Pour l’empirisme et le
cumul des mandats
Par Christian Fremaux avocat
honoraire
Notre ancien
Haut – commissaire au plan devenu premier ministre vient de déclarer à propos
de l’élection de M. Trump et de ses discours tonitruants : « si on ne
fait rien on va être dominés, écrasés ». L’éléphant républicain américain
va aplatir comme une crêpe -spécialité bretonne -la colombe tricolore française
et l’Europe en passant. Il va y avoir un effet de souffle mais je ne sais pas
dans quel sens va siffler le vent. M. Bayrou a naturellement raison et il faudrait
sortir au plus vite de nos blocages idéologiques et lancer des projets concrets
car personne ne détient la vérité. Et n’a la solution miracle ou le monopole du
progrès surtout pour les conditions de vie.
On promet tout, des agriculteurs aux
écologistes, des salariés aux patrons, des citoyens aux maires, mais rien
n’avance. La solution facile de taxer à tout va sans réduire ce qui est inutile
et improductif est illusoire. La classe moyenne qui subit est dans le viseur. Une
entreprise a besoin d’actionnaires pour vivre, embaucher et investir. Ce qui ne
veut pas dire que l’on sacrifie les travailleurs qui produisent aussi de la
richesse, les pauvres et les nécessiteux victimes de la vie. Ni la violence
institutionnelle, ni la taille à la serpette ou à la tronçonneuse ne sont à
juste titre admis chez nous. Ni la brutalité ou l’imagination sans limites ni
morale. Comme celle de M. Musk qui a réussi dans son domaine, soyons franc. On
aurait besoin de telles personnalités en France. Mais on déteste les riches et
notre culture, nos valeurs, nos habitudes ne lui faciliteraient pas la vie
surtout sans majorité politique. Et sans un président mirobolant qui délivre
les décrets à la chaine.
La fin ne
justifie pas tous les moyens. Mais il faut commencer à agir vigoureusement au-delà
de nos tabous. Et des ambitions de certains et certaines, qui nous fatiguent. Ce serait aussi bien que l’on sorte de la sinistrose
et que l’on ait un peu de joie.
Puisque on a échoué depuis des décennies et
qu’on est guetté en devenant le mauvais élève de la classe, il faut
changer de méthode. Ce sont peut- être les rodomontades de M. Trump dont on va
attendre les résultats qui vont nous encourager ? Seul le pragmatisme vaut en ce moment et
pour l’avenir il fait donner des perspectives à ceux qui travaillent et
vont assumer le poids de la dette par moins de dépenses publiques et plus
de travail. Ce qui permet la redistribution et la solidarité par l’action de
l’Etat qui trouve l’argent au fond des poches de ceux qui ne sont responsables
de rien, les retraités dits aisés notamment. Sauf d’avoir l’insolence de vivre
en ayant beaucoup cotisé pour leurs anciens. Le philosophe André Comte-
Sponville âgé de 72 ans vient de dire : « Si, quand j’avais 20 ans on
m’avait dit que 50 ans plus tard le principal problème des français serait
l’âge de la retraite, cela m’aurait affligé ». On a besoin d’espoirs et
d’enthousiasme. Et de valeurs pas seulement matérielles qui grandissent et
rassurent.
En attendant
de bonnes surprises engageons la réforme de l’Etat et revenons à ce qui marchait
et qui ne coûte pas cher. Le progrès c’est aussi de fixer le futur de reconnaissance
et de respect des autres par le dialogue
permanent.
Je me
réjouis que le premier ministre soit resté maire de Pau. Il cumule
ainsi deux fonctions à plein temps, en ignorant la loi sur la durée maximale du
travail. Il est au forfait jour comme on dit chez les cadres. C’est
vrai qu’il n’a qu’un CDD d’usage et que celui-ci peut être interrompu du jour
au lendemain. Sans préavis. Sur le terrain il rencontre les gens et leur
parle : il doit donc savoir ce qu’ils veulent. Il n’y a plus qu’à
faire.
Je suis pour
le cumul des mandats. Avec réalisme car je l’ai vécu comme élu municipal.
Un député
qui s’amuse avec la censure comme actuellement à l’Assemblée nationale
devrait avoir obligatoirement un mandat local et vivre là où il est élu. A
bas les parachutages. Il verrait les conséquences directes des lois qu’il
fabrique ou de leurs inconséquences. Les sénateurs sont choisis par les élus
locaux eux- mêmes au contact des administrés. Ils sont informés. Que le Sénat
reste l’assemblée des sages.
On a créé
des grandes régions dont on ne connait pas bien les compétences ni en quoi
elles bénéficient au citoyen. On a voulu éviter l’édification de baronnies à
l’ancienne mais on a construit d’immenses agglomérations et des métropoles ce
qui est pareil. Le citoyen ne contrôle rien. On a supprimé le conseiller général du canton
qui vivait parmi les citoyens devenus connaissances amicales, pour regrouper
plusieurs territoires. Le canton est devenu XXL. L’élu court mais ne s’arrête
plus. Pourtant le département avec le préfet qui incarne le pouvoir central est
un échelon pertinent si on lui donne les moyens et si l’Etat ne se décharge pas
sur lui de fonctions qu’il devrait exercer. On jure depuis des années de
réformer le millefeuille administratif : chiche. On veut de
la proximité et on éloigne tous les services du quidam. Notre haute administration
seule maintient la nation puisque les politiques se querellent et plombent le
pays.
Le domaine
privé doit prendre sa part des réformes. Public ou non ce que veut le citoyen
c’est un service. Et de l’écoute. Il
n’est pas interdit de confier à des entreprises sinon à des associations
structurées des missions de service public et je ne suis pas sûr que le
maintien d’une fonction publique à vie et pléthorique parfois, dans les
collectivités locales aussi, soit la meilleure solution. Sauf pour les exigences
régaliennes cela va de soi. M. Claude Allègre qui vient de décéder voulait
dégraisser le mammouth. C’est lui qui a été vidé de sa substance. Et de son
poste. Rien n’est facile surtout de modifier les acquis !
Nicolas
Sarkozy avait inventé le conseiller territorial. M. Hollande l’a effacé. Et
le référendum d’initiative partagée n’est pas utilisé. Le maire attend
fébrilement la dotation d’Etat pour bâtir son budget. A défaut il ne peut
rien faire. Notre décentralisation est un leurre.
Au lieu de
tirer au sort de prétendus sachants utilisons les moyens prévus par la
Constitution. A condition que le président du conseil constitutionnel ne dise
pas par avance qu’un référendum sur tel sujet est irrecevable. C’est au peuple
de décider.
En un mot multiplions
les actions avec empirisme. L’immobilisme fait reculer.