opinion internationale existe , ne serait -ce qu’à travers les réseaux
sociaux.
Tout est grave sans
hiérarchisation des priorités et sans mesure. On cède à la dictature de
l’émotion et de la transparence. Vaste débat.
La justice n’échappe pas à cette remise en question parce que l’on a besoin d’exemples et de
valeurs auxquels croire, d’objectivité ce qui se construit, et parce que les jugements ou arrêts rendus ont une
portée pour ceux qui ont vécu les drames, pour les pays qui les ont subis et
pour les responsables politiques , militaires ou autres qui les ont commandés,
justifiés, et parfois laissés faire . L’individu aussi existe et ne doit pas
être pris pour une variable d’ajustement.
Ce qui incite les
successeurs ceux qui ont triomphé ou
n’ont pas perdu, à la prudence non pas toujours par conviction mais au moins par raison au-delà de leurs croyances
ou haines; il est préférable de
respecter un minimum de droit, de faire semblant d’écouter les conseils de
modération et de sagesse démocratique plutôt que de comparaitre devant des
juges et finir dans une cellule, voire dans des conditions plus brutales et définitives.
Il a fallu
suppléer à l’IMPUNITE portée comme un étendard par certains qui croyaient
détenir la vérité avec le pouvoir absolu, s’étaient résolus-volontairement ou par « inadvertance » ou
faiblesse sous l’amicale pression de leurs partisans ? à faire le mal pour aboutir à leur bien, celui qu’ils
avaient choisi en toute conscience, et qui ne s’estimaient pas responsables des
effets directs ou collatéraux de leur politique, des ordres qu’ils avaient
donnés ou reçus ou des exactions qu’ils avaient laissées faire ou théorisées.
Nous devons balayer
devant notre porte et ne pas infliger en
permanence des leçons de gouvernance, de
vivre ensemble , de droits de l’homme et de justice aux autres : nous devons
d’abord donner l’exemple, éduquer, faire
savoir les principes en aidant tous ceux
qui nous le demandent ou qui en ont besoin. L’état de droit se construit, la
démocratie aussi, et la justice est au centre des rapports sociaux et humains.
Après ces modestes considérations sur la justice en général et sa
place dans la société avec ses principes, nous allons nous interroger sur la
COUR PENALE INTERNATIONALE. C’est-à-dire parler à
travers un ordre public international, de responsabilité individuelle et
d’un instrument qui permet d’avancer
vers la paix.
La C.P.I. est méconnue
par les particuliers en général,
est approuvée par le plus grand
nombre des Etats qui ont compris ses objectifs
et idéaux, mais décriée bien sûr pour des motifs que l’on va évoquer et
surtout par ceux qui comparaissent
devant elle. On s’interroge sur les intentions
de la C.P.I. : pourquoi s’est -elle intéressée à tel dirigeant plutôt qu’un
autre ? pourquoi avoir choisi tel pays et telle région ? pourquoi qualifier
d’inadmissibles telles ou telles actions alors qu’ils font pire à côté ou sur d’autres continents ?
Si la C.P.I.
n’existait pas est-ce que le monde irait mieux, est-ce que les conflits
seraient moins barbares ? est -ce- qu’il y aurait la paix ? est-ce-que l’Homme -ou la femme parité oblige-,
serait plus raisonnable et fraternel sachant que l’homme est ce qu’il est . L’humanisme doit triompher mais il faut
l’aider à réussir.
Une juridiction internationale a des contradictions, prend
des décisions qui parfois n’arrangent rien sur le terrain même si la justice a
été rendue . Certaines parties furieuses
de tels ou tels jugements veulent
quitter la cour pénale internationale : mais pour aller où ? pour la remplacer
par quoi ? Pour se juger entre soi ce
qui est la plus mauvaise des solutions .
Des principes doivent la guider.
Robert Jackson l’un de ceux qui représentaient le ministère
public au procès de Nuremberg en 1945 a déclaré : « Nous devons
accomplir notre tâche avec détachement et intégrité intellectuelle afin que ce procès représente pour la
postérité la réalisation des aspirations humaines à la justice ».
Nous y sommes dans la
postérité si l’on peut dire. La cour pénale internationale a été créée en 1998
soit 53 ans après la fin du procès de Nuremberg. De 1945 à 1998 il y a eu bien
des conflits, bien des guerres, bien des crimes, bien des victimes.
Avant de parler
stricto sensu de la C.P.I. de ses avantages et défauts, des critiques qui lui
sont adressées, je dois planter le décor et rappeler
ce qui a existé , les grands principes universels, les expériences locales qui se sont terminées,
tout ceci pour comprendre pourquoi la
CPI n’a pas été créée ex-nihilo en 1998
et comment elle s’est appropriée des précédents. Cela expliquera déjà ce qu’est la C.P.I. et ce qu’elle n’est
pas.
J’évoquerai d’où l’on est parti (Nuremberg), la création de
la CPI et ses grands modes de fonctionnement, avec quels juges ; les autres
juridictions internationales avec qui il ne faut pas la confondre ; les
décisions rendues qui concernent des personnalités africaines et les procès en
cours ; et les raisons qui conduisent certains pays africains notamment mais il y a d’autres Etats
mécontents, à être déçus au point de vouloir l’abandonner. Est -ce la justice des vainqueurs
ou d’une entité supérieure la
communauté internationale ? Des critiques sont justes mais ,il faut
expliquer le fonctionnement difficile de la CPI.
I)Le précédent
majeur : Nuremberg et les principes de base.
Il y a eu certes des
tentatives au 19ème siècle
avec la conférence de la Haye en
1899 et 1907 pour tenter de codifier le droit international humanitaire en
fixant les lois et coutumes de guerre et les modalités de règlement des
conflits. Il y a eu aussi les réflexions
de la convention de Genève en 1864 et 1937 .Après
la 1ère guerre mondiale le traité de Versailles dans son article 227 prévoyait la création
d’un tribunal international pour juger l’empereur Guillaume II pour « offense suprême contre la
morale internationale et l’autorité sacrée des traités ». Mais le tribunal
ne vit pas le jour….
L’acte fondateur d’une véritable justice internationale
vient de la seconde guerre mondiale.
Il y a eu le procès
de Nuremberg -justice des
vainqueurs-qui s’est tenu du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946 intenté par
les vainqueurs contre 24 des principaux responsables du 3ème Reich. Ce fut
l’acte I. de la fin de l’impunité. Pour la première fois des responsables
politiques et militaires ont comparu devant une juridiction pénale
internationale pour répondre de leurs actes. Je ne développe pas ce procès que
chacun d’entre vous connait. Je n’en souligne que les apports.
On en retient
la première mise en application de la condamnation pour « crime contre
l’humanité » dont la définition fut la suivante : « l’assassinat,
l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout acte inhumain commis contre toutes les populations civiles
avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs
politiques, raciaux ou religieux lorsque ces actes ou persécutions , qu’ils
aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été
perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime entrant dans la compétence
du tribunal ou en liaison avec ce crime ».[ Eric David. L’actualité juridique
de Nuremberg. Collectif 1988 page 162].
Il a fallu créer un régime particulier de l’administration
de la preuve et les articles 19 et 21 des accords de Londres du 8 août 1945 ont
disposé :
-il y aura une procédure rapide et non formaliste ;
-les faits de notoriété publique seront tenus pour acquis ;
-les documents et rapports officiels des gouvernements des
nations unies y compris ceux dressés par les commissions établies dans les
divers pays alliés seront considérés comme des preuves authentiques. Comme on
le sait il y a dans le monde deux principaux systèmes judiciaires : la « common
law » dans les pays anglo-saxons
qui instaure une procédure accusatoire et qui est un droit empirique, et la « civil
law »c’est-à-dire le système romano-germanique dont le droit
est écrit et codifié dans les autres pays du monde dont la France et les pays francophones qui utilisent la procédure
inquisitoire. Il fut décidé qu’à Nuremberg la procédure serait Accusatoire. Dont les grandes lignes sont les
suivantes :
Après lecture intégrale de l’acte d’accusation,
-Chaque accusé doit déclarer s’il plaide coupable ou non ;
-l’accusation expose
en premier son point de vue ;
-L’accusation et la défense doivent présenter leurs moyens de preuve ;
-les témoins sont entendus ;
-le rôle du président est particulier : en common law dans le système accusatoire il est arbitre, il
contrôle les échanges « objection mon honneur entend -on » :l’instruction
est orale. .
-puis la défense expose ses moyens en premier avant
l’accusation ; dans le système romano-germanique la défense plaide en dernier ;
-les accusés peuvent s’exprimer et faire une déclaration
;
-Enfin le jury se prononce sur la culpabilité et le président sur la peine ;
La cour pénale
internationale de La Haye juge selon le système anglo- saxon et sur les grands principes définis lors du
procès de Nuremberg reconnus par
l’assemblée générale des nations unies
le 11 décembre 1946.
Après Nuremberg il y a eu des créations de justice
internationale
II) D’autres
précédents qu’il ne faut pas confondre
avec d’autres juridictions :
Il va de soi qu’après
1946 d’autres actes de guerre ont eu lieu dans différents pays , que des
puissances ont mené des batailles, et que la barbarie n’a pas disparu par
miracle. A l’ONU en 1968 les crimes contre l’humanité ont été déclarés
imprescriptibles (pour rappel la prescription était de 20 ans en France et en
Allemagne). En 1998 le traité de Rome a
créé la cour pénale internationale , mais existaient avant cette date diverses
juridictions qu’il ne faut pas confondre
avec la CPI ; je vais citer les principales.
A)-D’abord pour
mémoire sur le plan européen, la cour de justice devenue de l’Union européenne créée en 1957 pour les 28 Etats membres moins 1 désormais qui siège à Luxembourg ; et la Cour européenne des droits de
l’homme en fonction depuis 1959 qui
siège auprès du conseil de l’Europe à Strasbourg et qui regroupe actuellement
47 Etats dont la Russie, la Turquie, l’Ukraine, …et qui se prononce sur les
libertés fondamentales après que l’on
ait épuisé tous les recours internes ;
-Ensuite la Cour internationale de justice qui siège aussi à La Haye et qui est une émanation de
l’ONU en l’article 92 de sa charte : c’est l’organe judiciaire principal des
nations unies. C’est un TRIBUNAL MONDIAL
qui règle principalement les différends entre Etats (limites territoriales,
frontières ; interprétation des traités internationaux ; coopération
judiciaire… ) ;
-la cour inter-américaine des droits de l’homme basée à San
José au Costa Rica créée en 1949 qui fait partie du système de protection des
droits de l’homme de l’organisation des Etats américains (OEA) qui sert à
défendre et promouvoir les droits fondamentaux
et les libertés individuelles dans les Amériques.
-La cour AFRICAINE
des droits de l’homme et des peuples. Elle a pour mission de compléter le
mandat de protection de la commission africaine des droits de l’homme et des peuples. Elle a son siège permanent à
Arusha en Tanzanie.Elle a été créée en
1998 au Burkina-faso et est entrée en fonction en 2004 . Elle est présidée par le juge
Sylvain ORE originaire de côte d’ivoire , ancien avocat membre depuis 2010 pour
6 ans et élu président en 2016 pour un mandat de deux ans. Sa vision est
d’installer de façon pérenne la culture
des droits de l’homme. Il y a 11 juges. Actuellement plus d’un vingtaine d’Etats sur les 54 Etats
membres ont ratifié le protocole de création.
Elle a vocation à régler des problèmes internes.
Le président ORÈ a déclaré
le 30 janvier 2017 que la cour africaine ne pouvait remplacer la
CPI car elle a un mandat pour les droits
de l’homme exclusivement mais pas en matière criminelle. Il a précisé « nous avons les mêmes
compétences à valeur comparative que la cour européenne des droits de l’homme
».
- La Cédéao communauté économique des Etats de l’Afrique
de l’ouest est née du traité de Lagos du 28 Mai 1975 : le 6 juillet 1991 a
été créée la cour de justice des communautés qui est entrée en vigueur le 5 novembre 1996. Son siège est à Abuja au Nigéria mais elle
peut se transformer en juridiction foraine. Elle n’est fonctionnelle que depuis le 22 août 2002. Elle est composée
de 7 juges indépendants désignés par l’autorité
des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO. Elle a pour objectifs
notamment de promouvoir la coopération et l’intégration, d’une union économique pour élever le niveau
de vie des peuples et de contribuer au progrès et au développement du continent
africain.
La cour peut être saisie par des requérants INDIVIDUELS. Sa
compétence concerne la promotion et la protection des droits de l’homme selon
la charte africaine de 1981. Elle doit prendre en compte aussi les TRADITIONS
JURIDIQUES AFRICAINES pour assurer une conception extensive des droits de
l’homme. Une des premières affaires
concernait l’esclavage et la vente d’une jeune fille comme domestique, concubine et esclave sexuelle.
Il faut épuiser les recours internes. (comme pour la CEDH).Elle a considéré que
l’Etat nigérien n’avait pas pris toutes les législations nécessaires pour
éradiquer l’esclavage et que sa responsabilité était engagée devant la
CJCEDEAO. La victime a obtenu 10 millions de frs CFA.
LE JUGE AFRICAIN EST
DONC ENTRE DANS L’HISTOIRE par cet arrêt Mme Hadijatou Mani Koraou c/ le Niger.
[lire l’article de Mme Delphine d’ALLIVY KELLY dans combats pour les droits de
l’homme]
B) Enfin il ne faut
pas confondre la CPI avec des juridictions pénales internationales AD HOC qui ont
été créées dans le cadre des Nations Unies à la suite de violations flagrantes
du droit humanitaire à partie des années 1990 :
-Les tribunaux spéciaux au timor oriental ou pour le Cambodge en 2006
pour juger les crimes des khmers rouges, ou pour la Sierra Leone en 2002 pour
les crimes pendant la guerre civile ; ou
pour le Liban en 2009 après l’assassinat
de Rafiq Hariri ;
Et deux juridictions plus connues :
1°-Le tribunal
international pour l’ex-Yougoslavie (TPI .Y) a été créé par la résolution 827
en 1993, la Yougoslavie étant en plein conflit et les casques bleus ne
pouvant pas intervenir : il a intéressé les européens notamment parce que les
Balkans sont proches. Il a examiné les faits commis après le 1er janvier 1991. Il a fermé ses portes le 31 décembre 2017,
après 24 ans d’existence. . Le TPI.Y fut le
premier tribunal à inculper un chef d’Etat en exercice le serbe Slobodan
Milosevic : arrêté en 2001 il est mort en détention . Il y eu des coups de
théâtre dont des suicides : le dernier a eu lieu en direct devant les médias.
Le 27 novembre 2017 le croate de Bosnie Slobodan Praljak a avalé une fiole de
poison au moment où on lui annonçait qu’il était condamné à 20 ans de prison.
Il est mort à l’hôpital. Le TPI.Y aura prononcé 161 inculpations et condamné 83
personnes . et prononcé 19 acquittements.
.
2°-Le TPI.R. pour
Rwanda, a été créé par la résolution 995 de l’ONU en 1995 à la suite du génocide de 1994 qui
aurait fait au moins 800 000 victimes, et s’est tenu à Arusha en Tanzanie. Il a
rendu son dernier jugement le 14 décembre 2015 contre l’ancienne ministre de la
famille et de la promotion féminine Mme Pauline Nyiramasuhuko qui a été
condamnée à 47 ans d’emprisonnement pour génocide.
Le TPI.R aura mis en accusation 93 personnes : 61 d’entre
elles ont été condamnées et 14 ont été acquittées .Il a fermé ses portes en
décembre 2015.
Les 15 membres du conseil de sécurité ont reconnu «
l’importante contribution du TPI. R au processus de réconciliation nationale ,
à la restauration de la paix et de la sécurité ainsi qu’à la lutte contre
l’impunité et au développement d’une justice pénale internationale, en
particulier en ce qui concerne le crime
de génocide ».Il faut savoir que pour
les faits perpétrés au Rwanda une autre
juridiction interne s’est prononcée en parallèle : les Gaçaça ,juridictions
populaires qui ont jugé des milliers de personnes pour les vols, les viols, les
meurtres.
3) j’ajoute ce qui est
dans l’ACTUALITE les chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens , compromis passé entre le
gouvernement cambodgien et les nations unies pour juger des anciens dirigeants
du régime Khmers rouges. Les toujours vivants
ont été jugés pour génocide. « Douch »
l’ancien chef du centre de rétention et de torture le camp 21 avait été condamné en 2012 à la prison à vie. Nuon Chea 92 ans, ancien n°2 et Khieu Samphan 87
ans , ancien chef de l’Etat du kampuchéa
démocratique ont été condamnés le 18 novembre 2018 à la réclusion
à perpétuité pour génocide (de l’ethnie
cham pour le premier, et de la minorité vietnamienne pour le second : c’étaient des ennemis du peuple… ).
Une critique était récurrente : celui qui gagne et est au
pouvoir essaie de conforter sa prise de
pouvoir en discréditant l’adversaire, pour faire oublier ce que lui n’a pas fait de bien. On ne le poursuit pas. C’est
le cri fameux : « mort aux vaincus ».
Il fallait donc agir
de façon plus large, ce qui a entrainé des choix pour commencer, donc ce qui a suscité
aussitôt des protestations.
Certains Etats se sont sentis « discriminés » pour prendre
un mot à la mode dans tous les domaines,
ou « moins égaux » que d’autres devant la justice internationale : on va
le voir dans le domaine criminel qui est de la compétence exclusive de la Cour
pénale internationale ce qui a entrainé le courroux voire la fureur de
quelques Etats en particulier en Afrique.
III) La cour
pénale internationale ou CPI.
A ) La création
Il fallait cesser de créer des juridictions ad hoc à
vocation locale ou régionale.
C’est un événement sans équivalent dans l’histoire de
l’humanité : une juridiction permanente à vocation universelle qui veut établir
la paix par le droit.
Il s’agit de
combattre l’IMMUNITE/IMPUNITE dans tous ses aspects.
C’est le résultat d’un conférence diplomatique, donc de
l’élaboration d’un compromis.
Le traité de Rome a
été signé le 17 juillet 1998. Il est entré en vigueur après sa ratification par
60 Etats le 1er juillet 2002. La compétence de la cour n’étant pas
rétroactive, elle traite des crimes
commis après le 1er juillet 2002.Son siège est à La Haye. Depuis le 4 mars
2016, 123 Etats sur les 193 Etats
membres de l’ONU ont ratifié le statut de Rome et acceptent l’autorité de la
cour.
On est dans le cœur de l’horreur à savoir les CRIMES, individuels
ou de masse, de toute nature, par tous moyens, quelqu’en soit la raison.
Les sanctions peuvent être très sévères : une peine
maximale de 30 ans voire la prison à perpétuité « si l’extrême gravité du
crime et la situation personnelle du condamné le justifient » dans une
cellule d’une prison se tenant dans un
Etat désigné par la cour sur une liste de pays candidats. Les condamnés sont condamnés à vivre et à
méditer entre quatre murs sur leurs
actes .La justice ne doit jamais être la violence. La justice internationale
encore moins : elle doit être juste, équilibrée, respectueuse de la vie ,
et exemplaire pour les vivants et pour l’avenir.
Des Etats parfois jouent au chat et à la souris : ils
ont signé le traité de Rome mais ne l’ont PAS RATIFIE : on peut citer les
Etats-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde.
B) Sur la compétence
et le fonctionnement :
UNE REGLE EST
FONDAMENTALE : la CPI ne juge que des individus (alors que la cour
internationale de justice ne juge que des Etats). Sauf désormais pour les
crimes d’agression. On attend un futur cas ? De ce point de vue elle a des
similitudes avec la cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg qui est
saisie par des individus, mais elle condamne les Etats.
Les faits doivent avoir été commis APRES le 1er
juillet 2002.
LE TERRORISME n’est
pas pour l’instant inclut dans la compétence de la cour .En 1998 il avait été exclu car on ne s’est pas mis d’accord sur
sa définition. Depuis 2014 on réfléchit à l’introduire dans les compétences de
la cour à travers la notion de crime contre l’humanité. De même pour les crimes écologiques, contre la
nature…
La cour ne peut en principe exercer sa compétence DE SA PROPRE
INITIATIVE que dans trois cas :
1)-si la personne mise en accusation - est un national d’un
Etat membre ou
2-) si le crime supposé est commis sur le territoire d’un
Etat membre ;
ou qui accepte la compétence de la cour.
3)-ou si le dossier lui est transmis par une résolution du
conseil de sécurité de l’ONU et qui a saisi le procureur en vertu du chapitre
VII de la charte des nations unies (pas de limite dans ce cas de compétence
rationae personae). Mais on connait l’existence … du droit de veto.
Elle peut être SAISIE
PAR UN ETAT MEMBRE qui lui défère une situation sur son territoire :
par exemple l’Ouganda en 2004 a déféré au procureur le cas de l’armée de résistance
du seigneur ; et la république démocratique du Congo l’a saisi du cas de
M.Thomas Lubanga notamment pour enrôlement d’enfants…
La CPI est composée de 4 organes :
1-la présidence avec
un président et 2 vices présidents élus pour un mandat renouvelable de 3
ans ;
2- les chambres(3) composées de juges élus par les Etats
parties pour un mandat de 3,6,ou 9 ans ;
*la chambre préliminaire qui étudie la validité des requêtes
et autorise ou non le début d’une procédure d’enquête pouvant déboucher sur un
procès.
*la chambre de première instance .
*la chambre d’appel.
3- le procureur élu pour 9 ans qui a un pouvoir
discrétionnaire pour ouvrir une enquête
de son propre chef ou sur demande du conseil de sécurité de l’ONU ;mais
après avoir été autorisé par la chambre
préliminaire.
4- le greffe surtout chargé de la gestion des preuves.
Le procureur de la CPI doit obtenir une autorisation de la
chambre préliminaire pour ouvrir une enquête.
Ce qui le distingue du procureur des TPI ad hoc qui décidait
seul de l’opportunité d’ouvrir une enquête.
La cour juge de façon
subsidiaire, en cas de défaillance de l’Etat compétent pour juger le criminel.
En effet le pouvoir de juger est de la SOUVERAINETE des Etats.
La cour a un budget d’environ 147,5 millions de dollars, et
actuellement des Etats voudraient réduire la voilure, tout en demandant à ce
que la cour étende ses investigations et juge plus ! Chacun d’entre nous
connait cette quadrature du cercle et la volonté d’économies partout et pour
tout.
Il y a environ 800 personnels.
Depuis son élection
pour 3 ans le 11 mars 2018, le président
actuel est M. Chile Eboe-Osugi qui vient du Nigéria.
Le juge thèque robert Fremr est 1er
vice-président, et le juge français
M.Marc Perrin de Brimchambault est 2ème vice président.
La procureure en
fonction - après la célèbre
magistrate suisse Mme Carla Del
ponte qui a démissionné car l’enquête sur les crimes en Syrie depuis 2011 ne débouchait pas sur des
poursuites par manque de volonté politique à l’ONU - est Mme Fatou Bensouda ancienne avocate qui vient de Gambie.
La création de la CPI
a été notamment une réponse judiciaire de la communauté internationale à la loi belge du 16 juin 1993 qui avait
donné « compétence universelle » à sa justice en matière de crimes
internationaux et de crimes contre l’humanité et ce, QUELLE QUE SOIT LA
NATIONALITE DE LA VICTIME OU DU CRIMINEL. Ce qui a posé quelques problèmes
diplomatiques (comme la plainte contre Georges Bush). Prudemment la Belgique a abrogé
sa loi sur la compétence universelle le 1er aout 2003.
La CPI est désormais seule compétente pour 4 catégories
d’infraction qui constituent les crimes les plus graves à savoir :
*Les crimes contre l’humanité ;
*Les crimes de guerre ;
*Les crimes d’agression ; ce sont les crimes commis par
les personnes ou Etats ayant préparé, accompli ou promu un conflit armé visant
à déstabiliser un ou plusieurs Etats souverains (invasion, occupation
militaire, annexion par la force, blocus des ports ou des côtes…).
*Les génocides ;
Elle prononce aussi des dommages intérêts pour les victimes.
La cour ne peut
intervenir que si le crime a été commis sur le territoire d’un Etat membre
ayant signé la convention ou si le mis en cause est un ressortissant de l’un de
ces Etats. ET le conseil de
sécurité peut lui donner compétence, y
compris de façon exceptionnelle lorsqu’un Etat qui n’a pas ratifié la
convention commet des violations graves : exemple le Darfour en 2005.Ou encore
par un examen préliminaire ouvert le 18 septembre 2018, sur
les déportations de rohingyas en Birmanie, avec des meurtres, des violences
sexuelles, des destructions, du pilage, des disparitions…. La Birmanie n’a pas
signé le traité de Rome, mais les
déportations ont eu lieu par le Bangladesh qui
est signataire.
La cour possède 3 chambres de première instance qui jugent
des affaires validées par la chambre
préliminaire saisie par le procureur, et
une chambre d’appel.
18 (dix huit) juges sont élus, comme les procureurs, par l’assemblée des Etats parties qui se réunit au moins une fois par an à La
HAYE pour discuter du budget, de la procédure .Chaque Etat partie dispose d’une (1) voix et on
recherche le consensus.
Les candidats sont présentés par leur propre Etat et je
laisse les diplomates présents expliquer
s’ils le veulent, comment se passent les candidatures, et l’élection. Chaque
Etat cherche à faire nommer un juge car ces fonctions sont prestigieuses et
honorent sa nation.
Pour mémoire les
anciens juges français ont été, en 2003 M. Claude Jorda , procureur général
près la cour d’appel de paris et président honoraire de la cour nationale du
droit d’asile, et en 2008 M.Bruno Cotte
désormais président honoraire de la chambre criminelle de la cour de
cassation .
Le fonctionnement de
cette juridiction répond à ce que j’ai expliqué en matière de procédure : c’est
la common law qui s’applique , le droit anglo-saxon et son aspect pragmatique,
ce qui suscite évidemment quelques critiques.
Pour la cour il
s’agit de participer à la LUTTE MONDIALE
visant à mettre un terme à l’impunité, à faire en sorte que chacun
agisse de façon raisonnable et humaine, à faire condamner les criminels quelques
soient leur niveau politique, militaire ou d’idéologie, d’éviter ainsi qu’il y
a ait encore des crimes, ou que des actes répréhensibles soient renouvelés, ou que l’on invente de
nouveaux prétextes ou moyens pour faire souffrir les populations ou des êtres
humains en général. Tout le monde est évidemment d’accord avec cette pétition
de principe.
Il s’agit de bannir la violence sous toutes ses formes et de
punir celui qui s’y livre personnellement ou donne des ordres.
Le procès devant la cour répond à la notion d’équité ; de
débats contradictoires ; d’une accusation indépendante ; les victimes sont
entendues et les témoins protégés ; la cour interroge les communautés qui ont
subi les crimes…
Il y a 6 bureaux extérieurs qui permettent de relayer les informations,
faire entendre les témoins, et permettre aux juges ce leur faciliter le travail
sur le terrain :
-kinshasa et Bunia (république démocratique du congo ;
-kampala (ouganda) ;
-Bangui (république centrafricaine) ;
-Nairobi (kenya) ;
-Abidjan-cote d’ivoire) .
C) Où en est-on ? Et pourquoi des pays africains sont-
ils mécontents ?
La cour a été saisie à ce jour de 25 dossiers dont certains comportaient plus
d’un suspect .31 mandats d’arrêt ont été délivrés et grâce à la coopération des Etats 7
personnes sont en détention au quartier
pénitentiaire de la CPI à la Haye dans
la prison de Scheveningen à la date du 20 novembre 2018.
Sont actuellement
détenus 7 personnalités au 3 décembre 2018 :
-M.dominic Ongwen pour l’ouganda ;
il était commandant présumé de la brigade Sinia de l’Ars pour des faits de 2003 et 2004 ;
-M Bosco Ntaganda pour la
R.D.C. : il était ancien chef d’état major présumé des forces
patriotiques pour le libération du congo,
et a utilisé des enfants soldats ;
-(M.jean pierre Bemba de la RDC a été libéré en juin
dernier pour les crimes mais condamné pour … subornation de témoins );
-M.laurent Gbagbo ( qui a formé une demande de libération) et
charles Blé Goudé, de la Côte d’ivoire ;
- pour le Mali, M.Ahmad
el faqi al mahdi -qui a plaidé coupable
de destruction de bâtiments à Tombouctou. Il a été condamné à 9ans. Et Al hassan ag abdoul suspecté de crimes de guerre et contre
l’humanité à Tombouctou en 2012 et 2013-
- et pour la
Centrafique M.Alfred Yakaton Rhombot.
Il y a eu 9 citations à comparaitre qui ont toutes été
respectées ( les 9 personnes se sont rendues devant la cour). Et 33 mandats
d’arrêt délivrés avec 15 suspects en
fuite. Les juges avaient rendu début 2018 ,9 condamnations et 1 acquittement. 26
affaires ont été ouvertes dont 6 sont actuellement au stade du procès , 1 au
stade de l’appel, 3 en phase de
réparations.
Parmi les dossiers ouverts on trouve des enquêtes en
Centrafrique ; au Kenya
(violences post électorales de 2007-2008 ; en Lybie ( pour des faits
depuis le 15 Février 2011 ; en
Géorgie pour des crimes en Ossétie du sud ; au Burundi ; en Ouganda contre les responsables de
l’armée de résistance du seigneur, qui sont en fuite…et désormais le Yemen (non signataire mais avec des
mercenaires sur son territoire).
PRINCIPALES CRITIQUES CONTRE LA COUR.
*On reproche à la
cour sa lenteur, ce qui est vrai, mais qu’en serait-il si elle était expéditive
?
*On lui reproche aussi
d’être inefficace : c’est un
reproche injuste car elle ne peut agir qu’avec la coopération des Etats et
certains se hâtent lentement ;
*On lui reproche une
procédure tatillonne ce qui est la caractéristique de la procédure
accusatoire car on n’envoie pas aux
galères un individu même odieux sur un coup de tête ou pour satisfaire quelques
uns . Mais il y a aussi des raisons
techniques :
il y a des juges de
culture juridique différente qui doivent s’adapter , car la procédure anglo-saxonne ne fait pas appel à un juge d’instruction , et
est accusatoire c’est-à-dire que tout se
passe à l’audience avec des débats contradictoires : avec des faits à vérifier sans pouvoir aller sur le
terrain : ces lenteurs sont cependant une protection contre l’arbitraire pour les personnes poursuivies. Le respect de
la procédure est une garantie pour un justiciable et conforte les droits de la
défense ;
*on s’offusque de
manœuvres : des Etats signataires ont amendé leurs codes pénaux pour
s’assurer qu’aucun de leur ressortissant ne se retrouve dans le box des accusés
car la cour n’intervient que si un Etat refuse de juger les auteurs de crimes
définis par le traité de Rome ;
*On lui reproche
d’être discriminatoire surtout avec les Etats africains :
c’est vrai que dans
les premières enquêtes le continent africain a été « servi » :
Ouganda, république démocratique du Congo, Centrafrique, Soudan, Kenya, Lybie ,
Côte d’ivoire et Mali. Mais s’il n’y avait pas de plaintes pour des faits
avérés, si ces pays respectaient un minimum de règles de bonne gouvernance, si
la grande délinquance ne se confondait pas parfois avec la constitution de butins pour faire la guerre, et arriver ou se maintenir au
pouvoir, si les problèmes religieux
n’étaient pas au centre des débats, si les actes de guerre
ne devenaient pas des massacres…… la CPI n’aurait pas à enquêter. Mais avec des
si tout va bien.
Et l’afrique n’est plus seule visée on va le voir avec l’actualité récente ou moins
récente. Par exemple des Etats proches du Vénezuela ont demandé une enquête sur
le régime de M.Maduro…
*On lui reproche ses
difficultés de coopération avec les
Etats :
Mais elle n’en est
pas responsable. Les politiques doivent donner aux juges les moyens d’exercer
leurs fonctions.
Un exemple récent
donne de l’espoir : la Centrafrique a remis à la CPI le 20 novembre 2018 l’ex-chef de milices anti-
balaka auto-proclamées d’autodéfense soupçonné d’avoir mené des campagnes
d’exactions contre des populations musulmanes , d’avoir utilisé des enfants
comme combattants et d’avoir commis des crimes de guerre, à partir de 2012. Il
s’agit de M.alfred Yekatom Rombhot simple caporal chef mais dit colonel « rambo»
qui s’était fait élire député et surtout
remarquer en tirant avec son arme dans
l’hémicycle !. La centrafrique a fait droit au mandat d’arrêt émis par la
Cpi.
*enfin le terrorisme
même pris sous l’angle de crime contre l’humanité ne fait pas partie de ses
compétences. On en discute.
D )Quels sont les pays qui mènent la fronde et
pourquoi veulent ils se retirer de la CPI ?
Le Burundi,(dont
le président pierre Nkurunziza est accusé personnellement de violation des droits de l’homme) mais où il
est impossible de mener une enquête sur des faits de violences avec le
déplacement de plus de 400 000 personnes , la mort de plus de 1000
personnes et des détentions illégales commis pendant que ce pays était membre
de 2004 à 2015.
l’Afrique du sud (qui soutient que l’adhésion au traité de Rome est
en contradiction avec ses engagements en terme d’immunité diplomatique :
les autorités sud- africaines ont refusé d’arrêter le président soudanais Omar el-bachir qui fait l’objet d’un mandat
d’arrêt de la CPI pour génocide en rappelant que le Soudan n’est pas signataire
du statut de Rome) ;
et la Gambie(qui
demande à ce que les pays occidentaux soient poursuivis pour la mort de
milliers de migrants)qui avait décidé de quitter la CPI et avait engagé les formalités pour se retirer du statut
de Rome. Avec son nouveau président le processus est suspendu. Rappelons que la
procureure de CPI est gambienne !
Au 20 septembre 2018
seuls 2 Etats ont mis leur menace à exécution : le Burundi et les
Philippines (procédure de retrait en
cours).
Les dirigeants africains considèrent cependant qu’il y a une sorte de persécution
en ce qui les concerne,
et que la CPI a une attitude néocolonialiste. Ils ont même envisagé un
retrait global, qui n’a pas eu lieu heureusement.
Mais il y a un vrai
malaise.
La CPI ne peut se
prononcer que sur des cas qui correspondent à sa compétence. Des nations comme
la Russie, la Chine, l’inde, les Etats-unis, la totalité des pays arabes et Israel n’ont pas ratifié le traité. Ils n’ont
donc pas à rendre des comptes. La CPI s’intéresse donc actuellement aux Etats sur le territoire
desquels elle a compétence dont…l’Afrique.
La CPI ne serait donc pas un tribunal à vocation
universelle.
En réalité tous les pays africains ne mènent pas la fronde
mais c’est le cas de certains dirigeants plus ou moins concernés par des poursuites
personnelles . Il n’y a pas de « chasse raciale » comme le soutient
un premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn ; les victimes ne sont en outre pas d’accord avec le retrait car
comment vont-elles avoir justice ?
Une des critiques
récurrentes est de soutenir que les africains possèdent des juridictions INTERNES qui leur permettent de juger
les criminels de guerre ou les coupables de génocide voire de crimes contre
l’humanité.
Est-ce une objection recevable mon honneur ? Examinons
quelques exemples.
IV) Les justices internes peuvent- elles
suppléer la CPI ?
En Egypte le 27 décembre 2017 , 15 personnes ont été pendues
pour des faits de terrorisme. C’est radical, et une justice expéditive. Faut-il
l’imiter ?
En Côte d’ivoire l’ex-ministre de Laurent Gbagbo M.Hubert
Oulaye a été condamné le 26 décembre 2017 à 20 ans de prison par la cour
d’assises d’Abidjan pour l’assassinat de 18 personnes dont 7 casques bleus.
AUCUN MANDAT DE DEPOT n’a été prononcé : il est donc resté libre. L’Etat
de Côte d’ivoire qui réclamait 20 milliards de francs CFA contre M.Oulaye et son co-accusé l’ancien ministre Dano Djedje … a été
débouté. La justice ivoirienne est passée.
Mme Simone Gbagbo a
été acquittée par la cour d’assises pour crime contre l’humanité. Mais elle
continuait de purger une peine de 20 ans prononcée en 2015 pour atteinte à la
sûreté de l’Etat.. jusqu’à l’amnistie prononcée récemment par le président Ouattara ! Elle est
donc libre. Et la CPI veut l’entendre !
Son mari M.Laurent Gbagbo a été condamné le 18 janvier
2018 par la cour d’assises d’Abidjan à
20 ans de prison pour le braquage de la
banque centrale des Etats de l’afrique de l’Ouest, et à 15 ans pour
complot contre le régime du président
Alassane Ouatarra. Sans mandat de dépôt mais en y ajoutant 329 millions de
francs Cfa à payer à la partie civile.
Notons qu’en Côte d’ivoire
les rivalités politiques ont repris et qu’à deux ans de la
présidentielle (2020) où M.Alassane Ouatara ne doit pas se présenter,
les élections locales du 13
octobre 2018 ont été marquées par des violences (4 morts), et un retour aux anciennes divisions et
pratiques (fraudes).
Hissène Habré
ancien président du Tchad de 1982 à 1990 a été arrêté en 1993 au Sénégal ;
il a été condamné à Dakar en appel en
avril 2017 par un tribunal spécial à la
prison à perpétuité pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, tortures
et viols ,et à 82 milliards de francs CFA pour les victimes.
La CPI ne pouvait le
juger car les faits reprochés étaient antérieurs à la création de la cour.
Rappelons que le premier dirigeant africain à comparaitre devant une
juridiction internationale fut Charles Taylor 22ème président de la
république du Libéria qui a été condamné par le tribunal spécial pour la Sierra
Leone à 5 0 ans de prison. Il a fait
appel.
Enfin d’autres
anciens dirigeants sont recherchés,
poursuivis ou convoqués :inutile d’en faire la liste… La justice interne est
nécessaire mais elle n’est pas suffisante. Elle ne règle pas les problèmes de
fond et laisse parfois des goûts de revanche.
Cela n’est pas spécifique à l’Afrique bien sûr : la
justice peut être instrumentalisée .
N’est- ce pas le magistrat
Antoine Séguier alors 1er président de la cour d’appel
de Paris qui déclara que la justice « rend des arrêts et non des
services » ce qui contraria fortement Charles X qui avait du mal à museler
la presse en 1828.
La justice a une fonction fondamentale, structurante des démocraties et ne doit pas
être suspectée, comme la femme de César.
Elle participe à l’état de droit, qui est avec des élections
libres et la séparation des pouvoirs cher à Montesquieu qui prône une
gouvernance avec des contre- pouvoirs, à
l’exercice de la démocratie, à la protection des libertés individuelles et
collectives ce qui implique la RESPONSABILITE de chacun quelque soit son niveau
dans la société. Et quand on a le pouvoir , ce niveau d’EXIGENCE est encore
plus affirmé. Le corollaire du pouvoir est de devoir rendre des comptes.
L’impunité n’est plus acceptée ou tolérée.
La justice interne dépend de sa législation qui parfois date,
du moment, des circonstances, de la
volonté d’oubli ou non, de la nécessaire réconciliation qui peut passer par de
l’indulgence ou autre.
Elle ne suffit donc pas, et ne peut suppléer une justice
internationale qui n’est évidemment pas la panacée.
V )Les faiblesses
de la CPI et les lueurs d’espoir ; LES PROTESTATIONS ;
[ lire oumarou NAREY agrégé de droit public à Niamey dans Afrilex revue d’étude et de recherche sur
le droit et l’administration dans les pays d’Afrique Université Montesquieu
Bordeaux IV].
Je les ai énumérées.
Son rendement est faible : En 2016 il y avait eu seulement quatre jugements dont 3 condamnations .
6 suspects ont
bénéficié d’un non-lieu. Les victimes sont peu considérées bien qu’elles
peuvent participer au procès et la section d’aide aux victimes et témoins
n’est pas très performante.
La CPI essaie d’
étendre son champ d’action :
On lui suggère de
s’intéresser aux troupes du président Ouatarra et d’aller voir ailleurs :
en janvier 2016 elle a décidé d’ouvrir une enquête sur les crimes qui auraient
été commis autour de l’Ossétie du sud, en Géorgie entre le 1er
juillet et le 10 octobre 2008. Qu’en est- il de l’Irak et des soldats
britanniques ? Que fait- on par exemple pour Gaza et les prisonniers palestiniens la Palestine
étant partie au statut. On a ajouté à sa
compétence les crimes d’agression depuis juillet 2018.
A ce sujet la France
a refusé de donner son accord car nous avons des troupes qui interviennent sur
des terrains extérieurs et l’on n’a pas défini le crime d’agression.
La cour a
entendu les demandes ce qui crée des polémiques actuellement :
*Concernant la Lybie le 15 août 2017 la CPI a délivré un
mandat d’arrêt international contre le capitaine Mahmoud Al Warfalli pour des
meurtres commis entre le 3 juin et le 27 juillet 2017 sur 33 personnes dont des
prisonniers sur Benghazi. Ce militaire se battait aux côtés du Maréchal Haftar
(reçu à l’Elysée avec le 1er
ministre lybien Al- sarraj.) ;
*Lundi 4 décembre 2017, la procureure de la CPI a fait
savoir qu’il y avait une « base raisonnable » de croire que des
soldats britanniques en Irak ont commis
des crimes de guerre après l’invasion américaine en 2002 .Mme Bensouda a ouvert
en 2014 un examen préliminaire à une enquête ;
*En décembre 2017 encore la procureure a demandé aux juges
l’autorisation d’ouvrir une enquête sur les crimes commis en Afghanistan y compris ceux des forces américaines et
la CIA ; le conseiller à la sécurité nationale du président Donald
Trump, M. John Bolton l’a très mal pris
et a menacé récemment de
sanctions judiciaires les juges et les procureurs de la CPI , et de leur
interdire l’entrée sur le territoire des USA ,
si une enquête était menée contre les militaires américains . Les
USA ne reconnaissent aucune autre autorité que… la constitution américaine a
affirmé M.Bolton début septembre 2018 d’un ton martial… ;
* elle veut enquêter aussi sur les crimes commis en Palestine
après l’adhésion de l’Autorité palestinienne au traité de la cour début 2015.
*Enfin la CPI avait
ouvert une enquête préliminaire en 2014 en Ukraine sur les crimes commis avant et pendant la
chute de l’ancien président Viktor Ianoukovitch.
.
Bref que l’on cesse d’avoir les regards dirigés vers
l’Afrique . 6 pays africains proposent
la mise en place d’un chambre pénale africaine des droits de
l’homme [déclaration du juge Marc-perrin de Brichambault] . Et que l’on évite de viser des présidents en exercice ( comme
M.Omar El bachir du Soudan, ou Le président Uhuru muigai kenyatta du Kenya pour
lequel le procureur a retiré toutes les charges en 2014) ce qui déstabiliserait
les Etats concernés, sape leur
souveraineté, et menace leur stabilité [déclaration de l’Union Africaine ] .
L’autre rôle de la cour :
Il ne faut pas
oublier non plus que la CPI a été considérée aussi comme une « cour de sécurité » [Jens
Ohilin Boston 2009] c’est-à-dire un
tribunal qui ne remplit pas seulement une fonction judiciaire. Elle est également dotée d’une finalité pacificatrice.
Les crimes qui justifient sa compétence
menacent la paix, la sécurité et le bien- être du monde [préambule du
traité de Rome].
La CPI traduit une judiciarisation des relations
internationales pour aboutir à la paix.
La cour évolue
comme le démontre le procès intenté à Ahmad-al-Madhi ressortissant malien qui s’est livré à la destruction des mausolées
à Tombouctou en 2012.C’est un
atteinte majeure à des BIENS
CULTURELS qui a été considérée comme crime de guerre. Il a été condamné à 9
ans d’emprisonnement. Il a plaidé coupable ce qui explique la rapidité de la procédure.
La justice internationale doit compter sur la coopération
des Etats et la réalité de la politique internationale. Il n’y a pas encore de
vraie jurisprudence. .
VI) Le casse tête
de la création d’un corpus de principes : L’apport du droit interne au droit international.
Les juges
réfléchissent avec leurs connaissances internes, qu’ils utilisent en les
revisitant, avec les textes du statut de 1998 pour trouver des solutions
juridiques innovantes. Cela conduit parfois à des insomnies…
A ce sujet de
l’apport du droit interne dans le droit
international , je ne peux faire mieux que vous inviter à lire l’article de M. le professeur agrégé de droit public de l’université de Bordeaux
entre autres fonctions éminentes, et membre de l’académie des sciences
d’outremer M.Jean Du Bois de
Gaudusson que je me garderai de
paraphraser et qui a écrit sur le sujet
suivant : « la justice en Afrique : nouveaux défis, nouveaux
acteurs » [Afrique contemporaine 2014/2].
Il termine ainsi sa réflexion : « il est
généralement admis que si les institutions judiciaires ont une grande part de
responsabilité dans le déficit démocratique et économique en Afrique , elles
n’en sont pas moins moins nécessaires à la transition et à la consolidation
démocratique comme au développement économique et sur la nécessité d’accorder à
la justice un rôle d’avant-garde afin qu’elle puisse jouer son rôle de
régulation des rapports sociaux… Une bonne justice dépend aussi du dispositif
institutionnel, politique et administratif… et de la culture politique
démocratique du système dans lesquels [ les cours et tribunaux]
s’insèrent ».
Tout est dit , et ce
qui vaut pour la qualité, la mission et
la place de la justice interne, s’applique aux juridictions internationales
dont la cour pénale internationale.
En effet l’influence croisée des juridictions nationales
comme internationales est désormais acquise.
Et parfois la jurisprudence s’illustre comme pour le cas d’un juge … qui s’était profondément
endormi pendant l’audience (cas réel)… la procédure a pu être annulée en
consultant les jurisprudences nationales car aucun texte du traité de Rome
n’interdit à un juge d’être d’être
inattentif….
La justice n’est pas qu’une organisation chargée de juger
les hommes-ou des femmes parité oblige- au nom de victimes, de la conscience
nationale ou internationale, ou pour établir des valeurs universelles. Elle combat aussi le « mal »
celui qui n’est pas codifié, qui est parfois défini en creux par des textes, mais pour autant elle n’érige pas un ordre moral.
Elle doit aussi s’adapter : y
aura-t-il des crimes touchant
l’homme dans l’avenir par le biais des nouvelles technologies ? La cyber
criminalité existe déjà.
L’Afrique a essuyé les plâtres si l’on peut dire, et les
Etats africains ont eu le sentiment qu’ils étaient moins privilégiés que
d’autres face à la justice. Mais ils ont
tort : la justice internationale n’est pas responsable des crimes de toute
nature qui sont perpétrés. La justice internationale n’est pas responsable de
la mauvaise gouvernance, de ceux qui
veulent se maintenir au pouvoir à tout prix, y compris à celui de la vie
humaine, quitte à reformer les
constitutions (qu’il faut toujours toucher comme pour les lois avec des mains
tremblantes nous a appris Montesquieu).
La CPI n’aurait pas à se prononcer s’il n’y avait pas de
criminels : il n’y aurait pas besoin de justice.
Et parmi les 18 juges, plusieurs viennent de l’Afrique : le
Nigéria, le Kenya ; le Bostwana ; la RDC et bientôt le Bénin et l’Ouganda. Le président actuel
vient du Nigeria.
La procureure en fonctions vient de Gambie.
On ne peut donc pas dire qu’il y a une volonté de nuire à
l’Afrique.
La culture africaine
est prise en compte ainsi que les
traditions et les coutumes comme de s’adresser à un féticheur avant de
faire quelque chose. (en RDC cité par M.B.COTTE).
La CPI tente de mettre fin à l’impunité et d’obtenir la paix par des
principes connus et acceptés par le plus grand nombre. Les africains sont
entrés dans l’histoire puisque ils ont créé des justices internes qui
fonctionnent, même si elles ne sont pas parfaites ,mais quelle justice l’est ?.
Il faut les soutenir, leur donner
des moyens de faire vivre réellement des
démocraties qui ne soient pas de pâles copies de nos modèles occidentaux qui
commencent à connaitre des difficultés. Je n’insiste pas c’est un autre débat.
L’humanisme ne se
divise pas.
Dans ma bouche et bien qu’avocat, la sanction n’est pas un gros mot. Il faut des punitions et le
mot est faible quand il s’agit des crimes les plus graves. L’homme, africain ou non, ne peut porter ce beau titre que s’il est responsable de ses actes.
Les africains sont
devenus des justiciables comme les autres. Ils sont désormais des citoyens justiciables
puisqu’ils dépendent de la justice internationale comme tout le monde..
L’Afrique devrait
donc dire merci à la CPI et ne pas vouloir l’abandonner.
Telles sont mes
explications en faveur de la CPI que je vous demande de ne pas condamner . La
CPI a ses défauts et ses qualités, elle est en période d’apprentissage. Je vous
demande de considérer en votre âme et
conscience comme on le demande devant la cour d’assises française, que le droit
peut être une ARME DE PERSUASION
MASSIVE, une ARME de DISSUASION de
choisir le fer au lieu des urnes ou le dialogue même difficile.
Je vous demande de faire mentir -si c’est possible-le grand
Blaise Pascal qui a écrit « qu’au point de vue des faits, le bien et le mal est
une question de latitude. En effet tel acte humain s’appelle crime ici ,
et bonne action là- bas, et réciproquement ».[Cité par Auguste de Villiers
de l’Isle Adam dans ses contes cruels;
Les demoiselles de bienfilâtre].
La CPI ne se
préoccupe ni de latitude ni de longitude, elle a un GPS, modernisme oblige, ni du noir ni du blanc.
Elle juge et rétablit
l’équilibre.
Elle exerce une INFLUENCE
certaine et aide à prévenir des crimes. Bien sûr elle ne peut les empêcher ou
dissuader des Etats à déclencher des guerres.
EN GUISE DE CONCLUSION.
Je suis arrivé au terme de mes explications, et si vous le
voulez bien puisque tout désormais est participatif je vous demande de bien vouloir répondre à une unique question :
« La CPI est- elle utile voire nécessaire malgré ses
imperfections ? ».
Si vous répondez non
, NON car c’est une justice partiale,
qui n’aime pas l’afrique, qui n’apporte
rien à la communauté internationale et qui n’a aucun effet, j’aurai alors
échoué, j’aurai perdu mon procès et je vous aurais fait perdre du temps.
Mais si vous répondez oui, OUI la CPI avec ses défauts et qualités est utile voire nécessaire
pour que le comportement des hommes qui sont ou veulent être au pouvoir change,
s’ils peuvent craindre d’être arrêtés et détenus, si la CPI peut par ses
jugements établir des règles de droit à
vocation mondiales ou universelles qui renforcent l’humanité et le respect des
autres, ou établissent un code de bonne conduite dans l’accession au pouvoir ou
dans les conflits de toute nature alors
j’aurai gagné mon procès ou plutôt la CPI sortira grandie de cette mise en
cause et poursuivra son chemin.
Le message de la CPI
est fort :
*la CPI se veut une justice
MONDIALE qui juge un individu, et désormais un Etat ou un groupe pour les
crimes d’agression ce qui tombe bien
puisque nous vivons dans un village global et que la mondialisation s’invite
partout ; et aussi parce que le
relativisme et les droits personnels avec le communautarisme au sens large l’emportent sur les devoirs collectifs
et mettent à mal les valeurs qui étaient universelles ;
*il n’y a plus d’impunité, pour personne, pour ceux qui se croient ou croyaient
intouchables en particulier, nulle part dans le monde ;
*seule la bonne gouvernance celle qui conduit à la
démocratie et au respect de l’homme est acceptée ;
*la dignité de l’homme doit être recherchée en toutes
circonstances ;
*La violence engendre la violence en retour et on ne peut l’excuser ou la justifier ;
*Le combat légitime pour le pouvoir, ou l’indépendance, ou
la volonté de vivre ensemble, ne peut se traduire par des crimes ou des
affrontements physiques quelques en
soient les motifs ou les prétendues justifications ;
* le mal implique d’ être responsable de ses propres actes ou des directives que
l’on donne ;
*enfin la fin ne justifie jamais les moyens.
Sans la CPI il y
aurait des quasi permis de tuer.
Or c’est de la vie
dont nous sommes globalement comptables.
« il n’y a de richesse que d’homme » a écrit Jean
Bodin (1529-1596 ) juge à Laon et philosophe ce qui n’est pas
incompatible ! ce qu’un militaire-politique le général de Gaulle a traduit
par : « il n’y a qu’une querelle qui vaille , celle de
l’homme ».
Devant la cour d’assises en France quand il y a un drame
passionnel on a coutume de dire : « quand on aime on a toujours
20 ans ».
On doit donc
aimer par raison la CPI qui est en
fonction depuis 20 ans (1998-2018). Elle ne peut que devenir adulte et
s’améliorer, aller plus vite, étendre ses missions à d’autres pays que
l’Afrique, et les guerres en cours un peu partout lui apportent malheureusement , des cas tous les jours. Elle
doit être déjà plus performante avec ce
qui existe comme crimes divers comme l’a
déclaré M.Bruno Cotte ancien juge à la CPI lors d’un exposé sur les défis de la
justice internationale à l’Ihedn à paris, le 22 janvier dernier.
Il s’agit en réalité
de protéger l’homme (ou la femme) qu’il soit noir, blanc ou jaune, qu’il
soit puissant ou misérable, dans l’intérêt de tous. Vaste programme !
Il faut que les Etats abandonnent un peu de leur pouvoir
souverain qui est celui de juger. C’est difficile.
M.Antonio Guttarès
secrétaire général de l’ONU a déclaré à la rentrée de 2018 que la paix était
« insaisissable » : mais il faut y croire .La CPI s’inscrit dans
le progrès de l’humanité.
Mesdames et messieurs je vous demande de considérer que si
la CPI n’existait pas il faudrait l’inventer, de dire qu’elle n’est coupable de
rien donc de l’acquitter, et ainsi de
lui rendre justice.