La C.P.I. et la position française
Par Christian Fremaux avocat
honoraire
Guerre et Justice n'est- ce pas un oxymore comme tolérance
subjective et partiale ?
La Cour Internationale de justice [C.I.J] créée en 1945 est
un organe de l'Onu qui siège à La Haye. Il y a un juge français M. Ronny
Abraham. Elle est compétente pour juger exclusivement les différends entre
Etats qui sont le plus souvent des difficultés de frontières terrestres ou maritimes.
Elle peut être saisie aussi pour apprécier l'existence d'un génocide, ou le
financement du terrorisme ou de la discrimination raciale (ex. Arménie contre
Azerbaïdjan). Elle se prononce au fond après une très longue procédure où
chaque partie argumente. Elle peut ordonner des mesures d'urgence comme celle que
la Russie cesse son action contre l'Ukraine. Mais elle ne peut forcer aucune
partie à s'exécuter. On est plutôt dans de la communication. Sur requête de
l'Afrique du Sud la Cour a indiqué qu'il y avait un risque génocidaire de la
part d'Israël contre Gaza. Elle ne s'est pas prononcée sur la nature du
mouvement terroriste du Hamas. Elle a indiqué qu'Israël avait le droit de se
défendre de façon proportionnée en privilégiant le devoir humanitaire. Elle n'a donc pas déclaré, comme le
soutiennent des militants, qu'il y avait génocide avéré.
La C.I.J. n'est pas à confondre avec une autre Cour qui
défraie la chronique.
La Cour Pénale Internationale [C.P.I] qui siège aussi à La
Haye a été créée en 1998. Elle ne juge que des individus pour crimes
d'agression, de guerre ou contre l'humanité et génocide. M. Nicolas Guillou est
le juge français. Des responsables africains pour le Rwanda ou la Côte d'Ivoire
ont été poursuivis et le dirigeant Serbe Milosevic est décédé en détention.
Pour qu'un quidam
soit justiciable il faut que son Etat ait ratifié la convention. Or les USA, la
Chine, la Russie, Israël notamment n'ont pas ratifiés le traité. Le procureur
de la Cour M. Karim Hahn avocat écossais a osé lancer des mandats d'arrêt
contre M. Netanyahou premier ministre d'Israël et son ministre de la Défense
qui ont une adresse et qui sont en fonctions. Et contre trois dirigeants du
Hamas qui sont sans domicile fixe dans le désert ou dans des tunnels ou dans
des pays amis et qui sont injoignables surtout avec des faux noms.
C'est un tollé et
peut-être de la gesticulation car les intéressés ne vont pas se livrer à la Cour
pieds et poings liés la corde au cou pour être mis en détention provisoire ! D'autant
plus que le procureur propose mais seule la Cour peut ordonner l'exécution de mandats
d'arrêt. Elle va y réfléchir car les bonnes intentions pour aboutir au cessez
le feu peuvent être contre productives et relancer le conflit. L'annonce du
procureur pose des problèmes.
Il y a deux poids deux mesures car on ne sait pas sur quels
textes précis et surtout sur quels critères objectifs on poursuit tel individu
plutôt qu'un autre qui a fait autant sinon pire ? Les pays du Sud global posent
cette question.
Peut-on mettre sur un niveau d'équivalence les dirigeants
d'un Etat démocratique reconnu et qui rendront des comptes à leurs mandants et à
leur Justice, avec des fantômes fugitifs sans responsabilités, non élus, sans
peuple défini qui les légitime et qui sont des terroristes. Le principe une vie
est une vie semble insuffisant car l'émotion ne remplace pas le droit qui ne
peut être à la remorque des opinons publiques.
La diplomatie française a approuvé par la doctrine du "en
même temps "la décision du procureur international. D'accord pour que le droit international
s'applique et qu'une Cour de Justice se prononce si elle est compétente et
reconnue. Mais pas d'accord en mettant au même niveau Israël et le Hamas. On ne
peut qu’être satisfait : on soutient le droit et l'ordre et on essaie la
négociation en proposant une trêve des combats pour sauver des êtres humains.
Furieux mais "même
pas peur" doivent ricaner M. Netanyahou et son ministre et les responsables
en fuite permanente du Hamas comme d'autres futurs ou déjà concernés dans d'autres
guerres, mais ils ne peuvent plus voyager sur le territoire d'un Etat qui est membre
de la C.P.I. qui doit appliquer le mandat d'arrêt si la Cour le juge ainsi ! ça
chauffe sous les crânes politiques. Dont
la France qui voudrait être le leader des pacifistes réalistes objectifs et
convoquer les parties pour en discuter à Paris ! Mais voyage-t-on quand son
pays est en guerre ?
Doctrine d'ailleurs
qui s'appliquerait peut- être pour nos émeutes internes dans les quartiers dits
perdus ? Et comme en Nouvelle- Calédonie par exemple puisqu'on combat pour des
motifs divers notamment la fin de la décolonisation et la reconnaissance d'un
peuple autonome. En niant les droits de la nation française. Et des Français citoyens
sur place ! Parallèle osé je l'avoue.
Le monde a besoin de principes supérieurs objectifs et
universels pour progresser et donc d'arbitres neutres. Commencer par enquêter
sur des criminels suspectés sous réserve de la légitime défense, est un bon début.
Sinon il n'y a plus qu'à se désespérer et attendre la fin des combats avec un
gagnant ou un perdant ou un match nul c'est-à- dire la mort de nombreuses
victimes. L'idéologie ne peut effacer le dialogue et le compromis nécessaire.
La vérité judiciaire est relative mais le droit est un moyen d'avancer. Il ne
peut cependant être à la place de la volonté politique et mettre fin à la folie
des hommes. Les armes pures doivent se
substituer aux armes qui tuent. Le procureur Karim Khan s'est lancé dans un
pari sous un tombereau de scepticisme sinon d'injures. Il a eu le courage de prendre
une initiative. Vive la C.P.I.
La justice n'est crédible que si elle est objective et ses servants neutres. Instrumentaliser la CPI contribue à dévoyer son intérêt. Pour quel résultat ?
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